Les trous de Latoile http://www.pascalsamain.be/ fr SPIP - www.spip.net Les trous de Latoile http://pascalsamain.be/IMG/siteon0.jpg?1447806507 http://www.pascalsamain.be/ 216 144 À une heure de grande écoute http://pascalsamain.be/spip.php?article630 http://pascalsamain.be/spip.php?article630 2015-11-19T18:41:45Z text/html fr pascal Samain <p>A UNE HEURE DE GRANDE ECOUTE Récits <br class='autobr' /> Pascal Samain Rue du Pont 6 7011 Ghlin Belgique pascal@pascalsamain.be http://pascalsamain.be 00 32 496 307742 <br class='autobr' /> alors (il) a pris un bâton d'ice cream pour faire une attelle et retaper l'oiseau. Dan Fante, dans une traduction de Léon Mercadet <br class='autobr' /> il passait des mois entiers seul dans une chambre, mangeant à peine, plongé dans un rêve éveillé. Ronald Laing <br class='autobr' /> le tocsin sonne. on arrête de jouer. Louis Calaferte <br class='autobr' /> il faut que tu respires, et ça c'est rien de le dire ; tu (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><strong>A UNE HEURE DE GRANDE ECOUTE<br class='autobr' /> Récits</strong></p> <p>Pascal Samain<br class='autobr' /> Rue du Pont 6<br class='autobr' /> 7011 Ghlin<br class='autobr' /> Belgique<br class='autobr' /> pascal@pascalsamain.be<br class='autobr' /> <a href="http://pascalsamain.be" class='spip_url spip_out auto' rel='nofollow'>http://pascalsamain.be</a><br class='autobr' /> 00 32 496 307742</p> <p><i>alors (il) a pris un bâton d'ice cream pour faire une attelle et retaper l'oiseau.<br class='autobr' /> Dan Fante, dans une traduction de Léon Mercadet</p> <p>il passait des mois entiers seul dans une chambre, mangeant à peine, plongé dans un rêve éveillé.<br class='autobr' /> Ronald Laing</p> <p>le tocsin sonne.<br class='autobr' /> on arrête de jouer.<br class='autobr' /> Louis Calaferte</p> <p>il faut que tu respires, <br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire ;<br class='autobr' /> tu vas pas mourir de rire,<br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire.<br class='autobr' /> Mickey 3D<br class='autobr' /> </i></p> <p>Pour Dan Fante, qui ne lit pas un putain de mot en français</p> <p>1</p> <p>tu aimes le foot<br class='autobr' /> que tu me dis, <br class='autobr' /> j'ai pas de doutes<br class='autobr' /> que je te dis.<br class='autobr' /> mais ta place je la paye <br class='autobr' /> en monnaie de singe. <br class='autobr' /> le feu dans mes méninges, une clé de merde dans ma bouche, une bouche de merde clé sur porte,<br class='autobr' /> que des mots qui en sortent, <br class='autobr' /> bouffis décolorés dissous collés voilés au palais <br class='autobr' /> enfermés à hurler on n'est pas des perroquets on n'est même pas des sirènes.<br class='autobr' /> ma bouche, mais je te paye en monnaie de singe.<br class='autobr' /> au fait, c'est quand qu'elle t'es venue ta passion pour les singes<br class='autobr' /> du foot ? <br class='autobr' /> j'aime le foot que tu me dis, traîne pas en route que je te dis,<br class='autobr' /> dehors <br class='autobr' /> la neige, les glaces déformées, les miroirs, le cosmos tu as ta carte de train ? tes livres d'école ? traîne pas en route, je suis pressé, toi devant le miroir, traîne pas sur le trottoir, je suis pressé comme un litron, à sept heures qu'elle ouvre la station, un litron, le premier, je ne traîne pas, moi, <br class='autobr' /> et ton papa te paye ta place en monnaie de singe.</p> <p>2</p> <p>les gens pensent que l'alcool est une maladie, les gens répètent que l'alcool est une maladie, les gens ont entendu dire que l'alcool est une maladie, les gens se persuadent que l'alcool est une maladie, les gens persuadent les autres gens que l'alcool est une maladie,<br class='autobr' /> ils ne trouvent pas le microbe le gène la bactérie,<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> les gens, ils boivent.</p> <p>3</p> <p>le facteur il boit<br class='autobr' /> l'éboueur il boit<br class='autobr' /> le maçon il boit<br class='autobr' /> ils ne font pas semblant d'être malades ils boivent.</p> <p>4</p> <p>au fond, ils vivent comme des microbes.<br class='autobr' /> sous la robe du vin.<br class='autobr' /> dans le faux-col de la bière.<br class='autobr' /> y a des liqueurs sucrées qui tuent sec.</p> <p>5</p> <p>les madames elles boivent.</p> <p>6</p> <p>elle quitte sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle double sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle va au magasin, elle ne se sent pas trop bien, elle embauche son vieux vélo, elle enfourche son vieux cabas, elle remplit son vieux cabas, <br class='autobr' /> des bouteilles, à ras,<br class='autobr' /> douze canettes dans les bras, personne d'autre sous les draps, des trous dans le pyjama, les taches de pisse sur le matelas.<br class='autobr' /> (elle est honteuse, à ras.)</p> <p>7</p> <p>le psychiatre dit ah venez en ville avec moi, et des alcooliques, on va en remplir trois pleins cars !<br class='autobr' /> bon, c'est toi qui conduit, mec ?</p> <p>8</p> <p>un gros, et son mur qui gagne son pain en le soutenant, un gros, il est plein aux trois-quarts.<br class='autobr' /> il serait dans le car du psychiatre, lui.<br class='autobr' /> je suis dans le cas.<br class='autobr' /> il sème derrière lui sa vie en croùtons de pain pourri et le pigeon c'est lui.</p> <p>9</p> <p>alors le grand-père explique à sa petite-fille bon maintenant qu'on a fini les courses on va aller boire un coup regarde mes mains tremblent<br class='autobr' /> tellement<br class='autobr' /> que j'en ai envie<br class='autobr' /> de boire un coup<br class='autobr' /> tellement.<br class='autobr' /> mais non, grand-papa, ce n'est pas à cause de ça.<br class='autobr' /> bien ! <br class='autobr' /> dans ce cas ma chérie tire la chevillette et la canette cherra !</p> <p>10</p> <p>en gros voilà c'est ça,<br class='autobr' /> il n'y a pas de mal à se faire du bien, un petit verre après le boulot c'est ça, ça aide, et d'abord les autres ont encore commandé une tournée, j'arrive, j'arrive, dans une heure j'arrive, on refait le monde (qui nous a repeints depuis longtemps), c'est quoi qu'on mange ?, non je n'ai pas très faim les enfants vont bien ?, <br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets,<br class='autobr' /> je te parjure.<br class='autobr' /> en gros voilà c'est ça.<br class='autobr' /> je n'ai pas très faim de la vie.<br class='autobr' /> ni de toi.<br class='autobr' /> ni de moi.</p> <p>11</p> <p>ma foi, pour son âge, encore de belles jambes, ne serait-ce ces poches sous les yeux comme le ventre vide d'une maman de kangourou,<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> juste là , <br class='autobr' /> putain que ça se voit !<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> ce bide-là c'est à toi, ce bide distendu par le tanin, en vain, mais là .<br class='autobr' /> ta vie, quelle bide !<br class='autobr' /> (mais la caissière ne le sait pas.)</p> <p>12</p> <p>Aujourd'hui j'ai accroché un papier tue-mouches<br class='autobr' /> à un nuage de ma rue.<br class='autobr' /> j'ai d'abord attrapé des éléphants roses.<br class='autobr' /> puis j'ai pris la peine j'ai pris la pose<br class='autobr' /> (longtemps !),<br class='autobr' /> alors j'ai attrapé les ivrognes qui vont avec.<br class='autobr' /> et voilà c'est comme ça qu'on fait mouche.</p> <p>13</p> <p>mais si, tu bois !<br class='autobr' /> mais non, je ne bois pas !<br class='autobr' /> mais si tu bois !<br class='autobr' /> je ne bois pas plus que tout le monde !<br class='autobr' /> parce que tout le monde boit ?<br class='autobr' /> oui, tout le monde boit.<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et c'est ainsi.<br class='autobr' /> (oui, je l'avais déjà remarqué.)</p> <p>14</p> <p>cette histoire commence un peu comme ça.<br class='autobr' /> ce garçon est le frère de sa soeur, aînée qu'elle est la soeur.<br class='autobr' /> un peu plus loin dans l'histoire, la soeur aînée s'inquiète de son frère<br class='autobr' /> qui boit,<br class='autobr' /> qui boit trop,<br class='autobr' /> qui boit plus que tout le monde.<br class='autobr' /> même si tout le monde boit.<br class='autobr' /> la soeur aînée va trouver son frère<br class='autobr' /> parce que justement<br class='autobr' /> elle vient de trouver les mots justes à lui dire.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> depuis un moment j'observe ta déchéance.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> souviens-toi de toutes les belles choses que tu as faites dans ta vie !<br class='autobr' /> (avant.)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> à toi de savoir si tu veux mourir ou pas !<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu as un fils (quand même !)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu ne te vois pas ?<br class='autobr' /> TU NE VOIS PAS CE QUE TU ES DEVENU ?<br class='autobr' /> (une loque, une épave, un déchet, sans doute, ou quelque chose d'approchant.)<br class='autobr' /> mais le garçon, lui, se voit, même flou dans le cul d'une bouteille, n'en déplaise à sa soeur.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> un peu plus loin encore dans l'histoire,<br class='autobr' /> il préfère ne plus adresser la parole à sa soeur,<br class='autobr' /> car voyons, fait-on remarquer à un cul-de-jatte qu'il n'a plus qu'un bras <br class='autobr' /> tandis que les gens normaux sont si sùrs d'en avoir deux ?</p> <p>15</p> <p>un homme qui boit, disons ça va.<br class='autobr' /> mais une femme qui boit !<br class='autobr' /> mon dieu non,<br class='autobr' /> ça,<br class='autobr' /> ça ne va pas !</p> <p>16</p> <p>papa, tu serres trop à droite.<br class='autobr' /> tu me racontes quoi ? je roule bien au milieu !<br class='autobr' /> (j'ai toujours été un bon conducteur.)</p> <p>17</p> <p>tiens au fait : toi.<br class='autobr' /> tu sais pourquoi tu bois ?<br class='autobr' /> oui, la psychologue me l'a expliqué.<br class='autobr' /> (ah ?)</p> <p>18</p> <p>et maintenant putain de merde,<br class='autobr' /> s'ils me foutent à la porte de l'hà´pital,<br class='autobr' /> putain !<br class='autobr' /> ils ont intérêt à me filer tous les médicaments que je veux !<br class='autobr' /> (sinon comment veux-tu que je m'en sorte ?)</p> <p>19</p> <p>la fête, la fête, tu parles !<br class='autobr' /> noà« l, tu parles !<br class='autobr' /> après six verres de rouge, papy va déprimer et monter se coucher<br class='autobr' /> (vu que mamy est morte l'année passée.)<br class='autobr' /> dès le champagne, machin va déconner !<br class='autobr' /> truc va s'enfiler cinq bouteilles, il finira par chialer <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> comme d'habitude !-,<br class='autobr' /> chose va cuver devant la télé,<br class='autobr' /> bidule va boucher les cabinets avec du vomi de poulet,<br class='autobr' /> et l'autre là , va s'étaler dans la cuisine !<br class='autobr' /> oui mais c'est la fête, alors…</p> <p>20</p> <p>le commissaire a pénétré les lieux du crime.<br class='autobr' /> les acteurs n'avaient pas encore quitté la scène du méfait.<br class='autobr' /> mais comme le commissaire n'avait pas bu,<br class='autobr' /> il n'a pas pu<br class='autobr' /> vraiment<br class='autobr' /> participer à cette discussion de bitus.</p> <p>21</p> <p>es-tu vraiment obligé de boire ?<br class='autobr' /> obligé, obligé, non…<br class='autobr' /> tu pourrais essayer autre chose ?<br class='autobr' /> oui je pourrais être propriétaire d'une voiture<br class='autobr' /> et la laver chaque jour tant que le temps dure,<br class='autobr' /> pour oublier cette douleur qui dure.</p> <p>22</p> <p>vraiment je ne crois plus en rien.<br class='autobr' /> cependant ce que je crois bien<br class='autobr' /> c'est que c'est le matin<br class='autobr' /> et que si je ne bois rien de ce putain de vin,<br class='autobr' /> mes doigts vont continuer à trembler,<br class='autobr' /> ça je le croirais bien.</p> <p>23</p> <p>avez-vous déjà été de pierre ?<br class='autobr' /> avez-vous déjà été pétrifié ?<br class='autobr' /> par quoi ? nul ne le sait, mais pétrifié.<br class='autobr' /> dans ces moments-là , plus rien ne va comme ça devrait aller,<br class='autobr' /> ni comme on dit que ça devrait aller.<br class='autobr' /> ça ne va pas bien, <br class='autobr' /> vous n'allez pas bien,<br class='autobr' /> vous êtes devenu de pierre.<br class='autobr' /> être de pierre, ça ne va pas, pour un être de chair.<br class='autobr' /> un être de chair, ça bouge<br class='autobr' /> (à´ dans les limites des lois de la gravité !)<br class='autobr' /> un être de chair, ça vit<br class='autobr' /> (à´ dans les limites du bocal !)<br class='autobr' /> un être de chair ça ressent des choses du vécu ça analyse ça comprend</p> <p>et ça le dit aux autres,<br class='autobr' /> ce que ça comprend.<br class='autobr' /> mais, comprenez-vous ça ?, vous, vous êtes de pierre.<br class='autobr' /> une pierre c'est plein de gravité ça ne bouge pas ça ne comprend<br class='autobr' /> rien<br class='autobr' /> que du gravas<br class='autobr' /> autant dire rien.<br class='autobr' /> pas la peine de calculer, de chercher une pierre aux riens,<br class='autobr' /> pour vous ça ne va pas bien.<br class='autobr' /> qu'est-ce qu'on boirait bien ?<br class='autobr' /> (un petit rien, une goutte, juste une goutte pour diluer ce qui ne va pas bien.)</p> <p>24</p> <p>l'alcool, c'est une maladie ?<br class='autobr' /> à ce qu'on dit…<br class='autobr' /> (et qui vous l'a dit ?)</p> <p>25</p> <p>que l'alcool est une maladie, vous l'avez lu, ça ?<br class='autobr' /> oui, quelque part… <br class='autobr' /> en tout cas, on le dit.<br class='autobr' /> c'est du sérieux ?<br class='autobr' /> oui, mais j'ignore si on en guérit !<br class='autobr' /> vous, vous ne buvez pas, vous, je le vois bien !<br class='autobr' /> oh non oh non pas du tout ! juste un peu, après le travail, mes trois bières d'abbaye, mais ces trois bières-là , justement c'est comme un abbaye, quoi,<br class='autobr' /> ça calme !</p> <p>26</p> <p>écoutez…<br class='autobr' /> écoutez…<br class='autobr' /> après tout je ne suis jamais que votre gé-né-ra-li-ste…<br class='autobr' /> votre toubib de tous les jours…<br class='autobr' /> (mais moi ça tombe bien je bois tous les jours !)<br class='autobr' /> alors alors il y a toujours un moment comme ça…<br class='autobr' /> où je suis bien obligé d'abandonner…<br class='autobr' /> la partie…<br class='autobr' /> ce n'est pas que je laisse tomber…<br class='autobr' /> mais allez donc voir ce psychiatre que je vous ai recommandé…<br class='autobr' /> (si j'arrive jusque là …)<br class='autobr' /> il s'y connaît mieux que moi,<br class='autobr' /> vous verrez… enfin… il verra… vous voyez ?<br class='autobr' /> (oui mais quoi ?)<br class='autobr' /> il y a de fortes chances … il vous écoutera<br class='autobr' /> puis c'est debout qu'il se mettra,<br class='autobr' /> il tapera du poing sur la table… très fort… très très fort…<br class='autobr' /> avec son poing droit <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> il le fait toujours, c'est comme ça !-<br class='autobr' /> il vous dira :<br class='autobr' /> « monsieur, si vous continuez à boire<br class='autobr' /> vous allez vous retrouver dans une prison noire<br class='autobr' /> dont vous ne sortirez plus jamais alors s'il vous plaît apprenez à marcher droit<br class='autobr' /> bordel de merde !<br class='autobr' /> et je vous donnerai les médicaments qu'il faudra. »<br class='autobr' /> (mon médicament c'est l'alcool.)<br class='autobr' /> donc vous verrez… vous verrez…<br class='autobr' /> il vous fera très peur, il vous foutra la trouille de votre vie, il y arrivera,<br class='autobr' /> en se mettant debout devant vous.<br class='autobr' /> (mais moi je vis déjà couché !)<br class='autobr' /> et vous,<br class='autobr' /> vous,<br class='autobr' /> vous comprendrez !<br class='autobr' /> (mais moi je ne verrai rien, rien du tout, les alcoolos n'ont pas peur de boire, ça se saurait, mais alors de quoi ont-ils peur ? sinon ils ne boiraient pas, ça se saurait.)<br class='autobr' /> vous verrez, ce psychiatre est fort, il est vraiment très très fort.<br class='autobr' /> 27</p> <p>maman maman dommage que tu sois là comme ça<br class='autobr' /> comme une conne à plat<br class='autobr' /> enfin ils t'ont bien maquillée bien retapée on dirait que c'est toi,<br class='autobr' /> et tiens je te glisse<br class='autobr' /> une photo de ton petit fils<br class='autobr' /> oui celle avec toi.<br class='autobr' /> celle-là ,<br class='autobr' /> celle du baiser propice.<br class='autobr' /> bon tu n'es plus vraiment là <br class='autobr' /> (mais nous deux on est seuls, là , personne n'a voulu monter la garde recevoir les cartes de visite les fleurs ni les humeurs de ceux qui ont si peur quand est mort l'un des leurs, personne pas même ton mari mon papa.)<br class='autobr' /> maman maman dommage que tu ne m'entendes pas !<br class='autobr' /> tu étais infirmière tout le monde sait ça,<br class='autobr' /> et donc même si tu ne m'entends pas<br class='autobr' /> je tiens à te dire merci,<br class='autobr' /> à moins que tu m'entendes ? je voudrais que tu m'entendes !,<br class='autobr' /> merci d'avoir pris soin<br class='autobr' /> de moi<br class='autobr' /> si bien.<br class='autobr' /> dans ton sein j'ai fini par le croire qu'il y avait déjà de la bière.<br class='autobr' /> une bière, <br class='autobr' /> bien bonne et bien noire <br class='autobr' /> ça favorise<br class='autobr' /> la montée de lait.<br class='autobr' /> mais<br class='autobr' /> tu ne m'as pas abandonné là en si bonne voie.<br class='autobr' /> plus tard à table on buvait de la bière,<br class='autobr' /> qui s'appelait « bière de ménage » avec si peu de degrés mais pas mal<br class='autobr' /> de caractère<br class='autobr' /> au bout du compte,<br class='autobr' /> mais bon elle nous ménage.<br class='autobr' /> tu te souviens de la fois<br class='autobr' /> (oui je vois que tu t'en souviens je le vois)<br class='autobr' /> où encore dans ce qu'on nomme l'enfance j'avais bu<br class='autobr' /> en cachette <br class='autobr' /> (à ce mariage),<br class='autobr' /> j'étais pompette,<br class='autobr' /> toi dans une robe coquette<br class='autobr' /> et ton sourire qui signifiait tu es un peu jeune pour commencer,<br class='autobr' /> et au bout du compte ça te rend mignon d'être rond<br class='autobr' /> d'être complètement rond.<br class='autobr' /> (je t'apprends maintenant qu'un peu plus tard ce jour-là je n'en suis pas resté là , <br class='autobr' /> torché comme un vieux toit je suis parti m'allonger au beau milieu d'une route de béton,<br class='autobr' /> en contrebas,<br class='autobr' /> certain que j'étais<br class='autobr' /> que j'allais<br class='autobr' /> pouvoir arrêter<br class='autobr' /> les voitures qui s'avançaient avec danger si près de moi<br class='autobr' /> allongé sur le béton, et le goudron qui me collait le pantalon mais bon j'étais rond,<br class='autobr' /> ça va ça va ne t'inquiète pas, j'entendais encore les voix des oncles qui racontaient des blagues interdites aux enfants, ça va ça va je n'étais pas si rond que ça, j'entendais encore les voix des oncles qui dégueulaient la moitié de leur repas !)<br class='autobr' /> maman maman<br class='autobr' /> j'ai eu quinze ans<br class='autobr' /> ni p'tit ni grand,<br class='autobr' /> après la messe avec les copains je repassais déjà au bistrot du coin<br class='autobr' /> et dans l'après-midi tu m'épongeais le front d'une serviette humide,<br class='autobr' /> et tiens, tant que tu es là , ne t'en va pas,<br class='autobr' /> pas avant que je te reparle du médecin de famille<br class='autobr' /> accouru au chevet de papa<br class='autobr' /> pour toutes les maladies qu'il n'avait pas, toi tu finissais souvent <br class='autobr' /> par dire :<br class='autobr' /> docteur (tu disais toujours docteur aux docteurs),<br class='autobr' /> docteur je vous sers une petite goutte ?<br class='autobr' /> c'était comme ça en ce temps-là <br class='autobr' /> il n'y a pas de quoi fouetter un chat,<br class='autobr' /> d'ailleurs monsieur le vicaire<br class='autobr' /> aussi il aimait la bière,<br class='autobr' /> celle que papa ramenait de la campagne,<br class='autobr' /> attention !<br class='autobr' /> fermée avec un vrai bouchon,<br class='autobr' /> fermentée en bouteille au moins six mois,<br class='autobr' /> et pan ! la mousse beige la robe brune<br class='autobr' /> on s'en foutait plein l'urne !<br class='autobr' /> maman maman maintenant<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi, <br class='autobr' /> ne vois aucun rapport entre toutes ces choses-là ,<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi,<br class='autobr' /> moi je vais repasser à la station<br class='autobr' /> m'acheter du soda bourré de vodka,<br class='autobr' /> allez je te laisse dans ta bière,<br class='autobr' /> moi je ne suis même pas le clou de ton cercueil.<br class='autobr' /> du moins pas celui-là .</p> <p>28</p> <p>Ils sont en train de chercher le gène de l'alcoolisme,<br class='autobr' /> lui cependant ,pas con,<br class='autobr' /> lui les a déjà repérés.</p> <p>29</p> <p>madame<br class='autobr' /> jamais je n'aurais imaginé être capable d'érafler la tà´le de votre quatre-quatre <br class='autobr' /> à l'aveuglette<br class='autobr' /> quatre à quatre<br class='autobr' /> on ne fait pas d'omelette sans casser des canettes.</p> <p>30</p> <p>et maintenant.<br class='autobr' /> et ensuite ?<br class='autobr' /> et après…<br class='autobr' /> après tout…</p> <p>31</p> <p>la télé est allumée, couverte de la poussière des centres de cure, magnétisme de misère, cordes délitées, un peu d'astéroà¯de, beaucoup de cendres de beaucoup de cigarettes, beaucoup de couches de beaucoup de vies qui ont mal brùlé, et elle, elle tient sa conférence, avec sous les yeux juste en dessous de la peau pendue rayée, son volcan mal éteint, son passé mal étreint, incendie d'eau, ils ont beau lui donner une charrette de Valiumâ„¢ le soir.</p> <p>32</p> <p>peut-on se noyer dans une bouteille ? <br class='autobr' /> une seule, non sans doute, mais c'est un début.</p> <p>33</p> <p>nager, pourquoi ? <br class='autobr' /> se noyer, pour sùr.</p> <p>34</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la « masturbation » intellectuelle ?</p> <p>35</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la folie ?</p> <p>36</p> <p>comment oses-tu me dire que je suis taré ?</p> <p>37</p> <p>comment oses-tu me dire que je ne suis pas normal ?</p> <p>38</p> <p>on est hors du circuit mais pas en vacances.<br class='autobr' /> on n'est pas en vacances mais on rame.<br class='autobr' /> on n'est pas des touristes.<br class='autobr' /> on est nous aussi de la vie. de la vie on en est aussi.<br class='autobr' /> peut-être plus que vous tous réunis, nous, dans l'auditoire de la mort.</p> <p>39</p> <p>l'infirmier rame. <br class='autobr' /> dans le couloir ils ont installé un rameur. pour la forme. pour notre forme.<br class='autobr' /> mais seul l'infirmier rame à ses heures perdues.</p> <p>40<br class='autobr' /> putain la psychologue a de ces nichons ! <br class='autobr' /> et souriante.</p> <p>41</p> <p>l'assistante sociale se retrouve chaque jour que Bacchus fait devant des mecs qui ont du verre pilé à la place des couilles et face à des nanas qui ont un tesson de bouteille dans le vagin. ça fait mal ça fait mal. vers 17 heures elle rentre à la maison après avoir chopé son gosse à la garderie. <br class='autobr' /> jeune maman elle n'a pas encore de bouteille.<br class='autobr' /> mais elle ne rame pas trop.<br class='autobr' /> 42</p> <p>la douche est collective, la douche est commune, prendre une douche c'est commun. mais toi tu t'étais abandonné comme une vieille loque desséchée dans la salle d'attente étriquée d'un purgatoire interminable. l'alcolo ne se lave plus, il s'en fout de ses cheveux devenus trop longs, il s'en fout de ses ongles de pieds poussés trop fort, il s'en fout de ces petites merdes coincées sous les paupières, il ne s'en fout pas de son cerveau trop gros coincé sous son crâne.</p> <p>43</p> <p>il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout.<br class='autobr' /> non il ne s'en fout pas. <br class='autobr' /> Il n'est pas si fou.</p> <p>44</p> <p>voilà bien la course des humains : quelque chose plutà´t que rien.<br class='autobr' /> et celle des buveurs : rien plutà´t que quelque chose.</p> <p>45</p> <p>tu prendras bien quelque chose ?</p> <p>46</p> <p>qu'est-ce que vous prendrez ?</p> <p>47</p> <p>on ne m'y prendra plus.</p> <p>48</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre (mais qu'est-ce qu'une tête de ?)</p> <p>49</p> <p>une cravate alors ?</p> <p>50</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre. une tignasse de hippie un peu, dirait-on, un vieux groupe de rock, parfois en catogan, un vieux t-shirt vert usé, et des baskets d'ado. il me tape sur le bide, il me dit tu sais moi aussi j'ai fait une dépression. <br class='autobr' /> et son sourire de latino.</p> <p>51</p> <p>bonjour madame, que pensez-vous de votre psychiatre ?<br class='autobr' /> il est bien (sous tous les rapports.)<br class='autobr' /> ah ?<br class='autobr' /> oui, il porte une cravate chose, un pantalon machin (oh j'ai vu le même dans une galerie !), des souliers pointus cirés avec du cirage truc (on sent que son petit personnel est de qualité), son caleçon vous pensez je n'y pense pas, puis des lunettes car-ré-es à la mode, devant sa villa se trouve son cabriolet, d'ailleurs chaque week-end il emmène sa maîtresse à la mer, là ils se tiennent la main en amoureux.<br class='autobr' /> ils connaissent les meilleurs restos du coin.<br class='autobr' /> ils savent vivre.<br class='autobr' /> eux.</p> <p>52</p> <p>et il y a aussi ce cinéaste qui explique ceci : que les plus grands créateurs étaient tous alcooliques, <br class='autobr' /> sont tous alcooliques.<br class='autobr' /> et ils le seront ? (où les cinéastes vont-ils chercher leurs idées ? bulle à verre ?)<br class='autobr' /> 53</p> <p>mais non il est complètement con, ce psychiatre !<br class='autobr' /> deux ans que je le vois, et il n'a pas réussi à me faire arrêter de boire.</p> <p>54</p> <p>le mien, il a si je puis dire le bras long. <br class='autobr' /> à force.<br class='autobr' /> partout il transporte son très lourd DSM-IV-TR, le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, quatrième édition révisée. je me reconnais dans la rubrique Troubles Liés à Une Substance. enfin, précisons, si je carbure, au fond, c'est peut-être à cause d'un trouble lié à l'essence, plutà´t.<br class='autobr' /> un manuel agnostique qui n'apporte aucune réponse à qui que quoi dont où quoi que ce soit, et partout nulle part, à la fois. <br class='autobr' /> depuis ma naissance.</p> <p>55</p> <p>un trouble.<br class='autobr' /> et une camisole chimique.<br class='autobr' /> deux forces.</p> <p>56</p> <p>et à la une,<br class='autobr' /> et à la deux, <br class='autobr' /> et à la trois,<br class='autobr' /> DSM quatre.</p> <p>57</p> <p>fiston, il faut que je te le dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, si les accus à plat j'ai arrêté d'accumuler les culs de bouteilles vides dans un coin du garage et si j'ai arrêté d'écrabouiller les canettes de vodka-orange sous le siège de la voiture, ce n'est pas pour moi, pas tellement. l'autre jour j'avais été déposer au moins cinquante vidanges de rouge à la bulle, alors un passant m'a fait remarquer : vous devez boire beaucoup. vous avez une bonne descente. <br class='autobr' /> oui je devais.<br class='autobr' /> oui une bonne descente, en effet, l'enfer n'était plus si loin de moi. à portée de goulot. <br class='autobr' /> ou bien le paradis ?<br class='autobr' /> parce que fiston, il faut que je te dise, après trois Xanax-Retard ®, un Rémergon ©,<br class='autobr' /> et une bonne dizaine de Château-Lafuite®, les draps de mon lit finissaient par avoir l'odeur du linceul, et cette odeur-là n'était pas pour me déplaire. c'est au premier étage que je dormais dès le milieu de l'après-midi, et pourtant je planais vachement plus haut que le premier étage. j'évitais avec soin le grenier où tous nous stockons les souvenirs dont nous ne voulons plus.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, ce n'est pas pour moi.<br class='autobr' /> la mort est inodore, je te le dis.</p> <p>58</p> <p>maman cette nuit j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> je ne m'en suis rendu compte qu'au réveil.<br class='autobr' /> il y avait quelque chose.<br class='autobr' /> insidieusement.<br class='autobr' /> quelque chose d'insidieux qui puait. <br class='autobr' /> quelque chose de lancinant qui puait.<br class='autobr' /> et c'était de la merde.<br class='autobr' /> ma merde.<br class='autobr' /> ma merde, tu l'as bien connue autrefois, ma merde, non ?<br class='autobr' /> donc je voudrais te parler de ma merde, celle de cette nuit. <br class='autobr' /> hier soir, j'étais, comme on dit, rétamé. le cuir passé, martelé par un rétameur du quartier des tannages de peaux, tu sais, cette collection de livres que tu m'achetais quand j'étais morveux, pour me faire connaître le monde. celui-là montrait d'énormes cuves avec du cuir trempé, depuis j'ai visité ce genre d'endroit,<br class='autobr' /> ça pue,<br class='autobr' /> ça pue aussi un peu la merde.<br class='autobr' /> à la fin, au bout de sept bouteilles de pinard (à 8 euros 75 pièce, on n'a que le plaisir qu'on se donne), sept comme dans les meilleurs contes, à la fin j'ai cédé. putain dehors c'était l'hiver livide, dehors. pas que tout semblait être en train de geler, non : tout était gelé pour de vrai. je vais t'aider à comprendre mon objectif. comme tu le sais, j'ai une tête, et dans sa partie supérieure, un cerveau. à un certain endroit de mon cerveau naissent des idées, des idées tantà´t fixes, pas qu'elles soient gelées, non : elles me glacent, moi ; et des idées tantà´t mobiles, toujours en mouvement,<br class='autobr' /> perpétuelles,<br class='autobr' /> en pure perte.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien.<br class='autobr' /> elles ne m'avancent pas.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien d'autre qu'à être là à courir entre mes neurones et qu'à me faire chier.<br class='autobr' /> elles avancent masquées, et ça n'a rien d'un carnaval.<br class='autobr' /> je n'y comprends que dalle, elles sont de plomb, mais qu'est-ce qu'elles galopent !<br class='autobr' /> alors<br class='autobr' /> moi<br class='autobr' /> j'ai pensé que les étouffer dans du vin, leur noyer le cerveau, ça ne me ferait pas de tort.<br class='autobr' /> enfin, pas plus que ça.<br class='autobr' /> or tu vois,<br class='autobr' /> avant ça j'avais avalé plusieurs cachets de XXXXX (copyrighted, d'une seule traite), puis des pilules de YYYYYYYY (registered, c'est un fait), et tu vois, ces bonbons ont si bien déposé leurs marques, et je flottais à un point tel, loin de mes idées fixes, à un point tel que je ne me suis plus senti, ça, je t'ai déjà aidée à comprendre mon objectif. <br class='autobr' /> je ne me suis plus senti, et j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> ça puait, ça collait, c'était froid.<br class='autobr' /> tu m'as déjà connu, maman,<br class='autobr' /> un peu comme ça.</p> <p>59</p> <p>the fact is.</p> <p>60</p> <p>à l'hà´pital, aucun divan.<br class='autobr' /> faut pas qu'on s'affale comme avant.<br class='autobr' /> à l'hà´pital, aucun sofa.<br class='autobr' /> faut pas qu'on retombe aussi bas.</p> <p>61</p> <p>chèèèèrrrr public bonjouuuuuurrrrr ! connais-tu l'histoire de l'ascenseur ?<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> chèèèèèèrrrrr public la voi-ciiiiiii !!!!l<br class='autobr' /> de nos jours on ne compte plus les ascenseurs ! partout il y en a ! des grands et des petits ! des vieux qu'ont bien vécu, des jeunes qui vont nous en faire vivre ! <br class='autobr' /> (au 19ème siècle, déjà !)<br class='autobr' /> (d'ailleurs chérie on n'a jamais fait l'amour dans un ascenseur, ah ah !)<br class='autobr' /> et bien aujourd'hui, notre ascenseur se trouve dans un, je vous le donne en mille !, … un hà´-pi-tal ! très général, hein, l'hà´pital, très général, rien de particulier. l'aphone habituel, la flore intestinale, ah ah ! <br class='autobr' /> et là , dans un coin de l'ascenseur, une dame, la quarantaine la dame, quarante ans à tout casser. <br class='autobr' /> il fait beau… dehors, hein, pas à l'intérieur de l'hà´pital, d'ailleurs passer l'été à l'hà´pital, hein, on vous dit pas.<br class='autobr' /> bref.<br class='autobr' /> la dame, la quarantaine, donc, porte un short, disons une espèce de, disons sur l'étiquette au magasin ils avaient écrit ça : short. elle tripote et tripote et tripote les cordons qui pourraient, éventuellement, au cas où, lui tenir le short à la taille (voir : magasin, nom commun etc.) chèèèèèrrrr public, tu l'as compris : <br class='autobr' /> la dame, elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble parce qu'elle picole.<br class='autobr' /> elle picole parce qu'elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble, alors elle boit.<br class='autobr' /> au début, de l'intérieur, qu'elle tremblait.<br class='autobr' /> maintenant de tout partout.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> humblement,<br class='autobr' /> elle demande au monsieur qui lui fait face monsieur vous ne pourriez-pas s'il vous plaît nouer les cordons de mon short je n'y arrive pas j'ai un problème je tremble.</p> <p>62</p> <p>la dame, la quarantaine, c'était la première fois qu'elle osait venir en parler.<br class='autobr' /> en parler à qui ?<br class='autobr' /> en parler à l'hà´pital, tiens !</p> <p>63</p> <p>putain de main droite de putain de main de putain de main de merde tu restes pas en place, j'ai encore dù utiliser ma main gauche pour te garder en place ! tu as encore cafouillé sur le clavier<br class='autobr' /> du terminal<br class='autobr' /> automatisé<br class='autobr' /> de la banque. <br class='autobr' /> j'avais tapé 368, pas 2b9 !</p> <p>63</p> <p>… mais je ne vais pas te couper, j'ai encore besoin de toi pour tenir la canette !</p> <p>64</p> <p>non monsieur l'agent de police non je ne bois pas !<br class='autobr' /> je me torche !<br class='autobr' /> 65</p> <p>bien bien bien vous l'avez compris (monsieur), vous buviez pour vous anesthésier. pour, en quelque sorte, endormir votre…votre douleur-de-vivre.<br class='autobr' /> non, pas en quelque sorte. souvent du bon vin.</p> <p>66</p> <p>ma douleur ce n'est pas que je m'y vautre, c'est que…</p> <p>67</p> <p>du coup,<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> (bordel c'est ça qu'ils apprennent à l'école, les psys ?)<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire,<br class='autobr' /> sèkeu… vivre, est-ce une telle douleur ?<br class='autobr' /> vivre…<br class='autobr' /> (pour moi, oui.) (bordel.)</p> <p>68</p> <p>alors monsieur comprenons-nous bien, ici personne ne vous demandera d'arrêter de boire, absolument personne, hum !, si vous buvez et bien c'est que vous buvez, et c'est un fait incontournable, et si vous avez commencé à boire c'est que bon vous aviez besoin de commencer à boire, alors oublions que vous buvez, cela n'a finalement aucun intérêt.<br class='autobr' /> on va pas se fixer là -dessus.<br class='autobr' /> et si un jour vous arrêtez de boire, supposons que vous arrêtiez de boire pour… pour… votre petit chien, moi en tant que toubib j'en serais fort heureux ! <br class='autobr' /> (mais il n'a pas de chien, ce buveur !)</p> <p>69</p> <p>buveur invétéré, qu'on dit !<br class='autobr' /> invertébré ?</p> <p>70</p> <p>décervelé ?</p> <p>71</p> <p>ah non ça c'est le but !</p> <p>72</p> <p>you and me at the edge of time.</p> <p>73</p> <p>tu vois, moi non. moi je ne supporte pas que vous disiez à tout bout de champ : j'ai rechuté j'ai rechuté !<br class='autobr' /> d'où ?</p> <p>74</p> <p>oh j'en ai entendu d'autres, monsieur (le psychiatre) ! <br class='autobr' /> que j'étais en pleine déchéance. mais qui m'avait déchu ? pas moi, rien d'autre que le regard des autres…</p> <p>75</p> <p>the fire-sea licking my feet.</p> <p>76</p> <p>on rigole, on rigole.<br class='autobr' /> mais la douleur, ça existe.<br class='autobr' /> une douleur, comme ça, sans nom, qui se balade en vous sans définition possible, qui prend toute la place, qui fait ses petits en vous. une douleur qui ne va pas si mal et qui ne vous va pas bien.</p> <p>77</p> <p>ta douleur ? ta douleur ? allons bon ! c'est facile de parler de douleur, de chercher des excuses alors qu'en fait tu manques de vo-lon-té !</p> <p>78</p> <p>quelle volonté ? de quoi parle-t-on (à la fin ?)</p> <p>79</p> <p>il faudrait d'abord, pour s'entendre, savoir de QUOI on parle, bordel à queue ! après tout, jésus déjà disait : père, pardonne-leur, ils ne savent pas de quoi ils parlent ! c'est vrai : <br class='autobr' /> les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), bon, on leur a appris à parler quand ils étaient petits. ce faisant, ils s'imaginent, les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), ils s'imaginent connaître le vocabulaire ! de fait quand ils vont au supermarché, ils précisent qu'ils ont l'intention de régler par carte bancaire, la caissière les comprend, les gens, nos proches, nos amis, la famille.<br class='autobr' /> la famille. ah, la famille !</p> <p>80</p> <p>tu dis simplement : voilà , j'en ai marre de la vie.<br class='autobr' /> et c'est un scandale.</p> <p>81</p> <p>tu dis : voilà j'ai le cancer.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt auprès de toi avec des bouts de tuyaux qui leur restaient dans la remise.</p> <p>82</p> <p>tu dis : voilà , ça fait trop longtemps que je souffre.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt avec des vitamines.<br class='autobr' /> et tout le monde planque les vitamines.</p> <p>83</p> <p>après tout, il n'a que le cancer…</p> <p>84</p> <p>je vais vous expliquer, moi, je vais vous l'expliquer pourquoi mon frère boit. <br class='autobr' /> je le sais, moi.<br class='autobr' /> c'est parce qu'il est faible.<br class='autobr' /> écoutez, allez, il avait tout pour réussir !<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> mais il est si faible !<br class='autobr' /> (est-ce que je bois, moi ?)</p> <p>85</p> <p>ces deux-là sont tombés amoureux. à l'hà´pital.<br class='autobr' /> d'accord, ils n'allaient pas bien.<br class='autobr' /> ni l'un.<br class='autobr' /> ni l'autre.<br class='autobr' /> lui bon c'est depuis la mort de sa femme (dans un accident de voiture, il conduisait, elle était enceinte de leur première fille et le foetus, on l'a retrouvé sur le pare-brise.)<br class='autobr' /> on peut comprendre, n'est-ce pas ? <br class='autobr' /> on peut comprendre.<br class='autobr' /> elle ? je sais pas. ça tournait pas rond non plus.<br class='autobr' /> ils font partie de ces personnes qui croient échapper enfin à l'alcool<br class='autobr' /> en tombant amoureux.<br class='autobr' /> à l'hà´pital.<br class='autobr' /> (de quoi tu te mêles ?)</p> <p>86</p> <p>à part ça, jésus a dit : aime ton prochain…</p> <p>87</p> <p>et jésus dit : aime ton prochain verre !</p> <p>88</p> <p>fiston, il faut que je te dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, c'est pour toi.<br class='autobr' /> je te le dis, de toi à moi.<br class='autobr' /> il fallait bien que je te le dise.<br class='autobr' /> je suppose qu'il est mieux de te le dire plutà´t que de ne pas te le dire.<br class='autobr' /> je pense vraiment qu'il n'est pas utile de tout dire à son fiston, sauf ce qu'il est mieux de dire plutà´t que de ne pas le dire.<br class='autobr' /> maintenant, ceci étant dit, je peux romancer l'affaire, si tu le souhaites.<br class='autobr' /> c'était un gris dimanche gris d'avril qui ne se découvrait pas d'un fil. comme à mon habitude, j'avais bu dès le réveil, j'étais déjà passé à la station, le dimanche c'est pas lui c'est sa cousine qui tient la boutique. <br class='autobr' /> comme à son habitude elle m'a salué avec gentillesse <br class='autobr' /> sans me poser <br class='autobr' /> la moindre question <br class='autobr' /> du genre : <br class='autobr' /> non mais pourquoi venez-vous acheter cinq bouteilles de rouge chaque dimanche à 7 heures du mat ? <br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> pas par compassion, sans doute.<br class='autobr' /> je faisais tourner la boutique, au fond.<br class='autobr' /> je débouche la première bouteille.<br class='autobr' /> je tremble.<br class='autobr' /> je flippe.<br class='autobr' /> mes mains lâchent la bouteille.<br class='autobr' /> elle va s'exploser la tronche sur les disques de mon chanteur favori.<br class='autobr' /> autour de moi. partout. du verre. du vin.<br class='autobr' /> ça pue. ça pue le vin. ma gueule pue pareil quand j'ai bu. et comme je bois toujours…<br class='autobr' /> tu sais, le vin, ça pue. ah la binette extatique du type à la télé ! il agite avec aaaamour son ballon, ah ça sent la noisette, le fruit rouge avec un arrière-goùt de mort ! arrêtez vos conneries, le vin ça pue ! <br class='autobr' /> j'ouvre une deuxième bouteille. je n'ai pas soif. je n'aime plus le vin. je n'aime plus boire du vin. je bois du vin parce que j'ai la tremblote. j'ai la tremblote. <br class='autobr' /> on appelle ça : le manque. joli mot.<br class='autobr' /> j'abrège la seconde bouteille je l'ai vomie.<br class='autobr' /> et au milieu des bulles de bile qui pétaient sur l'inox de l'évier<br class='autobr' /> de la cuisine,<br class='autobr' /> j'ai vu ton visage,<br class='autobr' /> fiston.<br class='autobr' /> joli mot.</p> <p>89</p> <p>et ce poteau de signalisation qui le regarde, <br class='autobr' /> lui,<br class='autobr' /> qui le nargue.<br class='autobr' /> ta gueule !</p> <p>90</p> <p>cette amie avait un ami.<br class='autobr' /> son ami buvait (beaucoup, mais demeurait toujours poli.)<br class='autobr' /> une fois assis à , par exemple, la terrasse de ce bistrot en face de la gare, <br class='autobr' /> il commandait un « demi de rouge. »<br class='autobr' /> la suite ? vous voulez la suite ?</p> <p>91</p> <p>tous les matins avant même de manger, il vomit.<br class='autobr' /> il ne vomit rien.<br class='autobr' /> juste un peu de cette bile verte<br class='autobr' /> fabriquée à l'intérieur de son corps blanc,<br class='autobr' /> ici, sur la planète bleue.</p> <p>92</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>93</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>94</p> <p>tous les matins…</p> <p>95</p> <p>les matins ? il les vomit tous.</p> <p>96</p> <p>un premier demi de rouge.</p> <p>97</p> <p>merde à la fin on vient ici pour se soigner, on sait très bien qu'on doit arrêter de boire, et puis voilà à la télé en plein salon, à une heure de grande écoute, des pubs pour de l'alcool vraiment c'est de nous qu'on se moque on nous provoque.</p> <p>98</p> <p>je ne sais pas, je me sens divisé.<br class='autobr' /> à quel sujet ?<br class='autobr' /> non, tu ne comprends pas. je suis divisé : moi.<br class='autobr' /> oui mais à propos de quoi ? de toi ?<br class='autobr' /> non tu ne comprends pas. je me sens divisé. une partie de moi dis fais ça, une partie de moi dit fais ci…<br class='autobr' /> ah oui ah oui ah oui je te comprends mieux, c'est le fameux truc de la division entre la raison et les émotions. non ?</p> <p>99</p> <p>aujourd'hui matin je n'ai même pas envie de me laver. non je ne vais pas me laver. j'ai des traces de merde sèche au fond du caleçon, trois jours de merde je crois.</p> <p>100</p> <p>putain l'odeur entre mes orteils ! <br class='autobr' /> 101</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, je m'épilais les poils de bite, j'évitais la brousse.<br class='autobr' /> maintenant, après, maintenant, après, je porte l'odeur de sperme pourri de ma branlette d'hier soir.</p> <p>102</p> <p>je me suis branlé hier soir ? j'ai oublié.</p> <p>103</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, j'éliminais ces morceaux de peau durcie sur la plante de mes pieds.</p> <p>104</p> <p>il va travailler. <br class='autobr' /> un détour par la station. <br class='autobr' /> il achète deux flacons de ce rouge à la con format 50 cl, y a pas de bouchon donc pas de problème à l'ouverture du goulot, en allant travailler, après un détour par la station.</p> <p>105</p> <p>monsieur c'était votre jour d'essai et vous sentiez l'alcool.<br class='autobr' /> je sentais l'alcool ?<br class='autobr' /> je ne l'ai pas remarqué moi-même, mais ma secrétaire avait des doutes, elle est venue m'en parler.<br class='autobr' /> elle avait des doutes sur quoi ? sur le fait que je boive, ou sur le fait que je ne boive pas ?</p> <p>106</p> <p>une bouche de merde, une clef de merde dans ma bouche.</p> <p>107</p> <p>c'était jour de stage, aujourd'hui. le troisième de la semaine de stage, aujourd'hui. <br class='autobr' /> au volant sur l'autoroute, elle a bu six canettes de gin-cola, aujourd'hui. <br class='autobr' /> à l'école, les toilettes étaient fermées, aujourd'hui.<br class='autobr' /> elle est ressortie en rue, mais elle n'a pas trouvé le moindre bistrot, aujourd'hui.<br class='autobr' /> c'était pourtant stage, aujourd'hui.<br class='autobr' /> en revenant vers l'école, elle a pissé sur elle. aujourd'hui, son pantalon était trempé. <br class='autobr' /> trop tard.<br class='autobr' /> alors, avant de se présenter à son troisième jour de stage (c'était aujourd'hui, quand même !), elle est retournée dans sa bagnole, elle a mis le chauffage à fond sur chaud, elle a espéré que son froc sèche vite, vite, vite.<br class='autobr' /> vite.<br class='autobr' /> elle a espéré que personne ne se doute de rien, aujourd'hui.<br class='autobr' /> quand le maître de stage lui a dit votre leçon était bien donnée bravo mais excusez-moi si je vous importune c'est délicat avez-vous hum hum comment ? un problème avec votre séchoir.<br class='autobr' /> (pourquoi ? je la flaire la pisse ? c'est ça ?)</p> <p>108</p> <p>c'est depuis quand que tu aimes le foot, fiston ?<br class='autobr' /> j'avais pas remarqué.</p> <p>109</p> <p>traîne pas en rue.<br class='autobr' /> il fait froid.</p> <p>110</p> <p>fiston.</p> <p>111</p> <p>fiston.</p> <p>112</p> <p>j'arrêterai de picoler, et je passerai des heures à caresser mes chats.<br class='autobr' /> quand j'arrêterai.</p> <p>113</p> <p>elle m'embrassait. je veux dire elle me mettait la langue. elle touchait mes cheveux. elle touchait mes nichons. elle suçait ma bite. elle me mettait un doigt dans le cul. elle hurlait j'aime ta bite. une fois elle m'a mis un concombre dans le cul. c'était froid, putain !<br class='autobr' /> elle aurait pu aussi me sucer les orteils !<br class='autobr' /> mais on s'est tapés sur la gueule.</p> <p>114</p> <p>tu comprends tu comprends tu comprends ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> tu comprends ? six mois que je ne bois plus !<br class='autobr' /> vraiment ?<br class='autobr' /> six mois que je ne bois plus ! tu comprends ? (mais voilà ce week-end y a la ducasse au village et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront.)<br class='autobr' /> nnnnoooonnnn…</p> <p>115</p> <p>mesdames et messieurs, d'emblée je vais commencer mon exposé <br class='autobr' /> par une provocation. <br class='autobr' /> tion.<br class='autobr' /> vous avez tous, je le suppose, entendu parler du bioéthanol, ce carburant qui serait censé éradiquer le problème de la consommation de pétrole<br class='autobr' /> par les humains<br class='autobr' /> à la surface de la terre ?<br class='autobr' /> terre.<br class='autobr' /> j'oserai, mesdames et messieurs, une comparaison,<br class='autobr' /> son, <br class='autobr' /> avec l'éthanol consommé comme carburant par les alcooliques pour éradiquer le problème de la consommation existentielle,<br class='autobr' /> tielle, <br class='autobr' /> des dits alcooliques<br class='autobr' /> à la surface<br class='autobr' /> de leur âme.<br class='autobr' /> (n'est-ce pas ?)<br class='autobr' /> (pas)</p> <p>116</p> <p>n'est-ce pas ?</p> <p>117</p> <p>allez ! à ta santé ! (mentale.)</p> <p>118</p> <p>tale.</p> <p>119</p> <p>neuf.</p> <p>120</p> <p>en matière d'alcool, poser la réponse c'est y répondre.</p> <p>121</p> <p>on était là , on était encore là , et encore ! on était las.<br class='autobr' /> dans un groupe. de parole.<br class='autobr' /> tout à coup sans prévenir, le psychiatre (qui se démet soudain de sa confortable position socratique genre je ne dis rien mais je n'en pense pas moins je ne dis rien c'est à vous de parler qu'est-ce qui va surgir here and now ?), le psychiatre lance comme ça :<br class='autobr' /> et si on parlait des bienfaits de l'alcool ? des bénéfices que vous en tirez ?</p> <p>122</p> <p>alors marc il a lancé comme ça : des bénéfices des bénéfices ? mais on est fauchés, nous autres !</p> <p>123</p> <p>maà¯eutique ta mère !</p> <p>124</p> <p>marc est très drà´le. parfois. quand il n'a pas bu.</p> <p>125</p> <p>madame, moi je vous rendrais bien volontiers votre fils ! bien volontiers ! je n'ai pas pour vocation de hum… « retenir » les gens ! seulement vous le saviez il est hum euh schizotypique il se protège de la euh « vie â…” » en se coupant en deux, enfin je veux dire mais non après tout c'est vrai qu'il y met du sien à se couper en morceaux,<br class='autobr' /> et donc pour y venir,<br class='autobr' /> lors de notre dernière séance il est tombé en deux, par terre, littéralement en deux, un lui, un autre lui.<br class='autobr' /> moi je peux vous expliquer pourquoi à partir d'aujourd'hui vous allez devoir payer deux chambres,<br class='autobr' /> et le pire,<br class='autobr' /> et le pire là -dedans c'est qu'au fond c'est à cause de vous<br class='autobr' /> que <br class='autobr' /> tout<br class='autobr' /> a commencé â„¢.<br class='autobr' /> </p> <p>126</p> <p>alcool : <br class='autobr' /> info ou intox ?</p> <p>127</p> <p>jésus décida ce jour là <br class='autobr' /> de multiplier les personnes pétrifiées de douleur.<br class='autobr' /> la pétrification.</p> <p>128</p> <p>la pétrification vient <br class='autobr' /> aussi en ne mangeant pas.</p> <p>129<br class='autobr' /> mais madame mais madame comment voulez-vous que je vous explique les dessous de l'affaire ? comment ? je ne suis pas DANS lui. j'imagine ce qu'il ressent. j'en ai une idée. une toute petite. <br class='autobr' /> si petite.<br class='autobr' /> vous en avez une si petite ?</p> <p>130</p> <p>d'idée ?</p> <p>131</p> <p>la douleur, le doux leurre<br class='autobr' /> (oh arrêtez vos jeux de mots à la con, les gars !)</p> <p>132</p> <p>les deux lui c'est lui quand même ? mais qui boit ? lui ou l'autre lui ?</p> <p>133</p> <p>quand elle avait poussé la porte de l'hà´pital, elle avait d'abord vu le sourire sympa d'une infirmière qui lui avait balancé : oh la la mademoiselle n'a pas l'air faite pour le bonheur !</p> <p>134</p> <p>je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais.</p> <p>135</p> <p>mon cher père, on peut toujours en causer on peut toujours. de ma douleur.<br class='autobr' /> cependant,<br class='autobr' /> dès que je vais t'annoncer que ma douleur commence avec ta tronche de merde, ça va mal tourner.</p> <p>136</p> <p>papa je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu m'as volé maman !<br class='autobr' /> maman je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu allaitais papa !</p> <p>137</p> <p>en couverture de ce magazine de sciences tousskiliadplusérieu, ils titrent :<br class='autobr' /> quand l'esprit dérape.<br class='autobr' /> petit a :<br class='autobr' /> l'esprit fonctionne ou ne fonctionne pas, il ne marche pas dans tous les cas, donc il ne se casse pas la gueule.<br class='autobr' /> c'est nous qu'on se casse la gueule !</p> <p>138</p> <p>bien-sùr que c'est la faute de la société !<br class='autobr' /> on ne va pas s'étendre là -dessus<br class='autobr' /> (quand même, quand bien même ♭♩♪♫ )</p> <p>139</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> j'ai acheté un microscope une lunette d'astronome et je me scrute. à la longue j'ai cessé de bouger pour ne pas voir trop de choses trop de détails trop d'étoiles mortes trop de minerai appauvri. en moi.<br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> les autres aussi se sont procuré le même équipement. ils me scrutent à leur tour, depuis si longtemps. ça me fait mal. <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ? <br class='autobr' /> je me fais tout petit, petit, petit.<br class='autobr' /> (mais il faut bien que je continue à aller pisser et chier. on n'en sort pas grandi.)</p> <p>140</p> <p>en couverture de ce magazine, ils titrent la psychanalyse peut-elle soigner ?<br class='autobr' /> ils veulent rire ?</p> <p>141</p> <p>ah bon madame vous avez une formation psychanalytique ? manifestement vous ne connaissez pas le préfixe « dé » !</p> <p>142</p> <p>madame, s'y connaître en psychanalyse ou ne s'y connaître en rien, c'est du pareil au même !<br class='autobr' /> voyons voyons la psychanalyse ne cherche pas la guérison !<br class='autobr' /> c'est bien là son symtpà´me !</p> <p>143</p> <p>et la thérapie ? vous y croyez à la thérapie ?<br class='autobr' /> si vous me le dites !</p> <p>144</p> <p>vous y croyez (au moins) ?<br class='autobr' /> +</p> <p>145</p> <p>polize௠drà¤nkt.</p> <p>146</p> <p>morgen wieleicht.</p> <p>147</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> me voilà installé dans « ma » chambre. <br class='autobr' /> un lit, un lit mais pas vraiment d'hà´pital, quelque chose d'un peu plus cosy. on peut régler la tête, pas mal, j'ai déjà remarqué qu'en dormant relevé les cauchemars passent directement du cerveau (ou du siège des émotions ! ah ah !) au trou du cul d'accord ça fait mal en passant mais ça passe plus vite. une armoire qui ferme à clef, clef de merde dans ma bouche, une bouche de merde.</p> <p>148</p> <p>pour avoir quelque espoir de changer quoi que ce soit de sa propre vie, il faut la fracasser.</p> <p>149</p> <p>si on se contentait de fracasser les vidanges ?</p> <p>150</p> <p>il faut il faut il faut, il faut ceci, il faut cela. et pourtant, cette incantation-là , putain, elle est vraie, pour une fois.</p> <p>151</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> une armoire équipée d'une minuscule serrure, le premier venu la crochète, mais le premier venu n'est pas toujours le dernier arrivé.</p> <p>152</p> <p>quand on a bu, on se sent plus fort on conduit mieux on rigole plus on se fait des copains ça donne du courage l'alcool conserve la preuve mon grand-père est mort à 97 ans ça donne du goùt aux pâtisseries et du piment à la vie on fait mieux l'amour après <br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins<br class='autobr' /> on a <br class='autobr' /> a <br class='autobr' /> on.<br class='autobr' /> (laquelle de ces propositions vous ressemble le plus ?)</p> <p>153</p> <p>la gentille demoiselle songe quelques minutes encore au pourtant chouette boulot qu'elle a dù laisser derrière elle<br class='autobr' /> pour un mois<br class='autobr' /> pour un an<br class='autobr' /> (le reste de sa vie ?)<br class='autobr' /> (elle travaillait dans un magasin de vêtements pour enfants.)<br class='autobr' /> elle plonge le regard dans la photocopie qu'un patient lui a laissée sur la tablette du lit (d'hà´pital.) <br class='autobr' /> alors bien vrai ? l'alcool s'attaque à toutes les fonctions de l'organisme ? <br class='autobr' /> bien vrai ? <br class='autobr' /> l'alcool détruit les neurones, les liaisons entre les neurones, l'alcool s'attaque au foie, à la vésicule, troue l'estomac, peut rendre aveugle, ronge la gaine des nerfs, déchausse les dents avant d'entrer dans l'oesophage,<br class='autobr' /> et c'est ainsi qu'ils vécurent et eurent beaucoup de maladies,<br class='autobr' /> des grandes et des moins grandes.</p> <p>154</p> <p>maître corbeau, sur un arbre bourré, tenait en son bec une vidange…</p> <p>155</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le buveur il en a marre de lui-même au point de ne plus prendre soin de lui-même. <br class='autobr' /> aucun.<br class='autobr' /> tu vois ? <br class='autobr' /> mais merde à la fin, je me souviens avoir changé tes langes peints à la diarrhée, coupé les ongles de tes petits petons, décrassé tes yeux divins,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot.<br class='autobr' /> mais merde à la fin pourquoi je me lave plus la raie du cul ?</p> <p>156</p> <p>si l'alcool conserve ?<br class='autobr' /> ça dépend.<br class='autobr' /> tu ouvres un bocal de prunes, c'est un délice.<br class='autobr' /> tu ouvres le bocal d'un alcoolique, ça dégage !</p> <p>157</p> <p>fiston, bien-entendu que derrière tout ça j'ai un problème.</p> <p>158</p> <p>l'alcool fait perdre la mémoire ? attends, ça m'intéresse, moi, ce truc…<br class='autobr' /> faut faire quoi ? le boire ?</p> <p>159</p> <p>suis-je alcoolique ?<br class='autobr' /> suis-je vraiment alcoolique ?<br class='autobr' /> ne suis-je que alcoolique ?<br class='autobr' /> je me cache quelque chose.<br class='autobr' /> mais toi ?</p> <p>160</p> <p>c'est pas possib' de boire autant !<br class='autobr' /> (il est dingue, il détruit tout autour de lui, tout le monde le fuit.)</p> <p>161</p> <p>ah ? mais c'est le but… j'ai envie d'en finir avec tout avant que tout ne finisse de toute façon.</p> <p>162<br class='autobr' /> je te jure, c'est un groupe de malades !<br class='autobr' /> tu as vu ces fans de foot ? ils sont arrangés !<br class='autobr' /> ce film, c'est la folie !<br class='autobr' /> quel truc de débiles !<br class='autobr' /> (arrêtez, quand vous serez vraiment fous, vous comprendrez…)<br class='autobr' /> arrêtez !</p> <p>163</p> <p>mais allez va ! depuis que je ne suce plus, j'ai réalisé que dans les magasins, et bien !, il mettent le rayon alcool juste à l'entrée quand tu rentres à l'entrée quand tu rentres à l'entrée…</p> <p>164</p> <p>fiston, j'entends le vent. énormément de vent. l'hà´pital psychiatrique est construit sur une hauteur, au-dessus de la ville. avant y avait le gibet, ici. on pendait les condamnés à l'écart de la bienséance, du commerce et du culte. puis quand s'est agi de caser les maboules quelque part, si possible loin du regard des bons bourgeois, les zautorités ont choisi le même lieu, tiens ! <br class='autobr' /> la folie dérange bla bla bla je ne vais pas te casser les pieds avec ça…</p> <p>165</p> <p>bla bla bla…</p> <p>166</p> <p>on lui a expliqué ceci :<br class='autobr' /> quand tu auras arrêté de boire (enfin… pas de l'eau hein ah ah ah !), tu verras des alcoolos partout. le mec qui boit, dans la rue, tu le sentiras à 10 kilomètres à la ronde ! la nana du bureau de poste aux yeux jaunes et transparents ! le garagiste à la langue épaissie qui n'a plus que trois doigts à chaque main !<br class='autobr' /> on les repère, on les repère !<br class='autobr' /> (précisons, ils sont par-tout !)</p> <p>167</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> fig.1 (voir plus haut)</p> <p>168</p> <p>il était une fois<br class='autobr' /> un tailleur de pierre<br class='autobr' /> qui chaque jour<br class='autobr' /> taillait la pierre<br class='autobr' /> dans la carrière<br class='autobr' /> de pierre.<br class='autobr' /> un jour qu'il avait introduit le burin vers l'arrière<br class='autobr' /> d'une filière<br class='autobr' /> de pierre<br class='autobr' /> lui parla une grosse pierre :<br class='autobr' /> délivre-moi, délivre-moi, petit tailleur de grosses pierres !<br class='autobr' /> je suis une âme prisonnière<br class='autobr' /> de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> plus loin qu'hier,<br class='autobr' /> plus loin qu'avant-hier,<br class='autobr' /> une brave fermière<br class='autobr' /> m'a enfermé à l'intérieur de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> mais pourquoi ? demanda le tailleur de pierre ?<br class='autobr' /> elle lui répondit, la pierre :<br class='autobr' /> elle en avait plein le cul de moi, je la faisais chier, et comme son mari s'en battait la queue avec une pelle à tarte,<br class='autobr' /> elle m'a taillé cette vilaine croupière !<br class='autobr' /> putain merde connasse !</p> <p>169</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> non, poussière d'ange aussi.<br class='autobr' /> ailes damnées.<br class='autobr' /> envol condamné.<br class='autobr' /> pierre aux pieds.<br class='autobr' /> icarrément.<br class='autobr' /> 170</p> <p>quand il était tout petit déjà :<br class='autobr' /> il perdait ses lattes, il s'emmêlait les pinceaux, il perdait parfois la boule, on ne le comprenait pas, il changeait d'humeur, jean-qui-jean-qui-pleure, il n'allait jamais jusqu'au bout, il n'achevait rien, <br class='autobr' /> bref,<br class='autobr' /> il était déjà une sorte de gamin pourfendu qui n'existait pas vraiment et qui vivait perché.<br class='autobr' /> (oui, loin de vous très loin.)</p> <p>171</p> <p>articule !</p> <p>172</p> <p>achève ce que tu as commencé !</p> <p>173</p> <p>mesdames, messieurs, l'équipe est absolument d'accord que vous nourrissiez les chats sauvages qui vivent dans le parc de l'hà´pital !</p> <p>174</p> <p>tu n'as que six ans et tu te poses trop de questions !</p> <p>175</p> <p>ras-le-bol !<br class='autobr' /> ils font leur café, d'accord (ils ont le droit !), tout le monde n'aime pas le café, mais la question n'est pas là . la question étant, madame l'infirmière, qu'ils laissent traîner leurs tasses, leurs mégots, et le soir ils ont encore le culot de réclamer leur programme télé favori, toujours des feuilletons de mes couilles !, les mêmes conneries amerloques, les pieux de l'amour !, en plus je sais pas si vous savez mais moi je le sais : dans les séries ils picolent, ils se servent un whisky pour un yes pour un no, alors je vous dis pas, non c'est pas ça, je comprends ce que vous dites, je dois aller leur parler à EUX ? c'est ça ? non mais on est dans un hà´pital ici ou quoi ? l'équipe elle sert à quoi ? je paye mon séjour, moi !<br class='autobr' /> (oui, la mutuelle, plutà´t, de fait…)</p> <p>176</p> <p>il ronfle, quoi ! toute la nuit ! je fais quoi ?</p> <p>177</p> <p>on assiste chez le sujet à une lutte pour préserver le sentiment de sa réalité.<br class='autobr' /> (n'importe quoi ! il se noie et se décape dans le pinard !)</p> <p>178</p> <p>moi intérieur  faux moi sans vie</p> <p>179</p> <p>perception irréelle  action insignifiante</p> <p>180</p> <p>réalité ✖ persécution  pétrification<br class='autobr' /> ( tu comprends mieux, fiston ?)</p> <p>181</p> <p>psy ï ¸ chiatre</p> <p>182</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> pas loin se trouve la morgue, <br class='autobr' /> comme pour rappeler que la vie on en meurt à en crever.<br class='autobr' /> (la porte bat au vent, ça fait un peu western glauque !)</p> <p>183</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le parc est grand, le pavillon des grands sérieux jouxte le mien, on peut rejoindre le pavillon des quand-c'est-eux à pied…</p> <p>184</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> on soigne toutes les pathologies des pas trop logiques, dans le coin…</p> <p>185</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> je n'irai pas jusqu'à dire que je les aime d'amour, non. quand tu viendras me saluer, bientà´t, on se baladera dans le parc, et alors tu les verras. <br class='autobr' /> ils me fendent, les « grands malades »â€¦<br class='autobr' /> celui-là fait un pas, stoppe le mouvement, reste là , comme une stèle, justement. derrière ses grosses lunettes, ses yeux s'allument de joie, il se met à sourire, à rire, il cause avec un autre, invisible, qui fait du surplace à ses cà´tés, et il porte de beaux favoris, au fait.<br class='autobr' /> celle-là avance, un lourd sac à la main, elle scrute le ciel toutes les dix secondes, j'ai regardé aussi, je n'ai rien vu, mais elle si : je la crois.<br class='autobr' /> celui-là s'esclaffe qu'aujourd'hui on va manger des calamars ! des calamars ! des calamars ! (fiston, j'ai vérifié, on bouffe du poulet !)<br class='autobr' /> tu feras connaissance avec « le chien », fiston : lui, il se carapate comme un militaire une-deux-une-deux, et de temps en temps il se prend à aboyer : roaoh roah !, peut-être après les chats sauvages, sans doute après des êtres qui lui font du mal et refusent absolument absolument absolument de lui foutre la paix.<br class='autobr' /> parfois on cite son prénom :<br class='autobr' /> marcel se prend pour un chanteur de variétoche,<br class='autobr' /> fernand le muet me montre les cahiers qu'il remplit d'une écriture indéchiffrable sauf de lui seul, il me fait piger que ce sont ses « devoirs. »<br class='autobr' /> simon chasse des mouches imaginaires avant de franchir le seuil des portes.<br class='autobr' /> ce n'est pas que je les aime d'amour, non. <br class='autobr' /> maintenant j'en fais partie,</p> <p>186</p> <p>bienvenue dans l'unité d'alcoologie !<br class='autobr' /> (ici, c'est moins grave !)</p> <p>187</p> <p>encore un gamin, débile léger, probable, en pleine discussion avec l'animatrice :<br class='autobr' /> • ils me font peur !<br class='autobr' /> • oh tu sais… devant chez moi un couple passe tous les jours à 17 heures promener leur chien… eux me font vraiment peur !</p> <p>188</p> <p>vraiment.</p> <p>189</p> <p>très peur.</p> <p>190</p> <p>je l'ai lu dans le journal :<br class='autobr' /> un jour un mec est arrivé dans un auditoire de médecins avec des échelles de différentes grandeurs. la vlà qui explique : il y a des échelles dans la douleur ainsi comparons un cancéreux à qui on a cousu le trou de balle et attaché une poche au ventre et comparons-le donc à un petit alcoolique de rien du tout qui manque totalement de courage…<br class='autobr' /> et bien ?<br class='autobr' /> et bien les étudiants ont saisi la plus grande échelle et ils ont pendu ce connard au plafond !</p> <p>191</p> <p>bon, je retourne à mon pavillon, celui des grands cireux au yeux vitreux…</p> <p>192</p> <p>y-a-t-il moyen de s'en sortir ? (parfois.)</p> <p>193</p> <p>parfois.</p> <p>194</p> <p>oh ça faisait longtemps qu'on ne me regardait plus comme avant !<br class='autobr' /> cool ! on te regardait toi (au moins) !</p> <p>195</p> <p>bonjour monsieur l'agent de quartier je viens pour la convocation celle de mon changement de domicile.<br class='autobr' /> ah ouais mais vous n'étiez jamais chez vous ! on peut être certain que vous habitez bien où vous le dites ?<br class='autobr' /> j'étais hospitalisé.<br class='autobr' /> hein ? où ça ?<br class='autobr' /> à l'hà´pital psychiatrique.<br class='autobr' /> hein ? on vous a interné ?<br class='autobr' /> non, j'y étais volontairement.<br class='autobr' /> hein ?</p> <p>196</p> <p>ce qu'elle a ? je vais t'avouer, moi, ce qu'elle a…<br class='autobr' /> pourquoi devrais-tu avouer TOI ce qu'elle aurait ELLE ?<br class='autobr' /> je me sens concerné…<br class='autobr' /> ah ?</p> <p>197</p> <p>ce qu'elle a c'est qu'elle a toujours eu peur de la vie, voilà !<br class='autobr' /> il est interdit d'avoir peur de la vie ?</p> <p>198</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ici la bouffe n'est pas très bonne. pas grave. mais pas tout à fait normal malgré tout. autour de moi y a des gens qui n'ont plus que ça, la bouffe…</p> <p>199</p> <p>normal, courant, ordinaire, compréhensible.<br class='autobr' /> anormal, spécial, monstrueux.<br class='autobr' /> incompréhensible.</p> <p>200</p> <p>ah je suis contente de t'entendre au bout du fil !<br class='autobr' /> tu m'appelles seulement maintenant ? chuis à l'hosto depuis trois mois.<br class='autobr' /> je sais, je me disais que tout allait bien.<br class='autobr' /> 201</p> <p>tu devrais faire une cure tu devrais faire une cure tu devrais…<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> tu es si… comment ?... loin<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et ça me fait peur.<br class='autobr' /> peur pour moi ou peur pour toi ?<br class='autobr' /> je sais pas… l'alcool la folie tout ça c'est des trucs je sais pas…</p> <p>202</p> <p>ah vous aussi vous êtes un patient ? vous avez une cigarette pour moi ? des menthol ? bon, d'accord, tant pis. mon administrateur de biens est un radin. ils prétendent que je vais mal parce que je suis schizophrène. vous n'avez pas l'air d'un patient. vous êtes schizophrène aussi ? l'alcool ? rien de plus ? bah, ce n'est pas grave, ça. mais je ne suis pas schizophrène. il fait beau ce soir, non ? ils vont venir. les extraterrestres. ils ont envoyé un signal sur mon portable. pas si simple, mon vieux ! c'est un message codé, naturellement ! moi seul comprend ! (des fois j'en ai marre d'obéir à ces enculés de l'espace !)</p> <p>203</p> <p>tu vois, moi j'ai rien fait. c'est mon ex-mari. je me suis laissée entraîner. et le juge vient de refuser que je sorte pour de bon de cette prison de merde ! prison, hà´pital, c'est du pareil au même.<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> non.</p> <p>204</p> <p>les fantà´mes de l'hà´pital.<br class='autobr' /> eux.<br class='autobr' /> et moi.<br class='autobr' /> 205</p> <p>jamais je n'aurais cru finir un jour ici. maintenant, voilà , j'y suis. <br class='autobr' /> pourquoi pas ?</p> <p>206</p> <p>depuis quelques années tu te dégrrrrades trrrrrès forrrrrt.<br class='autobr' /> va te faire enculer, papa !</p> <p>207</p> <p>il n'était plus le même, il n'était plus lui-même.<br class='autobr' /> mais surtout c'étaient les autres qui persistaient à rester plus que jamais les espèces de cons qu'ils avaient toujours été.</p> <p>208</p> <p>fils de pute ! tu es toujours là au cul des infirmières à essayer de dénoncer ton voisin de chambre soi-disant qu'il aurait bu en cachette et au moment où je te cause, tu laisses tomber par terre ta barrette de shit !</p> <p>209</p> <p>ils organisent un groupe « contes », la psy lit une histoire, et on doit essayer d'en parler, voilà , ça me branche pas, c'est en fait le groupe « con » !</p> <p>210</p> <p>avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté du fil<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> pour me recoudre le nombril.<br class='autobr' /> avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté pour cinq pistoles<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> de fil<br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> je vais recoudre ma camisole<br class='autobr' /> oh oh oh !</p> <p>arrivé à l'hosto<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> j'vais observer ma pourriture <br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> sous toutes ses coutures.</p> <p>j' suis une enflure<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une rature une vergeture<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> faut qu'on m'enferme derrière les murs !</p> <p>211</p> <p>vous savez la façon d'aborder la maladie mentale a beaucoup changé avec le temps !<br class='autobr' /> sur quel flanc ?</p> <p>212</p> <p>putain de vie de merde à la con !<br class='autobr' /> j'en ai ras la patate !<br class='autobr' /> je vais me cuiter !<br class='autobr' /> rien à foutre de leurs tests de crétins !<br class='autobr' /> c'est truqué leurs trucs.</p> <p>213</p> <p>hips !</p> <p>214</p> <p>fiston, je le sens je le sens, plus rien ne sera comme avant. je… je cherche mes mots : ce n'est pas que plus rien ne sera comme avant, c'est que plus rien ne pourra être comme avant. non… il est impossible que tout recommence comme avant, voilà . non… là tu vas t'imaginer qu'il est possible que je picole à nouveau, or, de fait, il est impossible que je picole encore, l'alcool et moi c'est fini. non… je ne sais pas comment je vivais, avant, mais… je ne vais plus vivre comme ça. et je ne vais plus vivre comme ça, comme avant, sinon je vais me remettre à boire. non… non, non, non, je ne boirai plus et ne me demande pas comment je le sais, je le sais c'est tout, j'en suis absolument convaincu, enfin… même pas convaincu, je ne bois déjà plus, là , de fait, depuis mon arrivée à l'hosto, pas besoin de me convaincre moi-même. ne me demande pas comment je m'y suis pris, vu que je ne me suis pris à rien du tout, c'est comme ça, dès que j'ai su qu'une place se libérait pour moi, je n'ai plus avalé un gramme d'alcool. <br class='autobr' /> j'ai du mérite ? <br class='autobr' /> je n'ai aucun mérite ? <br class='autobr' /> je n'en sais rien je l'ignore, je ne pense même pas à ce genre de choses complètement hors propos. <br class='autobr' /> j'ai arrêté, c'est bien, non ?<br class='autobr' /> j'ai arrêté, fiston. <br class='autobr' /> au fait, voilà ce que j'avais l'intention de te dire : j'ai arrêté.</p> <p>215</p> <p>j'étais comment, avant ?<br class='autobr' /> chiant… mais je t'aimais déjà .</p> <p>216</p> <p>bon… dites… sorry… je n'ai plus des masses d'unité sur ma carte de téléphone alors dites-moi en vitesse : COMMENT IL VA ?<br class='autobr' /> oh il est là depuis trois jours seulement, il dort, il dort, il dort.<br class='autobr' /> et… c'est normal ?</p> <p>217</p> <p>faut pas que je te cause trop fort, tu vois le type là -bas devant la télé ? oui, lui. avec sa barbe. et bien, hier au repas de midi, on mangeait et tout et tout. on a entendu un énorme cri. le gars, oui, lui, hurlait des phrases qui lui restaient un peu dans la gorge, un doigt tendu vers le plafond, il s'est mis à baver, puis il est tombé sur le pavement, boum !, en tremblant, et bon, chut ! plus bas !, il a chié sous lui. une infirmière s'est pointée, celle qui ne met jamais son tablier, jamais !, et elle lui a enfoncé un bout de tissu dans la bouche,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et.</p> <p>218</p> <p>clef de merde.</p> <p>219</p> <p>salut salut ! j'peux m'asseoir à cà´té ? bon moi je voulais pas mourir, pas vraiment je voulais juste ne plus vivre mais poser un acte violent pour me supprimer ça non je n'y arrivais pas.</p> <p>220</p> <p>asile.</p> <p>221</p> <p>au repos.</p> <p>222</p> <p>loin.</p> <p>223</p> <p>asile.</p> <p>224</p> <p>boire ? ça peut arriver à tout le monde ! regarde jocelyne, là , elle n'aurait jamais imaginé se retrouver ici !</p> <p>225</p> <p>mais… ceux qui ne picolent pas… comment ils font pour tenir le coup, pour supporter cette vie de merde ?</p> <p>226</p> <p>t'inquiète t'inquiète, la société elle sait pertinemment qu'elle broie les gens en mille morceaux ! elle en fait du haché desséché et là -dessus elle les imbibe d'alcool pour leur rendre un semblant d'élasticité, et hop, bon pour le service ! ainsi de suite…</p> <p>227</p> <p>chers collègues,<br class='autobr' /> à l'aube de ce colloque assez singulier, nous nous questionnons tous :<br class='autobr' /> la folie, c'est quoi ?<br class='autobr' /> 228</p> <p>et au coucher de soleil, ils se demandaient encore ce que la folie pouvait bien être, à la fin…<br class='autobr' /> (c'est à ce moment que le chamane…)</p> <p>229</p> <p>pure mother, pure milk.</p> <p>230</p> <p>il a toujours été fou.</p> <p>231</p> <p>ça l'a rendue folle. à tout jamais.</p> <p>233</p> <p>tu as vu son regard ?</p> <p>234</p> <p>il fait le fou</p> <p>235</p> <p>elle joue à être folle, ça l'arrange bien, rapport à …</p> <p>236</p> <p>complètement frappé. comme un apéro.</p> <p>237</p> <p>il est passé de l'autre cà´té.</p> <p>238</p> <p>trouble mental, déséquilibre mental, aliénation, démence, délire, maladie mentale, psychose, déraison, dérangement, égarement, divagation.</p> <p>239</p> <p>c'est dans un moment d'égarement qu'il s'est mis à divaguer vers la démence délirante sous l'effet d'une déraison déséquilibrante, d'une terrible aliénation troublante.</p> <p>240</p> <p>moi, ça ne m'étonne pas ! on le sentait venir…</p> <p>241</p> <p>mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse pour elle ? elle est dans son monde à elle.</p> <p>242</p> <p>je suis malade, complètement malade.</p> <p>243</p> <p>livraison de légumes à domicile.</p> <p>244</p> <p>tu savais que le mot « maboule » était d'origine arabe, toi ? <br class='autobr' /> non, mais ça ne m'étonne pas.</p> <p>245</p> <p>de toute façon, il n'écoute plus personne !</p> <p>246</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> te parler de la folie c'est un peu les mots pour ne pas le dire… le mot « folie », c'est un entonnoir, figure-toi ! on y enfourne tout et n'importe qui. un mec a un léger grain, de l'humour, une personnalité propre ? alors, il est fou. sentence. une nana va jusqu'au bout de ses désirs ? ça y est : elle est folle. un père de famille n'aime pas le foot ? il faut l'enfermer. tu ne te soumets aux conventions fixées depuis la nuit des temps par dieu sait quel imbécile ? par ici la piquouze !</p> <p>247</p> <p>mais la folie, ça existe.</p> <p>248</p> <p>marre de cette réunion d'équipe ! on ne va quand même pas ramener la camisole de force, le bain froid et les chaînes ! si ?</p> <p>249</p> <p>en quelque sorte, il buvait pour ne pas devenir complètement ouf !</p> <p>250</p> <p>non mais quoi c'est quoi la différence entre boire et de l'alcool et sniffer de l'héro je sais pas moi qu'on m'explique !</p> <p>251</p> <p>pour oser conduire quand on a trop bu, il faut être dingue !</p> <p>252</p> <p>papa,<br class='autobr' /> dès que j'osais émettre une opinion différente de la tienne, tu me hurlais que j'étais dingue. mes copains étaient dingues, les profs que j'aimais étaient dingues, j'écoutais de la musique de dingues. <br class='autobr' /> j'ai si vite pigé que pour obtenir un peu d'amour, de reconnaissance, d'éducation, de sécurité, il fallait que j'approuve tes opinions. à toi. <br class='autobr' /> tu t'empressais de raconter à ma soeur aînée que j'étais dingue, puis tu me confiais que ma soeur cadette était dingue, à qui tu avais affirmé que notre soeur aînée était dingue. <br class='autobr' /> tu voyais des dingues partout.<br class='autobr' /> tu ne te regardais pas assez souvent dans le miroir, je crois. <br class='autobr' /> tu aurais aperçu un dingue de plus.<br class='autobr' /> c'est pourquoi, cher papa, va te faire mettre !<br class='autobr' /> même là où tu te trouves maintenant.<br class='autobr' /> dans ta tombe.<br class='autobr' /> d'ailleurs j'ai créé un comité de soutien aux vers, aux insectes et aux parasites, et dès la première réunion je leur ai expliqué le chemin à suivre pour entrer dans ton trou de balle.</p> <p>253</p> <p>papa,<br class='autobr' /> c'est à cause de toi que j'ai commencé à boire, au fond.<br class='autobr' /> ça fait un bien fou de déposer le paquet chez un autre que soi.</p> <p>254</p> <p>non papa,<br class='autobr' /> c'est plutà´t grâce à toi que j'ai commencé à boire. pour changer sa vie, il faut la fracasser. sauf que la mienne de vie, tu l'avais déjà fracassée, dès ma naissance. <br class='autobr' /> l'alcool ?<br class='autobr' /> j'ai du recasser le plâtre, quoi !</p> <p>255</p> <p>putain de bordel à queue (à roulettes), les plus fous ne sont pas ceux qu'on croit !<br class='autobr' /> les gens normaux : eux sont fous. fous de normalité, de trop de normalité, de normalité confondante. <br class='autobr' /> ( t'as un exemple ?)</p> <p>256</p> <p>j'ai plein d'exemples.</p> <p>257</p> <p>oui papa, je suis dingue. oui.</p> <p>258</p> <p>clef de merde ? de diamant, ça oui !</p> <p>259</p> <p>j'ai froid.</p> <p>260</p> <p>j'ai froid.</p> <p>261<br class='autobr' /> la folie,<br class='autobr' /> fiston,<br class='autobr' /> c'est quand<br class='autobr' /> à l'intérieur <br class='autobr' /> de toi<br class='autobr' /> il fait froid,<br class='autobr' /> très froid,<br class='autobr' /> si froid<br class='autobr' /> trop froid.</p> <p>1 bis</p> <p>un diamant, je te dis.</p> <p>2 bis</p> <p>l'alcool, chez lui, ça cache quelque chose et en attendant ça gâche tout.</p> <p>3 bis</p> <p>entouré d'empaffés qui ne savent plus s'ils veulent arrêter de boire, ou continuer d'arrêter de boire.<br class='autobr' /> ou boire.</p> <p>4 bis</p> <p>boire et déboires.<br class='autobr' /> tu veux rire, là ?</p> <p>5 bis</p> <p>ce type, comment que tu veux que il se soigne ? il participe à rien, il regarde des dvds toute la journée. c'est pas comme ça qu'on s'y prend.<br class='autobr' /> on ne sait jamais.</p> <p>6 bis</p> <p>mesdames et messieurs, chers patients qui coùtent cher à la société, c'est le distribuement des médications ! <br class='autobr' /> ( à vos marques ?)</p> <p>7 bis</p> <p>pourquoi yzont donné des noms de musiciens à tous les pavillons ? bientà´t yvont nous dire de soigner notre alcoolisme avec<br class='autobr' /> des élixirs de fleurs<br class='autobr' /> de bach !</p> <p>8 bis</p> <p>un magnifique hêtre pourpre. il déploie ses branches etc.<br class='autobr' /> au pied de l'arbre, un bonhomme archi maigre, cheveux longs et poisseux (poisseux, les cheveux !)<br class='autobr' /> il se lance dans une gestuelle héritée du bouddha musulman né sur les bords du jourdain. <br class='autobr' /> il est fou, donc ?</p> <p>9 bis</p> <p>à ce qu'on dit.</p> <p>10 bis</p> <p>il y en a un, je sais pas, je l'ai surnommé : jérà´me bosch, il me fait penser à un personnage d'un tableau de jérà´me bosch (j'ai oublié lequel.)</p> <p>11 bis</p> <p>euh… ce genre de personnes… ça existe VRAIMENT alors ?<br class='autobr' /> tu vois bien.</p> <p>12 bis</p> <p>cette nuit, ils ont téléphoné au service sécurité.</p> <p>13 bis</p> <p>ce genre de gens… ce genre de gens… ils ne font de mal à personne, je te ferai remarquer ! ils vont même pas au salon de l'auto !</p> <p>14 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> ici tout se passe bien.<br class='autobr' /> ce n'est pas l'hà´tel mais bon je le savais avant de venir.</p> <p>15 bis</p> <p>je le savais, fiston.</p> <p>16 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> je fais te faire une esquisse d'une typologie des maladies de l'âme.</p> <p>17 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> merde alors ! j'ai un dérèglement des quatre humeurs à la fois : <br class='autobr' /> phlegme, sang, bile noire, bile jaune.</p> <p>18 bis</p> <p>billevesées.</p> <p>19 bis</p> <p>sous le poids de leurs péchés, ils sont condamnés à l'enfer.</p> <p>20 bis</p> <p>la trépanation, ça fait même pas mal, fiston !</p> <p>21 bis</p> <p>mieux vaut avoir une bite dans le cul qu'une bouteille dans la tête !</p> <p>22 bis</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> demain il m'enlèvent la pierre de folie de mon cerveau.</p> <p>23 bis</p> <p>de force dans la maison de force ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non… je suis venu en exprès !<br class='autobr' /> hein ? vous êtes fou ?</p> <p>24 bis</p> <p>qui a peur du grand méchant fou ?<br class='autobr' /> pas le petit litron rouge, en tout cas…</p> <p>25 bis</p> <p>bonsoir ma chérie, oui je t'aime encore, ah tu craignais qu'à cause de la cure je t'aimerais plus ? où tu vas chercher tout ça ? <br class='autobr' /> (quoique…)<br class='autobr' /> bon ben embrasse les enfants de ma part, hein !</p> <p>26 bis</p> <p>… paradoxalement, comme une avancée…</p> <p>27 bis</p> <p>fig 1, fig 2, fig 3, fig 4, figure-toi.</p> <p>28 bis</p> <p>quand charcot charcutait…</p> <p>29 bis</p> <p>nous sommes en direct du ALCOOL grand prix de formule 1 où les meilleurs ALCOOL joueurs de foot du monde vont s'affronter pour 3000 ALCOOL tours de pédales sur leurs ALCOOL vélos depuis un ALCOOL tremplin. ici la ALCOOL piscine olympique, à vous les ALCOOL studios !</p> <p>30 bis</p> <p>un jour ou l'autre, il est temps de savoir ce qu'on veut !</p> <p>31 bis</p> <p>plus jamais plus jamais !</p> <p>32 bis</p> <p>c'est ça que tu veux ?</p> <p>33 bis</p> <p>non, je pense vraiment que l'équipe nous respecte.<br class='autobr' /> tu parles ! ils savent tout de nous ! tout !</p> <p>34 bis</p> <p>chuis antipsychiatre… euh, antipsychiatrique…<br class='autobr' /> ouais, psychiatrique, quoi !</p> <p>35 bis</p> <p>JE N'AURAIS JAMAIS CRU QUE JE BOUFFERAIS UN JOUR DES NEUROLEPTIQUES !<br class='autobr' /> ( y en a bien qui bouffent du steak de cheval, alors…)</p> <p>36 bis</p> <p>qui s'y freud s'y pique !<br class='autobr' /> ( ou le pique…)</p> <p>37 bis</p> <p>alors vous, vous êtes contents d'avoir bu, vous êtes content d'avoir arrêté de boire, vous êtes content d'avoir fréquenté des malades mentaux ! hein ?</p> <p>38 bis</p> <p>d'une façon ou d'une autre, la soufffffrance mentale demeure un continent noir encore très mal exploré !<br class='autobr' /> (où ils ont mis le chauffeur de salle ?)</p> <p>39 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud.<br class='autobr' /> dans le fond de la salle : bien vrai, ça ! l'insconscient personne l'a jamais vu !<br class='autobr' /> au premier rang : en plus il sniffait de la coke !</p> <p>40 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et encore ! nous avons la chance toi et moi de vivre dans un pays qui ne criminalise pas la souffrance mentale ! y a un pays où un odieux président nabot …<br class='autobr' /> je sais, papa…<br class='autobr' /> comment : tu sais ?<br class='autobr' /> le cours de sciences sociales, à l école…</p> <p>41 bis</p> <p>sur cette photo, des malades mentaux à poil dans la cour d'un hosto en grèce. nous allons passer un chapeau pour le chauffeur…</p> <p>42 bis</p> <p>tu sais pas quoi tu sais pas quoi tu sais pas quoi ? il a réussi à convaincre son psychiatre qu'il était devenu alcoolique à cause de ses problèmes personnels !<br class='autobr' /> (quel culot !)</p> <p>43 bis</p> <p>depuis toujours l'homme s'est trouvé confronté à des êtres différents et impénétrables…<br class='autobr' /> ( d'autres hommes, non ?)</p> <p>44 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud qui prolongea le mythe grec de « suffocation de la matrice » alors qu'en fait , c'est lui qui suffoquait du cerveau</p> <p>45 bis</p> <p>bienheureux les…<br class='autobr' /> car…</p> <p>46 bis</p> <p>sous l'effet de l'alcool, tout devient laid. la vie devient laide. le regard devient laid. les autres deviennent laids. l'oxygène devient laid. l'herbe devient laide. un éléphant rose devient laids éléphants roses.</p> <p>47 bis</p> <p>il a un gros pif rouge plein de trous. ses yeux ressemblent à des oeufs de cane : jaune laid, blanc pisseux. dans le ventre une montgolfière qui ne prendra plus son envol. <br class='autobr' /> laid.<br class='autobr' /> très laid.<br class='autobr' /> la vraie liberté, quoi !</p> <p>48 bis</p> <p>pour la millième fois elle nous dresse la liste des formations qu'elle a suivies, couvrant des domaines aussi invraisemblables que disparates. elle veut en mettre plein la vue, elle veut convaincre son auditoire qu'elle est quelqu'un, encore, malgré tout. <br class='autobr' /> à des degrés divers.<br class='autobr' /> malheureusement elle pue de la gueule, l'alcool à cent mètres, plein la vue.</p> <p>49 bis</p> <p>il dit sans honte : c'est la huitième fois que je viens ici, je lutte contre l'alcool depuis 15 ans.</p> <p>50 bis</p> <p>il est plus fort que nous il est plus fort que nous il est plus fort que nous.<br class='autobr' /> mais les deux font la bande.</p> <p>51 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis mon arrivée ici, je ne t'ai plus jamais vue sur les murs en pleine nuit.</p> <p>52 bis</p> <p>pas mal ! vous avez un q.i. d'autant.<br class='autobr' /> d'autant que nous n'avez plus de cuites !</p> <p>53 bis</p> <p>est-ce que c'est pour toujours, les dégâts ?</p> <p>54 bis</p> <p>on RESTE alcoolique.</p> <p>55 bis</p> <p>j'ai une fille, oui. enfin, j'avais une fille. enfin je l'ai encore, pourtant…</p> <p>56 bis</p> <p>docteurj'ail'impressionquemespiedsnesententpluslesol !<br class='autobr' /> ah ? c'est un début de polynévrite.</p> <p>57 bis</p> <p>mais le concept demeure flou.</p> <p>58 bis</p> <p>qu'est-ce que la consommation d'alcool ?<br class='autobr' /> un délire ?<br class='autobr' /> une démence ?<br class='autobr' /> une folie ?<br class='autobr' /> une frénésie ?<br class='autobr' /> une humeur ?<br class='autobr' /> une idiotie ?<br class='autobr' /> une possession ?<br class='autobr' /> une connerie ?</p> <p>59 bis</p> <p>ouais j'ai bu et alors ? ça emmerde qui ? va chercher l'infirmier ! tu veux que je te casse la tronche ?</p> <p>60 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis que je suis arrivé ici, je commence à trouver la vie moins laide.</p> <p>61 bis</p> <p>c'est un bon début, ça oui ! mais derrière demeure un fameux rébus !</p> <p>62 bis</p> <p>quelle énigme de folie !</p> <p>63 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> s'il y a bien une chose que je ne supporte plus, c'est l'emploi à tout bout de champ du mot « malade » à la place d'autres mots. il a fait un truc de « malade », c'est un livre de « malade », il joue de la guitare comme un « malade. » la maladie, c'est la maladie. le froid. la laideur.</p> <p>64 bis</p> <p>il était deux fois… ah non ! une seule ! j'ai bu un coup de trop…</p> <p>65 bis</p> <p>voir page 974, cette citation de zigmound frott :<br class='autobr' /> la notion même de « boire un coup de trop » serait distrayante, pour ce qu'elle ne recouvrirait pas une réalité aussi sordide. en effet, le premier « coup » n'est-il pas déjà le « coup de trop ? »</p> <p>66 bis</p> <p>je lève le coude (de trop), et après, boum !, le trou noir. je me réveille à l'hosto.</p> <p>67 bis</p> <p>tu ne crois pas à la psychanalyse.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> c'est ton droit.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> pourtant, avoue, si tu as bu, c'est qu'il y a une raison, non ? arrêter l'alcool, c'est un premier pas, ok. mais derrière ? hein ? derrière ? ok ?</p> <p>68 bis</p> <p>disons que collectivement, la bouffe est dégueulasse. et il ne s'agit pas d'inconscient collectif.</p> <p>69 bis</p> <p>derrière ? tout ce que tu veux, derrière. mais pas avec les outils rouillés de la psychanalyse, cette incantation mystique proche du dogme religieux et qui s'admire elle-même dans un miroir fêlé.</p> <p>70 bis</p> <p>toi, tu es venu ici pourquoi ? parce que tu es alcoolique ou parce que tu es fou ? parce que pour les fous, il y a d'autres pavillons ! dans celui-ci, personne n'est dingo !</p> <p>71 bis</p> <p>oui oui je veux bien aller aux activités d'ergothérapie, mais comprenez-moi, ça me fait bizarre. avant je bossais comme éducateur, alors bon me voilà de l'autre cà´té de la barrière donc ça me fait tout drà´le !</p> <p>72 bis</p> <p>égo-thérapie.<br class='autobr' /> ergot-thérapie.<br class='autobr' /> très charpie.<br class='autobr' /> c'est pas fini non ?</p> <p>73 bis</p> <p>vous pouvez nourrir les chats sauvages avec les restes des repas, ne laissez quand même pas dix assiettes traîner dans la cuisine<br class='autobr' /> pendant plusieurs jours !</p> <p>74 bis</p> <p>toi, on t'a expliqué pourquoi on t'a envoyé ici ? spécialement ici ?</p> <p>75 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> j'ai dormi jour et nuit un mois durant. j'ai recommencé à me laver. je me nourris mieux.<br class='autobr' /> l'autre jour un type est arrivé en pleine crise de délirium. il tournait en rond au pas de course dans le jardin, en écrasant les plantes sur son passage. du coup, l'autre là , le mec que je n'aime pas du tout vu qu'il critique tout le monde au lieu de s'occuper de lui-même, il a gueulé dans le réfectoire : <br class='autobr' /> korsakoff ! <br class='autobr' /> ou : korsakov !<br class='autobr' /> je ne sais plus.<br class='autobr' /> apparemment, cela se produit quand l'alcool a définitivement grillé la plupart de tes neurones. <br class='autobr' /> irréversible. <br class='autobr' /> ça fout les jetons.</p> <p>76 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> j'avais oublié :<br class='autobr' /> dès que j'avais un peu mal au dents, tu me proposais un sucre imbibé d'alcool de menthe.</p> <p>77 bis</p> <p>oh ! vous avez bien raison, monsieur ! ici, certaines personnes s'installent et n'ont pas vraiment l'intention de guérir de quoi que ce soit ! si jamais elles ont quelque chose en débarquant ici, d'ailleurs !<br class='autobr' /> (oups ! je rougis ! en tant qu'infirmière, j'aurais du me taire !)<br class='autobr' /> (ah ! est-on assez sévères ?????)</p> <p>78 bis</p> <p>c'est à VOUS de savoir ce que VOUS attendez de VOTRE cure. NOUS on est à votre disposition pour vous aider dans VOTRE direction. <br class='autobr' /> (désolés mais y a rien d'aut' à dire !)</p> <p>79 bis</p> <p>c'est vous qu'avez commencé, c'est VOUS qu'arrêterez !<br class='autobr' /> (désolés mais c'est vrai !)</p> <p>80 bis</p> <p>moi, j'aime me bourrer la gueule, m'éclater le citron à la coke, à n'importe quoi qui me tombe sous la main ! avant j'étais taximan, j'ai bousillé je sais plus combien de bagnoles, plus aucun patron ne veut de moi ! je suis tombé du deuxième étage, bassin fracturé. cet appartement-là , en fait, j'y ai foutu le feu sans le faire exprès, je me suis endormi en fumant une cigarette ! <br class='autobr' /> du moment que ma bonne femme fait bien à manger !<br class='autobr' /> vrai, je claque toutes mes allocs de mutu dans l'alcool et la dope !<br class='autobr' /> et la meilleure de toutes ? j'suis heureux, moi ! j'suis heureux ! j'adore me péter les lattes ! à fond ! <br class='autobr' /> (c'est ma bonniche qui a contacté le psychiatre… moi…. bof…)</p> <p>81 bis</p> <p>moi j'en ai rien à foutre ici, rien…</p> <p>82 bis</p> <p>tu as d'autres anecdotes du genre ?<br class='autobr' /> plein.</p> <p>83 bis</p> <p>un rayon entier… :<br class='autobr' /> bonjour bonjour c'est moi je reviens ! je pensais que ça irait, dehors, mais ça n'a pas été. allez, je viens passer un petit mois de vacances, ah ah !</p> <p>84 bis</p> <p>t'es trop conasse ! huit fois que tu recommences une cure ! à chaque fois, tu subis un sevrage, vingt jours de comprimés ©, un mois de ® ! au bout de six semaines tu claironnes que tu te sens prête à quitter l'hosto… la suite au prochain numéro ! t'es trop débile â„¢ !!!!<br class='autobr' /> je n'arrive pas à me contrà´ler…</p> <p>85 bis</p> <p>mesdames et messieurs, la salle de remise en forme est ouverte !<br class='autobr' /> ppppffff….</p> <p>86 bis</p> <p>comme raconte le psychiatre, le taux de réussite, c'est 3% environ. alors, je préfère me dire que ça ne va pas marcher pour moi. et si ça marche…</p> <p>87 bis</p> <p>si ça marche, c'est bien emmerdant pour toi, au fond !</p> <p>88 bis</p> <p>je suis ton infirmière de référence, crois moi il faut que tu penses à toi. pas SUR toi. à toi. ça fait des années que tu tortures ton corps, il n'en peut plus, il est à bout…</p> <p>89 bis</p> <p>vous savez ?<br class='autobr' /> (elle pince les lèvres avec préciosité.)<br class='autobr' /> vous savez ? <br class='autobr' /> ici, c'est la première fois. mais avant j'ai fait quatre séjour à l'hà´pital ✜✜✜✜✜, et j'ai passé un an au centre $$$$$$, et bien, partout j'ai laissé un excellent souvenir, je suis encore en contact avec le ΨΔΓΑΘδ et avec la ςψζεΓ.<br class='autobr' /> tu veux ma photo ?</p> <p>90 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> y a un truc qui fait masse. <br class='autobr' /> autour de moi, je vois un gros tas d'alcoolos et d'alcoolotes qui n'ont pas l'air d'en vouloir. un peu comme s'ils refusaient leur moment de vérité. (non, tout à fait.) être face à eux-mêmes.<br class='autobr' /> pourquoi, au-delà du plaisir, je bois ? (plus que de raison.) that's the question quand même non ? <br class='autobr' /> bon, j'arrête de te casser les pieds.</p> <p>91 bis</p> <p>écoutez monsieur, je suis votre infirmière de référence et je peux vous affirmer <br class='autobr' /> que :<br class='autobr' /> c'est du travail !</p> <p>92 bis</p> <p>affolé par la folie,<br class='autobr' /> j'ai des affres au lit.<br class='autobr' /> va chier, à la fin !</p> <p>93 bis</p> <p>la première chose que tu ressens quand tu arrêtes de picoler, c'est que la vidange, c'est toi. et comme en plus tu es consigné, tu imagines que éventuellement il y aura moyen de recycler le grand vide que tu es devenu.</p> <p>94 bis</p> <p>salut à tous !<br class='autobr' /> j'me présente : je suis « la place. »<br class='autobr' /> pas la place du marché, ou la place de ciné, ni la place du mort ah ah ah !<br class='autobr' /> non, je suis : « la place. »<br class='autobr' /> celle que vous avez faite en vous décidant à faire une cure. oui, vous avez fait « de la place », et « la place » en question, c'est donc moi.<br class='autobr' /> quand même, ouvrez un peu les yeux, maintenant qu'ils ne sont plus plombés par monsieur éthanol â„—. l'alcool. l'alcool, avant, dans votre ancienne vie, il en prenait de la place, non ? <br class='autobr' /> il occupait touuuuuuutes vos pensées, lalalère !<br class='autobr' /> matin<br class='autobr' /> midi<br class='autobr' /> et soir<br class='autobr' /> et la nuit itou.<br class='autobr' /> lalalèreu !<br class='autobr' /> faut que j'aie de l'alcool en me levant, et de quoi tenir la matinée, et de quoi me noyer l'aprème, et devant la téloche, et du whisky pour le dodo, ça aide !!!!<br class='autobr' /> etc.<br class='autobr' /> itou.<br class='autobr' /> l'ennui, l'alcool, on doit aller l'acheter, se déplacer, passer du temps au night shop, revenir à la maison, ou bien alors repasser au bistrot. si on dégueule un building de bile, c'est encore la faute à l'alcool ! si on va pisser toutes les demi-heures, c'est encore la faute à l'alcool ! si on se fait choper au volant par les flics, avec deux tonnes de vodka dans les veines, ça prend la soirée pour s'expliquer ! si on crashe sa voiture contre une madame avec un landau, ça va encore durer des plombes ! si on se retrouve au tribunal de police, c'est encore à cause de l'alcool ! si on se chamaille avec sa gonze, c'est la faute à l'alcool ! si on fout des trempes aux gosses, la faute à qui ?<br class='autobr' /> hein ? à qui ? <br class='autobr' /> or donc :<br class='autobr' /> qu'allez-vous à présent faire de moi, « la place ? »</p> <p>95 bis</p> <p>de toute évidence, le problème… l'alcool, c'est permis ! légal ! encouragé, même ! voilà le problème !</p> <p>96 bis</p> <p>alll-llors… chez moi, tout a démarré quand<br class='autobr' /> (j'ai perdu mon boulot, ma femme m'a quitté, j'ai su que ma fille avait le sida, j'ai du vendre ma maison, mon père est mort, j'ai abandonné la pratique du foot, mon chef me harcelait, mon fils a tété en prison)<br class='autobr' /> quand j'ai craqué complètement.</p> <p>97 bis<br class='autobr' /> l'.</p> <p>98 bis</p> <p>l'énigme.<br class='autobr' /> 99 bis</p> <p>bonjour bonjour je suis « l'énigme. »</p> <p>100 bis</p> <p>mais non mais non l'alcool c'est bon pour plein de choses !<br class='autobr' /> regarde un peu…<br class='autobr' /> utilisée en shampooing, la bière permet de redonner de la brillance aux cheveux, <br class='autobr' /> l'odeur du houblon, incrustée dans un oreiller, aide à fermer l'oeil, la bière attire les limaces, elle noie les mouches, et détourne les guêpes, le sucre de la bière ravira vos fleurs et legumes, la bière enlève les taches des vêtements…</p> <p>101 bis</p> <p>et si tout cela, l'alcoolisme, si ce n'était qu'une construction de l'esprit ?<br class='autobr' /> et si après tout l'homme avait besoin d'alccol comme d'oxygène ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> tu en dis quoi ?</p> <p>102 bis</p> <p>l'excès nuit en tout, voilà .</p> <p>103 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ce que j'ai, c'est une douleur, de la douleur.<br class='autobr' /> de toute évidence, à part les spécialistes et les pros, ça ne branche personne, à notre époque.</p> <p>104 bis</p> <p>trucmuche, vous êtes en direct de la grand-place, alors dites-nous est-ce que cette manifestion pour une meilleure prise en charge collective de la folie individuelle a rassemblé beaucoup de monde ?<br class='autobr' /> et bien, bidulette, oui, ici c'est noir de people et les slogans les plus passionants fleurissent ! on peut lire des choses comme : - viens chez moi, j'habite avec une folle !, ou encore : - donne moi un grain de ta folie !<br class='autobr' /> trucmuche, vous êtes notre envoyé spécial sur place, peut-on dire que les organisateurs sont satisfaits ?<br class='autobr' /> alors oui en effet ça oui, la plupart des manifestants, et il y en a de tous les âges, se sont déclarés en faveur d'un meilleur partage de la folie. le centre pour l'égalité des chances mène d'ailleurs la fronde. il faut savoir qu'à peine 1% de la population mondiale semble touchée par la schizophrénie, cela de toute évidence n'est pas équitable. mais l'alcool, ça non, les gens ne veulent pas du tout s'en passer, ils trouvent que la répartition de l'alcoolisme est acceptable.<br class='autobr' /> (telle qu'elle est.)</p> <p>105 bis</p> <p>pas de quoi mener une croisade, non plus ? des fois ?</p> <p>106 bis</p> <p>d'abord dans cet hà´pital à la con vous ne proposez aucune activité, et quand vous en proposez une, elle est débile. <br class='autobr' /> (qu'est-ce qu'on en a à foutre de changer, nous ? du moment qu'on ne paie pas notre chauffage en hiver…)</p> <p>107 bis</p> <p>aller faire des petits dessins, des bricolages en bois, soigner des chevaux, et puis quoi encore ?<br class='autobr' /> (de toute manière, à la relaxation, on s'endort !)</p> <p>108 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et si on en finissait une fois pour toutes avec le sujet ?<br class='autobr' /> allons-y :<br class='autobr' /> LLLL'alcoolisme est l'addiction à l'alcool (éthanol) contenu dans les boissons alcoolisées, plus précisément l'absence du sentiment de satiété. LLLL'OMS reconnaît l'alcoolisme comme une maladie et le définit comme des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l'utilisation d'alcool. CCCCette perte de contrà´le s'accompagne généralement d'une dépendance physique caractérisée par un syndrome de sevrage à l'arrêt de la consommation (pharmacodépendance), une dépendance psychique, ainsi qu'une tolérance (nécessité d'augmenter les doses pour obtenir le même effet). LLLLa progression dans le temps est l'une des caractéristiques majeures de cette addiction. LLLL'usage sans dommage (appelé usage simple) précède l'usage à risque et l'usage nocif (sans dépendance), puis enfin la dépendance. LLLL'alcool est une substance psychoactive à l'origine de cette dépendance mais elle est également une substance toxique induisant des effets néfastes sur la santé. LLLL'alcoolodépendance est à l'origine de dommages physiques, psychiques et sociaux.</p> <p>109 bis<br class='autobr' /> wikhipspédia, quoi.</p> <p>110 bis</p> <p>l.</p> <p>111 bis</p> <p>leur.</p> <p>112 bis</p> <p>énigme.</p> <p>113 bis</p> <p>leur énigme.</p> <p>114 bis</p> <p>ils n'ont pas l'air d'en avoir une.<br class='autobr' /> les autres.</p> <p>115 bis</p> <p>moi si.</p> <p>116 bis</p> <p>eux ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.</p> <p>117 bis</p> <p>ils boivent.</p> <p>118 bis</p> <p>tout le monde boit.</p> <p>119 bis</p> <p>dyonisos buvait, les sumériens buvaient, noé buvait, tibère buvait, les grecs buvaient, les romains buvaient.<br class='autobr' /> déjà .<br class='autobr' /> alors…<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>120 bis</p> <p>c'est un truc ça existera toujours faudra toujours faire avec.<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>121 bis</p> <p>alors rien.</p> <p>122 bis</p> <p>les infirmières ne sont jamais là ! elles partent tout le temps en conge !<br class='autobr' /> figure-toi, enfoiré, qu'elles ont aussi une vie privée…</p> <p>123 bis</p> <p>on dit les musulmans les musulmans on les critique mais ils ne boivent pas d'alcool, eux ! <br class='autobr' /> la voilà la solution !<br class='autobr' /> (si tu savais…)</p> <p>124 bis</p> <p>leur énigme ? <br class='autobr' /> aux autres ? <br class='autobr' /> ils ne parlent jamais d'eux-mêmes. <br class='autobr' /> que leurs enfants ne souhaitent plus les rencontrer, qu'ils ont été obligés de vendre leur maison, qu'ils ont séjourné dans des centres aux normes très sévères, ça oui. qu'ils ont fait de la taule, ça oui. qu'ils carburent au gin, au vin blanc, à la bière blonde, ça oui. que la nouvelle année est une sale période vu qu'ils avaient l'habitude de baiser au champagne, ça oui.<br class='autobr' /> mais leur énigme ?<br class='autobr' /> (et dans des centres aux normes très sévères… ça ne marche pas mieux !)</p> <p>125 bis</p> <p>la première chose que tu fais quand tu sors, tu bois. tu rebois.</p> <p>126 bis</p> <p>je vous regarde toutes et tous, avachis, là , et je me rends compte que vous avez perdu le chemin de dieu.<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu fous parmi nous, alors ?</p> <p>127 bis</p> <p>qu'est-ce qu'on lirait bien pour passer le temps ?<br class='autobr' /> zola, blondin, london, kessel, baudelaire, lowry, bukowski, kerouac, hemingway, apollinaire, faulkner.<br class='autobr' /> c'est un bon début.</p> <p>128 bis</p> <p>la folie,<br class='autobr' /> c'est quand ?<br class='autobr' /> c'est quand…</p> <p>1 ter<br class='autobr' /> alors, toi tu es prêt ?<br class='autobr' /> près de quoi ? de la sortie ? non, près des cuisines.</p> <p>2 ter<br class='autobr' /> alors moi, je serais prêt ?<br class='autobr' /> prêt à quoi ?<br class='autobr' /> prêt à sortir ?<br class='autobr' /> près de sortir ?</p> <p>3 ter</p> <p>d'où ? du trou normand ? de l'auberge espagnole ? de la bouteille bordelaise ?</p> <p>3 ter</p> <p>c'est comment qu'on freine ? j'voudrais descendre de là .<br class='autobr' /> petit à petit, l'oiseau fait son nid.<br class='autobr' /> son petit en tombe.</p> <p>4 ter</p> <p>dehors c'est comment ? c'est où le danger ? c'est quand la chute ? la confrontation avec les brutes de brut ? dehors c'est du verre pilé ?<br class='autobr' /> non, rien que des âmes pliées.<br class='autobr' /> sucré-salé.</p> <p>5 ter</p> <p>dehors, ce sera la guerre !<br class='autobr' /> oui, mais faudra bien trancher, non ?</p> <p>6 ter</p> <p>tu sors quand, toi ?<br class='autobr' /> je sais pas je sais pas, pas tout d'suite pas tout d'suite, j'attends encore un peu et toi ?</p> <p>7 ter</p> <p>dehors je ne bois pas passque je sais que je vais revenir dormir à l'hà´pital.</p> <p>8 ter</p> <p>fiston.</p> <p>9 ter</p> <p>dehors pour se protéger faudra une prise de terre.</p> <p>10 ter</p> <p>dedans c'est dans la tranchée, les obus passent, ils flinguent les autres, ceux qui oublient de porter leur casque.<br class='autobr' /> dedans le cocon tout rond de ceux qui l'étaient toujours.<br class='autobr' /> dedans les tabliers blancs, les tabliers blanc-sec, l'attention carmin qu'on nous porte, les produits de nettoyage rosés.<br class='autobr' /> mais dehors mais dehors mais dehors.</p> <p>11 ter<br class='autobr' /> dehors faudra gérer.<br class='autobr' /> aaaaaaaaahhhhhhh ???? c'est ça, le truc ?<br class='autobr' /> ouais.<br class='autobr' /> aaaaaaaahhhhhhhh ! ok !</p> <p>12 ter</p> <p>épileptique. si si oui oui. il picolait sans être une brute, <br class='autobr' /> pour autant,<br class='autobr' /> mais il picolait. <br class='autobr' /> il en avait besoin, on aurait dit. par fierté, il a décidé d'arrêter tout seul comme le grand qu'il croyait être. s'est enfermé quatre jours dans une maison de campagne. a dormi pour oublier le bruit du verre qu'on dépose, la douceur du goulot dans la main. <br class='autobr' /> c'est bon, c'est bon, on est pas au cinéma !</p> <p>13 ter</p> <p>il a cru qu'il avait gagné, il a cru qu'il avait vaincu l'alcool, comme on dit.<br class='autobr' /> seulement donc voilà , une nuit sa nana l'a vu se tortiller comme un lombric…<br class='autobr' /> un quoi ?<br class='autobr' /> un ta gueule !<br class='autobr' /> il avait défoutu les couvertures…<br class='autobr' /> si ça tombe ils ont des couettes !<br class='autobr' /> … bon, la couette, alors, si ça fait plus joli plus exact. il avait défoutu la couette, il était en train de sucer un coin de son oreiller. puis, il s'est levé, s'est dirigé vers le couloir…<br class='autobr' /> … et il s'est ramassé une gamelle !<br class='autobr' /> … putain va enculer les gardes de sécurité, trouduc ! laisse-moi continuer ! t'as peur de ce que je raconte, hein ? ketapeur ? puis il se dirige vers une fenêtre, s'allonge sur le sol tout en ramassant des poussières qu'il accumule en petits tas, comme ça, pendant des heures, jusqu'à l'arrivée de l'ambulance.<br class='autobr' /> on dirait un livre !<br class='autobr' /> pauvre con ! tu comprends pas ? le mec, il s'est débarassé de l'alcool sans soins autour. alors il est devenu épileptique. ça arrive.<br class='autobr' /> à moi aussi ?<br class='autobr' /> non, t'es trop con ! trop con ! ton cerveau était déjà cramé à la maternité !</p> <p>14 ter<br class='autobr' /> fiston, je viens juste de louer une nouvelle maison.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> fiston, maison.<br class='autobr' /> comme si ça allait ensemble :<br class='autobr' /> fiston, maison.</p> <p>15 ter<br class='autobr' /> ton papa a déniché une maison sympa.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> papa, sympa.</p> <p>16 ter<br class='autobr' /> c'est s'taire, qu'il faudrait !</p> <p>17 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose.</p> <p>18 ter<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> elle sort.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> à 14 heures : pour de bon, comme on dit.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)<br class='autobr' /> une grosse valise près du bureau des infirmières. le bouquet de fleurs des copines.<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> il rentre.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)</p> <p>19 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose, fiston.<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?<br class='autobr' /> quand dans la file du supermarché<br class='autobr' /> à pas lestés<br class='autobr' /> je revoirdeirai et ron et ron petit, pas de litron,<br class='autobr' /> les têtes glauques des combattants du front<br class='autobr' /> en sueur mal torchés,<br class='autobr' /> l'énorme, là , à longueur d'année<br class='autobr' /> en sabots de bois<br class='autobr' /> (tu veux quoi ? tellement gros je suis désormais<br class='autobr' /> que je n'atteins plus mes pieds !),<br class='autobr' /> de ses douzes canettes toujours chargé,<br class='autobr' /> et les ouvriers du plâtre, les ouvriers polonaise,<br class='autobr' /> pour eux boire c'est la santé !,<br class='autobr' /> et le gamin de vingt ans tout ronds<br class='autobr' /> aux yeux injectés d'aiguilles rouges<br class='autobr' /> et quand je planterai ma culture de regards inquiets <br class='autobr' /> dans le sien<br class='autobr' /> où plus rien ne bouge<br class='autobr' /> sauf l'aiguille et le piston,<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?</p> <p>20 ter<br class='autobr' /> dehors : quoi ?<br class='autobr' /> quoi, dehors ?</p> <p>21 ter<br class='autobr' /> dedans ils sont nombreux les ratés, les pétés, le jetés, les tricheurs, les planqués, les trépassants, les gerbants, les emmerdants.<br class='autobr' /> dehors, ils sont legion, les tricheurs<br class='autobr' /> vu que boire un coup c'est bon pour la santé.<br class='autobr' /> dedans, ils ont au moins, ils ont un peu, essayé.<br class='autobr' /> dehors, ils n'essayent même pas, <br class='autobr' /> trop contents<br class='autobr' /> qu'à l'asile des fous <br class='autobr' /> c'est une partie de leur propre âme noire qu'on cache en leur nom.</p> <p>22 ter<br class='autobr' /> parle-moi de ton âme heureuse.</p> <p>23 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ?<br class='autobr' /> j'vais boire. tout d'suite.</p> <p>24 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ? <br class='autobr' /> je vais continuer.<br class='autobr' /> à boire ?<br class='autobr' /> non, imbécile ! à réfléchir, à essayer de comprendre pourquoi je buvais.<br class='autobr' /> ah ? ta psychologue te l'a pas expliqué ?</p> <p>25 ter<br class='autobr' /> moi aussi, je vais continuer à boire. la société à besoin de nous, elle nous attend ! bitus ou pas. surtout bitus, d'ailleurs ! ça crée de l'emploi !</p> <p>26 ter<br class='autobr' /> alors voici le plan, je te le dessine en vitesse :<br class='autobr' /> alcool<br class='autobr' /> =<br class='autobr' /> du boulot pour la vigne ou le houblon<br class='autobr' />  du boulot pour les cultivateurs<br class='autobr' /> ⌘ du boulot pour les transporteurs<br class='autobr' /> ± du boulot pour les grossistes<br class='autobr' /> ≥ du boulot pour les revendeurs<br class='autobr' /> â„¢ du boulot pour les bistrots <br class='autobr' /> ∨ du boulot pour les toubibs<br class='autobr' /> ★ on recommence tout le toutim…<br class='autobr' /> ♩♫ ♯qui voudrait supprimer ça ?</p> <p>27 ter<br class='autobr' /> putain mais si tu sors d'ici pour ENCORE réfléchir, alors c'est que tu bandes pour ton âme noire et pas pour ton âme heureuse… non ? Remarque, moi, ici, j'ai rien réfléchi à rien du tout, alors… je suis pas mieux que toi…</p> <p>28 ter<br class='autobr' /> tu l'as dit.</p> <p>29 ter<br class='autobr' /> je fais partie de quelle tribu, fiston ?<br class='autobr' /> la tribu des tronches ravagées aux rides plus profondes que les failles des océans<br class='autobr' /> (mais ils ont à peine quarante ans et n'ont rien des atlantides),<br class='autobr' /> la tribu des pantalons toujours dégeulasses,<br class='autobr' /> la tribu des alcoolos un rien artistes,<br class='autobr' /> la tribu des pénibles,<br class='autobr' /> la tribu des sans abribus,<br class='autobr' /> des-ceux-qui-n'ont-jamais-bu-malgré-tout-que-des-millésimes ?<br class='autobr' /> la tribu aux attributs ramollis ?<br class='autobr' /> la tribu, elle est sans fin, des pères indignes<br class='autobr' /> malgré-l'autocollant-je-suis-un-brave-papa-(sur-le-front ?)</p> <p>30 ter<br class='autobr' /> tu sors, alors ?<br class='autobr' /> oui.<br class='autobr' /> pour quoi faire ?<br class='autobr' /> redevenir un père.</p> <p>31 ter<br class='autobr' /> nous venons de vous voir dans ce reportage.<br class='autobr' /> l'alcool, vous y avez finalement échappé.<br class='autobr' /> (tiens, on ne dit pas : vous LUI avez échappé ?)<br class='autobr' /> nous allons maintenant vous permettre de répondre aux questions internet, mail et réseaux sociaux des téléspectateurs.<br class='autobr' /> première question de j.l. de truc-les-fouillasses :<br class='autobr' /> comment réagissez-vous lorsque, dans la file du supermarché, vous apercevez un caddie bourré, oui, bourré, de bouteilles de whisky et poussé par une femme (ou un homme) dont le visage boursouflé vous fait soudain comprendre ce que dante a voulu écrire ?</p> <p>32 ter<br class='autobr' /> tu vois, bon, euh, merde, j'ai des crasses sous les ongles, la salle de remise en forme, tout ça, c'est pas mal tout ça, mais pour se sentir prêt à sortir d'ici, le psychiatre m'a demandé : avez-vous un projet ? voilà le hic. un projet. c'est quoi, un projet ?<br class='autobr' /> à toi de savoir, enflure !</p> <p>33 ter</p> <p>moi des projets j'en avais plein. j'avais d'ailleurs commencé à les mettre à exécution. malheureusement, c'est moi que j'ai exécuté. <br class='autobr' /> avant terme.<br class='autobr' /> j'ai pris de l'alcool pour vingt ans ferme.</p> <p>34 ter<br class='autobr' /> ça vient d'où ça de préférer tout foutre en l'air plutà´t que de ne rien foutre en l'air ?</p> <p>35 ter<br class='autobr' /> air. <br class='autobr' /> pierre.<br class='autobr' /> mer. <br class='autobr' /> ter.</p> <p>36 ter<br class='autobr' /> september's here again.</p> <p>37 ter<br class='autobr' /> regarde les rolling stones ! déjà des papys, toujours capables de donner des concerts, et pourtant ils ont avalé :<br class='autobr' /> de l'alcool<br class='autobr' /> de la coke<br class='autobr' /> de l'héro<br class='autobr' /> des champis du h du lsd des couleuvres.</p> <p>38 ter<br class='autobr' /> les couleuvres, c'est nous qu'on les avale. leur guitariste il se fait changer le sang une fois par ang.</p> <p>39 ter<br class='autobr' /> c'est ça, et michaà« l jackson, il était pas dans son cercueil, c'est bien connu.</p> <p>40 ter<br class='autobr' /> quarantaine.</p> <p>41 ter<br class='autobr' /> fiston, je suis sorti.<br class='autobr' /> pas pour de bon.<br class='autobr' /> pour un week-end.<br class='autobr' /> entier.<br class='autobr' /> j'ai préféré dormir chez une copine.<br class='autobr' /> la maison sympa du papa n'est pas encore aménagée. <br class='autobr' /> pour toi.</p> <p>42 ter<br class='autobr' /> fiston, avec cette copine, on a eu un projet.<br class='autobr' /> on a fait ma lessive.<br class='autobr' /> oh pas celle de mes sentiments oh non !<br class='autobr' /> ma lessive, quoi.<br class='autobr' /> et comme on n'avait pas de séchoir (sous la main),<br class='autobr' /> on a mis le linge sur un radiateur.<br class='autobr' /> j'ai pris une serviette chaude, elle sentait l'assouplissant, j'ai enfermé mon visage dedans,<br class='autobr' /> c'était meilleur que le pinard,<br class='autobr' /> vraiment.</p> <p>43 ter<br class='autobr' /> i had a dream, j'ai un projet.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> je grimpe à l'échelle.<br class='autobr' /> du silence.<br class='autobr' /> des étoiles.<br class='autobr' /> rien à dire.<br class='autobr' /> rien à chanter.<br class='autobr' /> rien à boire.<br class='autobr' /> je suis le singe de dieu.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> (ah non putain merde cet espoir c'est celui qui justement m'a fait commencer à boire.)</p> <p>44 ter<br class='autobr' /> je pousse la porte,<br class='autobr' /> je casse la serrure,<br class='autobr' /> je veux permettre à la douleur de se faire un chemin en moi.</p> <p>45 ter<br class='autobr' /> hors de moi.</p> <p>46 ter<br class='autobr' /> car elle, elle ne meurt pas.</p> <p>47 ter<br class='autobr' /> car elle, on se la refile.</p> <p>48 ter<br class='autobr' /> de mains en mains.</p> <p>49 ter<br class='autobr' /> social, economical.</p> <p>50 ter<br class='autobr' /> un premier week-end.<br class='autobr' /> dehors.<br class='autobr' /> là -bas, ils prennent leurs potions vers 21 heures. <br class='autobr' /> y a des chances que thérèse soit de garde. thérèse, celle qui ne rit pas quand on ne la … pas. elle est pourtant si cool. 60 balais. enfermée des nuits entières avec des adddddddddictifs. thérèse, qui refuse qu'on ferme les portes des chambres. parce qu'elle l'a appris comme ça du temps des nonettes. elle passe son nez par le cran plusieurs fois sur la nuit. elle nous aime. je sais pas. un avant et un après. un dedans. et un dehors.</p> <p>51 ter<br class='autobr' /> je suis rentré.<br class='autobr' /> enfin : je suis sorti de chez cette copine.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas rentré chez moi.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas vraiment rentré à l'hosto.<br class='autobr' /> j'étais sorti pour un week-end complet.<br class='autobr' /> 52 ter<br class='autobr' /> ah fiston ravi d'avoir été voir ce film avec toi : robin des bois. notre première sortie ensemble depuis des mois. vuke y avait eu toi au bout du fil voici des mois : <br class='autobr' /> nonpapajeneviendraipluchétoi.</p> <p>53 ter<br class='autobr' /> tiens ? errol flynn avait déjà joué le rà´le de robin au cinoche. il est mort d'alcoolisme à cinquante vergetures.<br class='autobr' /> sale habitude.</p> <p>54 ter<br class='autobr' /> errol Flynn, héros archetypal. de la forêt sombre sombre sombre de sherbottle !<br class='autobr' /> chère bottle ! (pour ceux qui…)<br class='autobr' /> 55 ter<br class='autobr' /> je te jure je vais reprendre des chats.<br class='autobr' /> des ?<br class='autobr' /> ouais : des.</p> <p>56 ter<br class='autobr' /> une vie sans chats est pire qu'une vie sans flacon.</p> <p>57 ter<br class='autobr' /> indépendants, autonomes, souvent décidés sans avoir recours à la flasque qui conduit à la mollesse, et toujours reconnaissants.<br class='autobr' /> mais si nécessaire, ils te virent.<br class='autobr' /> j'ai pigé. la fameuse D.A.<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> dépendance. affective. ils connaissent pas. ils sont pas addicts. ils sont felix.</p> <p>58 ter<br class='autobr' /> men at work.</p> <p>59 ter<br class='autobr' /> ils me proposent de venir en jour. de ne plus dormir ici.<br class='autobr' /> déjà que j'étais venu en douce !</p> <p>60 ter<br class='autobr' /> il pleut des seaux sans vin blanc.<br class='autobr' /> je n'ai jamais compris comment les voitures se retrouvent en avant.<br class='autobr' /> j'arrive de la droite le virage mène ensuite à gauche et, là , je suis devant.<br class='autobr' /> je tourne vers la gauche, angle droit, vraiment, feux rouges, pas blancs.<br class='autobr' /> je passe sur le pont en dessous duquel sous lequel je suis passé avant quelques seconds seulement.<br class='autobr' /> soudain je l'aperçois.<br class='autobr' /> sans vin blanc.<br class='autobr' /> je l'aperçois.<br class='autobr' /> elle court sous les seaux sans vin blanc. <br class='autobr' /> sans doute que son patron l'attend maintenant.<br class='autobr' /> courrir.<br class='autobr' /> flétrir.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> 61 ter<br class='autobr' /> bonjour facteuse ! vous avez des nouvelles de “o†? <br class='autobr' /> il était avec moi à l'hosto.<br class='autobr' /> ah ! facteur ! <br class='autobr' /> ils se foutent de votre gueule vos manageurs !</p> <p>62 etr<br class='autobr' /> etc.</p> <p>63 ter<br class='autobr' /> il faut savoir.</p> <p>64 ter<br class='autobr' /> savoir dire non.</p> <p>65 ter<br class='autobr' /> au fond.</p> <p>66 ter<br class='autobr' /> mais oui !</p> <p>67 ter<br class='autobr' /> non je vais pas acheter ce divan, plutà´t cet autre, là .<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> me fait trop penser à la psychanalyse !<br class='autobr' /> 68 ter<br class='autobr' /> des gamins des gamines.<br class='autobr' /> mauvaises mines.<br class='autobr' /> leur prof n'est pas spécialement fine.<br class='autobr' /> certains ont une angine.<br class='autobr' /> certains voudraient montrer leur pine.<br class='autobr' /> de rage.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> et pourquoi ne pas vivre à l'hosto ?<br class='autobr' /> à vie.</p> <p>69 ter<br class='autobr' /> speechless.</p> <p>70 ter<br class='autobr' /> the age of self</p> <p>71 ter<br class='autobr' /> tu voulais faire quoi, DANS la vie ?<br class='autobr' /> la question étant : je suis venu faire quoi DANS la vie ?</p> <p>72 ter<br class='autobr' /> mais non, tu ne tombes pas.<br class='autobr' /> le garagiste du coin, lui il tombe.<br class='autobr' /> oui, dans sa fosse.</p> <p>73 ter<br class='autobr' /> toutes ces choses qui ne nous serviront plus quand nous serons morts.<br class='autobr' /> tous les livres que nous auron écrits, tous les livres que nous aurons écrits, <br class='autobr' /> toutes les voitures que nous aurons dépannées.<br class='autobr' /> les choses ne nous servent qu'à la condition d'être encore vivants.<br class='autobr' /> une bouteille vide ?</p> <p>74 ter<br class='autobr' /> revenons dehors. partons de l'intérieur.</p> <p>75 ter<br class='autobr' /> little red robin hood hit the road.</p> <p>76 ter<br class='autobr' /> on peut faire sans.<br class='autobr' /> sans quoi ?<br class='autobr' /> sans toutes ces choses.<br class='autobr' /> ok, je ferai avec.</p> <p>77 ter<br class='autobr' /> revenons dehors.<br class='autobr' /> ppppffff ! trop dur ! dehors, c'est le soleil MAIS la tempête, le chaud MAIS le froid, les feuilles mais les branches dénudées, les grosses nanas MAIS les maigres, et surtout : <br class='autobr' /> la télé, la télé, la téle, la télé.<br class='autobr' /> ouais mais la télé on l'a aussi ici dedans, derrière les murs de l'hà´pital, dans les murs, sous les murs, en cueillant des murs.</p> <p>78 ter<br class='autobr' /> oui, j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> mais je n'ai pas réussi la và´tre.<br class='autobr' /> mon fusain était usé.</p> <p>79 ter<br class='autobr' /> oui j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> j'ai arrêté de boire à vie. <br class='autobr' /> dernier avis.</p> <p>80 ter<br class='autobr' /> dehors :<br class='autobr' /> violence<br class='autobr' /> destruction<br class='autobr' /> obsessions<br class='autobr' /> passions.<br class='autobr' /> dedans :<br class='autobr' /> violence destruction obsessions passions.</p> <p>82 terre<br class='autobr' /> îles.</p> <p>83 ter<br class='autobr' /> now you're wandering what to do,<br class='autobr' /> now it's the end.</p> <p>84 ter</p> <p>je suis pas diffcile. <br class='autobr' /> pas vrai.<br class='autobr' /> tu me proposes une jolie femme nue sur mon lit…</p> <p>85 ter<br class='autobr' /> l'érotisme, c'est bizarre, et cà marche !<br class='autobr' /> bon… tu veux une médaille ou des menottes ?</p> <p>86 ter<br class='autobr' /> dehors, c'est quoi ?<br class='autobr' /> c'est de hors.<br class='autobr' /> tu te crois drà´le ?</p> <p>87 ter<br class='autobr' /> dedans c'est quoi ?<br class='autobr' /> de dans, cachés.</p> <p>88 ter<br class='autobr' /> allo la 88ème terre ?</p> <p>89 ter<br class='autobr' /> non mais je vais où moi ?</p> <p>90 ter<br class='autobr' /> dehors.</p> <p>mais c'est où mais c'est où mais c'est où,<br class='autobr' /> le pays de la liberté ?<br class='autobr' /> sans bis, sans repetita.</p> <p>dans la main mon portable.<br class='autobr' /> suis-je transportable ?<br class='autobr' /> on arrive.<br class='autobr' /> j'attends sur le pas de la porte.<br class='autobr' /> jaune l'ambulance.<br class='autobr' /> jaune violent<br class='autobr' /> un conducteur sans travaux.<br class='autobr' /> un convoyeur coréen. jaune ? allez, arrête !<br class='autobr' /> moi même pas sur un brancard.<br class='autobr' /> et puis quoi ?<br class='autobr' /> vieille l'ambulance.<br class='autobr' /> pas confort, l'ambulance.<br class='autobr' /> pas demandé à vivre, moi.<br class='autobr' /> et eux ? le conducteur ? le convoyeur ? pas demandé à convoyer ?</p> <p>on va vous conduire aux urgences… mais faut pas rêver…<br class='autobr' /> non, faut pas…</p> <p>alors vous buvez… combien ?<br class='autobr' /> ouh la…</p> <p>on peut vous garder une nuit.<br class='autobr' /> pas plus ? normal. <br class='autobr' /> la cure après la curée.</p> <p>mais votre pouls est bon. vous êtes solide.l'écho de votre estomac aussi.<br class='autobr' /> pas comme l'écho de mes pensées.<br class='autobr' /> bah, ça peut arriver à tout le monde. tiens, tenez, justement, ici dans le service, et bien…</p> <p>excusez, monsieur, une jeune fille va venir vous tenir compagnie. on va tendre ce rideau, là .<br class='autobr' /> je vous en prie. enfin : on vous en prie. je suis à plusieurs dans ma tête.<br class='autobr' /> ah ! cette blague-là elle est connue !</p> <p>ah merde elle m'a pissé dessus quand je lui ai enlevé sa culotte. ppppsss son string… oh non… elle chie maintenant… pas possible quoi… ces séries de merde à la télé… ils savent pas de quoi ils causent.<br class='autobr' /> ils savent. des gens s'y chient dessus. on ne le filme pas. <br class='autobr' /> storyboard. <br class='autobr' /> prison.<br class='autobr' /> putain merde qu'est-ce qu'elle est migonnne. infirmier ou pas. bousillée. remets. remets le masque à oxygène.</p> <p>qu'est-ce que je fous là ?</p> <p>voilà la famille les proches la famille les proches… <br class='autobr' /> bien vous êtes qui ? <br class='autobr' /> son ex-peti-tami ? <br class='autobr' /> vous avez rompu ? <br class='autobr' /> ce soir-là justement ? <br class='autobr' /> hier, quoi. bon. <br class='autobr' /> et maintenant elle est ici.<br class='autobr' /> elle a bu quoi ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non…<br class='autobr' /> d'accord, elle s'est endormie dans la baignoire.<br class='autobr' /> non, y a pas de quoi rire. on rit, nous ? <br class='autobr' /> d'accord, il a maintenu sa tête hors de l'eau.<br class='autobr' /> sa tête.<br class='autobr' /> hors.<br class='autobr' /> mais qu'est-ce qu'elle avait dans la tête ?<br class='autobr' /> que vous l'avez plaquée en début de soirée ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> vous avez tort.<br class='autobr' /> elle a bu.<br class='autobr' /> pour aussi peu. <br class='autobr' /> comme vous dites.<br class='autobr' /> elle est partie, où ? la gamine ?<br class='autobr' /> elle a foutu le camp.<br class='autobr' /> où ?<br class='autobr' /> vous savez bien.</p> <p>A UNE HEURE DE GRANDE ECOUTE<br class='autobr' /> Récits</p> <p>Pascal Samain<br class='autobr' /> Rue du Pont 6<br class='autobr' /> 7011 Ghlin<br class='autobr' /> Belgique<br class='autobr' /> pascal@pascalsamain.be<br class='autobr' /> <a href="http://pascalsamain.be" class='spip_url spip_out auto' rel='nofollow'>http://pascalsamain.be</a><br class='autobr' /> 00 32 496 307742</p> <p>alors (l…) a pris un bâton d'ice cream pour faire une attelle et retaper l'oiseau.<br class='autobr' /> Dan Fante, dans une traduction de Léon Mercadet</p> <p>il passait des mois entiers seul dans une chambre, mangeant à peine, plongé dans un rêve éveillé.<br class='autobr' /> Ronald Laing</p> <p>le tocsin sonne.<br class='autobr' /> on arrête de jouer.<br class='autobr' /> Louis Calaferte</p> <p>il faut que tu respires, <br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire ;<br class='autobr' /> tu vas pas mourir de rire,<br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire.<br class='autobr' /> Mickey 3D</p> <p>Pour Dan Fante, qui ne lit pas un putain de mot en français</p> <p>1</p> <p>tu aimes le foot<br class='autobr' /> que tu me dis, <br class='autobr' /> j'ai pas de doutes<br class='autobr' /> que je te dis.<br class='autobr' /> mais ta place je la paye <br class='autobr' /> en monnaie de singe. <br class='autobr' /> le feu dans mes méninges, une clé de merde dans ma bouche, une bouche de merde clé sur porte,<br class='autobr' /> que des mots qui en sortent, <br class='autobr' /> bouffis décolorés dissous collés voilés au palais <br class='autobr' /> enfermés à hurler on n'est pas des perroquets on n'est même pas des sirènes.<br class='autobr' /> ma bouche, mais je te paye en monnaie de singe.<br class='autobr' /> au fait, c'est quand qu'elle t'es venue ta passion pour les singes<br class='autobr' /> du foot ? <br class='autobr' /> j'aime le foot que tu me dis, traîne pas en route que je te dis,<br class='autobr' /> dehors <br class='autobr' /> la neige, les glaces déformées, les miroirs, le cosmos tu as ta carte de train ? tes livres d'école ? traîne pas en route, je suis pressé, toi devant le miroir, traîne pas sur le trottoir, je suis pressé comme un litron, à sept heures qu'elle ouvre la station, un litron, le premier, je ne traîne pas, moi, <br class='autobr' /> et ton papa te paye ta place en monnaie de singe.</p> <p>2</p> <p>les gens pensent que l'alcool est une maladie, les gens répètent que l'alcool est une maladie, les gens ont entendu dire que l'alcool est une maladie, les gens se persuadent que l'alcool est une maladie, les gens persuadent les autres gens que l'alcool est une maladie,<br class='autobr' /> ils ne trouvent pas le microbe le gène la bactérie,<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> les gens, ils boivent.</p> <p>3</p> <p>le facteur il boit<br class='autobr' /> l'éboueur il boit<br class='autobr' /> le maçon il boit<br class='autobr' /> ils ne font pas semblant d'être malades ils boivent.</p> <p>4</p> <p>au fond, ils vivent comme des microbes.<br class='autobr' /> sous la robe du vin.<br class='autobr' /> dans le faux-col de la bière.<br class='autobr' /> y a des liqueurs sucrées qui tuent sec.</p> <p>5</p> <p>les madames elles boivent.</p> <p>6</p> <p>elle quitte sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle double sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle va au magasin, elle ne se sent pas trop bien, elle embauche son vieux vélo, elle enfourche son vieux cabas, elle remplit son vieux cabas, <br class='autobr' /> des bouteilles, à ras,<br class='autobr' /> douze canettes dans les bras, personne d'autre sous les draps, des trous dans le pyjama, les taches de pisse sur le matelas.<br class='autobr' /> (elle est honteuse, à ras.)</p> <p>7</p> <p>le psychiatre dit ah venez en ville avec moi, et des alcooliques, on va en remplir trois pleins cars !<br class='autobr' /> bon, c'est toi qui conduit, mec ?</p> <p>8</p> <p>un gros, et son mur qui gagne son pain en le soutenant, un gros, il est plein aux trois-quarts.<br class='autobr' /> il serait dans le car du psychiatre, lui.<br class='autobr' /> je suis dans le cas.<br class='autobr' /> il sème derrière lui sa vie en croùtons de pain pourri et le pigeon c'est lui.</p> <p>9</p> <p>alors le grand-père explique à sa petite-fille bon maintenant qu'on a fini les courses on va aller boire un coup regarde mes mains tremblent<br class='autobr' /> tellement<br class='autobr' /> que j'en ai envie<br class='autobr' /> de boire un coup<br class='autobr' /> tellement.<br class='autobr' /> mais non, grand-papa, ce n'est pas à cause de ça.<br class='autobr' /> bien ! <br class='autobr' /> dans ce cas ma chérie tire la chevillette et la canette cherra !</p> <p>10</p> <p>en gros voilà c'est ça,<br class='autobr' /> il n'y a pas de mal à se faire du bien, un petit verre après le boulot c'est ça, ça aide, et d'abord les autres ont encore commandé une tournée, j'arrive, j'arrive, dans une heure j'arrive, on refait le monde (qui nous a repeints depuis longtemps), c'est quoi qu'on mange ?, non je n'ai pas très faim les enfants vont bien ?, <br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets,<br class='autobr' /> je te parjure.<br class='autobr' /> en gros voilà c'est ça.<br class='autobr' /> je n'ai pas très faim de la vie.<br class='autobr' /> ni de toi.<br class='autobr' /> ni de moi.</p> <p>11</p> <p>ma foi, pour son âge, encore de belles jambes, ne serait-ce ces poches sous les yeux comme le ventre vide d'une maman de kangourou,<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> juste là , <br class='autobr' /> putain que ça se voit !<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> ce bide-là c'est à toi, ce bide distendu par le tanin, en vain, mais là .<br class='autobr' /> ta vie, quelle bide !<br class='autobr' /> (mais la caissière ne le sait pas.)</p> <p>12</p> <p>Aujourd'hui j'ai accroché un papier tue-mouches<br class='autobr' /> à un nuage de ma rue.<br class='autobr' /> j'ai d'abord attrapé des éléphants roses.<br class='autobr' /> puis j'ai pris la peine j'ai pris la pose<br class='autobr' /> (longtemps !),<br class='autobr' /> alors j'ai attrapé les ivrognes qui vont avec.<br class='autobr' /> et voilà c'est comme ça qu'on fait mouche.</p> <p>13</p> <p>mais si, tu bois !<br class='autobr' /> mais non, je ne bois pas !<br class='autobr' /> mais si tu bois !<br class='autobr' /> je ne bois pas plus que tout le monde !<br class='autobr' /> parce que tout le monde boit ?<br class='autobr' /> oui, tout le monde boit.<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et c'est ainsi.<br class='autobr' /> (oui, je l'avais déjà remarqué.)</p> <p>14</p> <p>cette histoire commence un peu comme ça.<br class='autobr' /> ce garçon est le frère de sa soeur, aînée qu'elle est la soeur.<br class='autobr' /> un peu plus loin dans l'histoire, la soeur aînée s'inquiète de son frère<br class='autobr' /> qui boit,<br class='autobr' /> qui boit trop,<br class='autobr' /> qui boit plus que tout le monde.<br class='autobr' /> même si tout le monde boit.<br class='autobr' /> la soeur aînée va trouver son frère<br class='autobr' /> parce que justement<br class='autobr' /> elle vient de trouver les mots justes à lui dire.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> depuis un moment j'observe ta déchéance.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> souviens-toi de toutes les belles choses que tu as faites dans ta vie !<br class='autobr' /> (avant.)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> à toi de savoir si tu veux mourir ou pas !<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu as un fils (quand même !)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu ne te vois pas ?<br class='autobr' /> TU NE VOIS PAS CE QUE TU ES DEVENU ?<br class='autobr' /> (une loque, une épave, un déchet, sans doute, ou quelque chose d'approchant.)<br class='autobr' /> mais le garçon, lui, se voit, même flou dans le cul d'une bouteille, n'en déplaise à sa soeur.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> un peu plus loin encore dans l'histoire,<br class='autobr' /> il préfère ne plus adresser la parole à sa soeur,<br class='autobr' /> car voyons, fait-on remarquer à un cul-de-jatte qu'il n'a plus qu'un bras <br class='autobr' /> tandis que les gens normaux sont si sùrs d'en avoir deux ?</p> <p>15</p> <p>un homme qui boit, disons ça va.<br class='autobr' /> mais une femme qui boit !<br class='autobr' /> mon dieu non,<br class='autobr' /> ça,<br class='autobr' /> ça ne va pas !</p> <p>16</p> <p>papa, tu serres trop à droite.<br class='autobr' /> tu me racontes quoi ? je roule bien au milieu !<br class='autobr' /> (j'ai toujours été un bon conducteur.)</p> <p>17</p> <p>tiens au fait : toi.<br class='autobr' /> tu sais pourquoi tu bois ?<br class='autobr' /> oui, la psychologue me l'a expliqué.<br class='autobr' /> (ah ?)</p> <p>18</p> <p>et maintenant putain de merde,<br class='autobr' /> s'ils me foutent à la porte de l'hà´pital,<br class='autobr' /> putain !<br class='autobr' /> ils ont intérêt à me filer tous les médicaments que je veux !<br class='autobr' /> (sinon comment veux-tu que je m'en sorte ?)</p> <p>19</p> <p>la fête, la fête, tu parles !<br class='autobr' /> noà« l, tu parles !<br class='autobr' /> après six verres de rouge, papy va déprimer et monter se coucher<br class='autobr' /> (vu que mamy est morte l'année passée.)<br class='autobr' /> dès le champagne, machin va déconner !<br class='autobr' /> truc va s'enfiler cinq bouteilles, il finira par chialer <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> comme d'habitude !-,<br class='autobr' /> chose va cuver devant la télé,<br class='autobr' /> bidule va boucher les cabinets avec du vomi de poulet,<br class='autobr' /> et l'autre là , va s'étaler dans la cuisine !<br class='autobr' /> oui mais c'est la fête, alors…</p> <p>20</p> <p>le commissaire a pénétré les lieux du crime.<br class='autobr' /> les acteurs n'avaient pas encore quitté la scène du méfait.<br class='autobr' /> mais comme le commissaire n'avait pas bu,<br class='autobr' /> il n'a pas pu<br class='autobr' /> vraiment<br class='autobr' /> participer à cette discussion de bitus.</p> <p>21</p> <p>es-tu vraiment obligé de boire ?<br class='autobr' /> obligé, obligé, non…<br class='autobr' /> tu pourrais essayer autre chose ?<br class='autobr' /> oui je pourrais être propriétaire d'une voiture<br class='autobr' /> et la laver chaque jour tant que le temps dure,<br class='autobr' /> pour oublier cette douleur qui dure.</p> <p>22</p> <p>vraiment je ne crois plus en rien.<br class='autobr' /> cependant ce que je crois bien<br class='autobr' /> c'est que c'est le matin<br class='autobr' /> et que si je ne bois rien de ce putain de vin,<br class='autobr' /> mes doigts vont continuer à trembler,<br class='autobr' /> ça je le croirais bien.</p> <p>23</p> <p>avez-vous déjà été de pierre ?<br class='autobr' /> avez-vous déjà été pétrifié ?<br class='autobr' /> par quoi ? nul ne le sait, mais pétrifié.<br class='autobr' /> dans ces moments-là , plus rien ne va comme ça devrait aller,<br class='autobr' /> ni comme on dit que ça devrait aller.<br class='autobr' /> ça ne va pas bien, <br class='autobr' /> vous n'allez pas bien,<br class='autobr' /> vous êtes devenu de pierre.<br class='autobr' /> être de pierre, ça ne va pas, pour un être de chair.<br class='autobr' /> un être de chair, ça bouge<br class='autobr' /> (à´ dans les limites des lois de la gravité !)<br class='autobr' /> un être de chair, ça vit<br class='autobr' /> (à´ dans les limites du bocal !)<br class='autobr' /> un être de chair ça ressent des choses du vécu ça analyse ça comprend</p> <p>et ça le dit aux autres,<br class='autobr' /> ce que ça comprend.<br class='autobr' /> mais, comprenez-vous ça ?, vous, vous êtes de pierre.<br class='autobr' /> une pierre c'est plein de gravité ça ne bouge pas ça ne comprend<br class='autobr' /> rien<br class='autobr' /> que du gravas<br class='autobr' /> autant dire rien.<br class='autobr' /> pas la peine de calculer, de chercher une pierre aux riens,<br class='autobr' /> pour vous ça ne va pas bien.<br class='autobr' /> qu'est-ce qu'on boirait bien ?<br class='autobr' /> (un petit rien, une goutte, juste une goutte pour diluer ce qui ne va pas bien.)</p> <p>24</p> <p>l'alcool, c'est une maladie ?<br class='autobr' /> à ce qu'on dit…<br class='autobr' /> (et qui vous l'a dit ?)</p> <p>25</p> <p>que l'alcool est une maladie, vous l'avez lu, ça ?<br class='autobr' /> oui, quelque part… <br class='autobr' /> en tout cas, on le dit.<br class='autobr' /> c'est du sérieux ?<br class='autobr' /> oui, mais j'ignore si on en guérit !<br class='autobr' /> vous, vous ne buvez pas, vous, je le vois bien !<br class='autobr' /> oh non oh non pas du tout ! juste un peu, après le travail, mes trois bières d'abbaye, mais ces trois bières-là , justement c'est comme un abbaye, quoi,<br class='autobr' /> ça calme !</p> <p>26</p> <p>écoutez…<br class='autobr' /> écoutez…<br class='autobr' /> après tout je ne suis jamais que votre gé-né-ra-li-ste…<br class='autobr' /> votre toubib de tous les jours…<br class='autobr' /> (mais moi ça tombe bien je bois tous les jours !)<br class='autobr' /> alors alors il y a toujours un moment comme ça…<br class='autobr' /> où je suis bien obligé d'abandonner…<br class='autobr' /> la partie…<br class='autobr' /> ce n'est pas que je laisse tomber…<br class='autobr' /> mais allez donc voir ce psychiatre que je vous ai recommandé…<br class='autobr' /> (si j'arrive jusque là …)<br class='autobr' /> il s'y connaît mieux que moi,<br class='autobr' /> vous verrez… enfin… il verra… vous voyez ?<br class='autobr' /> (oui mais quoi ?)<br class='autobr' /> il y a de fortes chances … il vous écoutera<br class='autobr' /> puis c'est debout qu'il se mettra,<br class='autobr' /> il tapera du poing sur la table… très fort… très très fort…<br class='autobr' /> avec son poing droit <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> il le fait toujours, c'est comme ça !-<br class='autobr' /> il vous dira :<br class='autobr' /> « monsieur, si vous continuez à boire<br class='autobr' /> vous allez vous retrouver dans une prison noire<br class='autobr' /> dont vous ne sortirez plus jamais alors s'il vous plaît apprenez à marcher droit<br class='autobr' /> bordel de merde !<br class='autobr' /> et je vous donnerai les médicaments qu'il faudra. »<br class='autobr' /> (mon médicament c'est l'alcool.)<br class='autobr' /> donc vous verrez… vous verrez…<br class='autobr' /> il vous fera très peur, il vous foutra la trouille de votre vie, il y arrivera,<br class='autobr' /> en se mettant debout devant vous.<br class='autobr' /> (mais moi je vis déjà couché !)<br class='autobr' /> et vous,<br class='autobr' /> vous,<br class='autobr' /> vous comprendrez !<br class='autobr' /> (mais moi je ne verrai rien, rien du tout, les alcoolos n'ont pas peur de boire, ça se saurait, mais alors de quoi ont-ils peur ? sinon ils ne boiraient pas, ça se saurait.)<br class='autobr' /> vous verrez, ce psychiatre est fort, il est vraiment très très fort.<br class='autobr' /> 27</p> <p>maman maman dommage que tu sois là comme ça<br class='autobr' /> comme une conne à plat<br class='autobr' /> enfin ils t'ont bien maquillée bien retapée on dirait que c'est toi,<br class='autobr' /> et tiens je te glisse<br class='autobr' /> une photo de ton petit fils<br class='autobr' /> oui celle avec toi.<br class='autobr' /> celle-là ,<br class='autobr' /> celle du baiser propice.<br class='autobr' /> bon tu n'es plus vraiment là <br class='autobr' /> (mais nous deux on est seuls, là , personne n'a voulu monter la garde recevoir les cartes de visite les fleurs ni les humeurs de ceux qui ont si peur quand est mort l'un des leurs, personne pas même ton mari mon papa.)<br class='autobr' /> maman maman dommage que tu ne m'entendes pas !<br class='autobr' /> tu étais infirmière tout le monde sait ça,<br class='autobr' /> et donc même si tu ne m'entends pas<br class='autobr' /> je tiens à te dire merci,<br class='autobr' /> à moins que tu m'entendes ? je voudrais que tu m'entendes !,<br class='autobr' /> merci d'avoir pris soin<br class='autobr' /> de moi<br class='autobr' /> si bien.<br class='autobr' /> dans ton sein j'ai fini par le croire qu'il y avait déjà de la bière.<br class='autobr' /> une bière, <br class='autobr' /> bien bonne et bien noire <br class='autobr' /> ça favorise<br class='autobr' /> la montée de lait.<br class='autobr' /> mais<br class='autobr' /> tu ne m'as pas abandonné là en si bonne voie.<br class='autobr' /> plus tard à table on buvait de la bière,<br class='autobr' /> qui s'appelait « bière de ménage » avec si peu de degrés mais pas mal<br class='autobr' /> de caractère<br class='autobr' /> au bout du compte,<br class='autobr' /> mais bon elle nous ménage.<br class='autobr' /> tu te souviens de la fois<br class='autobr' /> (oui je vois que tu t'en souviens je le vois)<br class='autobr' /> où encore dans ce qu'on nomme l'enfance j'avais bu<br class='autobr' /> en cachette <br class='autobr' /> (à ce mariage),<br class='autobr' /> j'étais pompette,<br class='autobr' /> toi dans une robe coquette<br class='autobr' /> et ton sourire qui signifiait tu es un peu jeune pour commencer,<br class='autobr' /> et au bout du compte ça te rend mignon d'être rond<br class='autobr' /> d'être complètement rond.<br class='autobr' /> (je t'apprends maintenant qu'un peu plus tard ce jour-là je n'en suis pas resté là , <br class='autobr' /> torché comme un vieux toit je suis parti m'allonger au beau milieu d'une route de béton,<br class='autobr' /> en contrebas,<br class='autobr' /> certain que j'étais<br class='autobr' /> que j'allais<br class='autobr' /> pouvoir arrêter<br class='autobr' /> les voitures qui s'avançaient avec danger si près de moi<br class='autobr' /> allongé sur le béton, et le goudron qui me collait le pantalon mais bon j'étais rond,<br class='autobr' /> ça va ça va ne t'inquiète pas, j'entendais encore les voix des oncles qui racontaient des blagues interdites aux enfants, ça va ça va je n'étais pas si rond que ça, j'entendais encore les voix des oncles qui dégueulaient la moitié de leur repas !)<br class='autobr' /> maman maman<br class='autobr' /> j'ai eu quinze ans<br class='autobr' /> ni p'tit ni grand,<br class='autobr' /> après la messe avec les copains je repassais déjà au bistrot du coin<br class='autobr' /> et dans l'après-midi tu m'épongeais le front d'une serviette humide,<br class='autobr' /> et tiens, tant que tu es là , ne t'en va pas,<br class='autobr' /> pas avant que je te reparle du médecin de famille<br class='autobr' /> accouru au chevet de papa<br class='autobr' /> pour toutes les maladies qu'il n'avait pas, toi tu finissais souvent <br class='autobr' /> par dire :<br class='autobr' /> docteur (tu disais toujours docteur aux docteurs),<br class='autobr' /> docteur je vous sers une petite goutte ?<br class='autobr' /> c'était comme ça en ce temps-là <br class='autobr' /> il n'y a pas de quoi fouetter un chat,<br class='autobr' /> d'ailleurs monsieur le vicaire<br class='autobr' /> aussi il aimait la bière,<br class='autobr' /> celle que papa ramenait de la campagne,<br class='autobr' /> attention !<br class='autobr' /> fermée avec un vrai bouchon,<br class='autobr' /> fermentée en bouteille au moins six mois,<br class='autobr' /> et pan ! la mousse beige la robe brune<br class='autobr' /> on s'en foutait plein l'urne !<br class='autobr' /> maman maman maintenant<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi, <br class='autobr' /> ne vois aucun rapport entre toutes ces choses-là ,<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi,<br class='autobr' /> moi je vais repasser à la station<br class='autobr' /> m'acheter du soda bourré de vodka,<br class='autobr' /> allez je te laisse dans ta bière,<br class='autobr' /> moi je ne suis même pas le clou de ton cercueil.<br class='autobr' /> du moins pas celui-là .</p> <p>28</p> <p>Ils sont en train de chercher le gène de l'alcoolisme,<br class='autobr' /> lui cependant ,pas con,<br class='autobr' /> lui les a déjà repérés.</p> <p>29</p> <p>madame<br class='autobr' /> jamais je n'aurais imaginé être capable d'érafler la tà´le de votre quatre-quatre <br class='autobr' /> à l'aveuglette<br class='autobr' /> quatre à quatre<br class='autobr' /> on ne fait pas d'omelette sans casser des canettes.</p> <p>30</p> <p>et maintenant.<br class='autobr' /> et ensuite ?<br class='autobr' /> et après…<br class='autobr' /> après tout…</p> <p>31</p> <p>la télé est allumée, couverte de la poussière des centres de cure, magnétisme de misère, cordes délitées, un peu d'astéroà¯de, beaucoup de cendres de beaucoup de cigarettes, beaucoup de couches de beaucoup de vies qui ont mal brùlé, et elle, elle tient sa conférence, avec sous les yeux juste en dessous de la peau pendue rayée, son volcan mal éteint, son passé mal étreint, incendie d'eau, ils ont beau lui donner une charrette de Valiumâ„¢ le soir.</p> <p>32</p> <p>peut-on se noyer dans une bouteille ? <br class='autobr' /> une seule, non sans doute, mais c'est un début.</p> <p>33</p> <p>nager, pourquoi ? <br class='autobr' /> se noyer, pour sùr.</p> <p>34</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la « masturbation » intellectuelle ?</p> <p>35</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la folie ?</p> <p>36</p> <p>comment oses-tu me dire que je suis taré ?</p> <p>37</p> <p>comment oses-tu me dire que je ne suis pas normal ?</p> <p>38</p> <p>on est hors du circuit mais pas en vacances.<br class='autobr' /> on n'est pas en vacances mais on rame.<br class='autobr' /> on n'est pas des touristes.<br class='autobr' /> on est nous aussi de la vie. de la vie on en est aussi.<br class='autobr' /> peut-être plus que vous tous réunis, nous, dans l'auditoire de la mort.</p> <p>39</p> <p>l'infirmier rame. <br class='autobr' /> dans le couloir ils ont installé un rameur. pour la forme. pour notre forme.<br class='autobr' /> mais seul l'infirmier rame à ses heures perdues.</p> <p>40<br class='autobr' /> putain la psychologue a de ces nichons ! <br class='autobr' /> et souriante.</p> <p>41</p> <p>l'assistante sociale se retrouve chaque jour que Bacchus fait devant des mecs qui ont du verre pilé à la place des couilles et face à des nanas qui ont un tesson de bouteille dans le vagin. ça fait mal ça fait mal. vers 17 heures elle rentre à la maison après avoir chopé son gosse à la garderie. <br class='autobr' /> jeune maman elle n'a pas encore de bouteille.<br class='autobr' /> mais elle ne rame pas trop.<br class='autobr' /> 42</p> <p>la douche est collective, la douche est commune, prendre une douche c'est commun. mais toi tu t'étais abandonné comme une vieille loque desséchée dans la salle d'attente étriquée d'un purgatoire interminable. l'alcolo ne se lave plus, il s'en fout de ses cheveux devenus trop longs, il s'en fout de ses ongles de pieds poussés trop fort, il s'en fout de ces petites merdes coincées sous les paupières, il ne s'en fout pas de son cerveau trop gros coincé sous son crâne.</p> <p>43</p> <p>il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout.<br class='autobr' /> non il ne s'en fout pas. <br class='autobr' /> Il n'est pas si fou.</p> <p>44</p> <p>voilà bien la course des humains : quelque chose plutà´t que rien.<br class='autobr' /> et celle des buveurs : rien plutà´t que quelque chose.</p> <p>45</p> <p>tu prendras bien quelque chose ?</p> <p>46</p> <p>qu'est-ce que vous prendrez ?</p> <p>47</p> <p>on ne m'y prendra plus.</p> <p>48</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre (mais qu'est-ce qu'une tête de ?)</p> <p>49</p> <p>une cravate alors ?</p> <p>50</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre. une tignasse de hippie un peu, dirait-on, un vieux groupe de rock, parfois en catogan, un vieux t-shirt vert usé, et des baskets d'ado. il me tape sur le bide, il me dit tu sais moi aussi j'ai fait une dépression. <br class='autobr' /> et son sourire de latino.</p> <p>51</p> <p>bonjour madame, que pensez-vous de votre psychiatre ?<br class='autobr' /> il est bien (sous tous les rapports.)<br class='autobr' /> ah ?<br class='autobr' /> oui, il porte une cravate chose, un pantalon machin (oh j'ai vu le même dans une galerie !), des souliers pointus cirés avec du cirage truc (on sent que son petit personnel est de qualité), son caleçon vous pensez je n'y pense pas, puis des lunettes car-ré-es à la mode, devant sa villa se trouve son cabriolet, d'ailleurs chaque week-end il emmène sa maîtresse à la mer, là ils se tiennent la main en amoureux.<br class='autobr' /> ils connaissent les meilleurs restos du coin.<br class='autobr' /> ils savent vivre.<br class='autobr' /> eux.</p> <p>52</p> <p>et il y a aussi ce cinéaste qui explique ceci : que les plus grands créateurs étaient tous alcooliques, <br class='autobr' /> sont tous alcooliques.<br class='autobr' /> et ils le seront ? (où les cinéastes vont-ils chercher leurs idées ? bulle à verre ?)<br class='autobr' /> 53</p> <p>mais non il est complètement con, ce psychiatre !<br class='autobr' /> deux ans que je le vois, et il n'a pas réussi à me faire arrêter de boire.</p> <p>54</p> <p>le mien, il a si je puis dire le bras long. <br class='autobr' /> à force.<br class='autobr' /> partout il transporte son très lourd DSM-IV-TR, le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, quatrième édition révisée. je me reconnais dans la rubrique Troubles Liés à Une Substance. enfin, précisons, si je carbure, au fond, c'est peut-être à cause d'un trouble lié à l'essence, plutà´t.<br class='autobr' /> un manuel agnostique qui n'apporte aucune réponse à qui que quoi dont où quoi que ce soit, et partout nulle part, à la fois. <br class='autobr' /> depuis ma naissance.</p> <p>55</p> <p>un trouble.<br class='autobr' /> et une camisole chimique.<br class='autobr' /> deux forces.</p> <p>56</p> <p>et à la une,<br class='autobr' /> et à la deux, <br class='autobr' /> et à la trois,<br class='autobr' /> DSM quatre.</p> <p>57</p> <p>fiston, il faut que je te le dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, si les accus à plat j'ai arrêté d'accumuler les culs de bouteilles vides dans un coin du garage et si j'ai arrêté d'écrabouiller les canettes de vodka-orange sous le siège de la voiture, ce n'est pas pour moi, pas tellement. l'autre jour j'avais été déposer au moins cinquante vidanges de rouge à la bulle, alors un passant m'a fait remarquer : vous devez boire beaucoup. vous avez une bonne descente. <br class='autobr' /> oui je devais.<br class='autobr' /> oui une bonne descente, en effet, l'enfer n'était plus si loin de moi. à portée de goulot. <br class='autobr' /> ou bien le paradis ?<br class='autobr' /> parce que fiston, il faut que je te dise, après trois Xanax-Retard ®, un Rémergon ©,<br class='autobr' /> et une bonne dizaine de Château-Lafuite®, les draps de mon lit finissaient par avoir l'odeur du linceul, et cette odeur-là n'était pas pour me déplaire. c'est au premier étage que je dormais dès le milieu de l'après-midi, et pourtant je planais vachement plus haut que le premier étage. j'évitais avec soin le grenier où tous nous stockons les souvenirs dont nous ne voulons plus.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, ce n'est pas pour moi.<br class='autobr' /> la mort est inodore, je te le dis.</p> <p>58</p> <p>maman cette nuit j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> je ne m'en suis rendu compte qu'au réveil.<br class='autobr' /> il y avait quelque chose.<br class='autobr' /> insidieusement.<br class='autobr' /> quelque chose d'insidieux qui puait. <br class='autobr' /> quelque chose de lancinant qui puait.<br class='autobr' /> et c'était de la merde.<br class='autobr' /> ma merde.<br class='autobr' /> ma merde, tu l'as bien connue autrefois, ma merde, non ?<br class='autobr' /> donc je voudrais te parler de ma merde, celle de cette nuit. <br class='autobr' /> hier soir, j'étais, comme on dit, rétamé. le cuir passé, martelé par un rétameur du quartier des tannages de peaux, tu sais, cette collection de livres que tu m'achetais quand j'étais morveux, pour me faire connaître le monde. celui-là montrait d'énormes cuves avec du cuir trempé, depuis j'ai visité ce genre d'endroit,<br class='autobr' /> ça pue,<br class='autobr' /> ça pue aussi un peu la merde.<br class='autobr' /> à la fin, au bout de sept bouteilles de pinard (à 8 euros 75 pièce, on n'a que le plaisir qu'on se donne), sept comme dans les meilleurs contes, à la fin j'ai cédé. putain dehors c'était l'hiver livide, dehors. pas que tout semblait être en train de geler, non : tout était gelé pour de vrai. je vais t'aider à comprendre mon objectif. comme tu le sais, j'ai une tête, et dans sa partie supérieure, un cerveau. à un certain endroit de mon cerveau naissent des idées, des idées tantà´t fixes, pas qu'elles soient gelées, non : elles me glacent, moi ; et des idées tantà´t mobiles, toujours en mouvement,<br class='autobr' /> perpétuelles,<br class='autobr' /> en pure perte.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien.<br class='autobr' /> elles ne m'avancent pas.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien d'autre qu'à être là à courir entre mes neurones et qu'à me faire chier.<br class='autobr' /> elles avancent masquées, et ça n'a rien d'un carnaval.<br class='autobr' /> je n'y comprends que dalle, elles sont de plomb, mais qu'est-ce qu'elles galopent !<br class='autobr' /> alors<br class='autobr' /> moi<br class='autobr' /> j'ai pensé que les étouffer dans du vin, leur noyer le cerveau, ça ne me ferait pas de tort.<br class='autobr' /> enfin, pas plus que ça.<br class='autobr' /> or tu vois,<br class='autobr' /> avant ça j'avais avalé plusieurs cachets de XXXXX (copyrighted, d'une seule traite), puis des pilules de YYYYYYYY (registered, c'est un fait), et tu vois, ces bonbons ont si bien déposé leurs marques, et je flottais à un point tel, loin de mes idées fixes, à un point tel que je ne me suis plus senti, ça, je t'ai déjà aidée à comprendre mon objectif. <br class='autobr' /> je ne me suis plus senti, et j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> ça puait, ça collait, c'était froid.<br class='autobr' /> tu m'as déjà connu, maman,<br class='autobr' /> un peu comme ça.</p> <p>59</p> <p>the fact is.</p> <p>60</p> <p>à l'hà´pital, aucun divan.<br class='autobr' /> faut pas qu'on s'affale comme avant.<br class='autobr' /> à l'hà´pital, aucun sofa.<br class='autobr' /> faut pas qu'on retombe aussi bas.</p> <p>61</p> <p>chèèèèrrrr public bonjouuuuuurrrrr ! connais-tu l'histoire de l'ascenseur ?<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> chèèèèèèrrrrr public la voi-ciiiiiii !!!!l<br class='autobr' /> de nos jours on ne compte plus les ascenseurs ! partout il y en a ! des grands et des petits ! des vieux qu'ont bien vécu, des jeunes qui vont nous en faire vivre ! <br class='autobr' /> (au 19ème siècle, déjà !)<br class='autobr' /> (d'ailleurs chérie on n'a jamais fait l'amour dans un ascenseur, ah ah !)<br class='autobr' /> et bien aujourd'hui, notre ascenseur se trouve dans un, je vous le donne en mille !, … un hà´-pi-tal ! très général, hein, l'hà´pital, très général, rien de particulier. l'aphone habituel, la flore intestinale, ah ah ! <br class='autobr' /> et là , dans un coin de l'ascenseur, une dame, la quarantaine la dame, quarante ans à tout casser. <br class='autobr' /> il fait beau… dehors, hein, pas à l'intérieur de l'hà´pital, d'ailleurs passer l'été à l'hà´pital, hein, on vous dit pas.<br class='autobr' /> bref.<br class='autobr' /> la dame, la quarantaine, donc, porte un short, disons une espèce de, disons sur l'étiquette au magasin ils avaient écrit ça : short. elle tripote et tripote et tripote les cordons qui pourraient, éventuellement, au cas où, lui tenir le short à la taille (voir : magasin, nom commun etc.) chèèèèèrrrr public, tu l'as compris : <br class='autobr' /> la dame, elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble parce qu'elle picole.<br class='autobr' /> elle picole parce qu'elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble, alors elle boit.<br class='autobr' /> au début, de l'intérieur, qu'elle tremblait.<br class='autobr' /> maintenant de tout partout.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> humblement,<br class='autobr' /> elle demande au monsieur qui lui fait face monsieur vous ne pourriez-pas s'il vous plaît nouer les cordons de mon short je n'y arrive pas j'ai un problème je tremble.</p> <p>62</p> <p>la dame, la quarantaine, c'était la première fois qu'elle osait venir en parler.<br class='autobr' /> en parler à qui ?<br class='autobr' /> en parler à l'hà´pital, tiens !</p> <p>63</p> <p>putain de main droite de putain de main de putain de main de merde tu restes pas en place, j'ai encore dù utiliser ma main gauche pour te garder en place ! tu as encore cafouillé sur le clavier<br class='autobr' /> du terminal<br class='autobr' /> automatisé<br class='autobr' /> de la banque. <br class='autobr' /> j'avais tapé 368, pas 2b9 !</p> <p>63</p> <p>… mais je ne vais pas te couper, j'ai encore besoin de toi pour tenir la canette !</p> <p>64</p> <p>non monsieur l'agent de police non je ne bois pas !<br class='autobr' /> je me torche !<br class='autobr' /> 65</p> <p>bien bien bien vous l'avez compris (monsieur), vous buviez pour vous anesthésier. pour, en quelque sorte, endormir votre…votre douleur-de-vivre.<br class='autobr' /> non, pas en quelque sorte. souvent du bon vin.</p> <p>66</p> <p>ma douleur ce n'est pas que je m'y vautre, c'est que…</p> <p>67</p> <p>du coup,<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> (bordel c'est ça qu'ils apprennent à l'école, les psys ?)<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire,<br class='autobr' /> sèkeu… vivre, est-ce une telle douleur ?<br class='autobr' /> vivre…<br class='autobr' /> (pour moi, oui.) (bordel.)</p> <p>68</p> <p>alors monsieur comprenons-nous bien, ici personne ne vous demandera d'arrêter de boire, absolument personne, hum !, si vous buvez et bien c'est que vous buvez, et c'est un fait incontournable, et si vous avez commencé à boire c'est que bon vous aviez besoin de commencer à boire, alors oublions que vous buvez, cela n'a finalement aucun intérêt.<br class='autobr' /> on va pas se fixer là -dessus.<br class='autobr' /> et si un jour vous arrêtez de boire, supposons que vous arrêtiez de boire pour… pour… votre petit chien, moi en tant que toubib j'en serais fort heureux ! <br class='autobr' /> (mais il n'a pas de chien, ce buveur !)</p> <p>69</p> <p>buveur invétéré, qu'on dit !<br class='autobr' /> invertébré ?</p> <p>70</p> <p>décervelé ?</p> <p>71</p> <p>ah non ça c'est le but !</p> <p>72</p> <p>you and me at the edge of time.</p> <p>73</p> <p>tu vois, moi non. moi je ne supporte pas que vous disiez à tout bout de champ : j'ai rechuté j'ai rechuté !<br class='autobr' /> d'où ?</p> <p>74</p> <p>oh j'en ai entendu d'autres, monsieur (le psychiatre) ! <br class='autobr' /> que j'étais en pleine déchéance. mais qui m'avait déchu ? pas moi, rien d'autre que le regard des autres…</p> <p>75</p> <p>the fire-sea licking my feet.</p> <p>76</p> <p>on rigole, on rigole.<br class='autobr' /> mais la douleur, ça existe.<br class='autobr' /> une douleur, comme ça, sans nom, qui se balade en vous sans définition possible, qui prend toute la place, qui fait ses petits en vous. une douleur qui ne va pas si mal et qui ne vous va pas bien.</p> <p>77</p> <p>ta douleur ? ta douleur ? allons bon ! c'est facile de parler de douleur, de chercher des excuses alors qu'en fait tu manques de vo-lon-té !</p> <p>78</p> <p>quelle volonté ? de quoi parle-t-on (à la fin ?)</p> <p>79</p> <p>il faudrait d'abord, pour s'entendre, savoir de QUOI on parle, bordel à queue ! après tout, jésus déjà disait : père, pardonne-leur, ils ne savent pas de quoi ils parlent ! c'est vrai : <br class='autobr' /> les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), bon, on leur a appris à parler quand ils étaient petits. ce faisant, ils s'imaginent, les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), ils s'imaginent connaître le vocabulaire ! de fait quand ils vont au supermarché, ils précisent qu'ils ont l'intention de régler par carte bancaire, la caissière les comprend, les gens, nos proches, nos amis, la famille.<br class='autobr' /> la famille. ah, la famille !</p> <p>80</p> <p>tu dis simplement : voilà , j'en ai marre de la vie.<br class='autobr' /> et c'est un scandale.</p> <p>81</p> <p>tu dis : voilà j'ai le cancer.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt auprès de toi avec des bouts de tuyaux qui leur restaient dans la remise.</p> <p>82</p> <p>tu dis : voilà , ça fait trop longtemps que je souffre.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt avec des vitamines.<br class='autobr' /> et tout le monde planque les vitamines.</p> <p>83</p> <p>après tout, il n'a que le cancer…</p> <p>84</p> <p>je vais vous expliquer, moi, je vais vous l'expliquer pourquoi mon frère boit. <br class='autobr' /> je le sais, moi.<br class='autobr' /> c'est parce qu'il est faible.<br class='autobr' /> écoutez, allez, il avait tout pour réussir !<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> mais il est si faible !<br class='autobr' /> (est-ce que je bois, moi ?)</p> <p>85</p> <p>ces deux-là sont tombés amoureux. à l'hà´pital.<br class='autobr' /> d'accord, ils n'allaient pas bien.<br class='autobr' /> ni l'un.<br class='autobr' /> ni l'autre.<br class='autobr' /> lui bon c'est depuis la mort de sa femme (dans un accident de voiture, il conduisait, elle était enceinte de leur première fille et le foetus, on l'a retrouvé sur le pare-brise.)<br class='autobr' /> on peut comprendre, n'est-ce pas ? <br class='autobr' /> on peut comprendre.<br class='autobr' /> elle ? je sais pas. ça tournait pas rond non plus.<br class='autobr' /> ils font partie de ces personnes qui croient échapper enfin à l'alcool<br class='autobr' /> en tombant amoureux.<br class='autobr' /> à l'hà´pital.<br class='autobr' /> (de quoi tu te mêles ?)</p> <p>86</p> <p>à part ça, jésus a dit : aime ton prochain…</p> <p>87</p> <p>et jésus dit : aime ton prochain verre !</p> <p>88</p> <p>fiston, il faut que je te dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, c'est pour toi.<br class='autobr' /> je te le dis, de toi à moi.<br class='autobr' /> il fallait bien que je te le dise.<br class='autobr' /> je suppose qu'il est mieux de te le dire plutà´t que de ne pas te le dire.<br class='autobr' /> je pense vraiment qu'il n'est pas utile de tout dire à son fiston, sauf ce qu'il est mieux de dire plutà´t que de ne pas le dire.<br class='autobr' /> maintenant, ceci étant dit, je peux romancer l'affaire, si tu le souhaites.<br class='autobr' /> c'était un gris dimanche gris d'avril qui ne se découvrait pas d'un fil. comme à mon habitude, j'avais bu dès le réveil, j'étais déjà passé à la station, le dimanche c'est pas lui c'est sa cousine qui tient la boutique. <br class='autobr' /> comme à son habitude elle m'a salué avec gentillesse <br class='autobr' /> sans me poser <br class='autobr' /> la moindre question <br class='autobr' /> du genre : <br class='autobr' /> non mais pourquoi venez-vous acheter cinq bouteilles de rouge chaque dimanche à 7 heures du mat ? <br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> pas par compassion, sans doute.<br class='autobr' /> je faisais tourner la boutique, au fond.<br class='autobr' /> je débouche la première bouteille.<br class='autobr' /> je tremble.<br class='autobr' /> je flippe.<br class='autobr' /> mes mains lâchent la bouteille.<br class='autobr' /> elle va s'exploser la tronche sur les disques de mon chanteur favori.<br class='autobr' /> autour de moi. partout. du verre. du vin.<br class='autobr' /> ça pue. ça pue le vin. ma gueule pue pareil quand j'ai bu. et comme je bois toujours…<br class='autobr' /> tu sais, le vin, ça pue. ah la binette extatique du type à la télé ! il agite avec aaaamour son ballon, ah ça sent la noisette, le fruit rouge avec un arrière-goùt de mort ! arrêtez vos conneries, le vin ça pue ! <br class='autobr' /> j'ouvre une deuxième bouteille. je n'ai pas soif. je n'aime plus le vin. je n'aime plus boire du vin. je bois du vin parce que j'ai la tremblote. j'ai la tremblote. <br class='autobr' /> on appelle ça : le manque. joli mot.<br class='autobr' /> j'abrège la seconde bouteille je l'ai vomie.<br class='autobr' /> et au milieu des bulles de bile qui pétaient sur l'inox de l'évier<br class='autobr' /> de la cuisine,<br class='autobr' /> j'ai vu ton visage,<br class='autobr' /> fiston.<br class='autobr' /> joli mot.</p> <p>89</p> <p>et ce poteau de signalisation qui le regarde, <br class='autobr' /> lui,<br class='autobr' /> qui le nargue.<br class='autobr' /> ta gueule !</p> <p>90</p> <p>cette amie avait un ami.<br class='autobr' /> son ami buvait (beaucoup, mais demeurait toujours poli.)<br class='autobr' /> une fois assis à , par exemple, la terrasse de ce bistrot en face de la gare, <br class='autobr' /> il commandait un « demi de rouge. »<br class='autobr' /> la suite ? vous voulez la suite ?</p> <p>91</p> <p>tous les matins avant même de manger, il vomit.<br class='autobr' /> il ne vomit rien.<br class='autobr' /> juste un peu de cette bile verte<br class='autobr' /> fabriquée à l'intérieur de son corps blanc,<br class='autobr' /> ici, sur la planète bleue.</p> <p>92</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>93</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>94</p> <p>tous les matins…</p> <p>95</p> <p>les matins ? il les vomit tous.</p> <p>96</p> <p>un premier demi de rouge.</p> <p>97</p> <p>merde à la fin on vient ici pour se soigner, on sait très bien qu'on doit arrêter de boire, et puis voilà à la télé en plein salon, à une heure de grande écoute, des pubs pour de l'alcool vraiment c'est de nous qu'on se moque on nous provoque.</p> <p>98</p> <p>je ne sais pas, je me sens divisé.<br class='autobr' /> à quel sujet ?<br class='autobr' /> non, tu ne comprends pas. je suis divisé : moi.<br class='autobr' /> oui mais à propos de quoi ? de toi ?<br class='autobr' /> non tu ne comprends pas. je me sens divisé. une partie de moi dis fais ça, une partie de moi dit fais ci…<br class='autobr' /> ah oui ah oui ah oui je te comprends mieux, c'est le fameux truc de la division entre la raison et les émotions. non ?</p> <p>99</p> <p>aujourd'hui matin je n'ai même pas envie de me laver. non je ne vais pas me laver. j'ai des traces de merde sèche au fond du caleçon, trois jours de merde je crois.</p> <p>100</p> <p>putain l'odeur entre mes orteils ! <br class='autobr' /> 101</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, je m'épilais les poils de bite, j'évitais la brousse.<br class='autobr' /> maintenant, après, maintenant, après, je porte l'odeur de sperme pourri de ma branlette d'hier soir.</p> <p>102</p> <p>je me suis branlé hier soir ? j'ai oublié.</p> <p>103</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, j'éliminais ces morceaux de peau durcie sur la plante de mes pieds.</p> <p>104</p> <p>il va travailler. <br class='autobr' /> un détour par la station. <br class='autobr' /> il achète deux flacons de ce rouge à la con format 50 cl, y a pas de bouchon donc pas de problème à l'ouverture du goulot, en allant travailler, après un détour par la station.</p> <p>105</p> <p>monsieur c'était votre jour d'essai et vous sentiez l'alcool.<br class='autobr' /> je sentais l'alcool ?<br class='autobr' /> je ne l'ai pas remarqué moi-même, mais ma secrétaire avait des doutes, elle est venue m'en parler.<br class='autobr' /> elle avait des doutes sur quoi ? sur le fait que je boive, ou sur le fait que je ne boive pas ?</p> <p>106</p> <p>une bouche de merde, une clef de merde dans ma bouche.</p> <p>107</p> <p>c'était jour de stage, aujourd'hui. le troisième de la semaine de stage, aujourd'hui. <br class='autobr' /> au volant sur l'autoroute, elle a bu six canettes de gin-cola, aujourd'hui. <br class='autobr' /> à l'école, les toilettes étaient fermées, aujourd'hui.<br class='autobr' /> elle est ressortie en rue, mais elle n'a pas trouvé le moindre bistrot, aujourd'hui.<br class='autobr' /> c'était pourtant stage, aujourd'hui.<br class='autobr' /> en revenant vers l'école, elle a pissé sur elle. aujourd'hui, son pantalon était trempé. <br class='autobr' /> trop tard.<br class='autobr' /> alors, avant de se présenter à son troisième jour de stage (c'était aujourd'hui, quand même !), elle est retournée dans sa bagnole, elle a mis le chauffage à fond sur chaud, elle a espéré que son froc sèche vite, vite, vite.<br class='autobr' /> vite.<br class='autobr' /> elle a espéré que personne ne se doute de rien, aujourd'hui.<br class='autobr' /> quand le maître de stage lui a dit votre leçon était bien donnée bravo mais excusez-moi si je vous importune c'est délicat avez-vous hum hum comment ? un problème avec votre séchoir.<br class='autobr' /> (pourquoi ? je la flaire la pisse ? c'est ça ?)</p> <p>108</p> <p>c'est depuis quand que tu aimes le foot, fiston ?<br class='autobr' /> j'avais pas remarqué.</p> <p>109</p> <p>traîne pas en rue.<br class='autobr' /> il fait froid.</p> <p>110</p> <p>fiston.</p> <p>111</p> <p>fiston.</p> <p>112</p> <p>j'arrêterai de picoler, et je passerai des heures à caresser mes chats.<br class='autobr' /> quand j'arrêterai.</p> <p>113</p> <p>elle m'embrassait. je veux dire elle me mettait la langue. elle touchait mes cheveux. elle touchait mes nichons. elle suçait ma bite. elle me mettait un doigt dans le cul. elle hurlait j'aime ta bite. une fois elle m'a mis un concombre dans le cul. c'était froid, putain !<br class='autobr' /> elle aurait pu aussi me sucer les orteils !<br class='autobr' /> mais on s'est tapés sur la gueule.</p> <p>114</p> <p>tu comprends tu comprends tu comprends ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> tu comprends ? six mois que je ne bois plus !<br class='autobr' /> vraiment ?<br class='autobr' /> six mois que je ne bois plus ! tu comprends ? (mais voilà ce week-end y a la ducasse au village et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront.)<br class='autobr' /> nnnnoooonnnn…</p> <p>115</p> <p>mesdames et messieurs, d'emblée je vais commencer mon exposé <br class='autobr' /> par une provocation. <br class='autobr' /> tion.<br class='autobr' /> vous avez tous, je le suppose, entendu parler du bioéthanol, ce carburant qui serait censé éradiquer le problème de la consommation de pétrole<br class='autobr' /> par les humains<br class='autobr' /> à la surface de la terre ?<br class='autobr' /> terre.<br class='autobr' /> j'oserai, mesdames et messieurs, une comparaison,<br class='autobr' /> son, <br class='autobr' /> avec l'éthanol consommé comme carburant par les alcooliques pour éradiquer le problème de la consommation existentielle,<br class='autobr' /> tielle, <br class='autobr' /> des dits alcooliques<br class='autobr' /> à la surface<br class='autobr' /> de leur âme.<br class='autobr' /> (n'est-ce pas ?)<br class='autobr' /> (pas)</p> <p>116</p> <p>n'est-ce pas ?</p> <p>117</p> <p>allez ! à ta santé ! (mentale.)</p> <p>118</p> <p>tale.</p> <p>119</p> <p>neuf.</p> <p>120</p> <p>en matière d'alcool, poser la réponse c'est y répondre.</p> <p>121</p> <p>on était là , on était encore là , et encore ! on était las.<br class='autobr' /> dans un groupe. de parole.<br class='autobr' /> tout à coup sans prévenir, le psychiatre (qui se démet soudain de sa confortable position socratique genre je ne dis rien mais je n'en pense pas moins je ne dis rien c'est à vous de parler qu'est-ce qui va surgir here and now ?), le psychiatre lance comme ça :<br class='autobr' /> et si on parlait des bienfaits de l'alcool ? des bénéfices que vous en tirez ?</p> <p>122</p> <p>alors marc il a lancé comme ça : des bénéfices des bénéfices ? mais on est fauchés, nous autres !</p> <p>123</p> <p>maà¯eutique ta mère !</p> <p>124</p> <p>marc est très drà´le. parfois. quand il n'a pas bu.</p> <p>125</p> <p>madame, moi je vous rendrais bien volontiers votre fils ! bien volontiers ! je n'ai pas pour vocation de hum… « retenir » les gens ! seulement vous le saviez il est hum euh schizotypique il se protège de la euh « vie â…” » en se coupant en deux, enfin je veux dire mais non après tout c'est vrai qu'il y met du sien à se couper en morceaux,<br class='autobr' /> et donc pour y venir,<br class='autobr' /> lors de notre dernière séance il est tombé en deux, par terre, littéralement en deux, un lui, un autre lui.<br class='autobr' /> moi je peux vous expliquer pourquoi à partir d'aujourd'hui vous allez devoir payer deux chambres,<br class='autobr' /> et le pire,<br class='autobr' /> et le pire là -dedans c'est qu'au fond c'est à cause de vous<br class='autobr' /> que <br class='autobr' /> tout<br class='autobr' /> a commencé â„¢.<br class='autobr' /> </p> <p>126</p> <p>alcool : <br class='autobr' /> info ou intox ?</p> <p>127</p> <p>jésus décida ce jour là <br class='autobr' /> de multiplier les personnes pétrifiées de douleur.<br class='autobr' /> la pétrification.</p> <p>128</p> <p>la pétrification vient <br class='autobr' /> aussi en ne mangeant pas.</p> <p>129<br class='autobr' /> mais madame mais madame comment voulez-vous que je vous explique les dessous de l'affaire ? comment ? je ne suis pas DANS lui. j'imagine ce qu'il ressent. j'en ai une idée. une toute petite. <br class='autobr' /> si petite.<br class='autobr' /> vous en avez une si petite ?</p> <p>130</p> <p>d'idée ?</p> <p>131</p> <p>la douleur, le doux leurre<br class='autobr' /> (oh arrêtez vos jeux de mots à la con, les gars !)</p> <p>132</p> <p>les deux lui c'est lui quand même ? mais qui boit ? lui ou l'autre lui ?</p> <p>133</p> <p>quand elle avait poussé la porte de l'hà´pital, elle avait d'abord vu le sourire sympa d'une infirmière qui lui avait balancé : oh la la mademoiselle n'a pas l'air faite pour le bonheur !</p> <p>134</p> <p>je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais.</p> <p>135</p> <p>mon cher père, on peut toujours en causer on peut toujours. de ma douleur.<br class='autobr' /> cependant,<br class='autobr' /> dès que je vais t'annoncer que ma douleur commence avec ta tronche de merde, ça va mal tourner.</p> <p>136</p> <p>papa je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu m'as volé maman !<br class='autobr' /> maman je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu allaitais papa !</p> <p>137</p> <p>en couverture de ce magazine de sciences tousskiliadplusérieu, ils titrent :<br class='autobr' /> quand l'esprit dérape.<br class='autobr' /> petit a :<br class='autobr' /> l'esprit fonctionne ou ne fonctionne pas, il ne marche pas dans tous les cas, donc il ne se casse pas la gueule.<br class='autobr' /> c'est nous qu'on se casse la gueule !</p> <p>138</p> <p>bien-sùr que c'est la faute de la société !<br class='autobr' /> on ne va pas s'étendre là -dessus<br class='autobr' /> (quand même, quand bien même ♭♩♪♫ )</p> <p>139</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> j'ai acheté un microscope une lunette d'astronome et je me scrute. à la longue j'ai cessé de bouger pour ne pas voir trop de choses trop de détails trop d'étoiles mortes trop de minerai appauvri. en moi.<br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> les autres aussi se sont procuré le même équipement. ils me scrutent à leur tour, depuis si longtemps. ça me fait mal. <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ? <br class='autobr' /> je me fais tout petit, petit, petit.<br class='autobr' /> (mais il faut bien que je continue à aller pisser et chier. on n'en sort pas grandi.)</p> <p>140</p> <p>en couverture de ce magazine, ils titrent la psychanalyse peut-elle soigner ?<br class='autobr' /> ils veulent rire ?</p> <p>141</p> <p>ah bon madame vous avez une formation psychanalytique ? manifestement vous ne connaissez pas le préfixe « dé » !</p> <p>142</p> <p>madame, s'y connaître en psychanalyse ou ne s'y connaître en rien, c'est du pareil au même !<br class='autobr' /> voyons voyons la psychanalyse ne cherche pas la guérison !<br class='autobr' /> c'est bien là son symtpà´me !</p> <p>143</p> <p>et la thérapie ? vous y croyez à la thérapie ?<br class='autobr' /> si vous me le dites !</p> <p>144</p> <p>vous y croyez (au moins) ?<br class='autobr' /> +</p> <p>145</p> <p>polize௠drà¤nkt.</p> <p>146</p> <p>morgen wieleicht.</p> <p>147</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> me voilà installé dans « ma » chambre. <br class='autobr' /> un lit, un lit mais pas vraiment d'hà´pital, quelque chose d'un peu plus cosy. on peut régler la tête, pas mal, j'ai déjà remarqué qu'en dormant relevé les cauchemars passent directement du cerveau (ou du siège des émotions ! ah ah !) au trou du cul d'accord ça fait mal en passant mais ça passe plus vite. une armoire qui ferme à clef, clef de merde dans ma bouche, une bouche de merde.</p> <p>148</p> <p>pour avoir quelque espoir de changer quoi que ce soit de sa propre vie, il faut la fracasser.</p> <p>149</p> <p>si on se contentait de fracasser les vidanges ?</p> <p>150</p> <p>il faut il faut il faut, il faut ceci, il faut cela. et pourtant, cette incantation-là , putain, elle est vraie, pour une fois.</p> <p>151</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> une armoire équipée d'une minuscule serrure, le premier venu la crochète, mais le premier venu n'est pas toujours le dernier arrivé.</p> <p>152</p> <p>quand on a bu, on se sent plus fort on conduit mieux on rigole plus on se fait des copains ça donne du courage l'alcool conserve la preuve mon grand-père est mort à 97 ans ça donne du goùt aux pâtisseries et du piment à la vie on fait mieux l'amour après <br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins<br class='autobr' /> on a <br class='autobr' /> a <br class='autobr' /> on.<br class='autobr' /> (laquelle de ces propositions vous ressemble le plus ?)</p> <p>153</p> <p>la gentille demoiselle songe quelques minutes encore au pourtant chouette boulot qu'elle a dù laisser derrière elle<br class='autobr' /> pour un mois<br class='autobr' /> pour un an<br class='autobr' /> (le reste de sa vie ?)<br class='autobr' /> (elle travaillait dans un magasin de vêtements pour enfants.)<br class='autobr' /> elle plonge le regard dans la photocopie qu'un patient lui a laissée sur la tablette du lit (d'hà´pital.) <br class='autobr' /> alors bien vrai ? l'alcool s'attaque à toutes les fonctions de l'organisme ? <br class='autobr' /> bien vrai ? <br class='autobr' /> l'alcool détruit les neurones, les liaisons entre les neurones, l'alcool s'attaque au foie, à la vésicule, troue l'estomac, peut rendre aveugle, ronge la gaine des nerfs, déchausse les dents avant d'entrer dans l'oesophage,<br class='autobr' /> et c'est ainsi qu'ils vécurent et eurent beaucoup de maladies,<br class='autobr' /> des grandes et des moins grandes.</p> <p>154</p> <p>maître corbeau, sur un arbre bourré, tenait en son bec une vidange…</p> <p>155</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le buveur il en a marre de lui-même au point de ne plus prendre soin de lui-même. <br class='autobr' /> aucun.<br class='autobr' /> tu vois ? <br class='autobr' /> mais merde à la fin, je me souviens avoir changé tes langes peints à la diarrhée, coupé les ongles de tes petits petons, décrassé tes yeux divins,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot.<br class='autobr' /> mais merde à la fin pourquoi je me lave plus la raie du cul ?</p> <p>156</p> <p>si l'alcool conserve ?<br class='autobr' /> ça dépend.<br class='autobr' /> tu ouvres un bocal de prunes, c'est un délice.<br class='autobr' /> tu ouvres le bocal d'un alcoolique, ça dégage !</p> <p>157</p> <p>fiston, bien-entendu que derrière tout ça j'ai un problème.</p> <p>158</p> <p>l'alcool fait perdre la mémoire ? attends, ça m'intéresse, moi, ce truc…<br class='autobr' /> faut faire quoi ? le boire ?</p> <p>159</p> <p>suis-je alcoolique ?<br class='autobr' /> suis-je vraiment alcoolique ?<br class='autobr' /> ne suis-je que alcoolique ?<br class='autobr' /> je me cache quelque chose.<br class='autobr' /> mais toi ?</p> <p>160</p> <p>c'est pas possib' de boire autant !<br class='autobr' /> (il est dingue, il détruit tout autour de lui, tout le monde le fuit.)</p> <p>161</p> <p>ah ? mais c'est le but… j'ai envie d'en finir avec tout avant que tout ne finisse de toute façon.</p> <p>162<br class='autobr' /> je te jure, c'est un groupe de malades !<br class='autobr' /> tu as vu ces fans de foot ? ils sont arrangés !<br class='autobr' /> ce film, c'est la folie !<br class='autobr' /> quel truc de débiles !<br class='autobr' /> (arrêtez, quand vous serez vraiment fous, vous comprendrez…)<br class='autobr' /> arrêtez !</p> <p>163</p> <p>mais allez va ! depuis que je ne suce plus, j'ai réalisé que dans les magasins, et bien !, il mettent le rayon alcool juste à l'entrée quand tu rentres à l'entrée quand tu rentres à l'entrée…</p> <p>164</p> <p>fiston, j'entends le vent. énormément de vent. l'hà´pital psychiatrique est construit sur une hauteur, au-dessus de la ville. avant y avait le gibet, ici. on pendait les condamnés à l'écart de la bienséance, du commerce et du culte. puis quand s'est agi de caser les maboules quelque part, si possible loin du regard des bons bourgeois, les zautorités ont choisi le même lieu, tiens ! <br class='autobr' /> la folie dérange bla bla bla je ne vais pas te casser les pieds avec ça…</p> <p>165</p> <p>bla bla bla…</p> <p>166</p> <p>on lui a expliqué ceci :<br class='autobr' /> quand tu auras arrêté de boire (enfin… pas de l'eau hein ah ah ah !), tu verras des alcoolos partout. le mec qui boit, dans la rue, tu le sentiras à 10 kilomètres à la ronde ! la nana du bureau de poste aux yeux jaunes et transparents ! le garagiste à la langue épaissie qui n'a plus que trois doigts à chaque main !<br class='autobr' /> on les repère, on les repère !<br class='autobr' /> (précisons, ils sont par-tout !)</p> <p>167</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> fig.1 (voir plus haut)</p> <p>168</p> <p>il était une fois<br class='autobr' /> un tailleur de pierre<br class='autobr' /> qui chaque jour<br class='autobr' /> taillait la pierre<br class='autobr' /> dans la carrière<br class='autobr' /> de pierre.<br class='autobr' /> un jour qu'il avait introduit le burin vers l'arrière<br class='autobr' /> d'une filière<br class='autobr' /> de pierre<br class='autobr' /> lui parla une grosse pierre :<br class='autobr' /> délivre-moi, délivre-moi, petit tailleur de grosses pierres !<br class='autobr' /> je suis une âme prisonnière<br class='autobr' /> de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> plus loin qu'hier,<br class='autobr' /> plus loin qu'avant-hier,<br class='autobr' /> une brave fermière<br class='autobr' /> m'a enfermé à l'intérieur de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> mais pourquoi ? demanda le tailleur de pierre ?<br class='autobr' /> elle lui répondit, la pierre :<br class='autobr' /> elle en avait plein le cul de moi, je la faisais chier, et comme son mari s'en battait la queue avec une pelle à tarte,<br class='autobr' /> elle m'a taillé cette vilaine croupière !<br class='autobr' /> putain merde connasse !</p> <p>169</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> non, poussière d'ange aussi.<br class='autobr' /> ailes damnées.<br class='autobr' /> envol condamné.<br class='autobr' /> pierre aux pieds.<br class='autobr' /> icarrément.<br class='autobr' /> 170</p> <p>quand il était tout petit déjà :<br class='autobr' /> il perdait ses lattes, il s'emmêlait les pinceaux, il perdait parfois la boule, on ne le comprenait pas, il changeait d'humeur, jean-qui-jean-qui-pleure, il n'allait jamais jusqu'au bout, il n'achevait rien, <br class='autobr' /> bref,<br class='autobr' /> il était déjà une sorte de gamin pourfendu qui n'existait pas vraiment et qui vivait perché.<br class='autobr' /> (oui, loin de vous très loin.)</p> <p>171</p> <p>articule !</p> <p>172</p> <p>achève ce que tu as commencé !</p> <p>173</p> <p>mesdames, messieurs, l'équipe est absolument d'accord que vous nourrissiez les chats sauvages qui vivent dans le parc de l'hà´pital !</p> <p>174</p> <p>tu n'as que six ans et tu te poses trop de questions !</p> <p>175</p> <p>ras-le-bol !<br class='autobr' /> ils font leur café, d'accord (ils ont le droit !), tout le monde n'aime pas le café, mais la question n'est pas là . la question étant, madame l'infirmière, qu'ils laissent traîner leurs tasses, leurs mégots, et le soir ils ont encore le culot de réclamer leur programme télé favori, toujours des feuilletons de mes couilles !, les mêmes conneries amerloques, les pieux de l'amour !, en plus je sais pas si vous savez mais moi je le sais : dans les séries ils picolent, ils se servent un whisky pour un yes pour un no, alors je vous dis pas, non c'est pas ça, je comprends ce que vous dites, je dois aller leur parler à EUX ? c'est ça ? non mais on est dans un hà´pital ici ou quoi ? l'équipe elle sert à quoi ? je paye mon séjour, moi !<br class='autobr' /> (oui, la mutuelle, plutà´t, de fait…)</p> <p>176</p> <p>il ronfle, quoi ! toute la nuit ! je fais quoi ?</p> <p>177</p> <p>on assiste chez le sujet à une lutte pour préserver le sentiment de sa réalité.<br class='autobr' /> (n'importe quoi ! il se noie et se décape dans le pinard !)</p> <p>178</p> <p>moi intérieur  faux moi sans vie</p> <p>179</p> <p>perception irréelle  action insignifiante</p> <p>180</p> <p>réalité ✖ persécution  pétrification<br class='autobr' /> ( tu comprends mieux, fiston ?)</p> <p>181</p> <p>psy ï ¸ chiatre</p> <p>182</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> pas loin se trouve la morgue, <br class='autobr' /> comme pour rappeler que la vie on en meurt à en crever.<br class='autobr' /> (la porte bat au vent, ça fait un peu western glauque !)</p> <p>183</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le parc est grand, le pavillon des grands sérieux jouxte le mien, on peut rejoindre le pavillon des quand-c'est-eux à pied…</p> <p>184</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> on soigne toutes les pathologies des pas trop logiques, dans le coin…</p> <p>185</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> je n'irai pas jusqu'à dire que je les aime d'amour, non. quand tu viendras me saluer, bientà´t, on se baladera dans le parc, et alors tu les verras. <br class='autobr' /> ils me fendent, les « grands malades »â€¦<br class='autobr' /> celui-là fait un pas, stoppe le mouvement, reste là , comme une stèle, justement. derrière ses grosses lunettes, ses yeux s'allument de joie, il se met à sourire, à rire, il cause avec un autre, invisible, qui fait du surplace à ses cà´tés, et il porte de beaux favoris, au fait.<br class='autobr' /> celle-là avance, un lourd sac à la main, elle scrute le ciel toutes les dix secondes, j'ai regardé aussi, je n'ai rien vu, mais elle si : je la crois.<br class='autobr' /> celui-là s'esclaffe qu'aujourd'hui on va manger des calamars ! des calamars ! des calamars ! (fiston, j'ai vérifié, on bouffe du poulet !)<br class='autobr' /> tu feras connaissance avec « le chien », fiston : lui, il se carapate comme un militaire une-deux-une-deux, et de temps en temps il se prend à aboyer : roaoh roah !, peut-être après les chats sauvages, sans doute après des êtres qui lui font du mal et refusent absolument absolument absolument de lui foutre la paix.<br class='autobr' /> parfois on cite son prénom :<br class='autobr' /> marcel se prend pour un chanteur de variétoche,<br class='autobr' /> fernand le muet me montre les cahiers qu'il remplit d'une écriture indéchiffrable sauf de lui seul, il me fait piger que ce sont ses « devoirs. »<br class='autobr' /> simon chasse des mouches imaginaires avant de franchir le seuil des portes.<br class='autobr' /> ce n'est pas que je les aime d'amour, non. <br class='autobr' /> maintenant j'en fais partie,</p> <p>186</p> <p>bienvenue dans l'unité d'alcoologie !<br class='autobr' /> (ici, c'est moins grave !)</p> <p>187</p> <p>encore un gamin, débile léger, probable, en pleine discussion avec l'animatrice :<br class='autobr' /> • ils me font peur !<br class='autobr' /> • oh tu sais… devant chez moi un couple passe tous les jours à 17 heures promener leur chien… eux me font vraiment peur !</p> <p>188</p> <p>vraiment.</p> <p>189</p> <p>très peur.</p> <p>190</p> <p>je l'ai lu dans le journal :<br class='autobr' /> un jour un mec est arrivé dans un auditoire de médecins avec des échelles de différentes grandeurs. la vlà qui explique : il y a des échelles dans la douleur ainsi comparons un cancéreux à qui on a cousu le trou de balle et attaché une poche au ventre et comparons-le donc à un petit alcoolique de rien du tout qui manque totalement de courage…<br class='autobr' /> et bien ?<br class='autobr' /> et bien les étudiants ont saisi la plus grande échelle et ils ont pendu ce connard au plafond !</p> <p>191</p> <p>bon, je retourne à mon pavillon, celui des grands cireux au yeux vitreux…</p> <p>192</p> <p>y-a-t-il moyen de s'en sortir ? (parfois.)</p> <p>193</p> <p>parfois.</p> <p>194</p> <p>oh ça faisait longtemps qu'on ne me regardait plus comme avant !<br class='autobr' /> cool ! on te regardait toi (au moins) !</p> <p>195</p> <p>bonjour monsieur l'agent de quartier je viens pour la convocation celle de mon changement de domicile.<br class='autobr' /> ah ouais mais vous n'étiez jamais chez vous ! on peut être certain que vous habitez bien où vous le dites ?<br class='autobr' /> j'étais hospitalisé.<br class='autobr' /> hein ? où ça ?<br class='autobr' /> à l'hà´pital psychiatrique.<br class='autobr' /> hein ? on vous a interné ?<br class='autobr' /> non, j'y étais volontairement.<br class='autobr' /> hein ?</p> <p>196</p> <p>ce qu'elle a ? je vais t'avouer, moi, ce qu'elle a…<br class='autobr' /> pourquoi devrais-tu avouer TOI ce qu'elle aurait ELLE ?<br class='autobr' /> je me sens concerné…<br class='autobr' /> ah ?</p> <p>197</p> <p>ce qu'elle a c'est qu'elle a toujours eu peur de la vie, voilà !<br class='autobr' /> il est interdit d'avoir peur de la vie ?</p> <p>198</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ici la bouffe n'est pas très bonne. pas grave. mais pas tout à fait normal malgré tout. autour de moi y a des gens qui n'ont plus que ça, la bouffe…</p> <p>199</p> <p>normal, courant, ordinaire, compréhensible.<br class='autobr' /> anormal, spécial, monstrueux.<br class='autobr' /> incompréhensible.</p> <p>200</p> <p>ah je suis contente de t'entendre au bout du fil !<br class='autobr' /> tu m'appelles seulement maintenant ? chuis à l'hosto depuis trois mois.<br class='autobr' /> je sais, je me disais que tout allait bien.<br class='autobr' /> 201</p> <p>tu devrais faire une cure tu devrais faire une cure tu devrais…<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> tu es si… comment ?... loin<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et ça me fait peur.<br class='autobr' /> peur pour moi ou peur pour toi ?<br class='autobr' /> je sais pas… l'alcool la folie tout ça c'est des trucs je sais pas…</p> <p>202</p> <p>ah vous aussi vous êtes un patient ? vous avez une cigarette pour moi ? des menthol ? bon, d'accord, tant pis. mon administrateur de biens est un radin. ils prétendent que je vais mal parce que je suis schizophrène. vous n'avez pas l'air d'un patient. vous êtes schizophrène aussi ? l'alcool ? rien de plus ? bah, ce n'est pas grave, ça. mais je ne suis pas schizophrène. il fait beau ce soir, non ? ils vont venir. les extraterrestres. ils ont envoyé un signal sur mon portable. pas si simple, mon vieux ! c'est un message codé, naturellement ! moi seul comprend ! (des fois j'en ai marre d'obéir à ces enculés de l'espace !)</p> <p>203</p> <p>tu vois, moi j'ai rien fait. c'est mon ex-mari. je me suis laissée entraîner. et le juge vient de refuser que je sorte pour de bon de cette prison de merde ! prison, hà´pital, c'est du pareil au même.<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> non.</p> <p>204</p> <p>les fantà´mes de l'hà´pital.<br class='autobr' /> eux.<br class='autobr' /> et moi.<br class='autobr' /> 205</p> <p>jamais je n'aurais cru finir un jour ici. maintenant, voilà , j'y suis. <br class='autobr' /> pourquoi pas ?</p> <p>206</p> <p>depuis quelques années tu te dégrrrrades trrrrrès forrrrrt.<br class='autobr' /> va te faire enculer, papa !</p> <p>207</p> <p>il n'était plus le même, il n'était plus lui-même.<br class='autobr' /> mais surtout c'étaient les autres qui persistaient à rester plus que jamais les espèces de cons qu'ils avaient toujours été.</p> <p>208</p> <p>fils de pute ! tu es toujours là au cul des infirmières à essayer de dénoncer ton voisin de chambre soi-disant qu'il aurait bu en cachette et au moment où je te cause, tu laisses tomber par terre ta barrette de shit !</p> <p>209</p> <p>ils organisent un groupe « contes », la psy lit une histoire, et on doit essayer d'en parler, voilà , ça me branche pas, c'est en fait le groupe « con » !</p> <p>210</p> <p>avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté du fil<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> pour me recoudre le nombril.<br class='autobr' /> avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté pour cinq pistoles<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> de fil<br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> je vais recoudre ma camisole<br class='autobr' /> oh oh oh !</p> <p>arrivé à l'hosto<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> j'vais observer ma pourriture <br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> sous toutes ses coutures.</p> <p>j' suis une enflure<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une rature une vergeture<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> faut qu'on m'enferme derrière les murs !</p> <p>211</p> <p>vous savez la façon d'aborder la maladie mentale a beaucoup changé avec le temps !<br class='autobr' /> sur quel flanc ?</p> <p>212</p> <p>putain de vie de merde à la con !<br class='autobr' /> j'en ai ras la patate !<br class='autobr' /> je vais me cuiter !<br class='autobr' /> rien à foutre de leurs tests de crétins !<br class='autobr' /> c'est truqué leurs trucs.</p> <p>213</p> <p>hips !</p> <p>214</p> <p>fiston, je le sens je le sens, plus rien ne sera comme avant. je… je cherche mes mots : ce n'est pas que plus rien ne sera comme avant, c'est que plus rien ne pourra être comme avant. non… il est impossible que tout recommence comme avant, voilà . non… là tu vas t'imaginer qu'il est possible que je picole à nouveau, or, de fait, il est impossible que je picole encore, l'alcool et moi c'est fini. non… je ne sais pas comment je vivais, avant, mais… je ne vais plus vivre comme ça. et je ne vais plus vivre comme ça, comme avant, sinon je vais me remettre à boire. non… non, non, non, je ne boirai plus et ne me demande pas comment je le sais, je le sais c'est tout, j'en suis absolument convaincu, enfin… même pas convaincu, je ne bois déjà plus, là , de fait, depuis mon arrivée à l'hosto, pas besoin de me convaincre moi-même. ne me demande pas comment je m'y suis pris, vu que je ne me suis pris à rien du tout, c'est comme ça, dès que j'ai su qu'une place se libérait pour moi, je n'ai plus avalé un gramme d'alcool. <br class='autobr' /> j'ai du mérite ? <br class='autobr' /> je n'ai aucun mérite ? <br class='autobr' /> je n'en sais rien je l'ignore, je ne pense même pas à ce genre de choses complètement hors propos. <br class='autobr' /> j'ai arrêté, c'est bien, non ?<br class='autobr' /> j'ai arrêté, fiston. <br class='autobr' /> au fait, voilà ce que j'avais l'intention de te dire : j'ai arrêté.</p> <p>215</p> <p>j'étais comment, avant ?<br class='autobr' /> chiant… mais je t'aimais déjà .</p> <p>216</p> <p>bon… dites… sorry… je n'ai plus des masses d'unité sur ma carte de téléphone alors dites-moi en vitesse : COMMENT IL VA ?<br class='autobr' /> oh il est là depuis trois jours seulement, il dort, il dort, il dort.<br class='autobr' /> et… c'est normal ?</p> <p>217</p> <p>faut pas que je te cause trop fort, tu vois le type là -bas devant la télé ? oui, lui. avec sa barbe. et bien, hier au repas de midi, on mangeait et tout et tout. on a entendu un énorme cri. le gars, oui, lui, hurlait des phrases qui lui restaient un peu dans la gorge, un doigt tendu vers le plafond, il s'est mis à baver, puis il est tombé sur le pavement, boum !, en tremblant, et bon, chut ! plus bas !, il a chié sous lui. une infirmière s'est pointée, celle qui ne met jamais son tablier, jamais !, et elle lui a enfoncé un bout de tissu dans la bouche,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et.</p> <p>218</p> <p>clef de merde.</p> <p>219</p> <p>salut salut ! j'peux m'asseoir à cà´té ? bon moi je voulais pas mourir, pas vraiment je voulais juste ne plus vivre mais poser un acte violent pour me supprimer ça non je n'y arrivais pas.</p> <p>220</p> <p>asile.</p> <p>221</p> <p>au repos.</p> <p>222</p> <p>loin.</p> <p>223</p> <p>asile.</p> <p>224</p> <p>boire ? ça peut arriver à tout le monde ! regarde jocelyne, là , elle n'aurait jamais imaginé se retrouver ici !</p> <p>225</p> <p>mais… ceux qui ne picolent pas… comment ils font pour tenir le coup, pour supporter cette vie de merde ?</p> <p>226</p> <p>t'inquiète t'inquiète, la société elle sait pertinemment qu'elle broie les gens en mille morceaux ! elle en fait du haché desséché et là -dessus elle les imbibe d'alcool pour leur rendre un semblant d'élasticité, et hop, bon pour le service ! ainsi de suite…</p> <p>227</p> <p>chers collègues,<br class='autobr' /> à l'aube de ce colloque assez singulier, nous nous questionnons tous :<br class='autobr' /> la folie, c'est quoi ?<br class='autobr' /> 228</p> <p>et au coucher de soleil, ils se demandaient encore ce que la folie pouvait bien être, à la fin…<br class='autobr' /> (c'est à ce moment que le chamane…)</p> <p>229</p> <p>pure mother, pure milk.</p> <p>230</p> <p>il a toujours été fou.</p> <p>231</p> <p>ça l'a rendue folle. à tout jamais.</p> <p>233</p> <p>tu as vu son regard ?</p> <p>234</p> <p>il fait le fou</p> <p>235</p> <p>elle joue à être folle, ça l'arrange bien, rapport à …</p> <p>236</p> <p>complètement frappé. comme un apéro.</p> <p>237</p> <p>il est passé de l'autre cà´té.</p> <p>238</p> <p>trouble mental, déséquilibre mental, aliénation, démence, délire, maladie mentale, psychose, déraison, dérangement, égarement, divagation.</p> <p>239</p> <p>c'est dans un moment d'égarement qu'il s'est mis à divaguer vers la démence délirante sous l'effet d'une déraison déséquilibrante, d'une terrible aliénation troublante.</p> <p>240</p> <p>moi, ça ne m'étonne pas ! on le sentait venir…</p> <p>241</p> <p>mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse pour elle ? elle est dans son monde à elle.</p> <p>242</p> <p>je suis malade, complètement malade.</p> <p>243</p> <p>livraison de légumes à domicile.</p> <p>244</p> <p>tu savais que le mot « maboule » était d'origine arabe, toi ? <br class='autobr' /> non, mais ça ne m'étonne pas.</p> <p>245</p> <p>de toute façon, il n'écoute plus personne !</p> <p>246</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> te parler de la folie c'est un peu les mots pour ne pas le dire… le mot « folie », c'est un entonnoir, figure-toi ! on y enfourne tout et n'importe qui. un mec a un léger grain, de l'humour, une personnalité propre ? alors, il est fou. sentence. une nana va jusqu'au bout de ses désirs ? ça y est : elle est folle. un père de famille n'aime pas le foot ? il faut l'enfermer. tu ne te soumets aux conventions fixées depuis la nuit des temps par dieu sait quel imbécile ? par ici la piquouze !</p> <p>247</p> <p>mais la folie, ça existe.</p> <p>248</p> <p>marre de cette réunion d'équipe ! on ne va quand même pas ramener la camisole de force, le bain froid et les chaînes ! si ?</p> <p>249</p> <p>en quelque sorte, il buvait pour ne pas devenir complètement ouf !</p> <p>250</p> <p>non mais quoi c'est quoi la différence entre boire et de l'alcool et sniffer de l'héro je sais pas moi qu'on m'explique !</p> <p>251</p> <p>pour oser conduire quand on a trop bu, il faut être dingue !</p> <p>252</p> <p>papa,<br class='autobr' /> dès que j'osais émettre une opinion différente de la tienne, tu me hurlais que j'étais dingue. mes copains étaient dingues, les profs que j'aimais étaient dingues, j'écoutais de la musique de dingues. <br class='autobr' /> j'ai si vite pigé que pour obtenir un peu d'amour, de reconnaissance, d'éducation, de sécurité, il fallait que j'approuve tes opinions. à toi. <br class='autobr' /> tu t'empressais de raconter à ma soeur aînée que j'étais dingue, puis tu me confiais que ma soeur cadette était dingue, à qui tu avais affirmé que notre soeur aînée était dingue. <br class='autobr' /> tu voyais des dingues partout.<br class='autobr' /> tu ne te regardais pas assez souvent dans le miroir, je crois. <br class='autobr' /> tu aurais aperçu un dingue de plus.<br class='autobr' /> c'est pourquoi, cher papa, va te faire mettre !<br class='autobr' /> même là où tu te trouves maintenant.<br class='autobr' /> dans ta tombe.<br class='autobr' /> d'ailleurs j'ai créé un comité de soutien aux vers, aux insectes et aux parasites, et dès la première réunion je leur ai expliqué le chemin à suivre pour entrer dans ton trou de balle.</p> <p>253</p> <p>papa,<br class='autobr' /> c'est à cause de toi que j'ai commencé à boire, au fond.<br class='autobr' /> ça fait un bien fou de déposer le paquet chez un autre que soi.</p> <p>254</p> <p>non papa,<br class='autobr' /> c'est plutà´t grâce à toi que j'ai commencé à boire. pour changer sa vie, il faut la fracasser. sauf que la mienne de vie, tu l'avais déjà fracassée, dès ma naissance. <br class='autobr' /> l'alcool ?<br class='autobr' /> j'ai du recasser le plâtre, quoi !</p> <p>255</p> <p>putain de bordel à queue (à roulettes), les plus fous ne sont pas ceux qu'on croit !<br class='autobr' /> les gens normaux : eux sont fous. fous de normalité, de trop de normalité, de normalité confondante. <br class='autobr' /> ( t'as un exemple ?)</p> <p>256</p> <p>j'ai plein d'exemples.</p> <p>257</p> <p>oui papa, je suis dingue. oui.</p> <p>258</p> <p>clef de merde ? de diamant, ça oui !</p> <p>259</p> <p>j'ai froid.</p> <p>260</p> <p>j'ai froid.</p> <p>261<br class='autobr' /> la folie,<br class='autobr' /> fiston,<br class='autobr' /> c'est quand<br class='autobr' /> à l'intérieur <br class='autobr' /> de toi<br class='autobr' /> il fait froid,<br class='autobr' /> très froid,<br class='autobr' /> si froid<br class='autobr' /> trop froid.</p> <p>1 bis</p> <p>un diamant, je te dis.</p> <p>2 bis</p> <p>l'alcool, chez lui, ça cache quelque chose et en attendant ça gâche tout.</p> <p>3 bis</p> <p>entouré d'empaffés qui ne savent plus s'ils veulent arrêter de boire, ou continuer d'arrêter de boire.<br class='autobr' /> ou boire.</p> <p>4 bis</p> <p>boire et déboires.<br class='autobr' /> tu veux rire, là ?</p> <p>5 bis</p> <p>ce type, comment que tu veux que il se soigne ? il participe à rien, il regarde des dvds toute la journée. c'est pas comme ça qu'on s'y prend.<br class='autobr' /> on ne sait jamais.</p> <p>6 bis</p> <p>mesdames et messieurs, chers patients qui coùtent cher à la société, c'est le distribuement des médications ! <br class='autobr' /> ( à vos marques ?)</p> <p>7 bis</p> <p>pourquoi yzont donné des noms de musiciens à tous les pavillons ? bientà´t yvont nous dire de soigner notre alcoolisme avec<br class='autobr' /> des élixirs de fleurs<br class='autobr' /> de bach !</p> <p>8 bis</p> <p>un magnifique hêtre pourpre. il déploie ses branches etc.<br class='autobr' /> au pied de l'arbre, un bonhomme archi maigre, cheveux longs et poisseux (poisseux, les cheveux !)<br class='autobr' /> il se lance dans une gestuelle héritée du bouddha musulman né sur les bords du jourdain. <br class='autobr' /> il est fou, donc ?</p> <p>9 bis</p> <p>à ce qu'on dit.</p> <p>10 bis</p> <p>il y en a un, je sais pas, je l'ai surnommé : jérà´me bosch, il me fait penser à un personnage d'un tableau de jérà´me bosch (j'ai oublié lequel.)</p> <p>11 bis</p> <p>euh… ce genre de personnes… ça existe VRAIMENT alors ?<br class='autobr' /> tu vois bien.</p> <p>12 bis</p> <p>cette nuit, ils ont téléphoné au service sécurité.</p> <p>13 bis</p> <p>ce genre de gens… ce genre de gens… ils ne font de mal à personne, je te ferai remarquer ! ils vont même pas au salon de l'auto !</p> <p>14 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> ici tout se passe bien.<br class='autobr' /> ce n'est pas l'hà´tel mais bon je le savais avant de venir.</p> <p>15 bis</p> <p>je le savais, fiston.</p> <p>16 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> je fais te faire une esquisse d'une typologie des maladies de l'âme.</p> <p>17 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> merde alors ! j'ai un dérèglement des quatre humeurs à la fois : <br class='autobr' /> phlegme, sang, bile noire, bile jaune.</p> <p>18 bis</p> <p>billevesées.</p> <p>19 bis</p> <p>sous le poids de leurs péchés, ils sont condamnés à l'enfer.</p> <p>20 bis</p> <p>la trépanation, ça fait même pas mal, fiston !</p> <p>21 bis</p> <p>mieux vaut avoir une bite dans le cul qu'une bouteille dans la tête !</p> <p>22 bis</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> demain il m'enlèvent la pierre de folie de mon cerveau.</p> <p>23 bis</p> <p>de force dans la maison de force ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non… je suis venu en exprès !<br class='autobr' /> hein ? vous êtes fou ?</p> <p>24 bis</p> <p>qui a peur du grand méchant fou ?<br class='autobr' /> pas le petit litron rouge, en tout cas…</p> <p>25 bis</p> <p>bonsoir ma chérie, oui je t'aime encore, ah tu craignais qu'à cause de la cure je t'aimerais plus ? où tu vas chercher tout ça ? <br class='autobr' /> (quoique…)<br class='autobr' /> bon ben embrasse les enfants de ma part, hein !</p> <p>26 bis</p> <p>… paradoxalement, comme une avancée…</p> <p>27 bis</p> <p>fig 1, fig 2, fig 3, fig 4, figure-toi.</p> <p>28 bis</p> <p>quand charcot charcutait…</p> <p>29 bis</p> <p>nous sommes en direct du ALCOOL grand prix de formule 1 où les meilleurs ALCOOL joueurs de foot du monde vont s'affronter pour 3000 ALCOOL tours de pédales sur leurs ALCOOL vélos depuis un ALCOOL tremplin. ici la ALCOOL piscine olympique, à vous les ALCOOL studios !</p> <p>30 bis</p> <p>un jour ou l'autre, il est temps de savoir ce qu'on veut !</p> <p>31 bis</p> <p>plus jamais plus jamais !</p> <p>32 bis</p> <p>c'est ça que tu veux ?</p> <p>33 bis</p> <p>non, je pense vraiment que l'équipe nous respecte.<br class='autobr' /> tu parles ! ils savent tout de nous ! tout !</p> <p>34 bis</p> <p>chuis antipsychiatre… euh, antipsychiatrique…<br class='autobr' /> ouais, psychiatrique, quoi !</p> <p>35 bis</p> <p>JE N'AURAIS JAMAIS CRU QUE JE BOUFFERAIS UN JOUR DES NEUROLEPTIQUES !<br class='autobr' /> ( y en a bien qui bouffent du steak de cheval, alors…)</p> <p>36 bis</p> <p>qui s'y freud s'y pique !<br class='autobr' /> ( ou le pique…)</p> <p>37 bis</p> <p>alors vous, vous êtes contents d'avoir bu, vous êtes content d'avoir arrêté de boire, vous êtes content d'avoir fréquenté des malades mentaux ! hein ?</p> <p>38 bis</p> <p>d'une façon ou d'une autre, la soufffffrance mentale demeure un continent noir encore très mal exploré !<br class='autobr' /> (où ils ont mis le chauffeur de salle ?)</p> <p>39 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud.<br class='autobr' /> dans le fond de la salle : bien vrai, ça ! l'insconscient personne l'a jamais vu !<br class='autobr' /> au premier rang : en plus il sniffait de la coke !</p> <p>40 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et encore ! nous avons la chance toi et moi de vivre dans un pays qui ne criminalise pas la souffrance mentale ! y a un pays où un odieux président nabot …<br class='autobr' /> je sais, papa…<br class='autobr' /> comment : tu sais ?<br class='autobr' /> le cours de sciences sociales, à l école…</p> <p>41 bis</p> <p>sur cette photo, des malades mentaux à poil dans la cour d'un hosto en grèce. nous allons passer un chapeau pour le chauffeur…</p> <p>42 bis</p> <p>tu sais pas quoi tu sais pas quoi tu sais pas quoi ? il a réussi à convaincre son psychiatre qu'il était devenu alcoolique à cause de ses problèmes personnels !<br class='autobr' /> (quel culot !)</p> <p>43 bis</p> <p>depuis toujours l'homme s'est trouvé confronté à des êtres différents et impénétrables…<br class='autobr' /> ( d'autres hommes, non ?)</p> <p>44 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud qui prolongea le mythe grec de « suffocation de la matrice » alors qu'en fait , c'est lui qui suffoquait du cerveau</p> <p>45 bis</p> <p>bienheureux les…<br class='autobr' /> car…</p> <p>46 bis</p> <p>sous l'effet de l'alcool, tout devient laid. la vie devient laide. le regard devient laid. les autres deviennent laids. l'oxygène devient laid. l'herbe devient laide. un éléphant rose devient laids éléphants roses.</p> <p>47 bis</p> <p>il a un gros pif rouge plein de trous. ses yeux ressemblent à des oeufs de cane : jaune laid, blanc pisseux. dans le ventre une montgolfière qui ne prendra plus son envol. <br class='autobr' /> laid.<br class='autobr' /> très laid.<br class='autobr' /> la vraie liberté, quoi !</p> <p>48 bis</p> <p>pour la millième fois elle nous dresse la liste des formations qu'elle a suivies, couvrant des domaines aussi invraisemblables que disparates. elle veut en mettre plein la vue, elle veut convaincre son auditoire qu'elle est quelqu'un, encore, malgré tout. <br class='autobr' /> à des degrés divers.<br class='autobr' /> malheureusement elle pue de la gueule, l'alcool à cent mètres, plein la vue.</p> <p>49 bis</p> <p>il dit sans honte : c'est la huitième fois que je viens ici, je lutte contre l'alcool depuis 15 ans.</p> <p>50 bis</p> <p>il est plus fort que nous il est plus fort que nous il est plus fort que nous.<br class='autobr' /> mais les deux font la bande.</p> <p>51 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis mon arrivée ici, je ne t'ai plus jamais vue sur les murs en pleine nuit.</p> <p>52 bis</p> <p>pas mal ! vous avez un q.i. d'autant.<br class='autobr' /> d'autant que nous n'avez plus de cuites !</p> <p>53 bis</p> <p>est-ce que c'est pour toujours, les dégâts ?</p> <p>54 bis</p> <p>on RESTE alcoolique.</p> <p>55 bis</p> <p>j'ai une fille, oui. enfin, j'avais une fille. enfin je l'ai encore, pourtant…</p> <p>56 bis</p> <p>docteurj'ail'impressionquemespiedsnesententpluslesol !<br class='autobr' /> ah ? c'est un début de polynévrite.</p> <p>57 bis</p> <p>mais le concept demeure flou.</p> <p>58 bis</p> <p>qu'est-ce que la consommation d'alcool ?<br class='autobr' /> un délire ?<br class='autobr' /> une démence ?<br class='autobr' /> une folie ?<br class='autobr' /> une frénésie ?<br class='autobr' /> une humeur ?<br class='autobr' /> une idiotie ?<br class='autobr' /> une possession ?<br class='autobr' /> une connerie ?</p> <p>59 bis</p> <p>ouais j'ai bu et alors ? ça emmerde qui ? va chercher l'infirmier ! tu veux que je te casse la tronche ?</p> <p>60 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis que je suis arrivé ici, je commence à trouver la vie moins laide.</p> <p>61 bis</p> <p>c'est un bon début, ça oui ! mais derrière demeure un fameux rébus !</p> <p>62 bis</p> <p>quelle énigme de folie !</p> <p>63 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> s'il y a bien une chose que je ne supporte plus, c'est l'emploi à tout bout de champ du mot « malade » à la place d'autres mots. il a fait un truc de « malade », c'est un livre de « malade », il joue de la guitare comme un « malade. » la maladie, c'est la maladie. le froid. la laideur.</p> <p>64 bis</p> <p>il était deux fois… ah non ! une seule ! j'ai bu un coup de trop…</p> <p>65 bis</p> <p>voir page 974, cette citation de zigmound frott :<br class='autobr' /> la notion même de « boire un coup de trop » serait distrayante, pour ce qu'elle ne recouvrirait pas une réalité aussi sordide. en effet, le premier « coup » n'est-il pas déjà le « coup de trop ? »</p> <p>66 bis</p> <p>je lève le coude (de trop), et après, boum !, le trou noir. je me réveille à l'hosto.</p> <p>67 bis</p> <p>tu ne crois pas à la psychanalyse.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> c'est ton droit.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> pourtant, avoue, si tu as bu, c'est qu'il y a une raison, non ? arrêter l'alcool, c'est un premier pas, ok. mais derrière ? hein ? derrière ? ok ?</p> <p>68 bis</p> <p>disons que collectivement, la bouffe est dégueulasse. et il ne s'agit pas d'inconscient collectif.</p> <p>69 bis</p> <p>derrière ? tout ce que tu veux, derrière. mais pas avec les outils rouillés de la psychanalyse, cette incantation mystique proche du dogme religieux et qui s'admire elle-même dans un miroir fêlé.</p> <p>70 bis</p> <p>toi, tu es venu ici pourquoi ? parce que tu es alcoolique ou parce que tu es fou ? parce que pour les fous, il y a d'autres pavillons ! dans celui-ci, personne n'est dingo !</p> <p>71 bis</p> <p>oui oui je veux bien aller aux activités d'ergothérapie, mais comprenez-moi, ça me fait bizarre. avant je bossais comme éducateur, alors bon me voilà de l'autre cà´té de la barrière donc ça me fait tout drà´le !</p> <p>72 bis</p> <p>égo-thérapie.<br class='autobr' /> ergot-thérapie.<br class='autobr' /> très charpie.<br class='autobr' /> c'est pas fini non ?</p> <p>73 bis</p> <p>vous pouvez nourrir les chats sauvages avec les restes des repas, ne laissez quand même pas dix assiettes traîner dans la cuisine<br class='autobr' /> pendant plusieurs jours !</p> <p>74 bis</p> <p>toi, on t'a expliqué pourquoi on t'a envoyé ici ? spécialement ici ?</p> <p>75 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> j'ai dormi jour et nuit un mois durant. j'ai recommencé à me laver. je me nourris mieux.<br class='autobr' /> l'autre jour un type est arrivé en pleine crise de délirium. il tournait en rond au pas de course dans le jardin, en écrasant les plantes sur son passage. du coup, l'autre là , le mec que je n'aime pas du tout vu qu'il critique tout le monde au lieu de s'occuper de lui-même, il a gueulé dans le réfectoire : <br class='autobr' /> korsakoff ! <br class='autobr' /> ou : korsakov !<br class='autobr' /> je ne sais plus.<br class='autobr' /> apparemment, cela se produit quand l'alcool a définitivement grillé la plupart de tes neurones. <br class='autobr' /> irréversible. <br class='autobr' /> ça fout les jetons.</p> <p>76 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> j'avais oublié :<br class='autobr' /> dès que j'avais un peu mal au dents, tu me proposais un sucre imbibé d'alcool de menthe.</p> <p>77 bis</p> <p>oh ! vous avez bien raison, monsieur ! ici, certaines personnes s'installent et n'ont pas vraiment l'intention de guérir de quoi que ce soit ! si jamais elles ont quelque chose en débarquant ici, d'ailleurs !<br class='autobr' /> (oups ! je rougis ! en tant qu'infirmière, j'aurais du me taire !)<br class='autobr' /> (ah ! est-on assez sévères ?????)</p> <p>78 bis</p> <p>c'est à VOUS de savoir ce que VOUS attendez de VOTRE cure. NOUS on est à votre disposition pour vous aider dans VOTRE direction. <br class='autobr' /> (désolés mais y a rien d'aut' à dire !)</p> <p>79 bis</p> <p>c'est vous qu'avez commencé, c'est VOUS qu'arrêterez !<br class='autobr' /> (désolés mais c'est vrai !)</p> <p>80 bis</p> <p>moi, j'aime me bourrer la gueule, m'éclater le citron à la coke, à n'importe quoi qui me tombe sous la main ! avant j'étais taximan, j'ai bousillé je sais plus combien de bagnoles, plus aucun patron ne veut de moi ! je suis tombé du deuxième étage, bassin fracturé. cet appartement-là , en fait, j'y ai foutu le feu sans le faire exprès, je me suis endormi en fumant une cigarette ! <br class='autobr' /> du moment que ma bonne femme fait bien à manger !<br class='autobr' /> vrai, je claque toutes mes allocs de mutu dans l'alcool et la dope !<br class='autobr' /> et la meilleure de toutes ? j'suis heureux, moi ! j'suis heureux ! j'adore me péter les lattes ! à fond ! <br class='autobr' /> (c'est ma bonniche qui a contacté le psychiatre… moi…. bof…)</p> <p>81 bis</p> <p>moi j'en ai rien à foutre ici, rien…</p> <p>82 bis</p> <p>tu as d'autres anecdotes du genre ?<br class='autobr' /> plein.</p> <p>83 bis</p> <p>un rayon entier… :<br class='autobr' /> bonjour bonjour c'est moi je reviens ! je pensais que ça irait, dehors, mais ça n'a pas été. allez, je viens passer un petit mois de vacances, ah ah !</p> <p>84 bis</p> <p>t'es trop conasse ! huit fois que tu recommences une cure ! à chaque fois, tu subis un sevrage, vingt jours de comprimés ©, un mois de ® ! au bout de six semaines tu claironnes que tu te sens prête à quitter l'hosto… la suite au prochain numéro ! t'es trop débile â„¢ !!!!<br class='autobr' /> je n'arrive pas à me contrà´ler…</p> <p>85 bis</p> <p>mesdames et messieurs, la salle de remise en forme est ouverte !<br class='autobr' /> ppppffff….</p> <p>86 bis</p> <p>comme raconte le psychiatre, le taux de réussite, c'est 3% environ. alors, je préfère me dire que ça ne va pas marcher pour moi. et si ça marche…</p> <p>87 bis</p> <p>si ça marche, c'est bien emmerdant pour toi, au fond !</p> <p>88 bis</p> <p>je suis ton infirmière de référence, crois moi il faut que tu penses à toi. pas SUR toi. à toi. ça fait des années que tu tortures ton corps, il n'en peut plus, il est à bout…</p> <p>89 bis</p> <p>vous savez ?<br class='autobr' /> (elle pince les lèvres avec préciosité.)<br class='autobr' /> vous savez ? <br class='autobr' /> ici, c'est la première fois. mais avant j'ai fait quatre séjour à l'hà´pital ✜✜✜✜✜, et j'ai passé un an au centre $$$$$$, et bien, partout j'ai laissé un excellent souvenir, je suis encore en contact avec le ΨΔΓΑΘδ et avec la ςψζεΓ.<br class='autobr' /> tu veux ma photo ?</p> <p>90 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> y a un truc qui fait masse. <br class='autobr' /> autour de moi, je vois un gros tas d'alcoolos et d'alcoolotes qui n'ont pas l'air d'en vouloir. un peu comme s'ils refusaient leur moment de vérité. (non, tout à fait.) être face à eux-mêmes.<br class='autobr' /> pourquoi, au-delà du plaisir, je bois ? (plus que de raison.) that's the question quand même non ? <br class='autobr' /> bon, j'arrête de te casser les pieds.</p> <p>91 bis</p> <p>écoutez monsieur, je suis votre infirmière de référence et je peux vous affirmer <br class='autobr' /> que :<br class='autobr' /> c'est du travail !</p> <p>92 bis</p> <p>affolé par la folie,<br class='autobr' /> j'ai des affres au lit.<br class='autobr' /> va chier, à la fin !</p> <p>93 bis</p> <p>la première chose que tu ressens quand tu arrêtes de picoler, c'est que la vidange, c'est toi. et comme en plus tu es consigné, tu imagines que éventuellement il y aura moyen de recycler le grand vide que tu es devenu.</p> <p>94 bis</p> <p>salut à tous !<br class='autobr' /> j'me présente : je suis « la place. »<br class='autobr' /> pas la place du marché, ou la place de ciné, ni la place du mort ah ah ah !<br class='autobr' /> non, je suis : « la place. »<br class='autobr' /> celle que vous avez faite en vous décidant à faire une cure. oui, vous avez fait « de la place », et « la place » en question, c'est donc moi.<br class='autobr' /> quand même, ouvrez un peu les yeux, maintenant qu'ils ne sont plus plombés par monsieur éthanol â„—. l'alcool. l'alcool, avant, dans votre ancienne vie, il en prenait de la place, non ? <br class='autobr' /> il occupait touuuuuuutes vos pensées, lalalère !<br class='autobr' /> matin<br class='autobr' /> midi<br class='autobr' /> et soir<br class='autobr' /> et la nuit itou.<br class='autobr' /> lalalèreu !<br class='autobr' /> faut que j'aie de l'alcool en me levant, et de quoi tenir la matinée, et de quoi me noyer l'aprème, et devant la téloche, et du whisky pour le dodo, ça aide !!!!<br class='autobr' /> etc.<br class='autobr' /> itou.<br class='autobr' /> l'ennui, l'alcool, on doit aller l'acheter, se déplacer, passer du temps au night shop, revenir à la maison, ou bien alors repasser au bistrot. si on dégueule un building de bile, c'est encore la faute à l'alcool ! si on va pisser toutes les demi-heures, c'est encore la faute à l'alcool ! si on se fait choper au volant par les flics, avec deux tonnes de vodka dans les veines, ça prend la soirée pour s'expliquer ! si on crashe sa voiture contre une madame avec un landau, ça va encore durer des plombes ! si on se retrouve au tribunal de police, c'est encore à cause de l'alcool ! si on se chamaille avec sa gonze, c'est la faute à l'alcool ! si on fout des trempes aux gosses, la faute à qui ?<br class='autobr' /> hein ? à qui ? <br class='autobr' /> or donc :<br class='autobr' /> qu'allez-vous à présent faire de moi, « la place ? »</p> <p>95 bis</p> <p>de toute évidence, le problème… l'alcool, c'est permis ! légal ! encouragé, même ! voilà le problème !</p> <p>96 bis</p> <p>alll-llors… chez moi, tout a démarré quand<br class='autobr' /> (j'ai perdu mon boulot, ma femme m'a quitté, j'ai su que ma fille avait le sida, j'ai du vendre ma maison, mon père est mort, j'ai abandonné la pratique du foot, mon chef me harcelait, mon fils a tété en prison)<br class='autobr' /> quand j'ai craqué complètement.</p> <p>97 bis<br class='autobr' /> l'.</p> <p>98 bis</p> <p>l'énigme.<br class='autobr' /> 99 bis</p> <p>bonjour bonjour je suis « l'énigme. »</p> <p>100 bis</p> <p>mais non mais non l'alcool c'est bon pour plein de choses !<br class='autobr' /> regarde un peu…<br class='autobr' /> utilisée en shampooing, la bière permet de redonner de la brillance aux cheveux, <br class='autobr' /> l'odeur du houblon, incrustée dans un oreiller, aide à fermer l'oeil, la bière attire les limaces, elle noie les mouches, et détourne les guêpes, le sucre de la bière ravira vos fleurs et legumes, la bière enlève les taches des vêtements…</p> <p>101 bis</p> <p>et si tout cela, l'alcoolisme, si ce n'était qu'une construction de l'esprit ?<br class='autobr' /> et si après tout l'homme avait besoin d'alccol comme d'oxygène ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> tu en dis quoi ?</p> <p>102 bis</p> <p>l'excès nuit en tout, voilà .</p> <p>103 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ce que j'ai, c'est une douleur, de la douleur.<br class='autobr' /> de toute évidence, à part les spécialistes et les pros, ça ne branche personne, à notre époque.</p> <p>104 bis</p> <p>trucmuche, vous êtes en direct de la grand-place, alors dites-nous est-ce que cette manifestion pour une meilleure prise en charge collective de la folie individuelle a rassemblé beaucoup de monde ?<br class='autobr' /> et bien, bidulette, oui, ici c'est noir de people et les slogans les plus passionants fleurissent ! on peut lire des choses comme : - viens chez moi, j'habite avec une folle !, ou encore : - donne moi un grain de ta folie !<br class='autobr' /> trucmuche, vous êtes notre envoyé spécial sur place, peut-on dire que les organisateurs sont satisfaits ?<br class='autobr' /> alors oui en effet ça oui, la plupart des manifestants, et il y en a de tous les âges, se sont déclarés en faveur d'un meilleur partage de la folie. le centre pour l'égalité des chances mène d'ailleurs la fronde. il faut savoir qu'à peine 1% de la population mondiale semble touchée par la schizophrénie, cela de toute évidence n'est pas équitable. mais l'alcool, ça non, les gens ne veulent pas du tout s'en passer, ils trouvent que la répartition de l'alcoolisme est acceptable.<br class='autobr' /> (telle qu'elle est.)</p> <p>105 bis</p> <p>pas de quoi mener une croisade, non plus ? des fois ?</p> <p>106 bis</p> <p>d'abord dans cet hà´pital à la con vous ne proposez aucune activité, et quand vous en proposez une, elle est débile. <br class='autobr' /> (qu'est-ce qu'on en a à foutre de changer, nous ? du moment qu'on ne paie pas notre chauffage en hiver…)</p> <p>107 bis</p> <p>aller faire des petits dessins, des bricolages en bois, soigner des chevaux, et puis quoi encore ?<br class='autobr' /> (de toute manière, à la relaxation, on s'endort !)</p> <p>108 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et si on en finissait une fois pour toutes avec le sujet ?<br class='autobr' /> allons-y :<br class='autobr' /> LLLL'alcoolisme est l'addiction à l'alcool (éthanol) contenu dans les boissons alcoolisées, plus précisément l'absence du sentiment de satiété. LLLL'OMS reconnaît l'alcoolisme comme une maladie et le définit comme des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l'utilisation d'alcool. CCCCette perte de contrà´le s'accompagne généralement d'une dépendance physique caractérisée par un syndrome de sevrage à l'arrêt de la consommation (pharmacodépendance), une dépendance psychique, ainsi qu'une tolérance (nécessité d'augmenter les doses pour obtenir le même effet). LLLLa progression dans le temps est l'une des caractéristiques majeures de cette addiction. LLLL'usage sans dommage (appelé usage simple) précède l'usage à risque et l'usage nocif (sans dépendance), puis enfin la dépendance. LLLL'alcool est une substance psychoactive à l'origine de cette dépendance mais elle est également une substance toxique induisant des effets néfastes sur la santé. LLLL'alcoolodépendance est à l'origine de dommages physiques, psychiques et sociaux.</p> <p>109 bis<br class='autobr' /> wikhipspédia, quoi.</p> <p>110 bis</p> <p>l.</p> <p>111 bis</p> <p>leur.</p> <p>112 bis</p> <p>énigme.</p> <p>113 bis</p> <p>leur énigme.</p> <p>114 bis</p> <p>ils n'ont pas l'air d'en avoir une.<br class='autobr' /> les autres.</p> <p>115 bis</p> <p>moi si.</p> <p>116 bis</p> <p>eux ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.</p> <p>117 bis</p> <p>ils boivent.</p> <p>118 bis</p> <p>tout le monde boit.</p> <p>119 bis</p> <p>dyonisos buvait, les sumériens buvaient, noé buvait, tibère buvait, les grecs buvaient, les romains buvaient.<br class='autobr' /> déjà .<br class='autobr' /> alors…<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>120 bis</p> <p>c'est un truc ça existera toujours faudra toujours faire avec.<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>121 bis</p> <p>alors rien.</p> <p>122 bis</p> <p>les infirmières ne sont jamais là ! elles partent tout le temps en conge !<br class='autobr' /> figure-toi, enfoiré, qu'elles ont aussi une vie privée…</p> <p>123 bis</p> <p>on dit les musulmans les musulmans on les critique mais ils ne boivent pas d'alcool, eux ! <br class='autobr' /> la voilà la solution !<br class='autobr' /> (si tu savais…)</p> <p>124 bis</p> <p>leur énigme ? <br class='autobr' /> aux autres ? <br class='autobr' /> ils ne parlent jamais d'eux-mêmes. <br class='autobr' /> que leurs enfants ne souhaitent plus les rencontrer, qu'ils ont été obligés de vendre leur maison, qu'ils ont séjourné dans des centres aux normes très sévères, ça oui. qu'ils ont fait de la taule, ça oui. qu'ils carburent au gin, au vin blanc, à la bière blonde, ça oui. que la nouvelle année est une sale période vu qu'ils avaient l'habitude de baiser au champagne, ça oui.<br class='autobr' /> mais leur énigme ?<br class='autobr' /> (et dans des centres aux normes très sévères… ça ne marche pas mieux !)</p> <p>125 bis</p> <p>la première chose que tu fais quand tu sors, tu bois. tu rebois.</p> <p>126 bis</p> <p>je vous regarde toutes et tous, avachis, là , et je me rends compte que vous avez perdu le chemin de dieu.<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu fous parmi nous, alors ?</p> <p>127 bis</p> <p>qu'est-ce qu'on lirait bien pour passer le temps ?<br class='autobr' /> zola, blondin, london, kessel, baudelaire, lowry, bukowski, kerouac, hemingway, apollinaire, faulkner.<br class='autobr' /> c'est un bon début.</p> <p>128 bis</p> <p>la folie,<br class='autobr' /> c'est quand ?<br class='autobr' /> c'est quand…</p> <p>1 ter<br class='autobr' /> alors, toi tu es prêt ?<br class='autobr' /> près de quoi ? de la sortie ? non, près des cuisines.</p> <p>2 ter<br class='autobr' /> alors moi, je serais prêt ?<br class='autobr' /> prêt à quoi ?<br class='autobr' /> prêt à sortir ?<br class='autobr' /> près de sortir ?</p> <p>3 ter</p> <p>d'où ? du trou normand ? de l'auberge espagnole ? de la bouteille bordelaise ?</p> <p>3 ter</p> <p>c'est comment qu'on freine ? j'voudrais descendre de là .<br class='autobr' /> petit à petit, l'oiseau fait son nid.<br class='autobr' /> son petit en tombe.</p> <p>4 ter</p> <p>dehors c'est comment ? c'est où le danger ? c'est quand la chute ? la confrontation avec les brutes de brut ? dehors c'est du verre pilé ?<br class='autobr' /> non, rien que des âmes pliées.<br class='autobr' /> sucré-salé.</p> <p>5 ter</p> <p>dehors, ce sera la guerre !<br class='autobr' /> oui, mais faudra bien trancher, non ?</p> <p>6 ter</p> <p>tu sors quand, toi ?<br class='autobr' /> je sais pas je sais pas, pas tout d'suite pas tout d'suite, j'attends encore un peu et toi ?</p> <p>7 ter</p> <p>dehors je ne bois pas passque je sais que je vais revenir dormir à l'hà´pital.</p> <p>8 ter</p> <p>fiston.</p> <p>9 ter</p> <p>dehors pour se protéger faudra une prise de terre.</p> <p>10 ter</p> <p>dedans c'est dans la tranchée, les obus passent, ils flinguent les autres, ceux qui oublient de porter leur casque.<br class='autobr' /> dedans le cocon tout rond de ceux qui l'étaient toujours.<br class='autobr' /> dedans les tabliers blancs, les tabliers blanc-sec, l'attention carmin qu'on nous porte, les produits de nettoyage rosés.<br class='autobr' /> mais dehors mais dehors mais dehors.</p> <p>11 ter<br class='autobr' /> dehors faudra gérer.<br class='autobr' /> aaaaaaaaahhhhhhh ???? c'est ça, le truc ?<br class='autobr' /> ouais.<br class='autobr' /> aaaaaaaahhhhhhhh ! ok !</p> <p>12 ter</p> <p>épileptique. si si oui oui. il picolait sans être une brute, <br class='autobr' /> pour autant,<br class='autobr' /> mais il picolait. <br class='autobr' /> il en avait besoin, on aurait dit. par fierté, il a décidé d'arrêter tout seul comme le grand qu'il croyait être. s'est enfermé quatre jours dans une maison de campagne. a dormi pour oublier le bruit du verre qu'on dépose, la douceur du goulot dans la main. <br class='autobr' /> c'est bon, c'est bon, on est pas au cinéma !</p> <p>13 ter</p> <p>il a cru qu'il avait gagné, il a cru qu'il avait vaincu l'alcool, comme on dit.<br class='autobr' /> seulement donc voilà , une nuit sa nana l'a vu se tortiller comme un lombric…<br class='autobr' /> un quoi ?<br class='autobr' /> un ta gueule !<br class='autobr' /> il avait défoutu les couvertures…<br class='autobr' /> si ça tombe ils ont des couettes !<br class='autobr' /> … bon, la couette, alors, si ça fait plus joli plus exact. il avait défoutu la couette, il était en train de sucer un coin de son oreiller. puis, il s'est levé, s'est dirigé vers le couloir…<br class='autobr' /> … et il s'est ramassé une gamelle !<br class='autobr' /> … putain va enculer les gardes de sécurité, trouduc ! laisse-moi continuer ! t'as peur de ce que je raconte, hein ? ketapeur ? puis il se dirige vers une fenêtre, s'allonge sur le sol tout en ramassant des poussières qu'il accumule en petits tas, comme ça, pendant des heures, jusqu'à l'arrivée de l'ambulance.<br class='autobr' /> on dirait un livre !<br class='autobr' /> pauvre con ! tu comprends pas ? le mec, il s'est débarassé de l'alcool sans soins autour. alors il est devenu épileptique. ça arrive.<br class='autobr' /> à moi aussi ?<br class='autobr' /> non, t'es trop con ! trop con ! ton cerveau était déjà cramé à la maternité !</p> <p>14 ter<br class='autobr' /> fiston, je viens juste de louer une nouvelle maison.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> fiston, maison.<br class='autobr' /> comme si ça allait ensemble :<br class='autobr' /> fiston, maison.</p> <p>15 ter<br class='autobr' /> ton papa a déniché une maison sympa.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> papa, sympa.</p> <p>16 ter<br class='autobr' /> c'est s'taire, qu'il faudrait !</p> <p>17 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose.</p> <p>18 ter<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> elle sort.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> à 14 heures : pour de bon, comme on dit.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)<br class='autobr' /> une grosse valise près du bureau des infirmières. le bouquet de fleurs des copines.<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> il rentre.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)</p> <p>19 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose, fiston.<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?<br class='autobr' /> quand dans la file du supermarché<br class='autobr' /> à pas lestés<br class='autobr' /> je revoirdeirai et ron et ron petit, pas de litron,<br class='autobr' /> les têtes glauques des combattants du front<br class='autobr' /> en sueur mal torchés,<br class='autobr' /> l'énorme, là , à longueur d'année<br class='autobr' /> en sabots de bois<br class='autobr' /> (tu veux quoi ? tellement gros je suis désormais<br class='autobr' /> que je n'atteins plus mes pieds !),<br class='autobr' /> de ses douzes canettes toujours chargé,<br class='autobr' /> et les ouvriers du plâtre, les ouvriers polonaise,<br class='autobr' /> pour eux boire c'est la santé !,<br class='autobr' /> et le gamin de vingt ans tout ronds<br class='autobr' /> aux yeux injectés d'aiguilles rouges<br class='autobr' /> et quand je planterai ma culture de regards inquiets <br class='autobr' /> dans le sien<br class='autobr' /> où plus rien ne bouge<br class='autobr' /> sauf l'aiguille et le piston,<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?</p> <p>20 ter<br class='autobr' /> dehors : quoi ?<br class='autobr' /> quoi, dehors ?</p> <p>21 ter<br class='autobr' /> dedans ils sont nombreux les ratés, les pétés, le jetés, les tricheurs, les planqués, les trépassants, les gerbants, les emmerdants.<br class='autobr' /> dehors, ils sont legion, les tricheurs<br class='autobr' /> vu que boire un coup c'est bon pour la santé.<br class='autobr' /> dedans, ils ont au moins, ils ont un peu, essayé.<br class='autobr' /> dehors, ils n'essayent même pas, <br class='autobr' /> trop contents<br class='autobr' /> qu'à l'asile des fous <br class='autobr' /> c'est une partie de leur propre âme noire qu'on cache en leur nom.</p> <p>22 ter<br class='autobr' /> parle-moi de ton âme heureuse.</p> <p>23 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ?<br class='autobr' /> j'vais boire. tout d'suite.</p> <p>24 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ? <br class='autobr' /> je vais continuer.<br class='autobr' /> à boire ?<br class='autobr' /> non, imbécile ! à réfléchir, à essayer de comprendre pourquoi je buvais.<br class='autobr' /> ah ? ta psychologue te l'a pas expliqué ?</p> <p>25 ter<br class='autobr' /> moi aussi, je vais continuer à boire. la société à besoin de nous, elle nous attend ! bitus ou pas. surtout bitus, d'ailleurs ! ça crée de l'emploi !</p> <p>26 ter<br class='autobr' /> alors voici le plan, je te le dessine en vitesse :<br class='autobr' /> alcool<br class='autobr' /> =<br class='autobr' /> du boulot pour la vigne ou le houblon<br class='autobr' />  du boulot pour les cultivateurs<br class='autobr' /> ⌘ du boulot pour les transporteurs<br class='autobr' /> ± du boulot pour les grossistes<br class='autobr' /> ≥ du boulot pour les revendeurs<br class='autobr' /> â„¢ du boulot pour les bistrots <br class='autobr' /> ∨ du boulot pour les toubibs<br class='autobr' /> ★ on recommence tout le toutim…<br class='autobr' /> ♩♫ ♯qui voudrait supprimer ça ?</p> <p>27 ter<br class='autobr' /> putain mais si tu sors d'ici pour ENCORE réfléchir, alors c'est que tu bandes pour ton âme noire et pas pour ton âme heureuse… non ? Remarque, moi, ici, j'ai rien réfléchi à rien du tout, alors… je suis pas mieux que toi…</p> <p>28 ter<br class='autobr' /> tu l'as dit.</p> <p>29 ter<br class='autobr' /> je fais partie de quelle tribu, fiston ?<br class='autobr' /> la tribu des tronches ravagées aux rides plus profondes que les failles des océans<br class='autobr' /> (mais ils ont à peine quarante ans et n'ont rien des atlantides),<br class='autobr' /> la tribu des pantalons toujours dégeulasses,<br class='autobr' /> la tribu des alcoolos un rien artistes,<br class='autobr' /> la tribu des pénibles,<br class='autobr' /> la tribu des sans abribus,<br class='autobr' /> des-ceux-qui-n'ont-jamais-bu-malgré-tout-que-des-millésimes ?<br class='autobr' /> la tribu aux attributs ramollis ?<br class='autobr' /> la tribu, elle est sans fin, des pères indignes<br class='autobr' /> malgré-l'autocollant-je-suis-un-brave-papa-(sur-le-front ?)</p> <p>30 ter<br class='autobr' /> tu sors, alors ?<br class='autobr' /> oui.<br class='autobr' /> pour quoi faire ?<br class='autobr' /> redevenir un père.</p> <p>31 ter<br class='autobr' /> nous venons de vous voir dans ce reportage.<br class='autobr' /> l'alcool, vous y avez finalement échappé.<br class='autobr' /> (tiens, on ne dit pas : vous LUI avez échappé ?)<br class='autobr' /> nous allons maintenant vous permettre de répondre aux questions internet, mail et réseaux sociaux des téléspectateurs.<br class='autobr' /> première question de j.l. de truc-les-fouillasses :<br class='autobr' /> comment réagissez-vous lorsque, dans la file du supermarché, vous apercevez un caddie bourré, oui, bourré, de bouteilles de whisky et poussé par une femme (ou un homme) dont le visage boursouflé vous fait soudain comprendre ce que dante a voulu écrire ?</p> <p>32 ter<br class='autobr' /> tu vois, bon, euh, merde, j'ai des crasses sous les ongles, la salle de remise en forme, tout ça, c'est pas mal tout ça, mais pour se sentir prêt à sortir d'ici, le psychiatre m'a demandé : avez-vous un projet ? voilà le hic. un projet. c'est quoi, un projet ?<br class='autobr' /> à toi de savoir, enflure !</p> <p>33 ter</p> <p>moi des projets j'en avais plein. j'avais d'ailleurs commencé à les mettre à exécution. malheureusement, c'est moi que j'ai exécuté. <br class='autobr' /> avant terme.<br class='autobr' /> j'ai pris de l'alcool pour vingt ans ferme.</p> <p>34 ter<br class='autobr' /> ça vient d'où ça de préférer tout foutre en l'air plutà´t que de ne rien foutre en l'air ?</p> <p>35 ter<br class='autobr' /> air. <br class='autobr' /> pierre.<br class='autobr' /> mer. <br class='autobr' /> ter.</p> <p>36 ter<br class='autobr' /> september's here again.</p> <p>37 ter<br class='autobr' /> regarde les rolling stones ! déjà des papys, toujours capables de donner des concerts, et pourtant ils ont avalé :<br class='autobr' /> de l'alcool<br class='autobr' /> de la coke<br class='autobr' /> de l'héro<br class='autobr' /> des champis du h du lsd des couleuvres.</p> <p>38 ter<br class='autobr' /> les couleuvres, c'est nous qu'on les avale. leur guitariste il se fait changer le sang une fois par ang.</p> <p>39 ter<br class='autobr' /> c'est ça, et michaà« l jackson, il était pas dans son cercueil, c'est bien connu.</p> <p>40 ter<br class='autobr' /> quarantaine.</p> <p>41 ter<br class='autobr' /> fiston, je suis sorti.<br class='autobr' /> pas pour de bon.<br class='autobr' /> pour un week-end.<br class='autobr' /> entier.<br class='autobr' /> j'ai préféré dormir chez une copine.<br class='autobr' /> la maison sympa du papa n'est pas encore aménagée. <br class='autobr' /> pour toi.</p> <p>42 ter<br class='autobr' /> fiston, avec cette copine, on a eu un projet.<br class='autobr' /> on a fait ma lessive.<br class='autobr' /> oh pas celle de mes sentiments oh non !<br class='autobr' /> ma lessive, quoi.<br class='autobr' /> et comme on n'avait pas de séchoir (sous la main),<br class='autobr' /> on a mis le linge sur un radiateur.<br class='autobr' /> j'ai pris une serviette chaude, elle sentait l'assouplissant, j'ai enfermé mon visage dedans,<br class='autobr' /> c'était meilleur que le pinard,<br class='autobr' /> vraiment.</p> <p>43 ter<br class='autobr' /> i had a dream, j'ai un projet.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> je grimpe à l'échelle.<br class='autobr' /> du silence.<br class='autobr' /> des étoiles.<br class='autobr' /> rien à dire.<br class='autobr' /> rien à chanter.<br class='autobr' /> rien à boire.<br class='autobr' /> je suis le singe de dieu.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> (ah non putain merde cet espoir c'est celui qui justement m'a fait commencer à boire.)</p> <p>44 ter<br class='autobr' /> je pousse la porte,<br class='autobr' /> je casse la serrure,<br class='autobr' /> je veux permettre à la douleur de se faire un chemin en moi.</p> <p>45 ter<br class='autobr' /> hors de moi.</p> <p>46 ter<br class='autobr' /> car elle, elle ne meurt pas.</p> <p>47 ter<br class='autobr' /> car elle, on se la refile.</p> <p>48 ter<br class='autobr' /> de mains en mains.</p> <p>49 ter<br class='autobr' /> social, economical.</p> <p>50 ter<br class='autobr' /> un premier week-end.<br class='autobr' /> dehors.<br class='autobr' /> là -bas, ils prennent leurs potions vers 21 heures. <br class='autobr' /> y a des chances que thérèse soit de garde. thérèse, celle qui ne rit pas quand on ne la … pas. elle est pourtant si cool. 60 balais. enfermée des nuits entières avec des adddddddddictifs. thérèse, qui refuse qu'on ferme les portes des chambres. parce qu'elle l'a appris comme ça du temps des nonettes. elle passe son nez par le cran plusieurs fois sur la nuit. elle nous aime. je sais pas. un avant et un après. un dedans. et un dehors.</p> <p>51 ter<br class='autobr' /> je suis rentré.<br class='autobr' /> enfin : je suis sorti de chez cette copine.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas rentré chez moi.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas vraiment rentré à l'hosto.<br class='autobr' /> j'étais sorti pour un week-end complet.<br class='autobr' /> 52 ter<br class='autobr' /> ah fiston ravi d'avoir été voir ce film avec toi : robin des bois. notre première sortie ensemble depuis des mois. vuke y avait eu toi au bout du fil voici des mois : <br class='autobr' /> nonpapajeneviendraipluchétoi.</p> <p>53 ter<br class='autobr' /> tiens ? errol flynn avait déjà joué le rà´le de robin au cinoche. il est mort d'alcoolisme à cinquante vergetures.<br class='autobr' /> sale habitude.</p> <p>54 ter<br class='autobr' /> errol Flynn, héros archetypal. de la forêt sombre sombre sombre de sherbottle !<br class='autobr' /> chère bottle ! (pour ceux qui…)<br class='autobr' /> 55 ter<br class='autobr' /> je te jure je vais reprendre des chats.<br class='autobr' /> des ?<br class='autobr' /> ouais : des.</p> <p>56 ter<br class='autobr' /> une vie sans chats est pire qu'une vie sans flacon.</p> <p>57 ter<br class='autobr' /> indépendants, autonomes, souvent décidés sans avoir recours à la flasque qui conduit à la mollesse, et toujours reconnaissants.<br class='autobr' /> mais si nécessaire, ils te virent.<br class='autobr' /> j'ai pigé. la fameuse D.A.<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> dépendance. affective. ils connaissent pas. ils sont pas addicts. ils sont felix.</p> <p>58 ter<br class='autobr' /> men at work.</p> <p>59 ter<br class='autobr' /> ils me proposent de venir en jour. de ne plus dormir ici.<br class='autobr' /> déjà que j'étais venu en douce !</p> <p>60 ter<br class='autobr' /> il pleut des seaux sans vin blanc.<br class='autobr' /> je n'ai jamais compris comment les voitures se retrouvent en avant.<br class='autobr' /> j'arrive de la droite le virage mène ensuite à gauche et, là , je suis devant.<br class='autobr' /> je tourne vers la gauche, angle droit, vraiment, feux rouges, pas blancs.<br class='autobr' /> je passe sur le pont en dessous duquel sous lequel je suis passé avant quelques seconds seulement.<br class='autobr' /> soudain je l'aperçois.<br class='autobr' /> sans vin blanc.<br class='autobr' /> je l'aperçois.<br class='autobr' /> elle court sous les seaux sans vin blanc. <br class='autobr' /> sans doute que son patron l'attend maintenant.<br class='autobr' /> courrir.<br class='autobr' /> flétrir.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> 61 ter<br class='autobr' /> bonjour facteuse ! vous avez des nouvelles de “o†? <br class='autobr' /> il était avec moi à l'hosto.<br class='autobr' /> ah ! facteur ! <br class='autobr' /> ils se foutent de votre gueule vos manageurs !</p> <p>62 etr<br class='autobr' /> etc.</p> <p>63 ter<br class='autobr' /> il faut savoir.</p> <p>64 ter<br class='autobr' /> savoir dire non.</p> <p>65 ter<br class='autobr' /> au fond.</p> <p>66 ter<br class='autobr' /> mais oui !</p> <p>67 ter<br class='autobr' /> non je vais pas acheter ce divan, plutà´t cet autre, là .<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> me fait trop penser à la psychanalyse !<br class='autobr' /> 68 ter<br class='autobr' /> des gamins des gamines.<br class='autobr' /> mauvaises mines.<br class='autobr' /> leur prof n'est pas spécialement fine.<br class='autobr' /> certains ont une angine.<br class='autobr' /> certains voudraient montrer leur pine.<br class='autobr' /> de rage.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> et pourquoi ne pas vivre à l'hosto ?<br class='autobr' /> à vie.</p> <p>69 ter<br class='autobr' /> speechless.</p> <p>70 ter<br class='autobr' /> the age of self</p> <p>71 ter<br class='autobr' /> tu voulais faire quoi, DANS la vie ?<br class='autobr' /> la question étant : je suis venu faire quoi DANS la vie ?</p> <p>72 ter<br class='autobr' /> mais non, tu ne tombes pas.<br class='autobr' /> le garagiste du coin, lui il tombe.<br class='autobr' /> oui, dans sa fosse.</p> <p>73 ter<br class='autobr' /> toutes ces choses qui ne nous serviront plus quand nous serons morts.<br class='autobr' /> tous les livres que nous auron écrits, tous les livres que nous aurons écrits, <br class='autobr' /> toutes les voitures que nous aurons dépannées.<br class='autobr' /> les choses ne nous servent qu'à la condition d'être encore vivants.<br class='autobr' /> une bouteille vide ?</p> <p>74 ter<br class='autobr' /> revenons dehors. partons de l'intérieur.</p> <p>75 ter<br class='autobr' /> little red robin hood hit the road.</p> <p>76 ter<br class='autobr' /> on peut faire sans.<br class='autobr' /> sans quoi ?<br class='autobr' /> sans toutes ces choses.<br class='autobr' /> ok, je ferai avec.</p> <p>77 ter<br class='autobr' /> revenons dehors.<br class='autobr' /> ppppffff ! trop dur ! dehors, c'est le soleil MAIS la tempête, le chaud MAIS le froid, les feuilles mais les branches dénudées, les grosses nanas MAIS les maigres, et surtout : <br class='autobr' /> la télé, la télé, la téle, la télé.<br class='autobr' /> ouais mais la télé on l'a aussi ici dedans, derrière les murs de l'hà´pital, dans les murs, sous les murs, en cueillant des murs.</p> <p>78 ter<br class='autobr' /> oui, j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> mais je n'ai pas réussi la và´tre.<br class='autobr' /> mon fusain était usé.</p> <p>79 ter<br class='autobr' /> oui j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> j'ai arrêté de boire à vie. <br class='autobr' /> dernier avis.</p> <p>80 ter<br class='autobr' /> dehors :<br class='autobr' /> violence<br class='autobr' /> destruction<br class='autobr' /> obsessions<br class='autobr' /> passions.<br class='autobr' /> dedans :<br class='autobr' /> violence destruction obsessions passions.</p> <p>82 terre<br class='autobr' /> îles.</p> <p>83 ter<br class='autobr' /> now you're wandering what to do,<br class='autobr' /> now it's the end.</p> <p>84 ter</p> <p>je suis pas diffcile. <br class='autobr' /> pas vrai.<br class='autobr' /> tu me proposes une jolie femme nue sur mon lit…</p> <p>85 ter<br class='autobr' /> l'érotisme, c'est bizarre, et cà marche !<br class='autobr' /> bon… tu veux une médaille ou des menottes ?</p> <p>86 ter<br class='autobr' /> dehors, c'est quoi ?<br class='autobr' /> c'est de hors.<br class='autobr' /> tu te crois drà´le ?</p> <p>87 ter<br class='autobr' /> dedans c'est quoi ?<br class='autobr' /> de dans, cachés.</p> <p>88 ter<br class='autobr' /> allo la 88ème terre ?</p> <p>89 ter<br class='autobr' /> non mais je vais où moi ?</p> <p>90 ter<br class='autobr' /> dehors.</p> <p>mais c'est où mais c'est où mais c'est où,<br class='autobr' /> le pays de la liberté ?<br class='autobr' /> sans bis, sans repetita.</p> <p>dans la main mon portable.<br class='autobr' /> suis-je transportable ?<br class='autobr' /> on arrive.<br class='autobr' /> j'attends sur le pas de la porte.<br class='autobr' /> jaune l'ambulance.<br class='autobr' /> jaune violent<br class='autobr' /> un conducteur sans travaux.<br class='autobr' /> un convoyeur coréen. jaune ? allez, arrête !<br class='autobr' /> moi même pas sur un brancard.<br class='autobr' /> et puis quoi ?<br class='autobr' /> vieille l'ambulance.<br class='autobr' /> pas confort, l'ambulance.<br class='autobr' /> pas demandé à vivre, moi.<br class='autobr' /> et eux ? le conducteur ? le convoyeur ? pas demandé à convoyer ?</p> <p>on va vous conduire aux urgences… mais faut pas rêver…<br class='autobr' /> non, faut pas…</p> <p>alors vous buvez… combien ?<br class='autobr' /> ouh la…</p> <p>on peut vous garder une nuit.<br class='autobr' /> pas plus ? normal. <br class='autobr' /> la cure après la curée.</p> <p>mais votre pouls est bon. vous êtes solide.l'écho de votre estomac aussi.<br class='autobr' /> pas comme l'écho de mes pensées.<br class='autobr' /> bah, ça peut arriver à tout le monde. tiens, tenez, justement, ici dans le service, et bien…</p> <p>excusez, monsieur, une jeune fille va venir vous tenir compagnie. on va tendre ce rideau, là .<br class='autobr' /> je vous en prie. enfin : on vous en prie. je suis à plusieurs dans ma tête.<br class='autobr' /> ah ! cette blague-là elle est connue !</p> <p>ah merde elle m'a pissé dessus quand je lui ai enlevé sa culotte. ppppsss son string… oh non… elle chie maintenant… pas possible quoi… ces séries de merde à la télé… ils savent pas de quoi ils causent.<br class='autobr' /> ils savent. des gens s'y chient dessus. on ne le filme pas. <br class='autobr' /> storyboard. <br class='autobr' /> prison.<br class='autobr' /> putain merde qu'est-ce qu'elle est migonnne. infirmier ou pas. bousillée. remets. remets le masque à oxygène.</p> <p>qu'est-ce que je fous là ?</p> <p>voilà la famille les proches la famille les proches… <br class='autobr' /> bien vous êtes qui ? <br class='autobr' /> son ex-peti-tami ? <br class='autobr' /> vous avez rompu ? <br class='autobr' /> ce soir-là justement ? <br class='autobr' /> hier, quoi. bon. <br class='autobr' /> et maintenant elle est ici.<br class='autobr' /> elle a bu quoi ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non…<br class='autobr' /> d'accord, elle s'est endormie dans la baignoire.<br class='autobr' /> non, y a pas de quoi rire. on rit, nous ? <br class='autobr' /> d'accord, il a maintenu sa tête hors de l'eau.<br class='autobr' /> sa tête.<br class='autobr' /> hors.<br class='autobr' /> mais qu'est-ce qu'elle avait dans la tête ?<br class='autobr' /> que vous l'avez plaquée en début de soirée ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> vous avez tort.<br class='autobr' /> elle a bu.<br class='autobr' /> pour aussi peu. <br class='autobr' /> comme vous dites.<br class='autobr' /> elle est partie, où ? la gamine ?<br class='autobr' /> elle a foutu le camp.<br class='autobr' /> où ?<br class='autobr' /> vous savez bien.</p> <p>A UNE HEURE DE GRANDE ECOUTE<br class='autobr' /> Récits</p> <p>Pascal Samain<br class='autobr' /> Rue du Pont 6<br class='autobr' /> 7011 Ghlin<br class='autobr' /> Belgique<br class='autobr' /> pascal@pascalsamain.be<br class='autobr' /> <a href="http://pascalsamain.be" class='spip_url spip_out auto' rel='nofollow'>http://pascalsamain.be</a><br class='autobr' /> 00 32 496 307742</p> <p>alors (l…) a pris un bâton d'ice cream pour faire une attelle et retaper l'oiseau.<br class='autobr' /> Dan Fante, dans une traduction de Léon Mercadet</p> <p>il passait des mois entiers seul dans une chambre, mangeant à peine, plongé dans un rêve éveillé.<br class='autobr' /> Ronald Laing</p> <p>le tocsin sonne.<br class='autobr' /> on arrête de jouer.<br class='autobr' /> Louis Calaferte</p> <p>il faut que tu respires, <br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire ;<br class='autobr' /> tu vas pas mourir de rire,<br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire.<br class='autobr' /> Mickey 3D</p> <p>Pour Dan Fante, qui ne lit pas un putain de mot en français</p> <p>1</p> <p>tu aimes le foot<br class='autobr' /> que tu me dis, <br class='autobr' /> j'ai pas de doutes<br class='autobr' /> que je te dis.<br class='autobr' /> mais ta place je la paye <br class='autobr' /> en monnaie de singe. <br class='autobr' /> le feu dans mes méninges, une clé de merde dans ma bouche, une bouche de merde clé sur porte,<br class='autobr' /> que des mots qui en sortent, <br class='autobr' /> bouffis décolorés dissous collés voilés au palais <br class='autobr' /> enfermés à hurler on n'est pas des perroquets on n'est même pas des sirènes.<br class='autobr' /> ma bouche, mais je te paye en monnaie de singe.<br class='autobr' /> au fait, c'est quand qu'elle t'es venue ta passion pour les singes<br class='autobr' /> du foot ? <br class='autobr' /> j'aime le foot que tu me dis, traîne pas en route que je te dis,<br class='autobr' /> dehors <br class='autobr' /> la neige, les glaces déformées, les miroirs, le cosmos tu as ta carte de train ? tes livres d'école ? traîne pas en route, je suis pressé, toi devant le miroir, traîne pas sur le trottoir, je suis pressé comme un litron, à sept heures qu'elle ouvre la station, un litron, le premier, je ne traîne pas, moi, <br class='autobr' /> et ton papa te paye ta place en monnaie de singe.</p> <p>2</p> <p>les gens pensent que l'alcool est une maladie, les gens répètent que l'alcool est une maladie, les gens ont entendu dire que l'alcool est une maladie, les gens se persuadent que l'alcool est une maladie, les gens persuadent les autres gens que l'alcool est une maladie,<br class='autobr' /> ils ne trouvent pas le microbe le gène la bactérie,<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> les gens, ils boivent.</p> <p>3</p> <p>le facteur il boit<br class='autobr' /> l'éboueur il boit<br class='autobr' /> le maçon il boit<br class='autobr' /> ils ne font pas semblant d'être malades ils boivent.</p> <p>4</p> <p>au fond, ils vivent comme des microbes.<br class='autobr' /> sous la robe du vin.<br class='autobr' /> dans le faux-col de la bière.<br class='autobr' /> y a des liqueurs sucrées qui tuent sec.</p> <p>5</p> <p>les madames elles boivent.</p> <p>6</p> <p>elle quitte sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle double sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle va au magasin, elle ne se sent pas trop bien, elle embauche son vieux vélo, elle enfourche son vieux cabas, elle remplit son vieux cabas, <br class='autobr' /> des bouteilles, à ras,<br class='autobr' /> douze canettes dans les bras, personne d'autre sous les draps, des trous dans le pyjama, les taches de pisse sur le matelas.<br class='autobr' /> (elle est honteuse, à ras.)</p> <p>7</p> <p>le psychiatre dit ah venez en ville avec moi, et des alcooliques, on va en remplir trois pleins cars !<br class='autobr' /> bon, c'est toi qui conduit, mec ?</p> <p>8</p> <p>un gros, et son mur qui gagne son pain en le soutenant, un gros, il est plein aux trois-quarts.<br class='autobr' /> il serait dans le car du psychiatre, lui.<br class='autobr' /> je suis dans le cas.<br class='autobr' /> il sème derrière lui sa vie en croùtons de pain pourri et le pigeon c'est lui.</p> <p>9</p> <p>alors le grand-père explique à sa petite-fille bon maintenant qu'on a fini les courses on va aller boire un coup regarde mes mains tremblent<br class='autobr' /> tellement<br class='autobr' /> que j'en ai envie<br class='autobr' /> de boire un coup<br class='autobr' /> tellement.<br class='autobr' /> mais non, grand-papa, ce n'est pas à cause de ça.<br class='autobr' /> bien ! <br class='autobr' /> dans ce cas ma chérie tire la chevillette et la canette cherra !</p> <p>10</p> <p>en gros voilà c'est ça,<br class='autobr' /> il n'y a pas de mal à se faire du bien, un petit verre après le boulot c'est ça, ça aide, et d'abord les autres ont encore commandé une tournée, j'arrive, j'arrive, dans une heure j'arrive, on refait le monde (qui nous a repeints depuis longtemps), c'est quoi qu'on mange ?, non je n'ai pas très faim les enfants vont bien ?, <br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets,<br class='autobr' /> je te parjure.<br class='autobr' /> en gros voilà c'est ça.<br class='autobr' /> je n'ai pas très faim de la vie.<br class='autobr' /> ni de toi.<br class='autobr' /> ni de moi.</p> <p>11</p> <p>ma foi, pour son âge, encore de belles jambes, ne serait-ce ces poches sous les yeux comme le ventre vide d'une maman de kangourou,<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> juste là , <br class='autobr' /> putain que ça se voit !<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> ce bide-là c'est à toi, ce bide distendu par le tanin, en vain, mais là .<br class='autobr' /> ta vie, quelle bide !<br class='autobr' /> (mais la caissière ne le sait pas.)</p> <p>12</p> <p>Aujourd'hui j'ai accroché un papier tue-mouches<br class='autobr' /> à un nuage de ma rue.<br class='autobr' /> j'ai d'abord attrapé des éléphants roses.<br class='autobr' /> puis j'ai pris la peine j'ai pris la pose<br class='autobr' /> (longtemps !),<br class='autobr' /> alors j'ai attrapé les ivrognes qui vont avec.<br class='autobr' /> et voilà c'est comme ça qu'on fait mouche.</p> <p>13</p> <p>mais si, tu bois !<br class='autobr' /> mais non, je ne bois pas !<br class='autobr' /> mais si tu bois !<br class='autobr' /> je ne bois pas plus que tout le monde !<br class='autobr' /> parce que tout le monde boit ?<br class='autobr' /> oui, tout le monde boit.<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et c'est ainsi.<br class='autobr' /> (oui, je l'avais déjà remarqué.)</p> <p>14</p> <p>cette histoire commence un peu comme ça.<br class='autobr' /> ce garçon est le frère de sa soeur, aînée qu'elle est la soeur.<br class='autobr' /> un peu plus loin dans l'histoire, la soeur aînée s'inquiète de son frère<br class='autobr' /> qui boit,<br class='autobr' /> qui boit trop,<br class='autobr' /> qui boit plus que tout le monde.<br class='autobr' /> même si tout le monde boit.<br class='autobr' /> la soeur aînée va trouver son frère<br class='autobr' /> parce que justement<br class='autobr' /> elle vient de trouver les mots justes à lui dire.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> depuis un moment j'observe ta déchéance.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> souviens-toi de toutes les belles choses que tu as faites dans ta vie !<br class='autobr' /> (avant.)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> à toi de savoir si tu veux mourir ou pas !<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu as un fils (quand même !)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu ne te vois pas ?<br class='autobr' /> TU NE VOIS PAS CE QUE TU ES DEVENU ?<br class='autobr' /> (une loque, une épave, un déchet, sans doute, ou quelque chose d'approchant.)<br class='autobr' /> mais le garçon, lui, se voit, même flou dans le cul d'une bouteille, n'en déplaise à sa soeur.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> un peu plus loin encore dans l'histoire,<br class='autobr' /> il préfère ne plus adresser la parole à sa soeur,<br class='autobr' /> car voyons, fait-on remarquer à un cul-de-jatte qu'il n'a plus qu'un bras <br class='autobr' /> tandis que les gens normaux sont si sùrs d'en avoir deux ?</p> <p>15</p> <p>un homme qui boit, disons ça va.<br class='autobr' /> mais une femme qui boit !<br class='autobr' /> mon dieu non,<br class='autobr' /> ça,<br class='autobr' /> ça ne va pas !</p> <p>16</p> <p>papa, tu serres trop à droite.<br class='autobr' /> tu me racontes quoi ? je roule bien au milieu !<br class='autobr' /> (j'ai toujours été un bon conducteur.)</p> <p>17</p> <p>tiens au fait : toi.<br class='autobr' /> tu sais pourquoi tu bois ?<br class='autobr' /> oui, la psychologue me l'a expliqué.<br class='autobr' /> (ah ?)</p> <p>18</p> <p>et maintenant putain de merde,<br class='autobr' /> s'ils me foutent à la porte de l'hà´pital,<br class='autobr' /> putain !<br class='autobr' /> ils ont intérêt à me filer tous les médicaments que je veux !<br class='autobr' /> (sinon comment veux-tu que je m'en sorte ?)</p> <p>19</p> <p>la fête, la fête, tu parles !<br class='autobr' /> noà« l, tu parles !<br class='autobr' /> après six verres de rouge, papy va déprimer et monter se coucher<br class='autobr' /> (vu que mamy est morte l'année passée.)<br class='autobr' /> dès le champagne, machin va déconner !<br class='autobr' /> truc va s'enfiler cinq bouteilles, il finira par chialer <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> comme d'habitude !-,<br class='autobr' /> chose va cuver devant la télé,<br class='autobr' /> bidule va boucher les cabinets avec du vomi de poulet,<br class='autobr' /> et l'autre là , va s'étaler dans la cuisine !<br class='autobr' /> oui mais c'est la fête, alors…</p> <p>20</p> <p>le commissaire a pénétré les lieux du crime.<br class='autobr' /> les acteurs n'avaient pas encore quitté la scène du méfait.<br class='autobr' /> mais comme le commissaire n'avait pas bu,<br class='autobr' /> il n'a pas pu<br class='autobr' /> vraiment<br class='autobr' /> participer à cette discussion de bitus.</p> <p>21</p> <p>es-tu vraiment obligé de boire ?<br class='autobr' /> obligé, obligé, non…<br class='autobr' /> tu pourrais essayer autre chose ?<br class='autobr' /> oui je pourrais être propriétaire d'une voiture<br class='autobr' /> et la laver chaque jour tant que le temps dure,<br class='autobr' /> pour oublier cette douleur qui dure.</p> <p>22</p> <p>vraiment je ne crois plus en rien.<br class='autobr' /> cependant ce que je crois bien<br class='autobr' /> c'est que c'est le matin<br class='autobr' /> et que si je ne bois rien de ce putain de vin,<br class='autobr' /> mes doigts vont continuer à trembler,<br class='autobr' /> ça je le croirais bien.</p> <p>23</p> <p>avez-vous déjà été de pierre ?<br class='autobr' /> avez-vous déjà été pétrifié ?<br class='autobr' /> par quoi ? nul ne le sait, mais pétrifié.<br class='autobr' /> dans ces moments-là , plus rien ne va comme ça devrait aller,<br class='autobr' /> ni comme on dit que ça devrait aller.<br class='autobr' /> ça ne va pas bien, <br class='autobr' /> vous n'allez pas bien,<br class='autobr' /> vous êtes devenu de pierre.<br class='autobr' /> être de pierre, ça ne va pas, pour un être de chair.<br class='autobr' /> un être de chair, ça bouge<br class='autobr' /> (à´ dans les limites des lois de la gravité !)<br class='autobr' /> un être de chair, ça vit<br class='autobr' /> (à´ dans les limites du bocal !)<br class='autobr' /> un être de chair ça ressent des choses du vécu ça analyse ça comprend</p> <p>et ça le dit aux autres,<br class='autobr' /> ce que ça comprend.<br class='autobr' /> mais, comprenez-vous ça ?, vous, vous êtes de pierre.<br class='autobr' /> une pierre c'est plein de gravité ça ne bouge pas ça ne comprend<br class='autobr' /> rien<br class='autobr' /> que du gravas<br class='autobr' /> autant dire rien.<br class='autobr' /> pas la peine de calculer, de chercher une pierre aux riens,<br class='autobr' /> pour vous ça ne va pas bien.<br class='autobr' /> qu'est-ce qu'on boirait bien ?<br class='autobr' /> (un petit rien, une goutte, juste une goutte pour diluer ce qui ne va pas bien.)</p> <p>24</p> <p>l'alcool, c'est une maladie ?<br class='autobr' /> à ce qu'on dit…<br class='autobr' /> (et qui vous l'a dit ?)</p> <p>25</p> <p>que l'alcool est une maladie, vous l'avez lu, ça ?<br class='autobr' /> oui, quelque part… <br class='autobr' /> en tout cas, on le dit.<br class='autobr' /> c'est du sérieux ?<br class='autobr' /> oui, mais j'ignore si on en guérit !<br class='autobr' /> vous, vous ne buvez pas, vous, je le vois bien !<br class='autobr' /> oh non oh non pas du tout ! juste un peu, après le travail, mes trois bières d'abbaye, mais ces trois bières-là , justement c'est comme un abbaye, quoi,<br class='autobr' /> ça calme !</p> <p>26</p> <p>écoutez…<br class='autobr' /> écoutez…<br class='autobr' /> après tout je ne suis jamais que votre gé-né-ra-li-ste…<br class='autobr' /> votre toubib de tous les jours…<br class='autobr' /> (mais moi ça tombe bien je bois tous les jours !)<br class='autobr' /> alors alors il y a toujours un moment comme ça…<br class='autobr' /> où je suis bien obligé d'abandonner…<br class='autobr' /> la partie…<br class='autobr' /> ce n'est pas que je laisse tomber…<br class='autobr' /> mais allez donc voir ce psychiatre que je vous ai recommandé…<br class='autobr' /> (si j'arrive jusque là …)<br class='autobr' /> il s'y connaît mieux que moi,<br class='autobr' /> vous verrez… enfin… il verra… vous voyez ?<br class='autobr' /> (oui mais quoi ?)<br class='autobr' /> il y a de fortes chances … il vous écoutera<br class='autobr' /> puis c'est debout qu'il se mettra,<br class='autobr' /> il tapera du poing sur la table… très fort… très très fort…<br class='autobr' /> avec son poing droit <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> il le fait toujours, c'est comme ça !-<br class='autobr' /> il vous dira :<br class='autobr' /> « monsieur, si vous continuez à boire<br class='autobr' /> vous allez vous retrouver dans une prison noire<br class='autobr' /> dont vous ne sortirez plus jamais alors s'il vous plaît apprenez à marcher droit<br class='autobr' /> bordel de merde !<br class='autobr' /> et je vous donnerai les médicaments qu'il faudra. »<br class='autobr' /> (mon médicament c'est l'alcool.)<br class='autobr' /> donc vous verrez… vous verrez…<br class='autobr' /> il vous fera très peur, il vous foutra la trouille de votre vie, il y arrivera,<br class='autobr' /> en se mettant debout devant vous.<br class='autobr' /> (mais moi je vis déjà couché !)<br class='autobr' /> et vous,<br class='autobr' /> vous,<br class='autobr' /> vous comprendrez !<br class='autobr' /> (mais moi je ne verrai rien, rien du tout, les alcoolos n'ont pas peur de boire, ça se saurait, mais alors de quoi ont-ils peur ? sinon ils ne boiraient pas, ça se saurait.)<br class='autobr' /> vous verrez, ce psychiatre est fort, il est vraiment très très fort.<br class='autobr' /> 27</p> <p>maman maman dommage que tu sois là comme ça<br class='autobr' /> comme une conne à plat<br class='autobr' /> enfin ils t'ont bien maquillée bien retapée on dirait que c'est toi,<br class='autobr' /> et tiens je te glisse<br class='autobr' /> une photo de ton petit fils<br class='autobr' /> oui celle avec toi.<br class='autobr' /> celle-là ,<br class='autobr' /> celle du baiser propice.<br class='autobr' /> bon tu n'es plus vraiment là <br class='autobr' /> (mais nous deux on est seuls, là , personne n'a voulu monter la garde recevoir les cartes de visite les fleurs ni les humeurs de ceux qui ont si peur quand est mort l'un des leurs, personne pas même ton mari mon papa.)<br class='autobr' /> maman maman dommage que tu ne m'entendes pas !<br class='autobr' /> tu étais infirmière tout le monde sait ça,<br class='autobr' /> et donc même si tu ne m'entends pas<br class='autobr' /> je tiens à te dire merci,<br class='autobr' /> à moins que tu m'entendes ? je voudrais que tu m'entendes !,<br class='autobr' /> merci d'avoir pris soin<br class='autobr' /> de moi<br class='autobr' /> si bien.<br class='autobr' /> dans ton sein j'ai fini par le croire qu'il y avait déjà de la bière.<br class='autobr' /> une bière, <br class='autobr' /> bien bonne et bien noire <br class='autobr' /> ça favorise<br class='autobr' /> la montée de lait.<br class='autobr' /> mais<br class='autobr' /> tu ne m'as pas abandonné là en si bonne voie.<br class='autobr' /> plus tard à table on buvait de la bière,<br class='autobr' /> qui s'appelait « bière de ménage » avec si peu de degrés mais pas mal<br class='autobr' /> de caractère<br class='autobr' /> au bout du compte,<br class='autobr' /> mais bon elle nous ménage.<br class='autobr' /> tu te souviens de la fois<br class='autobr' /> (oui je vois que tu t'en souviens je le vois)<br class='autobr' /> où encore dans ce qu'on nomme l'enfance j'avais bu<br class='autobr' /> en cachette <br class='autobr' /> (à ce mariage),<br class='autobr' /> j'étais pompette,<br class='autobr' /> toi dans une robe coquette<br class='autobr' /> et ton sourire qui signifiait tu es un peu jeune pour commencer,<br class='autobr' /> et au bout du compte ça te rend mignon d'être rond<br class='autobr' /> d'être complètement rond.<br class='autobr' /> (je t'apprends maintenant qu'un peu plus tard ce jour-là je n'en suis pas resté là , <br class='autobr' /> torché comme un vieux toit je suis parti m'allonger au beau milieu d'une route de béton,<br class='autobr' /> en contrebas,<br class='autobr' /> certain que j'étais<br class='autobr' /> que j'allais<br class='autobr' /> pouvoir arrêter<br class='autobr' /> les voitures qui s'avançaient avec danger si près de moi<br class='autobr' /> allongé sur le béton, et le goudron qui me collait le pantalon mais bon j'étais rond,<br class='autobr' /> ça va ça va ne t'inquiète pas, j'entendais encore les voix des oncles qui racontaient des blagues interdites aux enfants, ça va ça va je n'étais pas si rond que ça, j'entendais encore les voix des oncles qui dégueulaient la moitié de leur repas !)<br class='autobr' /> maman maman<br class='autobr' /> j'ai eu quinze ans<br class='autobr' /> ni p'tit ni grand,<br class='autobr' /> après la messe avec les copains je repassais déjà au bistrot du coin<br class='autobr' /> et dans l'après-midi tu m'épongeais le front d'une serviette humide,<br class='autobr' /> et tiens, tant que tu es là , ne t'en va pas,<br class='autobr' /> pas avant que je te reparle du médecin de famille<br class='autobr' /> accouru au chevet de papa<br class='autobr' /> pour toutes les maladies qu'il n'avait pas, toi tu finissais souvent <br class='autobr' /> par dire :<br class='autobr' /> docteur (tu disais toujours docteur aux docteurs),<br class='autobr' /> docteur je vous sers une petite goutte ?<br class='autobr' /> c'était comme ça en ce temps-là <br class='autobr' /> il n'y a pas de quoi fouetter un chat,<br class='autobr' /> d'ailleurs monsieur le vicaire<br class='autobr' /> aussi il aimait la bière,<br class='autobr' /> celle que papa ramenait de la campagne,<br class='autobr' /> attention !<br class='autobr' /> fermée avec un vrai bouchon,<br class='autobr' /> fermentée en bouteille au moins six mois,<br class='autobr' /> et pan ! la mousse beige la robe brune<br class='autobr' /> on s'en foutait plein l'urne !<br class='autobr' /> maman maman maintenant<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi, <br class='autobr' /> ne vois aucun rapport entre toutes ces choses-là ,<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi,<br class='autobr' /> moi je vais repasser à la station<br class='autobr' /> m'acheter du soda bourré de vodka,<br class='autobr' /> allez je te laisse dans ta bière,<br class='autobr' /> moi je ne suis même pas le clou de ton cercueil.<br class='autobr' /> du moins pas celui-là .</p> <p>28</p> <p>Ils sont en train de chercher le gène de l'alcoolisme,<br class='autobr' /> lui cependant ,pas con,<br class='autobr' /> lui les a déjà repérés.</p> <p>29</p> <p>madame<br class='autobr' /> jamais je n'aurais imaginé être capable d'érafler la tà´le de votre quatre-quatre <br class='autobr' /> à l'aveuglette<br class='autobr' /> quatre à quatre<br class='autobr' /> on ne fait pas d'omelette sans casser des canettes.</p> <p>30</p> <p>et maintenant.<br class='autobr' /> et ensuite ?<br class='autobr' /> et après…<br class='autobr' /> après tout…</p> <p>31</p> <p>la télé est allumée, couverte de la poussière des centres de cure, magnétisme de misère, cordes délitées, un peu d'astéroà¯de, beaucoup de cendres de beaucoup de cigarettes, beaucoup de couches de beaucoup de vies qui ont mal brùlé, et elle, elle tient sa conférence, avec sous les yeux juste en dessous de la peau pendue rayée, son volcan mal éteint, son passé mal étreint, incendie d'eau, ils ont beau lui donner une charrette de Valiumâ„¢ le soir.</p> <p>32</p> <p>peut-on se noyer dans une bouteille ? <br class='autobr' /> une seule, non sans doute, mais c'est un début.</p> <p>33</p> <p>nager, pourquoi ? <br class='autobr' /> se noyer, pour sùr.</p> <p>34</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la « masturbation » intellectuelle ?</p> <p>35</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la folie ?</p> <p>36</p> <p>comment oses-tu me dire que je suis taré ?</p> <p>37</p> <p>comment oses-tu me dire que je ne suis pas normal ?</p> <p>38</p> <p>on est hors du circuit mais pas en vacances.<br class='autobr' /> on n'est pas en vacances mais on rame.<br class='autobr' /> on n'est pas des touristes.<br class='autobr' /> on est nous aussi de la vie. de la vie on en est aussi.<br class='autobr' /> peut-être plus que vous tous réunis, nous, dans l'auditoire de la mort.</p> <p>39</p> <p>l'infirmier rame. <br class='autobr' /> dans le couloir ils ont installé un rameur. pour la forme. pour notre forme.<br class='autobr' /> mais seul l'infirmier rame à ses heures perdues.</p> <p>40<br class='autobr' /> putain la psychologue a de ces nichons ! <br class='autobr' /> et souriante.</p> <p>41</p> <p>l'assistante sociale se retrouve chaque jour que Bacchus fait devant des mecs qui ont du verre pilé à la place des couilles et face à des nanas qui ont un tesson de bouteille dans le vagin. ça fait mal ça fait mal. vers 17 heures elle rentre à la maison après avoir chopé son gosse à la garderie. <br class='autobr' /> jeune maman elle n'a pas encore de bouteille.<br class='autobr' /> mais elle ne rame pas trop.<br class='autobr' /> 42</p> <p>la douche est collective, la douche est commune, prendre une douche c'est commun. mais toi tu t'étais abandonné comme une vieille loque desséchée dans la salle d'attente étriquée d'un purgatoire interminable. l'alcolo ne se lave plus, il s'en fout de ses cheveux devenus trop longs, il s'en fout de ses ongles de pieds poussés trop fort, il s'en fout de ces petites merdes coincées sous les paupières, il ne s'en fout pas de son cerveau trop gros coincé sous son crâne.</p> <p>43</p> <p>il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout.<br class='autobr' /> non il ne s'en fout pas. <br class='autobr' /> Il n'est pas si fou.</p> <p>44</p> <p>voilà bien la course des humains : quelque chose plutà´t que rien.<br class='autobr' /> et celle des buveurs : rien plutà´t que quelque chose.</p> <p>45</p> <p>tu prendras bien quelque chose ?</p> <p>46</p> <p>qu'est-ce que vous prendrez ?</p> <p>47</p> <p>on ne m'y prendra plus.</p> <p>48</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre (mais qu'est-ce qu'une tête de ?)</p> <p>49</p> <p>une cravate alors ?</p> <p>50</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre. une tignasse de hippie un peu, dirait-on, un vieux groupe de rock, parfois en catogan, un vieux t-shirt vert usé, et des baskets d'ado. il me tape sur le bide, il me dit tu sais moi aussi j'ai fait une dépression. <br class='autobr' /> et son sourire de latino.</p> <p>51</p> <p>bonjour madame, que pensez-vous de votre psychiatre ?<br class='autobr' /> il est bien (sous tous les rapports.)<br class='autobr' /> ah ?<br class='autobr' /> oui, il porte une cravate chose, un pantalon machin (oh j'ai vu le même dans une galerie !), des souliers pointus cirés avec du cirage truc (on sent que son petit personnel est de qualité), son caleçon vous pensez je n'y pense pas, puis des lunettes car-ré-es à la mode, devant sa villa se trouve son cabriolet, d'ailleurs chaque week-end il emmène sa maîtresse à la mer, là ils se tiennent la main en amoureux.<br class='autobr' /> ils connaissent les meilleurs restos du coin.<br class='autobr' /> ils savent vivre.<br class='autobr' /> eux.</p> <p>52</p> <p>et il y a aussi ce cinéaste qui explique ceci : que les plus grands créateurs étaient tous alcooliques, <br class='autobr' /> sont tous alcooliques.<br class='autobr' /> et ils le seront ? (où les cinéastes vont-ils chercher leurs idées ? bulle à verre ?)<br class='autobr' /> 53</p> <p>mais non il est complètement con, ce psychiatre !<br class='autobr' /> deux ans que je le vois, et il n'a pas réussi à me faire arrêter de boire.</p> <p>54</p> <p>le mien, il a si je puis dire le bras long. <br class='autobr' /> à force.<br class='autobr' /> partout il transporte son très lourd DSM-IV-TR, le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, quatrième édition révisée. je me reconnais dans la rubrique Troubles Liés à Une Substance. enfin, précisons, si je carbure, au fond, c'est peut-être à cause d'un trouble lié à l'essence, plutà´t.<br class='autobr' /> un manuel agnostique qui n'apporte aucune réponse à qui que quoi dont où quoi que ce soit, et partout nulle part, à la fois. <br class='autobr' /> depuis ma naissance.</p> <p>55</p> <p>un trouble.<br class='autobr' /> et une camisole chimique.<br class='autobr' /> deux forces.</p> <p>56</p> <p>et à la une,<br class='autobr' /> et à la deux, <br class='autobr' /> et à la trois,<br class='autobr' /> DSM quatre.</p> <p>57</p> <p>fiston, il faut que je te le dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, si les accus à plat j'ai arrêté d'accumuler les culs de bouteilles vides dans un coin du garage et si j'ai arrêté d'écrabouiller les canettes de vodka-orange sous le siège de la voiture, ce n'est pas pour moi, pas tellement. l'autre jour j'avais été déposer au moins cinquante vidanges de rouge à la bulle, alors un passant m'a fait remarquer : vous devez boire beaucoup. vous avez une bonne descente. <br class='autobr' /> oui je devais.<br class='autobr' /> oui une bonne descente, en effet, l'enfer n'était plus si loin de moi. à portée de goulot. <br class='autobr' /> ou bien le paradis ?<br class='autobr' /> parce que fiston, il faut que je te dise, après trois Xanax-Retard ®, un Rémergon ©,<br class='autobr' /> et une bonne dizaine de Château-Lafuite®, les draps de mon lit finissaient par avoir l'odeur du linceul, et cette odeur-là n'était pas pour me déplaire. c'est au premier étage que je dormais dès le milieu de l'après-midi, et pourtant je planais vachement plus haut que le premier étage. j'évitais avec soin le grenier où tous nous stockons les souvenirs dont nous ne voulons plus.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, ce n'est pas pour moi.<br class='autobr' /> la mort est inodore, je te le dis.</p> <p>58</p> <p>maman cette nuit j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> je ne m'en suis rendu compte qu'au réveil.<br class='autobr' /> il y avait quelque chose.<br class='autobr' /> insidieusement.<br class='autobr' /> quelque chose d'insidieux qui puait. <br class='autobr' /> quelque chose de lancinant qui puait.<br class='autobr' /> et c'était de la merde.<br class='autobr' /> ma merde.<br class='autobr' /> ma merde, tu l'as bien connue autrefois, ma merde, non ?<br class='autobr' /> donc je voudrais te parler de ma merde, celle de cette nuit. <br class='autobr' /> hier soir, j'étais, comme on dit, rétamé. le cuir passé, martelé par un rétameur du quartier des tannages de peaux, tu sais, cette collection de livres que tu m'achetais quand j'étais morveux, pour me faire connaître le monde. celui-là montrait d'énormes cuves avec du cuir trempé, depuis j'ai visité ce genre d'endroit,<br class='autobr' /> ça pue,<br class='autobr' /> ça pue aussi un peu la merde.<br class='autobr' /> à la fin, au bout de sept bouteilles de pinard (à 8 euros 75 pièce, on n'a que le plaisir qu'on se donne), sept comme dans les meilleurs contes, à la fin j'ai cédé. putain dehors c'était l'hiver livide, dehors. pas que tout semblait être en train de geler, non : tout était gelé pour de vrai. je vais t'aider à comprendre mon objectif. comme tu le sais, j'ai une tête, et dans sa partie supérieure, un cerveau. à un certain endroit de mon cerveau naissent des idées, des idées tantà´t fixes, pas qu'elles soient gelées, non : elles me glacent, moi ; et des idées tantà´t mobiles, toujours en mouvement,<br class='autobr' /> perpétuelles,<br class='autobr' /> en pure perte.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien.<br class='autobr' /> elles ne m'avancent pas.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien d'autre qu'à être là à courir entre mes neurones et qu'à me faire chier.<br class='autobr' /> elles avancent masquées, et ça n'a rien d'un carnaval.<br class='autobr' /> je n'y comprends que dalle, elles sont de plomb, mais qu'est-ce qu'elles galopent !<br class='autobr' /> alors<br class='autobr' /> moi<br class='autobr' /> j'ai pensé que les étouffer dans du vin, leur noyer le cerveau, ça ne me ferait pas de tort.<br class='autobr' /> enfin, pas plus que ça.<br class='autobr' /> or tu vois,<br class='autobr' /> avant ça j'avais avalé plusieurs cachets de XXXXX (copyrighted, d'une seule traite), puis des pilules de YYYYYYYY (registered, c'est un fait), et tu vois, ces bonbons ont si bien déposé leurs marques, et je flottais à un point tel, loin de mes idées fixes, à un point tel que je ne me suis plus senti, ça, je t'ai déjà aidée à comprendre mon objectif. <br class='autobr' /> je ne me suis plus senti, et j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> ça puait, ça collait, c'était froid.<br class='autobr' /> tu m'as déjà connu, maman,<br class='autobr' /> un peu comme ça.</p> <p>59</p> <p>the fact is.</p> <p>60</p> <p>à l'hà´pital, aucun divan.<br class='autobr' /> faut pas qu'on s'affale comme avant.<br class='autobr' /> à l'hà´pital, aucun sofa.<br class='autobr' /> faut pas qu'on retombe aussi bas.</p> <p>61</p> <p>chèèèèrrrr public bonjouuuuuurrrrr ! connais-tu l'histoire de l'ascenseur ?<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> chèèèèèèrrrrr public la voi-ciiiiiii !!!!l<br class='autobr' /> de nos jours on ne compte plus les ascenseurs ! partout il y en a ! des grands et des petits ! des vieux qu'ont bien vécu, des jeunes qui vont nous en faire vivre ! <br class='autobr' /> (au 19ème siècle, déjà !)<br class='autobr' /> (d'ailleurs chérie on n'a jamais fait l'amour dans un ascenseur, ah ah !)<br class='autobr' /> et bien aujourd'hui, notre ascenseur se trouve dans un, je vous le donne en mille !, … un hà´-pi-tal ! très général, hein, l'hà´pital, très général, rien de particulier. l'aphone habituel, la flore intestinale, ah ah ! <br class='autobr' /> et là , dans un coin de l'ascenseur, une dame, la quarantaine la dame, quarante ans à tout casser. <br class='autobr' /> il fait beau… dehors, hein, pas à l'intérieur de l'hà´pital, d'ailleurs passer l'été à l'hà´pital, hein, on vous dit pas.<br class='autobr' /> bref.<br class='autobr' /> la dame, la quarantaine, donc, porte un short, disons une espèce de, disons sur l'étiquette au magasin ils avaient écrit ça : short. elle tripote et tripote et tripote les cordons qui pourraient, éventuellement, au cas où, lui tenir le short à la taille (voir : magasin, nom commun etc.) chèèèèèrrrr public, tu l'as compris : <br class='autobr' /> la dame, elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble parce qu'elle picole.<br class='autobr' /> elle picole parce qu'elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble, alors elle boit.<br class='autobr' /> au début, de l'intérieur, qu'elle tremblait.<br class='autobr' /> maintenant de tout partout.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> humblement,<br class='autobr' /> elle demande au monsieur qui lui fait face monsieur vous ne pourriez-pas s'il vous plaît nouer les cordons de mon short je n'y arrive pas j'ai un problème je tremble.</p> <p>62</p> <p>la dame, la quarantaine, c'était la première fois qu'elle osait venir en parler.<br class='autobr' /> en parler à qui ?<br class='autobr' /> en parler à l'hà´pital, tiens !</p> <p>63</p> <p>putain de main droite de putain de main de putain de main de merde tu restes pas en place, j'ai encore dù utiliser ma main gauche pour te garder en place ! tu as encore cafouillé sur le clavier<br class='autobr' /> du terminal<br class='autobr' /> automatisé<br class='autobr' /> de la banque. <br class='autobr' /> j'avais tapé 368, pas 2b9 !</p> <p>63</p> <p>… mais je ne vais pas te couper, j'ai encore besoin de toi pour tenir la canette !</p> <p>64</p> <p>non monsieur l'agent de police non je ne bois pas !<br class='autobr' /> je me torche !<br class='autobr' /> 65</p> <p>bien bien bien vous l'avez compris (monsieur), vous buviez pour vous anesthésier. pour, en quelque sorte, endormir votre…votre douleur-de-vivre.<br class='autobr' /> non, pas en quelque sorte. souvent du bon vin.</p> <p>66</p> <p>ma douleur ce n'est pas que je m'y vautre, c'est que…</p> <p>67</p> <p>du coup,<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> (bordel c'est ça qu'ils apprennent à l'école, les psys ?)<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire,<br class='autobr' /> sèkeu… vivre, est-ce une telle douleur ?<br class='autobr' /> vivre…<br class='autobr' /> (pour moi, oui.) (bordel.)</p> <p>68</p> <p>alors monsieur comprenons-nous bien, ici personne ne vous demandera d'arrêter de boire, absolument personne, hum !, si vous buvez et bien c'est que vous buvez, et c'est un fait incontournable, et si vous avez commencé à boire c'est que bon vous aviez besoin de commencer à boire, alors oublions que vous buvez, cela n'a finalement aucun intérêt.<br class='autobr' /> on va pas se fixer là -dessus.<br class='autobr' /> et si un jour vous arrêtez de boire, supposons que vous arrêtiez de boire pour… pour… votre petit chien, moi en tant que toubib j'en serais fort heureux ! <br class='autobr' /> (mais il n'a pas de chien, ce buveur !)</p> <p>69</p> <p>buveur invétéré, qu'on dit !<br class='autobr' /> invertébré ?</p> <p>70</p> <p>décervelé ?</p> <p>71</p> <p>ah non ça c'est le but !</p> <p>72</p> <p>you and me at the edge of time.</p> <p>73</p> <p>tu vois, moi non. moi je ne supporte pas que vous disiez à tout bout de champ : j'ai rechuté j'ai rechuté !<br class='autobr' /> d'où ?</p> <p>74</p> <p>oh j'en ai entendu d'autres, monsieur (le psychiatre) ! <br class='autobr' /> que j'étais en pleine déchéance. mais qui m'avait déchu ? pas moi, rien d'autre que le regard des autres…</p> <p>75</p> <p>the fire-sea licking my feet.</p> <p>76</p> <p>on rigole, on rigole.<br class='autobr' /> mais la douleur, ça existe.<br class='autobr' /> une douleur, comme ça, sans nom, qui se balade en vous sans définition possible, qui prend toute la place, qui fait ses petits en vous. une douleur qui ne va pas si mal et qui ne vous va pas bien.</p> <p>77</p> <p>ta douleur ? ta douleur ? allons bon ! c'est facile de parler de douleur, de chercher des excuses alors qu'en fait tu manques de vo-lon-té !</p> <p>78</p> <p>quelle volonté ? de quoi parle-t-on (à la fin ?)</p> <p>79</p> <p>il faudrait d'abord, pour s'entendre, savoir de QUOI on parle, bordel à queue ! après tout, jésus déjà disait : père, pardonne-leur, ils ne savent pas de quoi ils parlent ! c'est vrai : <br class='autobr' /> les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), bon, on leur a appris à parler quand ils étaient petits. ce faisant, ils s'imaginent, les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), ils s'imaginent connaître le vocabulaire ! de fait quand ils vont au supermarché, ils précisent qu'ils ont l'intention de régler par carte bancaire, la caissière les comprend, les gens, nos proches, nos amis, la famille.<br class='autobr' /> la famille. ah, la famille !</p> <p>80</p> <p>tu dis simplement : voilà , j'en ai marre de la vie.<br class='autobr' /> et c'est un scandale.</p> <p>81</p> <p>tu dis : voilà j'ai le cancer.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt auprès de toi avec des bouts de tuyaux qui leur restaient dans la remise.</p> <p>82</p> <p>tu dis : voilà , ça fait trop longtemps que je souffre.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt avec des vitamines.<br class='autobr' /> et tout le monde planque les vitamines.</p> <p>83</p> <p>après tout, il n'a que le cancer…</p> <p>84</p> <p>je vais vous expliquer, moi, je vais vous l'expliquer pourquoi mon frère boit. <br class='autobr' /> je le sais, moi.<br class='autobr' /> c'est parce qu'il est faible.<br class='autobr' /> écoutez, allez, il avait tout pour réussir !<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> mais il est si faible !<br class='autobr' /> (est-ce que je bois, moi ?)</p> <p>85</p> <p>ces deux-là sont tombés amoureux. à l'hà´pital.<br class='autobr' /> d'accord, ils n'allaient pas bien.<br class='autobr' /> ni l'un.<br class='autobr' /> ni l'autre.<br class='autobr' /> lui bon c'est depuis la mort de sa femme (dans un accident de voiture, il conduisait, elle était enceinte de leur première fille et le foetus, on l'a retrouvé sur le pare-brise.)<br class='autobr' /> on peut comprendre, n'est-ce pas ? <br class='autobr' /> on peut comprendre.<br class='autobr' /> elle ? je sais pas. ça tournait pas rond non plus.<br class='autobr' /> ils font partie de ces personnes qui croient échapper enfin à l'alcool<br class='autobr' /> en tombant amoureux.<br class='autobr' /> à l'hà´pital.<br class='autobr' /> (de quoi tu te mêles ?)</p> <p>86</p> <p>à part ça, jésus a dit : aime ton prochain…</p> <p>87</p> <p>et jésus dit : aime ton prochain verre !</p> <p>88</p> <p>fiston, il faut que je te dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, c'est pour toi.<br class='autobr' /> je te le dis, de toi à moi.<br class='autobr' /> il fallait bien que je te le dise.<br class='autobr' /> je suppose qu'il est mieux de te le dire plutà´t que de ne pas te le dire.<br class='autobr' /> je pense vraiment qu'il n'est pas utile de tout dire à son fiston, sauf ce qu'il est mieux de dire plutà´t que de ne pas le dire.<br class='autobr' /> maintenant, ceci étant dit, je peux romancer l'affaire, si tu le souhaites.<br class='autobr' /> c'était un gris dimanche gris d'avril qui ne se découvrait pas d'un fil. comme à mon habitude, j'avais bu dès le réveil, j'étais déjà passé à la station, le dimanche c'est pas lui c'est sa cousine qui tient la boutique. <br class='autobr' /> comme à son habitude elle m'a salué avec gentillesse <br class='autobr' /> sans me poser <br class='autobr' /> la moindre question <br class='autobr' /> du genre : <br class='autobr' /> non mais pourquoi venez-vous acheter cinq bouteilles de rouge chaque dimanche à 7 heures du mat ? <br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> pas par compassion, sans doute.<br class='autobr' /> je faisais tourner la boutique, au fond.<br class='autobr' /> je débouche la première bouteille.<br class='autobr' /> je tremble.<br class='autobr' /> je flippe.<br class='autobr' /> mes mains lâchent la bouteille.<br class='autobr' /> elle va s'exploser la tronche sur les disques de mon chanteur favori.<br class='autobr' /> autour de moi. partout. du verre. du vin.<br class='autobr' /> ça pue. ça pue le vin. ma gueule pue pareil quand j'ai bu. et comme je bois toujours…<br class='autobr' /> tu sais, le vin, ça pue. ah la binette extatique du type à la télé ! il agite avec aaaamour son ballon, ah ça sent la noisette, le fruit rouge avec un arrière-goùt de mort ! arrêtez vos conneries, le vin ça pue ! <br class='autobr' /> j'ouvre une deuxième bouteille. je n'ai pas soif. je n'aime plus le vin. je n'aime plus boire du vin. je bois du vin parce que j'ai la tremblote. j'ai la tremblote. <br class='autobr' /> on appelle ça : le manque. joli mot.<br class='autobr' /> j'abrège la seconde bouteille je l'ai vomie.<br class='autobr' /> et au milieu des bulles de bile qui pétaient sur l'inox de l'évier<br class='autobr' /> de la cuisine,<br class='autobr' /> j'ai vu ton visage,<br class='autobr' /> fiston.<br class='autobr' /> joli mot.</p> <p>89</p> <p>et ce poteau de signalisation qui le regarde, <br class='autobr' /> lui,<br class='autobr' /> qui le nargue.<br class='autobr' /> ta gueule !</p> <p>90</p> <p>cette amie avait un ami.<br class='autobr' /> son ami buvait (beaucoup, mais demeurait toujours poli.)<br class='autobr' /> une fois assis à , par exemple, la terrasse de ce bistrot en face de la gare, <br class='autobr' /> il commandait un « demi de rouge. »<br class='autobr' /> la suite ? vous voulez la suite ?</p> <p>91</p> <p>tous les matins avant même de manger, il vomit.<br class='autobr' /> il ne vomit rien.<br class='autobr' /> juste un peu de cette bile verte<br class='autobr' /> fabriquée à l'intérieur de son corps blanc,<br class='autobr' /> ici, sur la planète bleue.</p> <p>92</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>93</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>94</p> <p>tous les matins…</p> <p>95</p> <p>les matins ? il les vomit tous.</p> <p>96</p> <p>un premier demi de rouge.</p> <p>97</p> <p>merde à la fin on vient ici pour se soigner, on sait très bien qu'on doit arrêter de boire, et puis voilà à la télé en plein salon, à une heure de grande écoute, des pubs pour de l'alcool vraiment c'est de nous qu'on se moque on nous provoque.</p> <p>98</p> <p>je ne sais pas, je me sens divisé.<br class='autobr' /> à quel sujet ?<br class='autobr' /> non, tu ne comprends pas. je suis divisé : moi.<br class='autobr' /> oui mais à propos de quoi ? de toi ?<br class='autobr' /> non tu ne comprends pas. je me sens divisé. une partie de moi dis fais ça, une partie de moi dit fais ci…<br class='autobr' /> ah oui ah oui ah oui je te comprends mieux, c'est le fameux truc de la division entre la raison et les émotions. non ?</p> <p>99</p> <p>aujourd'hui matin je n'ai même pas envie de me laver. non je ne vais pas me laver. j'ai des traces de merde sèche au fond du caleçon, trois jours de merde je crois.</p> <p>100</p> <p>putain l'odeur entre mes orteils ! <br class='autobr' /> 101</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, je m'épilais les poils de bite, j'évitais la brousse.<br class='autobr' /> maintenant, après, maintenant, après, je porte l'odeur de sperme pourri de ma branlette d'hier soir.</p> <p>102</p> <p>je me suis branlé hier soir ? j'ai oublié.</p> <p>103</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, j'éliminais ces morceaux de peau durcie sur la plante de mes pieds.</p> <p>104</p> <p>il va travailler. <br class='autobr' /> un détour par la station. <br class='autobr' /> il achète deux flacons de ce rouge à la con format 50 cl, y a pas de bouchon donc pas de problème à l'ouverture du goulot, en allant travailler, après un détour par la station.</p> <p>105</p> <p>monsieur c'était votre jour d'essai et vous sentiez l'alcool.<br class='autobr' /> je sentais l'alcool ?<br class='autobr' /> je ne l'ai pas remarqué moi-même, mais ma secrétaire avait des doutes, elle est venue m'en parler.<br class='autobr' /> elle avait des doutes sur quoi ? sur le fait que je boive, ou sur le fait que je ne boive pas ?</p> <p>106</p> <p>une bouche de merde, une clef de merde dans ma bouche.</p> <p>107</p> <p>c'était jour de stage, aujourd'hui. le troisième de la semaine de stage, aujourd'hui. <br class='autobr' /> au volant sur l'autoroute, elle a bu six canettes de gin-cola, aujourd'hui. <br class='autobr' /> à l'école, les toilettes étaient fermées, aujourd'hui.<br class='autobr' /> elle est ressortie en rue, mais elle n'a pas trouvé le moindre bistrot, aujourd'hui.<br class='autobr' /> c'était pourtant stage, aujourd'hui.<br class='autobr' /> en revenant vers l'école, elle a pissé sur elle. aujourd'hui, son pantalon était trempé. <br class='autobr' /> trop tard.<br class='autobr' /> alors, avant de se présenter à son troisième jour de stage (c'était aujourd'hui, quand même !), elle est retournée dans sa bagnole, elle a mis le chauffage à fond sur chaud, elle a espéré que son froc sèche vite, vite, vite.<br class='autobr' /> vite.<br class='autobr' /> elle a espéré que personne ne se doute de rien, aujourd'hui.<br class='autobr' /> quand le maître de stage lui a dit votre leçon était bien donnée bravo mais excusez-moi si je vous importune c'est délicat avez-vous hum hum comment ? un problème avec votre séchoir.<br class='autobr' /> (pourquoi ? je la flaire la pisse ? c'est ça ?)</p> <p>108</p> <p>c'est depuis quand que tu aimes le foot, fiston ?<br class='autobr' /> j'avais pas remarqué.</p> <p>109</p> <p>traîne pas en rue.<br class='autobr' /> il fait froid.</p> <p>110</p> <p>fiston.</p> <p>111</p> <p>fiston.</p> <p>112</p> <p>j'arrêterai de picoler, et je passerai des heures à caresser mes chats.<br class='autobr' /> quand j'arrêterai.</p> <p>113</p> <p>elle m'embrassait. je veux dire elle me mettait la langue. elle touchait mes cheveux. elle touchait mes nichons. elle suçait ma bite. elle me mettait un doigt dans le cul. elle hurlait j'aime ta bite. une fois elle m'a mis un concombre dans le cul. c'était froid, putain !<br class='autobr' /> elle aurait pu aussi me sucer les orteils !<br class='autobr' /> mais on s'est tapés sur la gueule.</p> <p>114</p> <p>tu comprends tu comprends tu comprends ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> tu comprends ? six mois que je ne bois plus !<br class='autobr' /> vraiment ?<br class='autobr' /> six mois que je ne bois plus ! tu comprends ? (mais voilà ce week-end y a la ducasse au village et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront.)<br class='autobr' /> nnnnoooonnnn…</p> <p>115</p> <p>mesdames et messieurs, d'emblée je vais commencer mon exposé <br class='autobr' /> par une provocation. <br class='autobr' /> tion.<br class='autobr' /> vous avez tous, je le suppose, entendu parler du bioéthanol, ce carburant qui serait censé éradiquer le problème de la consommation de pétrole<br class='autobr' /> par les humains<br class='autobr' /> à la surface de la terre ?<br class='autobr' /> terre.<br class='autobr' /> j'oserai, mesdames et messieurs, une comparaison,<br class='autobr' /> son, <br class='autobr' /> avec l'éthanol consommé comme carburant par les alcooliques pour éradiquer le problème de la consommation existentielle,<br class='autobr' /> tielle, <br class='autobr' /> des dits alcooliques<br class='autobr' /> à la surface<br class='autobr' /> de leur âme.<br class='autobr' /> (n'est-ce pas ?)<br class='autobr' /> (pas)</p> <p>116</p> <p>n'est-ce pas ?</p> <p>117</p> <p>allez ! à ta santé ! (mentale.)</p> <p>118</p> <p>tale.</p> <p>119</p> <p>neuf.</p> <p>120</p> <p>en matière d'alcool, poser la réponse c'est y répondre.</p> <p>121</p> <p>on était là , on était encore là , et encore ! on était las.<br class='autobr' /> dans un groupe. de parole.<br class='autobr' /> tout à coup sans prévenir, le psychiatre (qui se démet soudain de sa confortable position socratique genre je ne dis rien mais je n'en pense pas moins je ne dis rien c'est à vous de parler qu'est-ce qui va surgir here and now ?), le psychiatre lance comme ça :<br class='autobr' /> et si on parlait des bienfaits de l'alcool ? des bénéfices que vous en tirez ?</p> <p>122</p> <p>alors marc il a lancé comme ça : des bénéfices des bénéfices ? mais on est fauchés, nous autres !</p> <p>123</p> <p>maà¯eutique ta mère !</p> <p>124</p> <p>marc est très drà´le. parfois. quand il n'a pas bu.</p> <p>125</p> <p>madame, moi je vous rendrais bien volontiers votre fils ! bien volontiers ! je n'ai pas pour vocation de hum… « retenir » les gens ! seulement vous le saviez il est hum euh schizotypique il se protège de la euh « vie â…” » en se coupant en deux, enfin je veux dire mais non après tout c'est vrai qu'il y met du sien à se couper en morceaux,<br class='autobr' /> et donc pour y venir,<br class='autobr' /> lors de notre dernière séance il est tombé en deux, par terre, littéralement en deux, un lui, un autre lui.<br class='autobr' /> moi je peux vous expliquer pourquoi à partir d'aujourd'hui vous allez devoir payer deux chambres,<br class='autobr' /> et le pire,<br class='autobr' /> et le pire là -dedans c'est qu'au fond c'est à cause de vous<br class='autobr' /> que <br class='autobr' /> tout<br class='autobr' /> a commencé â„¢.<br class='autobr' /> </p> <p>126</p> <p>alcool : <br class='autobr' /> info ou intox ?</p> <p>127</p> <p>jésus décida ce jour là <br class='autobr' /> de multiplier les personnes pétrifiées de douleur.<br class='autobr' /> la pétrification.</p> <p>128</p> <p>la pétrification vient <br class='autobr' /> aussi en ne mangeant pas.</p> <p>129<br class='autobr' /> mais madame mais madame comment voulez-vous que je vous explique les dessous de l'affaire ? comment ? je ne suis pas DANS lui. j'imagine ce qu'il ressent. j'en ai une idée. une toute petite. <br class='autobr' /> si petite.<br class='autobr' /> vous en avez une si petite ?</p> <p>130</p> <p>d'idée ?</p> <p>131</p> <p>la douleur, le doux leurre<br class='autobr' /> (oh arrêtez vos jeux de mots à la con, les gars !)</p> <p>132</p> <p>les deux lui c'est lui quand même ? mais qui boit ? lui ou l'autre lui ?</p> <p>133</p> <p>quand elle avait poussé la porte de l'hà´pital, elle avait d'abord vu le sourire sympa d'une infirmière qui lui avait balancé : oh la la mademoiselle n'a pas l'air faite pour le bonheur !</p> <p>134</p> <p>je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais.</p> <p>135</p> <p>mon cher père, on peut toujours en causer on peut toujours. de ma douleur.<br class='autobr' /> cependant,<br class='autobr' /> dès que je vais t'annoncer que ma douleur commence avec ta tronche de merde, ça va mal tourner.</p> <p>136</p> <p>papa je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu m'as volé maman !<br class='autobr' /> maman je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu allaitais papa !</p> <p>137</p> <p>en couverture de ce magazine de sciences tousskiliadplusérieu, ils titrent :<br class='autobr' /> quand l'esprit dérape.<br class='autobr' /> petit a :<br class='autobr' /> l'esprit fonctionne ou ne fonctionne pas, il ne marche pas dans tous les cas, donc il ne se casse pas la gueule.<br class='autobr' /> c'est nous qu'on se casse la gueule !</p> <p>138</p> <p>bien-sùr que c'est la faute de la société !<br class='autobr' /> on ne va pas s'étendre là -dessus<br class='autobr' /> (quand même, quand bien même ♭♩♪♫ )</p> <p>139</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> j'ai acheté un microscope une lunette d'astronome et je me scrute. à la longue j'ai cessé de bouger pour ne pas voir trop de choses trop de détails trop d'étoiles mortes trop de minerai appauvri. en moi.<br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> les autres aussi se sont procuré le même équipement. ils me scrutent à leur tour, depuis si longtemps. ça me fait mal. <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ? <br class='autobr' /> je me fais tout petit, petit, petit.<br class='autobr' /> (mais il faut bien que je continue à aller pisser et chier. on n'en sort pas grandi.)</p> <p>140</p> <p>en couverture de ce magazine, ils titrent la psychanalyse peut-elle soigner ?<br class='autobr' /> ils veulent rire ?</p> <p>141</p> <p>ah bon madame vous avez une formation psychanalytique ? manifestement vous ne connaissez pas le préfixe « dé » !</p> <p>142</p> <p>madame, s'y connaître en psychanalyse ou ne s'y connaître en rien, c'est du pareil au même !<br class='autobr' /> voyons voyons la psychanalyse ne cherche pas la guérison !<br class='autobr' /> c'est bien là son symtpà´me !</p> <p>143</p> <p>et la thérapie ? vous y croyez à la thérapie ?<br class='autobr' /> si vous me le dites !</p> <p>144</p> <p>vous y croyez (au moins) ?<br class='autobr' /> +</p> <p>145</p> <p>polize௠drà¤nkt.</p> <p>146</p> <p>morgen wieleicht.</p> <p>147</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> me voilà installé dans « ma » chambre. <br class='autobr' /> un lit, un lit mais pas vraiment d'hà´pital, quelque chose d'un peu plus cosy. on peut régler la tête, pas mal, j'ai déjà remarqué qu'en dormant relevé les cauchemars passent directement du cerveau (ou du siège des émotions ! ah ah !) au trou du cul d'accord ça fait mal en passant mais ça passe plus vite. une armoire qui ferme à clef, clef de merde dans ma bouche, une bouche de merde.</p> <p>148</p> <p>pour avoir quelque espoir de changer quoi que ce soit de sa propre vie, il faut la fracasser.</p> <p>149</p> <p>si on se contentait de fracasser les vidanges ?</p> <p>150</p> <p>il faut il faut il faut, il faut ceci, il faut cela. et pourtant, cette incantation-là , putain, elle est vraie, pour une fois.</p> <p>151</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> une armoire équipée d'une minuscule serrure, le premier venu la crochète, mais le premier venu n'est pas toujours le dernier arrivé.</p> <p>152</p> <p>quand on a bu, on se sent plus fort on conduit mieux on rigole plus on se fait des copains ça donne du courage l'alcool conserve la preuve mon grand-père est mort à 97 ans ça donne du goùt aux pâtisseries et du piment à la vie on fait mieux l'amour après <br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins<br class='autobr' /> on a <br class='autobr' /> a <br class='autobr' /> on.<br class='autobr' /> (laquelle de ces propositions vous ressemble le plus ?)</p> <p>153</p> <p>la gentille demoiselle songe quelques minutes encore au pourtant chouette boulot qu'elle a dù laisser derrière elle<br class='autobr' /> pour un mois<br class='autobr' /> pour un an<br class='autobr' /> (le reste de sa vie ?)<br class='autobr' /> (elle travaillait dans un magasin de vêtements pour enfants.)<br class='autobr' /> elle plonge le regard dans la photocopie qu'un patient lui a laissée sur la tablette du lit (d'hà´pital.) <br class='autobr' /> alors bien vrai ? l'alcool s'attaque à toutes les fonctions de l'organisme ? <br class='autobr' /> bien vrai ? <br class='autobr' /> l'alcool détruit les neurones, les liaisons entre les neurones, l'alcool s'attaque au foie, à la vésicule, troue l'estomac, peut rendre aveugle, ronge la gaine des nerfs, déchausse les dents avant d'entrer dans l'oesophage,<br class='autobr' /> et c'est ainsi qu'ils vécurent et eurent beaucoup de maladies,<br class='autobr' /> des grandes et des moins grandes.</p> <p>154</p> <p>maître corbeau, sur un arbre bourré, tenait en son bec une vidange…</p> <p>155</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le buveur il en a marre de lui-même au point de ne plus prendre soin de lui-même. <br class='autobr' /> aucun.<br class='autobr' /> tu vois ? <br class='autobr' /> mais merde à la fin, je me souviens avoir changé tes langes peints à la diarrhée, coupé les ongles de tes petits petons, décrassé tes yeux divins,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot.<br class='autobr' /> mais merde à la fin pourquoi je me lave plus la raie du cul ?</p> <p>156</p> <p>si l'alcool conserve ?<br class='autobr' /> ça dépend.<br class='autobr' /> tu ouvres un bocal de prunes, c'est un délice.<br class='autobr' /> tu ouvres le bocal d'un alcoolique, ça dégage !</p> <p>157</p> <p>fiston, bien-entendu que derrière tout ça j'ai un problème.</p> <p>158</p> <p>l'alcool fait perdre la mémoire ? attends, ça m'intéresse, moi, ce truc…<br class='autobr' /> faut faire quoi ? le boire ?</p> <p>159</p> <p>suis-je alcoolique ?<br class='autobr' /> suis-je vraiment alcoolique ?<br class='autobr' /> ne suis-je que alcoolique ?<br class='autobr' /> je me cache quelque chose.<br class='autobr' /> mais toi ?</p> <p>160</p> <p>c'est pas possib' de boire autant !<br class='autobr' /> (il est dingue, il détruit tout autour de lui, tout le monde le fuit.)</p> <p>161</p> <p>ah ? mais c'est le but… j'ai envie d'en finir avec tout avant que tout ne finisse de toute façon.</p> <p>162<br class='autobr' /> je te jure, c'est un groupe de malades !<br class='autobr' /> tu as vu ces fans de foot ? ils sont arrangés !<br class='autobr' /> ce film, c'est la folie !<br class='autobr' /> quel truc de débiles !<br class='autobr' /> (arrêtez, quand vous serez vraiment fous, vous comprendrez…)<br class='autobr' /> arrêtez !</p> <p>163</p> <p>mais allez va ! depuis que je ne suce plus, j'ai réalisé que dans les magasins, et bien !, il mettent le rayon alcool juste à l'entrée quand tu rentres à l'entrée quand tu rentres à l'entrée…</p> <p>164</p> <p>fiston, j'entends le vent. énormément de vent. l'hà´pital psychiatrique est construit sur une hauteur, au-dessus de la ville. avant y avait le gibet, ici. on pendait les condamnés à l'écart de la bienséance, du commerce et du culte. puis quand s'est agi de caser les maboules quelque part, si possible loin du regard des bons bourgeois, les zautorités ont choisi le même lieu, tiens ! <br class='autobr' /> la folie dérange bla bla bla je ne vais pas te casser les pieds avec ça…</p> <p>165</p> <p>bla bla bla…</p> <p>166</p> <p>on lui a expliqué ceci :<br class='autobr' /> quand tu auras arrêté de boire (enfin… pas de l'eau hein ah ah ah !), tu verras des alcoolos partout. le mec qui boit, dans la rue, tu le sentiras à 10 kilomètres à la ronde ! la nana du bureau de poste aux yeux jaunes et transparents ! le garagiste à la langue épaissie qui n'a plus que trois doigts à chaque main !<br class='autobr' /> on les repère, on les repère !<br class='autobr' /> (précisons, ils sont par-tout !)</p> <p>167</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> fig.1 (voir plus haut)</p> <p>168</p> <p>il était une fois<br class='autobr' /> un tailleur de pierre<br class='autobr' /> qui chaque jour<br class='autobr' /> taillait la pierre<br class='autobr' /> dans la carrière<br class='autobr' /> de pierre.<br class='autobr' /> un jour qu'il avait introduit le burin vers l'arrière<br class='autobr' /> d'une filière<br class='autobr' /> de pierre<br class='autobr' /> lui parla une grosse pierre :<br class='autobr' /> délivre-moi, délivre-moi, petit tailleur de grosses pierres !<br class='autobr' /> je suis une âme prisonnière<br class='autobr' /> de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> plus loin qu'hier,<br class='autobr' /> plus loin qu'avant-hier,<br class='autobr' /> une brave fermière<br class='autobr' /> m'a enfermé à l'intérieur de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> mais pourquoi ? demanda le tailleur de pierre ?<br class='autobr' /> elle lui répondit, la pierre :<br class='autobr' /> elle en avait plein le cul de moi, je la faisais chier, et comme son mari s'en battait la queue avec une pelle à tarte,<br class='autobr' /> elle m'a taillé cette vilaine croupière !<br class='autobr' /> putain merde connasse !</p> <p>169</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> non, poussière d'ange aussi.<br class='autobr' /> ailes damnées.<br class='autobr' /> envol condamné.<br class='autobr' /> pierre aux pieds.<br class='autobr' /> icarrément.<br class='autobr' /> 170</p> <p>quand il était tout petit déjà :<br class='autobr' /> il perdait ses lattes, il s'emmêlait les pinceaux, il perdait parfois la boule, on ne le comprenait pas, il changeait d'humeur, jean-qui-jean-qui-pleure, il n'allait jamais jusqu'au bout, il n'achevait rien, <br class='autobr' /> bref,<br class='autobr' /> il était déjà une sorte de gamin pourfendu qui n'existait pas vraiment et qui vivait perché.<br class='autobr' /> (oui, loin de vous très loin.)</p> <p>171</p> <p>articule !</p> <p>172</p> <p>achève ce que tu as commencé !</p> <p>173</p> <p>mesdames, messieurs, l'équipe est absolument d'accord que vous nourrissiez les chats sauvages qui vivent dans le parc de l'hà´pital !</p> <p>174</p> <p>tu n'as que six ans et tu te poses trop de questions !</p> <p>175</p> <p>ras-le-bol !<br class='autobr' /> ils font leur café, d'accord (ils ont le droit !), tout le monde n'aime pas le café, mais la question n'est pas là . la question étant, madame l'infirmière, qu'ils laissent traîner leurs tasses, leurs mégots, et le soir ils ont encore le culot de réclamer leur programme télé favori, toujours des feuilletons de mes couilles !, les mêmes conneries amerloques, les pieux de l'amour !, en plus je sais pas si vous savez mais moi je le sais : dans les séries ils picolent, ils se servent un whisky pour un yes pour un no, alors je vous dis pas, non c'est pas ça, je comprends ce que vous dites, je dois aller leur parler à EUX ? c'est ça ? non mais on est dans un hà´pital ici ou quoi ? l'équipe elle sert à quoi ? je paye mon séjour, moi !<br class='autobr' /> (oui, la mutuelle, plutà´t, de fait…)</p> <p>176</p> <p>il ronfle, quoi ! toute la nuit ! je fais quoi ?</p> <p>177</p> <p>on assiste chez le sujet à une lutte pour préserver le sentiment de sa réalité.<br class='autobr' /> (n'importe quoi ! il se noie et se décape dans le pinard !)</p> <p>178</p> <p>moi intérieur  faux moi sans vie</p> <p>179</p> <p>perception irréelle  action insignifiante</p> <p>180</p> <p>réalité ✖ persécution  pétrification<br class='autobr' /> ( tu comprends mieux, fiston ?)</p> <p>181</p> <p>psy ï ¸ chiatre</p> <p>182</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> pas loin se trouve la morgue, <br class='autobr' /> comme pour rappeler que la vie on en meurt à en crever.<br class='autobr' /> (la porte bat au vent, ça fait un peu western glauque !)</p> <p>183</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le parc est grand, le pavillon des grands sérieux jouxte le mien, on peut rejoindre le pavillon des quand-c'est-eux à pied…</p> <p>184</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> on soigne toutes les pathologies des pas trop logiques, dans le coin…</p> <p>185</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> je n'irai pas jusqu'à dire que je les aime d'amour, non. quand tu viendras me saluer, bientà´t, on se baladera dans le parc, et alors tu les verras. <br class='autobr' /> ils me fendent, les « grands malades »â€¦<br class='autobr' /> celui-là fait un pas, stoppe le mouvement, reste là , comme une stèle, justement. derrière ses grosses lunettes, ses yeux s'allument de joie, il se met à sourire, à rire, il cause avec un autre, invisible, qui fait du surplace à ses cà´tés, et il porte de beaux favoris, au fait.<br class='autobr' /> celle-là avance, un lourd sac à la main, elle scrute le ciel toutes les dix secondes, j'ai regardé aussi, je n'ai rien vu, mais elle si : je la crois.<br class='autobr' /> celui-là s'esclaffe qu'aujourd'hui on va manger des calamars ! des calamars ! des calamars ! (fiston, j'ai vérifié, on bouffe du poulet !)<br class='autobr' /> tu feras connaissance avec « le chien », fiston : lui, il se carapate comme un militaire une-deux-une-deux, et de temps en temps il se prend à aboyer : roaoh roah !, peut-être après les chats sauvages, sans doute après des êtres qui lui font du mal et refusent absolument absolument absolument de lui foutre la paix.<br class='autobr' /> parfois on cite son prénom :<br class='autobr' /> marcel se prend pour un chanteur de variétoche,<br class='autobr' /> fernand le muet me montre les cahiers qu'il remplit d'une écriture indéchiffrable sauf de lui seul, il me fait piger que ce sont ses « devoirs. »<br class='autobr' /> simon chasse des mouches imaginaires avant de franchir le seuil des portes.<br class='autobr' /> ce n'est pas que je les aime d'amour, non. <br class='autobr' /> maintenant j'en fais partie,</p> <p>186</p> <p>bienvenue dans l'unité d'alcoologie !<br class='autobr' /> (ici, c'est moins grave !)</p> <p>187</p> <p>encore un gamin, débile léger, probable, en pleine discussion avec l'animatrice :<br class='autobr' /> • ils me font peur !<br class='autobr' /> • oh tu sais… devant chez moi un couple passe tous les jours à 17 heures promener leur chien… eux me font vraiment peur !</p> <p>188</p> <p>vraiment.</p> <p>189</p> <p>très peur.</p> <p>190</p> <p>je l'ai lu dans le journal :<br class='autobr' /> un jour un mec est arrivé dans un auditoire de médecins avec des échelles de différentes grandeurs. la vlà qui explique : il y a des échelles dans la douleur ainsi comparons un cancéreux à qui on a cousu le trou de balle et attaché une poche au ventre et comparons-le donc à un petit alcoolique de rien du tout qui manque totalement de courage…<br class='autobr' /> et bien ?<br class='autobr' /> et bien les étudiants ont saisi la plus grande échelle et ils ont pendu ce connard au plafond !</p> <p>191</p> <p>bon, je retourne à mon pavillon, celui des grands cireux au yeux vitreux…</p> <p>192</p> <p>y-a-t-il moyen de s'en sortir ? (parfois.)</p> <p>193</p> <p>parfois.</p> <p>194</p> <p>oh ça faisait longtemps qu'on ne me regardait plus comme avant !<br class='autobr' /> cool ! on te regardait toi (au moins) !</p> <p>195</p> <p>bonjour monsieur l'agent de quartier je viens pour la convocation celle de mon changement de domicile.<br class='autobr' /> ah ouais mais vous n'étiez jamais chez vous ! on peut être certain que vous habitez bien où vous le dites ?<br class='autobr' /> j'étais hospitalisé.<br class='autobr' /> hein ? où ça ?<br class='autobr' /> à l'hà´pital psychiatrique.<br class='autobr' /> hein ? on vous a interné ?<br class='autobr' /> non, j'y étais volontairement.<br class='autobr' /> hein ?</p> <p>196</p> <p>ce qu'elle a ? je vais t'avouer, moi, ce qu'elle a…<br class='autobr' /> pourquoi devrais-tu avouer TOI ce qu'elle aurait ELLE ?<br class='autobr' /> je me sens concerné…<br class='autobr' /> ah ?</p> <p>197</p> <p>ce qu'elle a c'est qu'elle a toujours eu peur de la vie, voilà !<br class='autobr' /> il est interdit d'avoir peur de la vie ?</p> <p>198</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ici la bouffe n'est pas très bonne. pas grave. mais pas tout à fait normal malgré tout. autour de moi y a des gens qui n'ont plus que ça, la bouffe…</p> <p>199</p> <p>normal, courant, ordinaire, compréhensible.<br class='autobr' /> anormal, spécial, monstrueux.<br class='autobr' /> incompréhensible.</p> <p>200</p> <p>ah je suis contente de t'entendre au bout du fil !<br class='autobr' /> tu m'appelles seulement maintenant ? chuis à l'hosto depuis trois mois.<br class='autobr' /> je sais, je me disais que tout allait bien.<br class='autobr' /> 201</p> <p>tu devrais faire une cure tu devrais faire une cure tu devrais…<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> tu es si… comment ?... loin<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et ça me fait peur.<br class='autobr' /> peur pour moi ou peur pour toi ?<br class='autobr' /> je sais pas… l'alcool la folie tout ça c'est des trucs je sais pas…</p> <p>202</p> <p>ah vous aussi vous êtes un patient ? vous avez une cigarette pour moi ? des menthol ? bon, d'accord, tant pis. mon administrateur de biens est un radin. ils prétendent que je vais mal parce que je suis schizophrène. vous n'avez pas l'air d'un patient. vous êtes schizophrène aussi ? l'alcool ? rien de plus ? bah, ce n'est pas grave, ça. mais je ne suis pas schizophrène. il fait beau ce soir, non ? ils vont venir. les extraterrestres. ils ont envoyé un signal sur mon portable. pas si simple, mon vieux ! c'est un message codé, naturellement ! moi seul comprend ! (des fois j'en ai marre d'obéir à ces enculés de l'espace !)</p> <p>203</p> <p>tu vois, moi j'ai rien fait. c'est mon ex-mari. je me suis laissée entraîner. et le juge vient de refuser que je sorte pour de bon de cette prison de merde ! prison, hà´pital, c'est du pareil au même.<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> non.</p> <p>204</p> <p>les fantà´mes de l'hà´pital.<br class='autobr' /> eux.<br class='autobr' /> et moi.<br class='autobr' /> 205</p> <p>jamais je n'aurais cru finir un jour ici. maintenant, voilà , j'y suis. <br class='autobr' /> pourquoi pas ?</p> <p>206</p> <p>depuis quelques années tu te dégrrrrades trrrrrès forrrrrt.<br class='autobr' /> va te faire enculer, papa !</p> <p>207</p> <p>il n'était plus le même, il n'était plus lui-même.<br class='autobr' /> mais surtout c'étaient les autres qui persistaient à rester plus que jamais les espèces de cons qu'ils avaient toujours été.</p> <p>208</p> <p>fils de pute ! tu es toujours là au cul des infirmières à essayer de dénoncer ton voisin de chambre soi-disant qu'il aurait bu en cachette et au moment où je te cause, tu laisses tomber par terre ta barrette de shit !</p> <p>209</p> <p>ils organisent un groupe « contes », la psy lit une histoire, et on doit essayer d'en parler, voilà , ça me branche pas, c'est en fait le groupe « con » !</p> <p>210</p> <p>avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté du fil<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> pour me recoudre le nombril.<br class='autobr' /> avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté pour cinq pistoles<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> de fil<br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> je vais recoudre ma camisole<br class='autobr' /> oh oh oh !</p> <p>arrivé à l'hosto<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> j'vais observer ma pourriture <br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> sous toutes ses coutures.</p> <p>j' suis une enflure<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une rature une vergeture<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> faut qu'on m'enferme derrière les murs !</p> <p>211</p> <p>vous savez la façon d'aborder la maladie mentale a beaucoup changé avec le temps !<br class='autobr' /> sur quel flanc ?</p> <p>212</p> <p>putain de vie de merde à la con !<br class='autobr' /> j'en ai ras la patate !<br class='autobr' /> je vais me cuiter !<br class='autobr' /> rien à foutre de leurs tests de crétins !<br class='autobr' /> c'est truqué leurs trucs.</p> <p>213</p> <p>hips !</p> <p>214</p> <p>fiston, je le sens je le sens, plus rien ne sera comme avant. je… je cherche mes mots : ce n'est pas que plus rien ne sera comme avant, c'est que plus rien ne pourra être comme avant. non… il est impossible que tout recommence comme avant, voilà . non… là tu vas t'imaginer qu'il est possible que je picole à nouveau, or, de fait, il est impossible que je picole encore, l'alcool et moi c'est fini. non… je ne sais pas comment je vivais, avant, mais… je ne vais plus vivre comme ça. et je ne vais plus vivre comme ça, comme avant, sinon je vais me remettre à boire. non… non, non, non, je ne boirai plus et ne me demande pas comment je le sais, je le sais c'est tout, j'en suis absolument convaincu, enfin… même pas convaincu, je ne bois déjà plus, là , de fait, depuis mon arrivée à l'hosto, pas besoin de me convaincre moi-même. ne me demande pas comment je m'y suis pris, vu que je ne me suis pris à rien du tout, c'est comme ça, dès que j'ai su qu'une place se libérait pour moi, je n'ai plus avalé un gramme d'alcool. <br class='autobr' /> j'ai du mérite ? <br class='autobr' /> je n'ai aucun mérite ? <br class='autobr' /> je n'en sais rien je l'ignore, je ne pense même pas à ce genre de choses complètement hors propos. <br class='autobr' /> j'ai arrêté, c'est bien, non ?<br class='autobr' /> j'ai arrêté, fiston. <br class='autobr' /> au fait, voilà ce que j'avais l'intention de te dire : j'ai arrêté.</p> <p>215</p> <p>j'étais comment, avant ?<br class='autobr' /> chiant… mais je t'aimais déjà .</p> <p>216</p> <p>bon… dites… sorry… je n'ai plus des masses d'unité sur ma carte de téléphone alors dites-moi en vitesse : COMMENT IL VA ?<br class='autobr' /> oh il est là depuis trois jours seulement, il dort, il dort, il dort.<br class='autobr' /> et… c'est normal ?</p> <p>217</p> <p>faut pas que je te cause trop fort, tu vois le type là -bas devant la télé ? oui, lui. avec sa barbe. et bien, hier au repas de midi, on mangeait et tout et tout. on a entendu un énorme cri. le gars, oui, lui, hurlait des phrases qui lui restaient un peu dans la gorge, un doigt tendu vers le plafond, il s'est mis à baver, puis il est tombé sur le pavement, boum !, en tremblant, et bon, chut ! plus bas !, il a chié sous lui. une infirmière s'est pointée, celle qui ne met jamais son tablier, jamais !, et elle lui a enfoncé un bout de tissu dans la bouche,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et.</p> <p>218</p> <p>clef de merde.</p> <p>219</p> <p>salut salut ! j'peux m'asseoir à cà´té ? bon moi je voulais pas mourir, pas vraiment je voulais juste ne plus vivre mais poser un acte violent pour me supprimer ça non je n'y arrivais pas.</p> <p>220</p> <p>asile.</p> <p>221</p> <p>au repos.</p> <p>222</p> <p>loin.</p> <p>223</p> <p>asile.</p> <p>224</p> <p>boire ? ça peut arriver à tout le monde ! regarde jocelyne, là , elle n'aurait jamais imaginé se retrouver ici !</p> <p>225</p> <p>mais… ceux qui ne picolent pas… comment ils font pour tenir le coup, pour supporter cette vie de merde ?</p> <p>226</p> <p>t'inquiète t'inquiète, la société elle sait pertinemment qu'elle broie les gens en mille morceaux ! elle en fait du haché desséché et là -dessus elle les imbibe d'alcool pour leur rendre un semblant d'élasticité, et hop, bon pour le service ! ainsi de suite…</p> <p>227</p> <p>chers collègues,<br class='autobr' /> à l'aube de ce colloque assez singulier, nous nous questionnons tous :<br class='autobr' /> la folie, c'est quoi ?<br class='autobr' /> 228</p> <p>et au coucher de soleil, ils se demandaient encore ce que la folie pouvait bien être, à la fin…<br class='autobr' /> (c'est à ce moment que le chamane…)</p> <p>229</p> <p>pure mother, pure milk.</p> <p>230</p> <p>il a toujours été fou.</p> <p>231</p> <p>ça l'a rendue folle. à tout jamais.</p> <p>233</p> <p>tu as vu son regard ?</p> <p>234</p> <p>il fait le fou</p> <p>235</p> <p>elle joue à être folle, ça l'arrange bien, rapport à …</p> <p>236</p> <p>complètement frappé. comme un apéro.</p> <p>237</p> <p>il est passé de l'autre cà´té.</p> <p>238</p> <p>trouble mental, déséquilibre mental, aliénation, démence, délire, maladie mentale, psychose, déraison, dérangement, égarement, divagation.</p> <p>239</p> <p>c'est dans un moment d'égarement qu'il s'est mis à divaguer vers la démence délirante sous l'effet d'une déraison déséquilibrante, d'une terrible aliénation troublante.</p> <p>240</p> <p>moi, ça ne m'étonne pas ! on le sentait venir…</p> <p>241</p> <p>mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse pour elle ? elle est dans son monde à elle.</p> <p>242</p> <p>je suis malade, complètement malade.</p> <p>243</p> <p>livraison de légumes à domicile.</p> <p>244</p> <p>tu savais que le mot « maboule » était d'origine arabe, toi ? <br class='autobr' /> non, mais ça ne m'étonne pas.</p> <p>245</p> <p>de toute façon, il n'écoute plus personne !</p> <p>246</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> te parler de la folie c'est un peu les mots pour ne pas le dire… le mot « folie », c'est un entonnoir, figure-toi ! on y enfourne tout et n'importe qui. un mec a un léger grain, de l'humour, une personnalité propre ? alors, il est fou. sentence. une nana va jusqu'au bout de ses désirs ? ça y est : elle est folle. un père de famille n'aime pas le foot ? il faut l'enfermer. tu ne te soumets aux conventions fixées depuis la nuit des temps par dieu sait quel imbécile ? par ici la piquouze !</p> <p>247</p> <p>mais la folie, ça existe.</p> <p>248</p> <p>marre de cette réunion d'équipe ! on ne va quand même pas ramener la camisole de force, le bain froid et les chaînes ! si ?</p> <p>249</p> <p>en quelque sorte, il buvait pour ne pas devenir complètement ouf !</p> <p>250</p> <p>non mais quoi c'est quoi la différence entre boire et de l'alcool et sniffer de l'héro je sais pas moi qu'on m'explique !</p> <p>251</p> <p>pour oser conduire quand on a trop bu, il faut être dingue !</p> <p>252</p> <p>papa,<br class='autobr' /> dès que j'osais émettre une opinion différente de la tienne, tu me hurlais que j'étais dingue. mes copains étaient dingues, les profs que j'aimais étaient dingues, j'écoutais de la musique de dingues. <br class='autobr' /> j'ai si vite pigé que pour obtenir un peu d'amour, de reconnaissance, d'éducation, de sécurité, il fallait que j'approuve tes opinions. à toi. <br class='autobr' /> tu t'empressais de raconter à ma soeur aînée que j'étais dingue, puis tu me confiais que ma soeur cadette était dingue, à qui tu avais affirmé que notre soeur aînée était dingue. <br class='autobr' /> tu voyais des dingues partout.<br class='autobr' /> tu ne te regardais pas assez souvent dans le miroir, je crois. <br class='autobr' /> tu aurais aperçu un dingue de plus.<br class='autobr' /> c'est pourquoi, cher papa, va te faire mettre !<br class='autobr' /> même là où tu te trouves maintenant.<br class='autobr' /> dans ta tombe.<br class='autobr' /> d'ailleurs j'ai créé un comité de soutien aux vers, aux insectes et aux parasites, et dès la première réunion je leur ai expliqué le chemin à suivre pour entrer dans ton trou de balle.</p> <p>253</p> <p>papa,<br class='autobr' /> c'est à cause de toi que j'ai commencé à boire, au fond.<br class='autobr' /> ça fait un bien fou de déposer le paquet chez un autre que soi.</p> <p>254</p> <p>non papa,<br class='autobr' /> c'est plutà´t grâce à toi que j'ai commencé à boire. pour changer sa vie, il faut la fracasser. sauf que la mienne de vie, tu l'avais déjà fracassée, dès ma naissance. <br class='autobr' /> l'alcool ?<br class='autobr' /> j'ai du recasser le plâtre, quoi !</p> <p>255</p> <p>putain de bordel à queue (à roulettes), les plus fous ne sont pas ceux qu'on croit !<br class='autobr' /> les gens normaux : eux sont fous. fous de normalité, de trop de normalité, de normalité confondante. <br class='autobr' /> ( t'as un exemple ?)</p> <p>256</p> <p>j'ai plein d'exemples.</p> <p>257</p> <p>oui papa, je suis dingue. oui.</p> <p>258</p> <p>clef de merde ? de diamant, ça oui !</p> <p>259</p> <p>j'ai froid.</p> <p>260</p> <p>j'ai froid.</p> <p>261<br class='autobr' /> la folie,<br class='autobr' /> fiston,<br class='autobr' /> c'est quand<br class='autobr' /> à l'intérieur <br class='autobr' /> de toi<br class='autobr' /> il fait froid,<br class='autobr' /> très froid,<br class='autobr' /> si froid<br class='autobr' /> trop froid.</p> <p>1 bis</p> <p>un diamant, je te dis.</p> <p>2 bis</p> <p>l'alcool, chez lui, ça cache quelque chose et en attendant ça gâche tout.</p> <p>3 bis</p> <p>entouré d'empaffés qui ne savent plus s'ils veulent arrêter de boire, ou continuer d'arrêter de boire.<br class='autobr' /> ou boire.</p> <p>4 bis</p> <p>boire et déboires.<br class='autobr' /> tu veux rire, là ?</p> <p>5 bis</p> <p>ce type, comment que tu veux que il se soigne ? il participe à rien, il regarde des dvds toute la journée. c'est pas comme ça qu'on s'y prend.<br class='autobr' /> on ne sait jamais.</p> <p>6 bis</p> <p>mesdames et messieurs, chers patients qui coùtent cher à la société, c'est le distribuement des médications ! <br class='autobr' /> ( à vos marques ?)</p> <p>7 bis</p> <p>pourquoi yzont donné des noms de musiciens à tous les pavillons ? bientà´t yvont nous dire de soigner notre alcoolisme avec<br class='autobr' /> des élixirs de fleurs<br class='autobr' /> de bach !</p> <p>8 bis</p> <p>un magnifique hêtre pourpre. il déploie ses branches etc.<br class='autobr' /> au pied de l'arbre, un bonhomme archi maigre, cheveux longs et poisseux (poisseux, les cheveux !)<br class='autobr' /> il se lance dans une gestuelle héritée du bouddha musulman né sur les bords du jourdain. <br class='autobr' /> il est fou, donc ?</p> <p>9 bis</p> <p>à ce qu'on dit.</p> <p>10 bis</p> <p>il y en a un, je sais pas, je l'ai surnommé : jérà´me bosch, il me fait penser à un personnage d'un tableau de jérà´me bosch (j'ai oublié lequel.)</p> <p>11 bis</p> <p>euh… ce genre de personnes… ça existe VRAIMENT alors ?<br class='autobr' /> tu vois bien.</p> <p>12 bis</p> <p>cette nuit, ils ont téléphoné au service sécurité.</p> <p>13 bis</p> <p>ce genre de gens… ce genre de gens… ils ne font de mal à personne, je te ferai remarquer ! ils vont même pas au salon de l'auto !</p> <p>14 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> ici tout se passe bien.<br class='autobr' /> ce n'est pas l'hà´tel mais bon je le savais avant de venir.</p> <p>15 bis</p> <p>je le savais, fiston.</p> <p>16 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> je fais te faire une esquisse d'une typologie des maladies de l'âme.</p> <p>17 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> merde alors ! j'ai un dérèglement des quatre humeurs à la fois : <br class='autobr' /> phlegme, sang, bile noire, bile jaune.</p> <p>18 bis</p> <p>billevesées.</p> <p>19 bis</p> <p>sous le poids de leurs péchés, ils sont condamnés à l'enfer.</p> <p>20 bis</p> <p>la trépanation, ça fait même pas mal, fiston !</p> <p>21 bis</p> <p>mieux vaut avoir une bite dans le cul qu'une bouteille dans la tête !</p> <p>22 bis</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> demain il m'enlèvent la pierre de folie de mon cerveau.</p> <p>23 bis</p> <p>de force dans la maison de force ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non… je suis venu en exprès !<br class='autobr' /> hein ? vous êtes fou ?</p> <p>24 bis</p> <p>qui a peur du grand méchant fou ?<br class='autobr' /> pas le petit litron rouge, en tout cas…</p> <p>25 bis</p> <p>bonsoir ma chérie, oui je t'aime encore, ah tu craignais qu'à cause de la cure je t'aimerais plus ? où tu vas chercher tout ça ? <br class='autobr' /> (quoique…)<br class='autobr' /> bon ben embrasse les enfants de ma part, hein !</p> <p>26 bis</p> <p>… paradoxalement, comme une avancée…</p> <p>27 bis</p> <p>fig 1, fig 2, fig 3, fig 4, figure-toi.</p> <p>28 bis</p> <p>quand charcot charcutait…</p> <p>29 bis</p> <p>nous sommes en direct du ALCOOL grand prix de formule 1 où les meilleurs ALCOOL joueurs de foot du monde vont s'affronter pour 3000 ALCOOL tours de pédales sur leurs ALCOOL vélos depuis un ALCOOL tremplin. ici la ALCOOL piscine olympique, à vous les ALCOOL studios !</p> <p>30 bis</p> <p>un jour ou l'autre, il est temps de savoir ce qu'on veut !</p> <p>31 bis</p> <p>plus jamais plus jamais !</p> <p>32 bis</p> <p>c'est ça que tu veux ?</p> <p>33 bis</p> <p>non, je pense vraiment que l'équipe nous respecte.<br class='autobr' /> tu parles ! ils savent tout de nous ! tout !</p> <p>34 bis</p> <p>chuis antipsychiatre… euh, antipsychiatrique…<br class='autobr' /> ouais, psychiatrique, quoi !</p> <p>35 bis</p> <p>JE N'AURAIS JAMAIS CRU QUE JE BOUFFERAIS UN JOUR DES NEUROLEPTIQUES !<br class='autobr' /> ( y en a bien qui bouffent du steak de cheval, alors…)</p> <p>36 bis</p> <p>qui s'y freud s'y pique !<br class='autobr' /> ( ou le pique…)</p> <p>37 bis</p> <p>alors vous, vous êtes contents d'avoir bu, vous êtes content d'avoir arrêté de boire, vous êtes content d'avoir fréquenté des malades mentaux ! hein ?</p> <p>38 bis</p> <p>d'une façon ou d'une autre, la soufffffrance mentale demeure un continent noir encore très mal exploré !<br class='autobr' /> (où ils ont mis le chauffeur de salle ?)</p> <p>39 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud.<br class='autobr' /> dans le fond de la salle : bien vrai, ça ! l'insconscient personne l'a jamais vu !<br class='autobr' /> au premier rang : en plus il sniffait de la coke !</p> <p>40 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et encore ! nous avons la chance toi et moi de vivre dans un pays qui ne criminalise pas la souffrance mentale ! y a un pays où un odieux président nabot …<br class='autobr' /> je sais, papa…<br class='autobr' /> comment : tu sais ?<br class='autobr' /> le cours de sciences sociales, à l école…</p> <p>41 bis</p> <p>sur cette photo, des malades mentaux à poil dans la cour d'un hosto en grèce. nous allons passer un chapeau pour le chauffeur…</p> <p>42 bis</p> <p>tu sais pas quoi tu sais pas quoi tu sais pas quoi ? il a réussi à convaincre son psychiatre qu'il était devenu alcoolique à cause de ses problèmes personnels !<br class='autobr' /> (quel culot !)</p> <p>43 bis</p> <p>depuis toujours l'homme s'est trouvé confronté à des êtres différents et impénétrables…<br class='autobr' /> ( d'autres hommes, non ?)</p> <p>44 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud qui prolongea le mythe grec de « suffocation de la matrice » alors qu'en fait , c'est lui qui suffoquait du cerveau</p> <p>45 bis</p> <p>bienheureux les…<br class='autobr' /> car…</p> <p>46 bis</p> <p>sous l'effet de l'alcool, tout devient laid. la vie devient laide. le regard devient laid. les autres deviennent laids. l'oxygène devient laid. l'herbe devient laide. un éléphant rose devient laids éléphants roses.</p> <p>47 bis</p> <p>il a un gros pif rouge plein de trous. ses yeux ressemblent à des oeufs de cane : jaune laid, blanc pisseux. dans le ventre une montgolfière qui ne prendra plus son envol. <br class='autobr' /> laid.<br class='autobr' /> très laid.<br class='autobr' /> la vraie liberté, quoi !</p> <p>48 bis</p> <p>pour la millième fois elle nous dresse la liste des formations qu'elle a suivies, couvrant des domaines aussi invraisemblables que disparates. elle veut en mettre plein la vue, elle veut convaincre son auditoire qu'elle est quelqu'un, encore, malgré tout. <br class='autobr' /> à des degrés divers.<br class='autobr' /> malheureusement elle pue de la gueule, l'alcool à cent mètres, plein la vue.</p> <p>49 bis</p> <p>il dit sans honte : c'est la huitième fois que je viens ici, je lutte contre l'alcool depuis 15 ans.</p> <p>50 bis</p> <p>il est plus fort que nous il est plus fort que nous il est plus fort que nous.<br class='autobr' /> mais les deux font la bande.</p> <p>51 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis mon arrivée ici, je ne t'ai plus jamais vue sur les murs en pleine nuit.</p> <p>52 bis</p> <p>pas mal ! vous avez un q.i. d'autant.<br class='autobr' /> d'autant que nous n'avez plus de cuites !</p> <p>53 bis</p> <p>est-ce que c'est pour toujours, les dégâts ?</p> <p>54 bis</p> <p>on RESTE alcoolique.</p> <p>55 bis</p> <p>j'ai une fille, oui. enfin, j'avais une fille. enfin je l'ai encore, pourtant…</p> <p>56 bis</p> <p>docteurj'ail'impressionquemespiedsnesententpluslesol !<br class='autobr' /> ah ? c'est un début de polynévrite.</p> <p>57 bis</p> <p>mais le concept demeure flou.</p> <p>58 bis</p> <p>qu'est-ce que la consommation d'alcool ?<br class='autobr' /> un délire ?<br class='autobr' /> une démence ?<br class='autobr' /> une folie ?<br class='autobr' /> une frénésie ?<br class='autobr' /> une humeur ?<br class='autobr' /> une idiotie ?<br class='autobr' /> une possession ?<br class='autobr' /> une connerie ?</p> <p>59 bis</p> <p>ouais j'ai bu et alors ? ça emmerde qui ? va chercher l'infirmier ! tu veux que je te casse la tronche ?</p> <p>60 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis que je suis arrivé ici, je commence à trouver la vie moins laide.</p> <p>61 bis</p> <p>c'est un bon début, ça oui ! mais derrière demeure un fameux rébus !</p> <p>62 bis</p> <p>quelle énigme de folie !</p> <p>63 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> s'il y a bien une chose que je ne supporte plus, c'est l'emploi à tout bout de champ du mot « malade » à la place d'autres mots. il a fait un truc de « malade », c'est un livre de « malade », il joue de la guitare comme un « malade. » la maladie, c'est la maladie. le froid. la laideur.</p> <p>64 bis</p> <p>il était deux fois… ah non ! une seule ! j'ai bu un coup de trop…</p> <p>65 bis</p> <p>voir page 974, cette citation de zigmound frott :<br class='autobr' /> la notion même de « boire un coup de trop » serait distrayante, pour ce qu'elle ne recouvrirait pas une réalité aussi sordide. en effet, le premier « coup » n'est-il pas déjà le « coup de trop ? »</p> <p>66 bis</p> <p>je lève le coude (de trop), et après, boum !, le trou noir. je me réveille à l'hosto.</p> <p>67 bis</p> <p>tu ne crois pas à la psychanalyse.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> c'est ton droit.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> pourtant, avoue, si tu as bu, c'est qu'il y a une raison, non ? arrêter l'alcool, c'est un premier pas, ok. mais derrière ? hein ? derrière ? ok ?</p> <p>68 bis</p> <p>disons que collectivement, la bouffe est dégueulasse. et il ne s'agit pas d'inconscient collectif.</p> <p>69 bis</p> <p>derrière ? tout ce que tu veux, derrière. mais pas avec les outils rouillés de la psychanalyse, cette incantation mystique proche du dogme religieux et qui s'admire elle-même dans un miroir fêlé.</p> <p>70 bis</p> <p>toi, tu es venu ici pourquoi ? parce que tu es alcoolique ou parce que tu es fou ? parce que pour les fous, il y a d'autres pavillons ! dans celui-ci, personne n'est dingo !</p> <p>71 bis</p> <p>oui oui je veux bien aller aux activités d'ergothérapie, mais comprenez-moi, ça me fait bizarre. avant je bossais comme éducateur, alors bon me voilà de l'autre cà´té de la barrière donc ça me fait tout drà´le !</p> <p>72 bis</p> <p>égo-thérapie.<br class='autobr' /> ergot-thérapie.<br class='autobr' /> très charpie.<br class='autobr' /> c'est pas fini non ?</p> <p>73 bis</p> <p>vous pouvez nourrir les chats sauvages avec les restes des repas, ne laissez quand même pas dix assiettes traîner dans la cuisine<br class='autobr' /> pendant plusieurs jours !</p> <p>74 bis</p> <p>toi, on t'a expliqué pourquoi on t'a envoyé ici ? spécialement ici ?</p> <p>75 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> j'ai dormi jour et nuit un mois durant. j'ai recommencé à me laver. je me nourris mieux.<br class='autobr' /> l'autre jour un type est arrivé en pleine crise de délirium. il tournait en rond au pas de course dans le jardin, en écrasant les plantes sur son passage. du coup, l'autre là , le mec que je n'aime pas du tout vu qu'il critique tout le monde au lieu de s'occuper de lui-même, il a gueulé dans le réfectoire : <br class='autobr' /> korsakoff ! <br class='autobr' /> ou : korsakov !<br class='autobr' /> je ne sais plus.<br class='autobr' /> apparemment, cela se produit quand l'alcool a définitivement grillé la plupart de tes neurones. <br class='autobr' /> irréversible. <br class='autobr' /> ça fout les jetons.</p> <p>76 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> j'avais oublié :<br class='autobr' /> dès que j'avais un peu mal au dents, tu me proposais un sucre imbibé d'alcool de menthe.</p> <p>77 bis</p> <p>oh ! vous avez bien raison, monsieur ! ici, certaines personnes s'installent et n'ont pas vraiment l'intention de guérir de quoi que ce soit ! si jamais elles ont quelque chose en débarquant ici, d'ailleurs !<br class='autobr' /> (oups ! je rougis ! en tant qu'infirmière, j'aurais du me taire !)<br class='autobr' /> (ah ! est-on assez sévères ?????)</p> <p>78 bis</p> <p>c'est à VOUS de savoir ce que VOUS attendez de VOTRE cure. NOUS on est à votre disposition pour vous aider dans VOTRE direction. <br class='autobr' /> (désolés mais y a rien d'aut' à dire !)</p> <p>79 bis</p> <p>c'est vous qu'avez commencé, c'est VOUS qu'arrêterez !<br class='autobr' /> (désolés mais c'est vrai !)</p> <p>80 bis</p> <p>moi, j'aime me bourrer la gueule, m'éclater le citron à la coke, à n'importe quoi qui me tombe sous la main ! avant j'étais taximan, j'ai bousillé je sais plus combien de bagnoles, plus aucun patron ne veut de moi ! je suis tombé du deuxième étage, bassin fracturé. cet appartement-là , en fait, j'y ai foutu le feu sans le faire exprès, je me suis endormi en fumant une cigarette ! <br class='autobr' /> du moment que ma bonne femme fait bien à manger !<br class='autobr' /> vrai, je claque toutes mes allocs de mutu dans l'alcool et la dope !<br class='autobr' /> et la meilleure de toutes ? j'suis heureux, moi ! j'suis heureux ! j'adore me péter les lattes ! à fond ! <br class='autobr' /> (c'est ma bonniche qui a contacté le psychiatre… moi…. bof…)</p> <p>81 bis</p> <p>moi j'en ai rien à foutre ici, rien…</p> <p>82 bis</p> <p>tu as d'autres anecdotes du genre ?<br class='autobr' /> plein.</p> <p>83 bis</p> <p>un rayon entier… :<br class='autobr' /> bonjour bonjour c'est moi je reviens ! je pensais que ça irait, dehors, mais ça n'a pas été. allez, je viens passer un petit mois de vacances, ah ah !</p> <p>84 bis</p> <p>t'es trop conasse ! huit fois que tu recommences une cure ! à chaque fois, tu subis un sevrage, vingt jours de comprimés ©, un mois de ® ! au bout de six semaines tu claironnes que tu te sens prête à quitter l'hosto… la suite au prochain numéro ! t'es trop débile â„¢ !!!!<br class='autobr' /> je n'arrive pas à me contrà´ler…</p> <p>85 bis</p> <p>mesdames et messieurs, la salle de remise en forme est ouverte !<br class='autobr' /> ppppffff….</p> <p>86 bis</p> <p>comme raconte le psychiatre, le taux de réussite, c'est 3% environ. alors, je préfère me dire que ça ne va pas marcher pour moi. et si ça marche…</p> <p>87 bis</p> <p>si ça marche, c'est bien emmerdant pour toi, au fond !</p> <p>88 bis</p> <p>je suis ton infirmière de référence, crois moi il faut que tu penses à toi. pas SUR toi. à toi. ça fait des années que tu tortures ton corps, il n'en peut plus, il est à bout…</p> <p>89 bis</p> <p>vous savez ?<br class='autobr' /> (elle pince les lèvres avec préciosité.)<br class='autobr' /> vous savez ? <br class='autobr' /> ici, c'est la première fois. mais avant j'ai fait quatre séjour à l'hà´pital ✜✜✜✜✜, et j'ai passé un an au centre $$$$$$, et bien, partout j'ai laissé un excellent souvenir, je suis encore en contact avec le ΨΔΓΑΘδ et avec la ςψζεΓ.<br class='autobr' /> tu veux ma photo ?</p> <p>90 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> y a un truc qui fait masse. <br class='autobr' /> autour de moi, je vois un gros tas d'alcoolos et d'alcoolotes qui n'ont pas l'air d'en vouloir. un peu comme s'ils refusaient leur moment de vérité. (non, tout à fait.) être face à eux-mêmes.<br class='autobr' /> pourquoi, au-delà du plaisir, je bois ? (plus que de raison.) that's the question quand même non ? <br class='autobr' /> bon, j'arrête de te casser les pieds.</p> <p>91 bis</p> <p>écoutez monsieur, je suis votre infirmière de référence et je peux vous affirmer <br class='autobr' /> que :<br class='autobr' /> c'est du travail !</p> <p>92 bis</p> <p>affolé par la folie,<br class='autobr' /> j'ai des affres au lit.<br class='autobr' /> va chier, à la fin !</p> <p>93 bis</p> <p>la première chose que tu ressens quand tu arrêtes de picoler, c'est que la vidange, c'est toi. et comme en plus tu es consigné, tu imagines que éventuellement il y aura moyen de recycler le grand vide que tu es devenu.</p> <p>94 bis</p> <p>salut à tous !<br class='autobr' /> j'me présente : je suis « la place. »<br class='autobr' /> pas la place du marché, ou la place de ciné, ni la place du mort ah ah ah !<br class='autobr' /> non, je suis : « la place. »<br class='autobr' /> celle que vous avez faite en vous décidant à faire une cure. oui, vous avez fait « de la place », et « la place » en question, c'est donc moi.<br class='autobr' /> quand même, ouvrez un peu les yeux, maintenant qu'ils ne sont plus plombés par monsieur éthanol â„—. l'alcool. l'alcool, avant, dans votre ancienne vie, il en prenait de la place, non ? <br class='autobr' /> il occupait touuuuuuutes vos pensées, lalalère !<br class='autobr' /> matin<br class='autobr' /> midi<br class='autobr' /> et soir<br class='autobr' /> et la nuit itou.<br class='autobr' /> lalalèreu !<br class='autobr' /> faut que j'aie de l'alcool en me levant, et de quoi tenir la matinée, et de quoi me noyer l'aprème, et devant la téloche, et du whisky pour le dodo, ça aide !!!!<br class='autobr' /> etc.<br class='autobr' /> itou.<br class='autobr' /> l'ennui, l'alcool, on doit aller l'acheter, se déplacer, passer du temps au night shop, revenir à la maison, ou bien alors repasser au bistrot. si on dégueule un building de bile, c'est encore la faute à l'alcool ! si on va pisser toutes les demi-heures, c'est encore la faute à l'alcool ! si on se fait choper au volant par les flics, avec deux tonnes de vodka dans les veines, ça prend la soirée pour s'expliquer ! si on crashe sa voiture contre une madame avec un landau, ça va encore durer des plombes ! si on se retrouve au tribunal de police, c'est encore à cause de l'alcool ! si on se chamaille avec sa gonze, c'est la faute à l'alcool ! si on fout des trempes aux gosses, la faute à qui ?<br class='autobr' /> hein ? à qui ? <br class='autobr' /> or donc :<br class='autobr' /> qu'allez-vous à présent faire de moi, « la place ? »</p> <p>95 bis</p> <p>de toute évidence, le problème… l'alcool, c'est permis ! légal ! encouragé, même ! voilà le problème !</p> <p>96 bis</p> <p>alll-llors… chez moi, tout a démarré quand<br class='autobr' /> (j'ai perdu mon boulot, ma femme m'a quitté, j'ai su que ma fille avait le sida, j'ai du vendre ma maison, mon père est mort, j'ai abandonné la pratique du foot, mon chef me harcelait, mon fils a tété en prison)<br class='autobr' /> quand j'ai craqué complètement.</p> <p>97 bis<br class='autobr' /> l'.</p> <p>98 bis</p> <p>l'énigme.<br class='autobr' /> 99 bis</p> <p>bonjour bonjour je suis « l'énigme. »</p> <p>100 bis</p> <p>mais non mais non l'alcool c'est bon pour plein de choses !<br class='autobr' /> regarde un peu…<br class='autobr' /> utilisée en shampooing, la bière permet de redonner de la brillance aux cheveux, <br class='autobr' /> l'odeur du houblon, incrustée dans un oreiller, aide à fermer l'oeil, la bière attire les limaces, elle noie les mouches, et détourne les guêpes, le sucre de la bière ravira vos fleurs et legumes, la bière enlève les taches des vêtements…</p> <p>101 bis</p> <p>et si tout cela, l'alcoolisme, si ce n'était qu'une construction de l'esprit ?<br class='autobr' /> et si après tout l'homme avait besoin d'alccol comme d'oxygène ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> tu en dis quoi ?</p> <p>102 bis</p> <p>l'excès nuit en tout, voilà .</p> <p>103 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ce que j'ai, c'est une douleur, de la douleur.<br class='autobr' /> de toute évidence, à part les spécialistes et les pros, ça ne branche personne, à notre époque.</p> <p>104 bis</p> <p>trucmuche, vous êtes en direct de la grand-place, alors dites-nous est-ce que cette manifestion pour une meilleure prise en charge collective de la folie individuelle a rassemblé beaucoup de monde ?<br class='autobr' /> et bien, bidulette, oui, ici c'est noir de people et les slogans les plus passionants fleurissent ! on peut lire des choses comme : - viens chez moi, j'habite avec une folle !, ou encore : - donne moi un grain de ta folie !<br class='autobr' /> trucmuche, vous êtes notre envoyé spécial sur place, peut-on dire que les organisateurs sont satisfaits ?<br class='autobr' /> alors oui en effet ça oui, la plupart des manifestants, et il y en a de tous les âges, se sont déclarés en faveur d'un meilleur partage de la folie. le centre pour l'égalité des chances mène d'ailleurs la fronde. il faut savoir qu'à peine 1% de la population mondiale semble touchée par la schizophrénie, cela de toute évidence n'est pas équitable. mais l'alcool, ça non, les gens ne veulent pas du tout s'en passer, ils trouvent que la répartition de l'alcoolisme est acceptable.<br class='autobr' /> (telle qu'elle est.)</p> <p>105 bis</p> <p>pas de quoi mener une croisade, non plus ? des fois ?</p> <p>106 bis</p> <p>d'abord dans cet hà´pital à la con vous ne proposez aucune activité, et quand vous en proposez une, elle est débile. <br class='autobr' /> (qu'est-ce qu'on en a à foutre de changer, nous ? du moment qu'on ne paie pas notre chauffage en hiver…)</p> <p>107 bis</p> <p>aller faire des petits dessins, des bricolages en bois, soigner des chevaux, et puis quoi encore ?<br class='autobr' /> (de toute manière, à la relaxation, on s'endort !)</p> <p>108 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et si on en finissait une fois pour toutes avec le sujet ?<br class='autobr' /> allons-y :<br class='autobr' /> LLLL'alcoolisme est l'addiction à l'alcool (éthanol) contenu dans les boissons alcoolisées, plus précisément l'absence du sentiment de satiété. LLLL'OMS reconnaît l'alcoolisme comme une maladie et le définit comme des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l'utilisation d'alcool. CCCCette perte de contrà´le s'accompagne généralement d'une dépendance physique caractérisée par un syndrome de sevrage à l'arrêt de la consommation (pharmacodépendance), une dépendance psychique, ainsi qu'une tolérance (nécessité d'augmenter les doses pour obtenir le même effet). LLLLa progression dans le temps est l'une des caractéristiques majeures de cette addiction. LLLL'usage sans dommage (appelé usage simple) précède l'usage à risque et l'usage nocif (sans dépendance), puis enfin la dépendance. LLLL'alcool est une substance psychoactive à l'origine de cette dépendance mais elle est également une substance toxique induisant des effets néfastes sur la santé. LLLL'alcoolodépendance est à l'origine de dommages physiques, psychiques et sociaux.</p> <p>109 bis<br class='autobr' /> wikhipspédia, quoi.</p> <p>110 bis</p> <p>l.</p> <p>111 bis</p> <p>leur.</p> <p>112 bis</p> <p>énigme.</p> <p>113 bis</p> <p>leur énigme.</p> <p>114 bis</p> <p>ils n'ont pas l'air d'en avoir une.<br class='autobr' /> les autres.</p> <p>115 bis</p> <p>moi si.</p> <p>116 bis</p> <p>eux ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.</p> <p>117 bis</p> <p>ils boivent.</p> <p>118 bis</p> <p>tout le monde boit.</p> <p>119 bis</p> <p>dyonisos buvait, les sumériens buvaient, noé buvait, tibère buvait, les grecs buvaient, les romains buvaient.<br class='autobr' /> déjà .<br class='autobr' /> alors…<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>120 bis</p> <p>c'est un truc ça existera toujours faudra toujours faire avec.<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>121 bis</p> <p>alors rien.</p> <p>122 bis</p> <p>les infirmières ne sont jamais là ! elles partent tout le temps en conge !<br class='autobr' /> figure-toi, enfoiré, qu'elles ont aussi une vie privée…</p> <p>123 bis</p> <p>on dit les musulmans les musulmans on les critique mais ils ne boivent pas d'alcool, eux ! <br class='autobr' /> la voilà la solution !<br class='autobr' /> (si tu savais…)</p> <p>124 bis</p> <p>leur énigme ? <br class='autobr' /> aux autres ? <br class='autobr' /> ils ne parlent jamais d'eux-mêmes. <br class='autobr' /> que leurs enfants ne souhaitent plus les rencontrer, qu'ils ont été obligés de vendre leur maison, qu'ils ont séjourné dans des centres aux normes très sévères, ça oui. qu'ils ont fait de la taule, ça oui. qu'ils carburent au gin, au vin blanc, à la bière blonde, ça oui. que la nouvelle année est une sale période vu qu'ils avaient l'habitude de baiser au champagne, ça oui.<br class='autobr' /> mais leur énigme ?<br class='autobr' /> (et dans des centres aux normes très sévères… ça ne marche pas mieux !)</p> <p>125 bis</p> <p>la première chose que tu fais quand tu sors, tu bois. tu rebois.</p> <p>126 bis</p> <p>je vous regarde toutes et tous, avachis, là , et je me rends compte que vous avez perdu le chemin de dieu.<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu fous parmi nous, alors ?</p> <p>127 bis</p> <p>qu'est-ce qu'on lirait bien pour passer le temps ?<br class='autobr' /> zola, blondin, london, kessel, baudelaire, lowry, bukowski, kerouac, hemingway, apollinaire, faulkner.<br class='autobr' /> c'est un bon début.</p> <p>128 bis</p> <p>la folie,<br class='autobr' /> c'est quand ?<br class='autobr' /> c'est quand…</p> <p>1 ter<br class='autobr' /> alors, toi tu es prêt ?<br class='autobr' /> près de quoi ? de la sortie ? non, près des cuisines.</p> <p>2 ter<br class='autobr' /> alors moi, je serais prêt ?<br class='autobr' /> prêt à quoi ?<br class='autobr' /> prêt à sortir ?<br class='autobr' /> près de sortir ?</p> <p>3 ter</p> <p>d'où ? du trou normand ? de l'auberge espagnole ? de la bouteille bordelaise ?</p> <p>3 ter</p> <p>c'est comment qu'on freine ? j'voudrais descendre de là .<br class='autobr' /> petit à petit, l'oiseau fait son nid.<br class='autobr' /> son petit en tombe.</p> <p>4 ter</p> <p>dehors c'est comment ? c'est où le danger ? c'est quand la chute ? la confrontation avec les brutes de brut ? dehors c'est du verre pilé ?<br class='autobr' /> non, rien que des âmes pliées.<br class='autobr' /> sucré-salé.</p> <p>5 ter</p> <p>dehors, ce sera la guerre !<br class='autobr' /> oui, mais faudra bien trancher, non ?</p> <p>6 ter</p> <p>tu sors quand, toi ?<br class='autobr' /> je sais pas je sais pas, pas tout d'suite pas tout d'suite, j'attends encore un peu et toi ?</p> <p>7 ter</p> <p>dehors je ne bois pas passque je sais que je vais revenir dormir à l'hà´pital.</p> <p>8 ter</p> <p>fiston.</p> <p>9 ter</p> <p>dehors pour se protéger faudra une prise de terre.</p> <p>10 ter</p> <p>dedans c'est dans la tranchée, les obus passent, ils flinguent les autres, ceux qui oublient de porter leur casque.<br class='autobr' /> dedans le cocon tout rond de ceux qui l'étaient toujours.<br class='autobr' /> dedans les tabliers blancs, les tabliers blanc-sec, l'attention carmin qu'on nous porte, les produits de nettoyage rosés.<br class='autobr' /> mais dehors mais dehors mais dehors.</p> <p>11 ter<br class='autobr' /> dehors faudra gérer.<br class='autobr' /> aaaaaaaaahhhhhhh ???? c'est ça, le truc ?<br class='autobr' /> ouais.<br class='autobr' /> aaaaaaaahhhhhhhh ! ok !</p> <p>12 ter</p> <p>épileptique. si si oui oui. il picolait sans être une brute, <br class='autobr' /> pour autant,<br class='autobr' /> mais il picolait. <br class='autobr' /> il en avait besoin, on aurait dit. par fierté, il a décidé d'arrêter tout seul comme le grand qu'il croyait être. s'est enfermé quatre jours dans une maison de campagne. a dormi pour oublier le bruit du verre qu'on dépose, la douceur du goulot dans la main. <br class='autobr' /> c'est bon, c'est bon, on est pas au cinéma !</p> <p>13 ter</p> <p>il a cru qu'il avait gagné, il a cru qu'il avait vaincu l'alcool, comme on dit.<br class='autobr' /> seulement donc voilà , une nuit sa nana l'a vu se tortiller comme un lombric…<br class='autobr' /> un quoi ?<br class='autobr' /> un ta gueule !<br class='autobr' /> il avait défoutu les couvertures…<br class='autobr' /> si ça tombe ils ont des couettes !<br class='autobr' /> … bon, la couette, alors, si ça fait plus joli plus exact. il avait défoutu la couette, il était en train de sucer un coin de son oreiller. puis, il s'est levé, s'est dirigé vers le couloir…<br class='autobr' /> … et il s'est ramassé une gamelle !<br class='autobr' /> … putain va enculer les gardes de sécurité, trouduc ! laisse-moi continuer ! t'as peur de ce que je raconte, hein ? ketapeur ? puis il se dirige vers une fenêtre, s'allonge sur le sol tout en ramassant des poussières qu'il accumule en petits tas, comme ça, pendant des heures, jusqu'à l'arrivée de l'ambulance.<br class='autobr' /> on dirait un livre !<br class='autobr' /> pauvre con ! tu comprends pas ? le mec, il s'est débarassé de l'alcool sans soins autour. alors il est devenu épileptique. ça arrive.<br class='autobr' /> à moi aussi ?<br class='autobr' /> non, t'es trop con ! trop con ! ton cerveau était déjà cramé à la maternité !</p> <p>14 ter<br class='autobr' /> fiston, je viens juste de louer une nouvelle maison.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> fiston, maison.<br class='autobr' /> comme si ça allait ensemble :<br class='autobr' /> fiston, maison.</p> <p>15 ter<br class='autobr' /> ton papa a déniché une maison sympa.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> papa, sympa.</p> <p>16 ter<br class='autobr' /> c'est s'taire, qu'il faudrait !</p> <p>17 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose.</p> <p>18 ter<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> elle sort.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> à 14 heures : pour de bon, comme on dit.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)<br class='autobr' /> une grosse valise près du bureau des infirmières. le bouquet de fleurs des copines.<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> il rentre.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)</p> <p>19 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose, fiston.<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?<br class='autobr' /> quand dans la file du supermarché<br class='autobr' /> à pas lestés<br class='autobr' /> je revoirdeirai et ron et ron petit, pas de litron,<br class='autobr' /> les têtes glauques des combattants du front<br class='autobr' /> en sueur mal torchés,<br class='autobr' /> l'énorme, là , à longueur d'année<br class='autobr' /> en sabots de bois<br class='autobr' /> (tu veux quoi ? tellement gros je suis désormais<br class='autobr' /> que je n'atteins plus mes pieds !),<br class='autobr' /> de ses douzes canettes toujours chargé,<br class='autobr' /> et les ouvriers du plâtre, les ouvriers polonaise,<br class='autobr' /> pour eux boire c'est la santé !,<br class='autobr' /> et le gamin de vingt ans tout ronds<br class='autobr' /> aux yeux injectés d'aiguilles rouges<br class='autobr' /> et quand je planterai ma culture de regards inquiets <br class='autobr' /> dans le sien<br class='autobr' /> où plus rien ne bouge<br class='autobr' /> sauf l'aiguille et le piston,<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?</p> <p>20 ter<br class='autobr' /> dehors : quoi ?<br class='autobr' /> quoi, dehors ?</p> <p>21 ter<br class='autobr' /> dedans ils sont nombreux les ratés, les pétés, le jetés, les tricheurs, les planqués, les trépassants, les gerbants, les emmerdants.<br class='autobr' /> dehors, ils sont legion, les tricheurs<br class='autobr' /> vu que boire un coup c'est bon pour la santé.<br class='autobr' /> dedans, ils ont au moins, ils ont un peu, essayé.<br class='autobr' /> dehors, ils n'essayent même pas, <br class='autobr' /> trop contents<br class='autobr' /> qu'à l'asile des fous <br class='autobr' /> c'est une partie de leur propre âme noire qu'on cache en leur nom.</p> <p>22 ter<br class='autobr' /> parle-moi de ton âme heureuse.</p> <p>23 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ?<br class='autobr' /> j'vais boire. tout d'suite.</p> <p>24 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ? <br class='autobr' /> je vais continuer.<br class='autobr' /> à boire ?<br class='autobr' /> non, imbécile ! à réfléchir, à essayer de comprendre pourquoi je buvais.<br class='autobr' /> ah ? ta psychologue te l'a pas expliqué ?</p> <p>25 ter<br class='autobr' /> moi aussi, je vais continuer à boire. la société à besoin de nous, elle nous attend ! bitus ou pas. surtout bitus, d'ailleurs ! ça crée de l'emploi !</p> <p>26 ter<br class='autobr' /> alors voici le plan, je te le dessine en vitesse :<br class='autobr' /> alcool<br class='autobr' /> =<br class='autobr' /> du boulot pour la vigne ou le houblon<br class='autobr' />  du boulot pour les cultivateurs<br class='autobr' /> ⌘ du boulot pour les transporteurs<br class='autobr' /> ± du boulot pour les grossistes<br class='autobr' /> ≥ du boulot pour les revendeurs<br class='autobr' /> â„¢ du boulot pour les bistrots <br class='autobr' /> ∨ du boulot pour les toubibs<br class='autobr' /> ★ on recommence tout le toutim…<br class='autobr' /> ♩♫ ♯qui voudrait supprimer ça ?</p> <p>27 ter<br class='autobr' /> putain mais si tu sors d'ici pour ENCORE réfléchir, alors c'est que tu bandes pour ton âme noire et pas pour ton âme heureuse… non ? Remarque, moi, ici, j'ai rien réfléchi à rien du tout, alors… je suis pas mieux que toi…</p> <p>28 ter<br class='autobr' /> tu l'as dit.</p> <p>29 ter<br class='autobr' /> je fais partie de quelle tribu, fiston ?<br class='autobr' /> la tribu des tronches ravagées aux rides plus profondes que les failles des océans<br class='autobr' /> (mais ils ont à peine quarante ans et n'ont rien des atlantides),<br class='autobr' /> la tribu des pantalons toujours dégeulasses,<br class='autobr' /> la tribu des alcoolos un rien artistes,<br class='autobr' /> la tribu des pénibles,<br class='autobr' /> la tribu des sans abribus,<br class='autobr' /> des-ceux-qui-n'ont-jamais-bu-malgré-tout-que-des-millésimes ?<br class='autobr' /> la tribu aux attributs ramollis ?<br class='autobr' /> la tribu, elle est sans fin, des pères indignes<br class='autobr' /> malgré-l'autocollant-je-suis-un-brave-papa-(sur-le-front ?)</p> <p>30 ter<br class='autobr' /> tu sors, alors ?<br class='autobr' /> oui.<br class='autobr' /> pour quoi faire ?<br class='autobr' /> redevenir un père.</p> <p>31 ter<br class='autobr' /> nous venons de vous voir dans ce reportage.<br class='autobr' /> l'alcool, vous y avez finalement échappé.<br class='autobr' /> (tiens, on ne dit pas : vous LUI avez échappé ?)<br class='autobr' /> nous allons maintenant vous permettre de répondre aux questions internet, mail et réseaux sociaux des téléspectateurs.<br class='autobr' /> première question de j.l. de truc-les-fouillasses :<br class='autobr' /> comment réagissez-vous lorsque, dans la file du supermarché, vous apercevez un caddie bourré, oui, bourré, de bouteilles de whisky et poussé par une femme (ou un homme) dont le visage boursouflé vous fait soudain comprendre ce que dante a voulu écrire ?</p> <p>32 ter<br class='autobr' /> tu vois, bon, euh, merde, j'ai des crasses sous les ongles, la salle de remise en forme, tout ça, c'est pas mal tout ça, mais pour se sentir prêt à sortir d'ici, le psychiatre m'a demandé : avez-vous un projet ? voilà le hic. un projet. c'est quoi, un projet ?<br class='autobr' /> à toi de savoir, enflure !</p> <p>33 ter</p> <p>moi des projets j'en avais plein. j'avais d'ailleurs commencé à les mettre à exécution. malheureusement, c'est moi que j'ai exécuté. <br class='autobr' /> avant terme.<br class='autobr' /> j'ai pris de l'alcool pour vingt ans ferme.</p> <p>34 ter<br class='autobr' /> ça vient d'où ça de préférer tout foutre en l'air plutà´t que de ne rien foutre en l'air ?</p> <p>35 ter<br class='autobr' /> air. <br class='autobr' /> pierre.<br class='autobr' /> mer. <br class='autobr' /> ter.</p> <p>36 ter<br class='autobr' /> september's here again.</p> <p>37 ter<br class='autobr' /> regarde les rolling stones ! déjà des papys, toujours capables de donner des concerts, et pourtant ils ont avalé :<br class='autobr' /> de l'alcool<br class='autobr' /> de la coke<br class='autobr' /> de l'héro<br class='autobr' /> des champis du h du lsd des couleuvres.</p> <p>38 ter<br class='autobr' /> les couleuvres, c'est nous qu'on les avale. leur guitariste il se fait changer le sang une fois par ang.</p> <p>39 ter<br class='autobr' /> c'est ça, et michaà« l jackson, il était pas dans son cercueil, c'est bien connu.</p> <p>40 ter<br class='autobr' /> quarantaine.</p> <p>41 ter<br class='autobr' /> fiston, je suis sorti.<br class='autobr' /> pas pour de bon.<br class='autobr' /> pour un week-end.<br class='autobr' /> entier.<br class='autobr' /> j'ai préféré dormir chez une copine.<br class='autobr' /> la maison sympa du papa n'est pas encore aménagée. <br class='autobr' /> pour toi.</p> <p>42 ter<br class='autobr' /> fiston, avec cette copine, on a eu un projet.<br class='autobr' /> on a fait ma lessive.<br class='autobr' /> oh pas celle de mes sentiments oh non !<br class='autobr' /> ma lessive, quoi.<br class='autobr' /> et comme on n'avait pas de séchoir (sous la main),<br class='autobr' /> on a mis le linge sur un radiateur.<br class='autobr' /> j'ai pris une serviette chaude, elle sentait l'assouplissant, j'ai enfermé mon visage dedans,<br class='autobr' /> c'était meilleur que le pinard,<br class='autobr' /> vraiment.</p> <p>43 ter<br class='autobr' /> i had a dream, j'ai un projet.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> je grimpe à l'échelle.<br class='autobr' /> du silence.<br class='autobr' /> des étoiles.<br class='autobr' /> rien à dire.<br class='autobr' /> rien à chanter.<br class='autobr' /> rien à boire.<br class='autobr' /> je suis le singe de dieu.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> (ah non putain merde cet espoir c'est celui qui justement m'a fait commencer à boire.)</p> <p>44 ter<br class='autobr' /> je pousse la porte,<br class='autobr' /> je casse la serrure,<br class='autobr' /> je veux permettre à la douleur de se faire un chemin en moi.</p> <p>45 ter<br class='autobr' /> hors de moi.</p> <p>46 ter<br class='autobr' /> car elle, elle ne meurt pas.</p> <p>47 ter<br class='autobr' /> car elle, on se la refile.</p> <p>48 ter<br class='autobr' /> de mains en mains.</p> <p>49 ter<br class='autobr' /> social, economical.</p> <p>50 ter<br class='autobr' /> un premier week-end.<br class='autobr' /> dehors.<br class='autobr' /> là -bas, ils prennent leurs potions vers 21 heures. <br class='autobr' /> y a des chances que thérèse soit de garde. thérèse, celle qui ne rit pas quand on ne la … pas. elle est pourtant si cool. 60 balais. enfermée des nuits entières avec des adddddddddictifs. thérèse, qui refuse qu'on ferme les portes des chambres. parce qu'elle l'a appris comme ça du temps des nonettes. elle passe son nez par le cran plusieurs fois sur la nuit. elle nous aime. je sais pas. un avant et un après. un dedans. et un dehors.</p> <p>51 ter<br class='autobr' /> je suis rentré.<br class='autobr' /> enfin : je suis sorti de chez cette copine.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas rentré chez moi.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas vraiment rentré à l'hosto.<br class='autobr' /> j'étais sorti pour un week-end complet.<br class='autobr' /> 52 ter<br class='autobr' /> ah fiston ravi d'avoir été voir ce film avec toi : robin des bois. notre première sortie ensemble depuis des mois. vuke y avait eu toi au bout du fil voici des mois : <br class='autobr' /> nonpapajeneviendraipluchétoi.</p> <p>53 ter<br class='autobr' /> tiens ? errol flynn avait déjà joué le rà´le de robin au cinoche. il est mort d'alcoolisme à cinquante vergetures.<br class='autobr' /> sale habitude.</p> <p>54 ter<br class='autobr' /> errol Flynn, héros archetypal. de la forêt sombre sombre sombre de sherbottle !<br class='autobr' /> chère bottle ! (pour ceux qui…)<br class='autobr' /> 55 ter<br class='autobr' /> je te jure je vais reprendre des chats.<br class='autobr' /> des ?<br class='autobr' /> ouais : des.</p> <p>56 ter<br class='autobr' /> une vie sans chats est pire qu'une vie sans flacon.</p> <p>57 ter<br class='autobr' /> indépendants, autonomes, souvent décidés sans avoir recours à la flasque qui conduit à la mollesse, et toujours reconnaissants.<br class='autobr' /> mais si nécessaire, ils te virent.<br class='autobr' /> j'ai pigé. la fameuse D.A.<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> dépendance. affective. ils connaissent pas. ils sont pas addicts. ils sont felix.</p> <p>58 ter<br class='autobr' /> men at work.</p> <p>59 ter<br class='autobr' /> ils me proposent de venir en jour. de ne plus dormir ici.<br class='autobr' /> déjà que j'étais venu en douce !</p> <p>60 ter<br class='autobr' /> il pleut des seaux sans vin blanc.<br class='autobr' /> je n'ai jamais compris comment les voitures se retrouvent en avant.<br class='autobr' /> j'arrive de la droite le virage mène ensuite à gauche et, là , je suis devant.<br class='autobr' /> je tourne vers la gauche, angle droit, vraiment, feux rouges, pas blancs.<br class='autobr' /> je passe sur le pont en dessous duquel sous lequel je suis passé avant quelques seconds seulement.<br class='autobr' /> soudain je l'aperçois.<br class='autobr' /> sans vin blanc.<br class='autobr' /> je l'aperçois.<br class='autobr' /> elle court sous les seaux sans vin blanc. <br class='autobr' /> sans doute que son patron l'attend maintenant.<br class='autobr' /> courrir.<br class='autobr' /> flétrir.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> 61 ter<br class='autobr' /> bonjour facteuse ! vous avez des nouvelles de “o†? <br class='autobr' /> il était avec moi à l'hosto.<br class='autobr' /> ah ! facteur ! <br class='autobr' /> ils se foutent de votre gueule vos manageurs !</p> <p>62 etr<br class='autobr' /> etc.</p> <p>63 ter<br class='autobr' /> il faut savoir.</p> <p>64 ter<br class='autobr' /> savoir dire non.</p> <p>65 ter<br class='autobr' /> au fond.</p> <p>66 ter<br class='autobr' /> mais oui !</p> <p>67 ter<br class='autobr' /> non je vais pas acheter ce divan, plutà´t cet autre, là .<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> me fait trop penser à la psychanalyse !<br class='autobr' /> 68 ter<br class='autobr' /> des gamins des gamines.<br class='autobr' /> mauvaises mines.<br class='autobr' /> leur prof n'est pas spécialement fine.<br class='autobr' /> certains ont une angine.<br class='autobr' /> certains voudraient montrer leur pine.<br class='autobr' /> de rage.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> et pourquoi ne pas vivre à l'hosto ?<br class='autobr' /> à vie.</p> <p>69 ter<br class='autobr' /> speechless.</p> <p>70 ter<br class='autobr' /> the age of self</p> <p>71 ter<br class='autobr' /> tu voulais faire quoi, DANS la vie ?<br class='autobr' /> la question étant : je suis venu faire quoi DANS la vie ?</p> <p>72 ter<br class='autobr' /> mais non, tu ne tombes pas.<br class='autobr' /> le garagiste du coin, lui il tombe.<br class='autobr' /> oui, dans sa fosse.</p> <p>73 ter<br class='autobr' /> toutes ces choses qui ne nous serviront plus quand nous serons morts.<br class='autobr' /> tous les livres que nous auron écrits, tous les livres que nous aurons écrits, <br class='autobr' /> toutes les voitures que nous aurons dépannées.<br class='autobr' /> les choses ne nous servent qu'à la condition d'être encore vivants.<br class='autobr' /> une bouteille vide ?</p> <p>74 ter<br class='autobr' /> revenons dehors. partons de l'intérieur.</p> <p>75 ter<br class='autobr' /> little red robin hood hit the road.</p> <p>76 ter<br class='autobr' /> on peut faire sans.<br class='autobr' /> sans quoi ?<br class='autobr' /> sans toutes ces choses.<br class='autobr' /> ok, je ferai avec.</p> <p>77 ter<br class='autobr' /> revenons dehors.<br class='autobr' /> ppppffff ! trop dur ! dehors, c'est le soleil MAIS la tempête, le chaud MAIS le froid, les feuilles mais les branches dénudées, les grosses nanas MAIS les maigres, et surtout : <br class='autobr' /> la télé, la télé, la téle, la télé.<br class='autobr' /> ouais mais la télé on l'a aussi ici dedans, derrière les murs de l'hà´pital, dans les murs, sous les murs, en cueillant des murs.</p> <p>78 ter<br class='autobr' /> oui, j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> mais je n'ai pas réussi la và´tre.<br class='autobr' /> mon fusain était usé.</p> <p>79 ter<br class='autobr' /> oui j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> j'ai arrêté de boire à vie. <br class='autobr' /> dernier avis.</p> <p>80 ter<br class='autobr' /> dehors :<br class='autobr' /> violence<br class='autobr' /> destruction<br class='autobr' /> obsessions<br class='autobr' /> passions.<br class='autobr' /> dedans :<br class='autobr' /> violence destruction obsessions passions.</p> <p>82 terre<br class='autobr' /> îles.</p> <p>83 ter<br class='autobr' /> now you're wandering what to do,<br class='autobr' /> now it's the end.</p> <p>84 ter</p> <p>je suis pas diffcile. <br class='autobr' /> pas vrai.<br class='autobr' /> tu me proposes une jolie femme nue sur mon lit…</p> <p>85 ter<br class='autobr' /> l'érotisme, c'est bizarre, et cà marche !<br class='autobr' /> bon… tu veux une médaille ou des menottes ?</p> <p>86 ter<br class='autobr' /> dehors, c'est quoi ?<br class='autobr' /> c'est de hors.<br class='autobr' /> tu te crois drà´le ?</p> <p>87 ter<br class='autobr' /> dedans c'est quoi ?<br class='autobr' /> de dans, cachés.</p> <p>88 ter<br class='autobr' /> allo la 88ème terre ?</p> <p>89 ter<br class='autobr' /> non mais je vais où moi ?</p> <p>90 ter<br class='autobr' /> dehors.</p> <p>mais c'est où mais c'est où mais c'est où,<br class='autobr' /> le pays de la liberté ?<br class='autobr' /> sans bis, sans repetita.</p> <p>dans la main mon portable.<br class='autobr' /> suis-je transportable ?<br class='autobr' /> on arrive.<br class='autobr' /> j'attends sur le pas de la porte.<br class='autobr' /> jaune l'ambulance.<br class='autobr' /> jaune violent<br class='autobr' /> un conducteur sans travaux.<br class='autobr' /> un convoyeur coréen. jaune ? allez, arrête !<br class='autobr' /> moi même pas sur un brancard.<br class='autobr' /> et puis quoi ?<br class='autobr' /> vieille l'ambulance.<br class='autobr' /> pas confort, l'ambulance.<br class='autobr' /> pas demandé à vivre, moi.<br class='autobr' /> et eux ? le conducteur ? le convoyeur ? pas demandé à convoyer ?</p> <p>on va vous conduire aux urgences… mais faut pas rêver…<br class='autobr' /> non, faut pas…</p> <p>alors vous buvez… combien ?<br class='autobr' /> ouh la…</p> <p>on peut vous garder une nuit.<br class='autobr' /> pas plus ? normal. <br class='autobr' /> la cure après la curée.</p> <p>mais votre pouls est bon. vous êtes solide.l'écho de votre estomac aussi.<br class='autobr' /> pas comme l'écho de mes pensées.<br class='autobr' /> bah, ça peut arriver à tout le monde. tiens, tenez, justement, ici dans le service, et bien…</p> <p>excusez, monsieur, une jeune fille va venir vous tenir compagnie. on va tendre ce rideau, là .<br class='autobr' /> je vous en prie. enfin : on vous en prie. je suis à plusieurs dans ma tête.<br class='autobr' /> ah ! cette blague-là elle est connue !</p> <p>ah merde elle m'a pissé dessus quand je lui ai enlevé sa culotte. ppppsss son string… oh non… elle chie maintenant… pas possible quoi… ces séries de merde à la télé… ils savent pas de quoi ils causent.<br class='autobr' /> ils savent. des gens s'y chient dessus. on ne le filme pas. <br class='autobr' /> storyboard. <br class='autobr' /> prison.<br class='autobr' /> putain merde qu'est-ce qu'elle est migonnne. infirmier ou pas. bousillée. remets. remets le masque à oxygène.</p> <p>qu'est-ce que je fous là ?</p> <p>voilà la famille les proches la famille les proches… <br class='autobr' /> bien vous êtes qui ? <br class='autobr' /> son ex-peti-tami ? <br class='autobr' /> vous avez rompu ? <br class='autobr' /> ce soir-là justement ? <br class='autobr' /> hier, quoi. bon. <br class='autobr' /> et maintenant elle est ici.<br class='autobr' /> elle a bu quoi ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non…<br class='autobr' /> d'accord, elle s'est endormie dans la baignoire.<br class='autobr' /> non, y a pas de quoi rire. on rit, nous ? <br class='autobr' /> d'accord, il a maintenu sa tête hors de l'eau.<br class='autobr' /> sa tête.<br class='autobr' /> hors.<br class='autobr' /> mais qu'est-ce qu'elle avait dans la tête ?<br class='autobr' /> que vous l'avez plaquée en début de soirée ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> vous avez tort.<br class='autobr' /> elle a bu.<br class='autobr' /> pour aussi peu. <br class='autobr' /> comme vous dites.<br class='autobr' /> elle est partie, où ? la gamine ?<br class='autobr' /> elle a foutu le camp.<br class='autobr' /> où ?<br class='autobr' /> vous savez bien.</p> <p>A UNE HEURE DE GRANDE ECOUTE<br class='autobr' /> Récits</p> <p>Pascal Samain<br class='autobr' /> Rue du Pont 6<br class='autobr' /> 7011 Ghlin<br class='autobr' /> Belgique<br class='autobr' /> pascal@pascalsamain.be<br class='autobr' /> <a href="http://pascalsamain.be" class='spip_url spip_out auto' rel='nofollow'>http://pascalsamain.be</a><br class='autobr' /> 00 32 496 307742</p> <p>alors (l…) a pris un bâton d'ice cream pour faire une attelle et retaper l'oiseau.<br class='autobr' /> Dan Fante, dans une traduction de Léon Mercadet</p> <p>il passait des mois entiers seul dans une chambre, mangeant à peine, plongé dans un rêve éveillé.<br class='autobr' /> Ronald Laing</p> <p>le tocsin sonne.<br class='autobr' /> on arrête de jouer.<br class='autobr' /> Louis Calaferte</p> <p>il faut que tu respires, <br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire ;<br class='autobr' /> tu vas pas mourir de rire,<br class='autobr' /> et ça c'est rien de le dire.<br class='autobr' /> Mickey 3D</p> <p>Pour Dan Fante, qui ne lit pas un putain de mot en français</p> <p>1</p> <p>tu aimes le foot<br class='autobr' /> que tu me dis, <br class='autobr' /> j'ai pas de doutes<br class='autobr' /> que je te dis.<br class='autobr' /> mais ta place je la paye <br class='autobr' /> en monnaie de singe. <br class='autobr' /> le feu dans mes méninges, une clé de merde dans ma bouche, une bouche de merde clé sur porte,<br class='autobr' /> que des mots qui en sortent, <br class='autobr' /> bouffis décolorés dissous collés voilés au palais <br class='autobr' /> enfermés à hurler on n'est pas des perroquets on n'est même pas des sirènes.<br class='autobr' /> ma bouche, mais je te paye en monnaie de singe.<br class='autobr' /> au fait, c'est quand qu'elle t'es venue ta passion pour les singes<br class='autobr' /> du foot ? <br class='autobr' /> j'aime le foot que tu me dis, traîne pas en route que je te dis,<br class='autobr' /> dehors <br class='autobr' /> la neige, les glaces déformées, les miroirs, le cosmos tu as ta carte de train ? tes livres d'école ? traîne pas en route, je suis pressé, toi devant le miroir, traîne pas sur le trottoir, je suis pressé comme un litron, à sept heures qu'elle ouvre la station, un litron, le premier, je ne traîne pas, moi, <br class='autobr' /> et ton papa te paye ta place en monnaie de singe.</p> <p>2</p> <p>les gens pensent que l'alcool est une maladie, les gens répètent que l'alcool est une maladie, les gens ont entendu dire que l'alcool est une maladie, les gens se persuadent que l'alcool est une maladie, les gens persuadent les autres gens que l'alcool est une maladie,<br class='autobr' /> ils ne trouvent pas le microbe le gène la bactérie,<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> les gens, ils boivent.</p> <p>3</p> <p>le facteur il boit<br class='autobr' /> l'éboueur il boit<br class='autobr' /> le maçon il boit<br class='autobr' /> ils ne font pas semblant d'être malades ils boivent.</p> <p>4</p> <p>au fond, ils vivent comme des microbes.<br class='autobr' /> sous la robe du vin.<br class='autobr' /> dans le faux-col de la bière.<br class='autobr' /> y a des liqueurs sucrées qui tuent sec.</p> <p>5</p> <p>les madames elles boivent.</p> <p>6</p> <p>elle quitte sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle double sa grande maison grande,<br class='autobr' /> elle va au magasin, elle ne se sent pas trop bien, elle embauche son vieux vélo, elle enfourche son vieux cabas, elle remplit son vieux cabas, <br class='autobr' /> des bouteilles, à ras,<br class='autobr' /> douze canettes dans les bras, personne d'autre sous les draps, des trous dans le pyjama, les taches de pisse sur le matelas.<br class='autobr' /> (elle est honteuse, à ras.)</p> <p>7</p> <p>le psychiatre dit ah venez en ville avec moi, et des alcooliques, on va en remplir trois pleins cars !<br class='autobr' /> bon, c'est toi qui conduit, mec ?</p> <p>8</p> <p>un gros, et son mur qui gagne son pain en le soutenant, un gros, il est plein aux trois-quarts.<br class='autobr' /> il serait dans le car du psychiatre, lui.<br class='autobr' /> je suis dans le cas.<br class='autobr' /> il sème derrière lui sa vie en croùtons de pain pourri et le pigeon c'est lui.</p> <p>9</p> <p>alors le grand-père explique à sa petite-fille bon maintenant qu'on a fini les courses on va aller boire un coup regarde mes mains tremblent<br class='autobr' /> tellement<br class='autobr' /> que j'en ai envie<br class='autobr' /> de boire un coup<br class='autobr' /> tellement.<br class='autobr' /> mais non, grand-papa, ce n'est pas à cause de ça.<br class='autobr' /> bien ! <br class='autobr' /> dans ce cas ma chérie tire la chevillette et la canette cherra !</p> <p>10</p> <p>en gros voilà c'est ça,<br class='autobr' /> il n'y a pas de mal à se faire du bien, un petit verre après le boulot c'est ça, ça aide, et d'abord les autres ont encore commandé une tournée, j'arrive, j'arrive, dans une heure j'arrive, on refait le monde (qui nous a repeints depuis longtemps), c'est quoi qu'on mange ?, non je n'ai pas très faim les enfants vont bien ?, <br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets<br class='autobr' /> je te jure<br class='autobr' /> je te promets,<br class='autobr' /> je te parjure.<br class='autobr' /> en gros voilà c'est ça.<br class='autobr' /> je n'ai pas très faim de la vie.<br class='autobr' /> ni de toi.<br class='autobr' /> ni de moi.</p> <p>11</p> <p>ma foi, pour son âge, encore de belles jambes, ne serait-ce ces poches sous les yeux comme le ventre vide d'une maman de kangourou,<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> juste là , <br class='autobr' /> putain que ça se voit !<br class='autobr' /> mais là ,<br class='autobr' /> ce bide-là c'est à toi, ce bide distendu par le tanin, en vain, mais là .<br class='autobr' /> ta vie, quelle bide !<br class='autobr' /> (mais la caissière ne le sait pas.)</p> <p>12</p> <p>Aujourd'hui j'ai accroché un papier tue-mouches<br class='autobr' /> à un nuage de ma rue.<br class='autobr' /> j'ai d'abord attrapé des éléphants roses.<br class='autobr' /> puis j'ai pris la peine j'ai pris la pose<br class='autobr' /> (longtemps !),<br class='autobr' /> alors j'ai attrapé les ivrognes qui vont avec.<br class='autobr' /> et voilà c'est comme ça qu'on fait mouche.</p> <p>13</p> <p>mais si, tu bois !<br class='autobr' /> mais non, je ne bois pas !<br class='autobr' /> mais si tu bois !<br class='autobr' /> je ne bois pas plus que tout le monde !<br class='autobr' /> parce que tout le monde boit ?<br class='autobr' /> oui, tout le monde boit.<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et c'est ainsi.<br class='autobr' /> (oui, je l'avais déjà remarqué.)</p> <p>14</p> <p>cette histoire commence un peu comme ça.<br class='autobr' /> ce garçon est le frère de sa soeur, aînée qu'elle est la soeur.<br class='autobr' /> un peu plus loin dans l'histoire, la soeur aînée s'inquiète de son frère<br class='autobr' /> qui boit,<br class='autobr' /> qui boit trop,<br class='autobr' /> qui boit plus que tout le monde.<br class='autobr' /> même si tout le monde boit.<br class='autobr' /> la soeur aînée va trouver son frère<br class='autobr' /> parce que justement<br class='autobr' /> elle vient de trouver les mots justes à lui dire.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> depuis un moment j'observe ta déchéance.<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> souviens-toi de toutes les belles choses que tu as faites dans ta vie !<br class='autobr' /> (avant.)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> à toi de savoir si tu veux mourir ou pas !<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu as un fils (quand même !)<br class='autobr' /> elle lui dit :<br class='autobr' /> tu ne te vois pas ?<br class='autobr' /> TU NE VOIS PAS CE QUE TU ES DEVENU ?<br class='autobr' /> (une loque, une épave, un déchet, sans doute, ou quelque chose d'approchant.)<br class='autobr' /> mais le garçon, lui, se voit, même flou dans le cul d'une bouteille, n'en déplaise à sa soeur.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> un peu plus loin encore dans l'histoire,<br class='autobr' /> il préfère ne plus adresser la parole à sa soeur,<br class='autobr' /> car voyons, fait-on remarquer à un cul-de-jatte qu'il n'a plus qu'un bras <br class='autobr' /> tandis que les gens normaux sont si sùrs d'en avoir deux ?</p> <p>15</p> <p>un homme qui boit, disons ça va.<br class='autobr' /> mais une femme qui boit !<br class='autobr' /> mon dieu non,<br class='autobr' /> ça,<br class='autobr' /> ça ne va pas !</p> <p>16</p> <p>papa, tu serres trop à droite.<br class='autobr' /> tu me racontes quoi ? je roule bien au milieu !<br class='autobr' /> (j'ai toujours été un bon conducteur.)</p> <p>17</p> <p>tiens au fait : toi.<br class='autobr' /> tu sais pourquoi tu bois ?<br class='autobr' /> oui, la psychologue me l'a expliqué.<br class='autobr' /> (ah ?)</p> <p>18</p> <p>et maintenant putain de merde,<br class='autobr' /> s'ils me foutent à la porte de l'hà´pital,<br class='autobr' /> putain !<br class='autobr' /> ils ont intérêt à me filer tous les médicaments que je veux !<br class='autobr' /> (sinon comment veux-tu que je m'en sorte ?)</p> <p>19</p> <p>la fête, la fête, tu parles !<br class='autobr' /> noà« l, tu parles !<br class='autobr' /> après six verres de rouge, papy va déprimer et monter se coucher<br class='autobr' /> (vu que mamy est morte l'année passée.)<br class='autobr' /> dès le champagne, machin va déconner !<br class='autobr' /> truc va s'enfiler cinq bouteilles, il finira par chialer <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> comme d'habitude !-,<br class='autobr' /> chose va cuver devant la télé,<br class='autobr' /> bidule va boucher les cabinets avec du vomi de poulet,<br class='autobr' /> et l'autre là , va s'étaler dans la cuisine !<br class='autobr' /> oui mais c'est la fête, alors…</p> <p>20</p> <p>le commissaire a pénétré les lieux du crime.<br class='autobr' /> les acteurs n'avaient pas encore quitté la scène du méfait.<br class='autobr' /> mais comme le commissaire n'avait pas bu,<br class='autobr' /> il n'a pas pu<br class='autobr' /> vraiment<br class='autobr' /> participer à cette discussion de bitus.</p> <p>21</p> <p>es-tu vraiment obligé de boire ?<br class='autobr' /> obligé, obligé, non…<br class='autobr' /> tu pourrais essayer autre chose ?<br class='autobr' /> oui je pourrais être propriétaire d'une voiture<br class='autobr' /> et la laver chaque jour tant que le temps dure,<br class='autobr' /> pour oublier cette douleur qui dure.</p> <p>22</p> <p>vraiment je ne crois plus en rien.<br class='autobr' /> cependant ce que je crois bien<br class='autobr' /> c'est que c'est le matin<br class='autobr' /> et que si je ne bois rien de ce putain de vin,<br class='autobr' /> mes doigts vont continuer à trembler,<br class='autobr' /> ça je le croirais bien.</p> <p>23</p> <p>avez-vous déjà été de pierre ?<br class='autobr' /> avez-vous déjà été pétrifié ?<br class='autobr' /> par quoi ? nul ne le sait, mais pétrifié.<br class='autobr' /> dans ces moments-là , plus rien ne va comme ça devrait aller,<br class='autobr' /> ni comme on dit que ça devrait aller.<br class='autobr' /> ça ne va pas bien, <br class='autobr' /> vous n'allez pas bien,<br class='autobr' /> vous êtes devenu de pierre.<br class='autobr' /> être de pierre, ça ne va pas, pour un être de chair.<br class='autobr' /> un être de chair, ça bouge<br class='autobr' /> (à´ dans les limites des lois de la gravité !)<br class='autobr' /> un être de chair, ça vit<br class='autobr' /> (à´ dans les limites du bocal !)<br class='autobr' /> un être de chair ça ressent des choses du vécu ça analyse ça comprend</p> <p>et ça le dit aux autres,<br class='autobr' /> ce que ça comprend.<br class='autobr' /> mais, comprenez-vous ça ?, vous, vous êtes de pierre.<br class='autobr' /> une pierre c'est plein de gravité ça ne bouge pas ça ne comprend<br class='autobr' /> rien<br class='autobr' /> que du gravas<br class='autobr' /> autant dire rien.<br class='autobr' /> pas la peine de calculer, de chercher une pierre aux riens,<br class='autobr' /> pour vous ça ne va pas bien.<br class='autobr' /> qu'est-ce qu'on boirait bien ?<br class='autobr' /> (un petit rien, une goutte, juste une goutte pour diluer ce qui ne va pas bien.)</p> <p>24</p> <p>l'alcool, c'est une maladie ?<br class='autobr' /> à ce qu'on dit…<br class='autobr' /> (et qui vous l'a dit ?)</p> <p>25</p> <p>que l'alcool est une maladie, vous l'avez lu, ça ?<br class='autobr' /> oui, quelque part… <br class='autobr' /> en tout cas, on le dit.<br class='autobr' /> c'est du sérieux ?<br class='autobr' /> oui, mais j'ignore si on en guérit !<br class='autobr' /> vous, vous ne buvez pas, vous, je le vois bien !<br class='autobr' /> oh non oh non pas du tout ! juste un peu, après le travail, mes trois bières d'abbaye, mais ces trois bières-là , justement c'est comme un abbaye, quoi,<br class='autobr' /> ça calme !</p> <p>26</p> <p>écoutez…<br class='autobr' /> écoutez…<br class='autobr' /> après tout je ne suis jamais que votre gé-né-ra-li-ste…<br class='autobr' /> votre toubib de tous les jours…<br class='autobr' /> (mais moi ça tombe bien je bois tous les jours !)<br class='autobr' /> alors alors il y a toujours un moment comme ça…<br class='autobr' /> où je suis bien obligé d'abandonner…<br class='autobr' /> la partie…<br class='autobr' /> ce n'est pas que je laisse tomber…<br class='autobr' /> mais allez donc voir ce psychiatre que je vous ai recommandé…<br class='autobr' /> (si j'arrive jusque là …)<br class='autobr' /> il s'y connaît mieux que moi,<br class='autobr' /> vous verrez… enfin… il verra… vous voyez ?<br class='autobr' /> (oui mais quoi ?)<br class='autobr' /> il y a de fortes chances … il vous écoutera<br class='autobr' /> puis c'est debout qu'il se mettra,<br class='autobr' /> il tapera du poing sur la table… très fort… très très fort…<br class='autobr' /> avec son poing droit <br /><img src='http://pascalsamain.be/local/cache-vignettes/L8xH11/puce-32883.gif?1641427221' width='8' height='11' class='puce' alt="-" /> il le fait toujours, c'est comme ça !-<br class='autobr' /> il vous dira :<br class='autobr' /> « monsieur, si vous continuez à boire<br class='autobr' /> vous allez vous retrouver dans une prison noire<br class='autobr' /> dont vous ne sortirez plus jamais alors s'il vous plaît apprenez à marcher droit<br class='autobr' /> bordel de merde !<br class='autobr' /> et je vous donnerai les médicaments qu'il faudra. »<br class='autobr' /> (mon médicament c'est l'alcool.)<br class='autobr' /> donc vous verrez… vous verrez…<br class='autobr' /> il vous fera très peur, il vous foutra la trouille de votre vie, il y arrivera,<br class='autobr' /> en se mettant debout devant vous.<br class='autobr' /> (mais moi je vis déjà couché !)<br class='autobr' /> et vous,<br class='autobr' /> vous,<br class='autobr' /> vous comprendrez !<br class='autobr' /> (mais moi je ne verrai rien, rien du tout, les alcoolos n'ont pas peur de boire, ça se saurait, mais alors de quoi ont-ils peur ? sinon ils ne boiraient pas, ça se saurait.)<br class='autobr' /> vous verrez, ce psychiatre est fort, il est vraiment très très fort.<br class='autobr' /> 27</p> <p>maman maman dommage que tu sois là comme ça<br class='autobr' /> comme une conne à plat<br class='autobr' /> enfin ils t'ont bien maquillée bien retapée on dirait que c'est toi,<br class='autobr' /> et tiens je te glisse<br class='autobr' /> une photo de ton petit fils<br class='autobr' /> oui celle avec toi.<br class='autobr' /> celle-là ,<br class='autobr' /> celle du baiser propice.<br class='autobr' /> bon tu n'es plus vraiment là <br class='autobr' /> (mais nous deux on est seuls, là , personne n'a voulu monter la garde recevoir les cartes de visite les fleurs ni les humeurs de ceux qui ont si peur quand est mort l'un des leurs, personne pas même ton mari mon papa.)<br class='autobr' /> maman maman dommage que tu ne m'entendes pas !<br class='autobr' /> tu étais infirmière tout le monde sait ça,<br class='autobr' /> et donc même si tu ne m'entends pas<br class='autobr' /> je tiens à te dire merci,<br class='autobr' /> à moins que tu m'entendes ? je voudrais que tu m'entendes !,<br class='autobr' /> merci d'avoir pris soin<br class='autobr' /> de moi<br class='autobr' /> si bien.<br class='autobr' /> dans ton sein j'ai fini par le croire qu'il y avait déjà de la bière.<br class='autobr' /> une bière, <br class='autobr' /> bien bonne et bien noire <br class='autobr' /> ça favorise<br class='autobr' /> la montée de lait.<br class='autobr' /> mais<br class='autobr' /> tu ne m'as pas abandonné là en si bonne voie.<br class='autobr' /> plus tard à table on buvait de la bière,<br class='autobr' /> qui s'appelait « bière de ménage » avec si peu de degrés mais pas mal<br class='autobr' /> de caractère<br class='autobr' /> au bout du compte,<br class='autobr' /> mais bon elle nous ménage.<br class='autobr' /> tu te souviens de la fois<br class='autobr' /> (oui je vois que tu t'en souviens je le vois)<br class='autobr' /> où encore dans ce qu'on nomme l'enfance j'avais bu<br class='autobr' /> en cachette <br class='autobr' /> (à ce mariage),<br class='autobr' /> j'étais pompette,<br class='autobr' /> toi dans une robe coquette<br class='autobr' /> et ton sourire qui signifiait tu es un peu jeune pour commencer,<br class='autobr' /> et au bout du compte ça te rend mignon d'être rond<br class='autobr' /> d'être complètement rond.<br class='autobr' /> (je t'apprends maintenant qu'un peu plus tard ce jour-là je n'en suis pas resté là , <br class='autobr' /> torché comme un vieux toit je suis parti m'allonger au beau milieu d'une route de béton,<br class='autobr' /> en contrebas,<br class='autobr' /> certain que j'étais<br class='autobr' /> que j'allais<br class='autobr' /> pouvoir arrêter<br class='autobr' /> les voitures qui s'avançaient avec danger si près de moi<br class='autobr' /> allongé sur le béton, et le goudron qui me collait le pantalon mais bon j'étais rond,<br class='autobr' /> ça va ça va ne t'inquiète pas, j'entendais encore les voix des oncles qui racontaient des blagues interdites aux enfants, ça va ça va je n'étais pas si rond que ça, j'entendais encore les voix des oncles qui dégueulaient la moitié de leur repas !)<br class='autobr' /> maman maman<br class='autobr' /> j'ai eu quinze ans<br class='autobr' /> ni p'tit ni grand,<br class='autobr' /> après la messe avec les copains je repassais déjà au bistrot du coin<br class='autobr' /> et dans l'après-midi tu m'épongeais le front d'une serviette humide,<br class='autobr' /> et tiens, tant que tu es là , ne t'en va pas,<br class='autobr' /> pas avant que je te reparle du médecin de famille<br class='autobr' /> accouru au chevet de papa<br class='autobr' /> pour toutes les maladies qu'il n'avait pas, toi tu finissais souvent <br class='autobr' /> par dire :<br class='autobr' /> docteur (tu disais toujours docteur aux docteurs),<br class='autobr' /> docteur je vous sers une petite goutte ?<br class='autobr' /> c'était comme ça en ce temps-là <br class='autobr' /> il n'y a pas de quoi fouetter un chat,<br class='autobr' /> d'ailleurs monsieur le vicaire<br class='autobr' /> aussi il aimait la bière,<br class='autobr' /> celle que papa ramenait de la campagne,<br class='autobr' /> attention !<br class='autobr' /> fermée avec un vrai bouchon,<br class='autobr' /> fermentée en bouteille au moins six mois,<br class='autobr' /> et pan ! la mousse beige la robe brune<br class='autobr' /> on s'en foutait plein l'urne !<br class='autobr' /> maman maman maintenant<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi, <br class='autobr' /> ne vois aucun rapport entre toutes ces choses-là ,<br class='autobr' /> je te laisse un peu avec toi,<br class='autobr' /> moi je vais repasser à la station<br class='autobr' /> m'acheter du soda bourré de vodka,<br class='autobr' /> allez je te laisse dans ta bière,<br class='autobr' /> moi je ne suis même pas le clou de ton cercueil.<br class='autobr' /> du moins pas celui-là .</p> <p>28</p> <p>Ils sont en train de chercher le gène de l'alcoolisme,<br class='autobr' /> lui cependant ,pas con,<br class='autobr' /> lui les a déjà repérés.</p> <p>29</p> <p>madame<br class='autobr' /> jamais je n'aurais imaginé être capable d'érafler la tà´le de votre quatre-quatre <br class='autobr' /> à l'aveuglette<br class='autobr' /> quatre à quatre<br class='autobr' /> on ne fait pas d'omelette sans casser des canettes.</p> <p>30</p> <p>et maintenant.<br class='autobr' /> et ensuite ?<br class='autobr' /> et après…<br class='autobr' /> après tout…</p> <p>31</p> <p>la télé est allumée, couverte de la poussière des centres de cure, magnétisme de misère, cordes délitées, un peu d'astéroà¯de, beaucoup de cendres de beaucoup de cigarettes, beaucoup de couches de beaucoup de vies qui ont mal brùlé, et elle, elle tient sa conférence, avec sous les yeux juste en dessous de la peau pendue rayée, son volcan mal éteint, son passé mal étreint, incendie d'eau, ils ont beau lui donner une charrette de Valiumâ„¢ le soir.</p> <p>32</p> <p>peut-on se noyer dans une bouteille ? <br class='autobr' /> une seule, non sans doute, mais c'est un début.</p> <p>33</p> <p>nager, pourquoi ? <br class='autobr' /> se noyer, pour sùr.</p> <p>34</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la « masturbation » intellectuelle ?</p> <p>35</p> <p>comment oses-tu me dire que c'est de la folie ?</p> <p>36</p> <p>comment oses-tu me dire que je suis taré ?</p> <p>37</p> <p>comment oses-tu me dire que je ne suis pas normal ?</p> <p>38</p> <p>on est hors du circuit mais pas en vacances.<br class='autobr' /> on n'est pas en vacances mais on rame.<br class='autobr' /> on n'est pas des touristes.<br class='autobr' /> on est nous aussi de la vie. de la vie on en est aussi.<br class='autobr' /> peut-être plus que vous tous réunis, nous, dans l'auditoire de la mort.</p> <p>39</p> <p>l'infirmier rame. <br class='autobr' /> dans le couloir ils ont installé un rameur. pour la forme. pour notre forme.<br class='autobr' /> mais seul l'infirmier rame à ses heures perdues.</p> <p>40<br class='autobr' /> putain la psychologue a de ces nichons ! <br class='autobr' /> et souriante.</p> <p>41</p> <p>l'assistante sociale se retrouve chaque jour que Bacchus fait devant des mecs qui ont du verre pilé à la place des couilles et face à des nanas qui ont un tesson de bouteille dans le vagin. ça fait mal ça fait mal. vers 17 heures elle rentre à la maison après avoir chopé son gosse à la garderie. <br class='autobr' /> jeune maman elle n'a pas encore de bouteille.<br class='autobr' /> mais elle ne rame pas trop.<br class='autobr' /> 42</p> <p>la douche est collective, la douche est commune, prendre une douche c'est commun. mais toi tu t'étais abandonné comme une vieille loque desséchée dans la salle d'attente étriquée d'un purgatoire interminable. l'alcolo ne se lave plus, il s'en fout de ses cheveux devenus trop longs, il s'en fout de ses ongles de pieds poussés trop fort, il s'en fout de ces petites merdes coincées sous les paupières, il ne s'en fout pas de son cerveau trop gros coincé sous son crâne.</p> <p>43</p> <p>il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout,<br class='autobr' /> il s'en fout.<br class='autobr' /> non il ne s'en fout pas. <br class='autobr' /> Il n'est pas si fou.</p> <p>44</p> <p>voilà bien la course des humains : quelque chose plutà´t que rien.<br class='autobr' /> et celle des buveurs : rien plutà´t que quelque chose.</p> <p>45</p> <p>tu prendras bien quelque chose ?</p> <p>46</p> <p>qu'est-ce que vous prendrez ?</p> <p>47</p> <p>on ne m'y prendra plus.</p> <p>48</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre (mais qu'est-ce qu'une tête de ?)</p> <p>49</p> <p>une cravate alors ?</p> <p>50</p> <p>le psychiatre n'a pas une tête de psychiatre. une tignasse de hippie un peu, dirait-on, un vieux groupe de rock, parfois en catogan, un vieux t-shirt vert usé, et des baskets d'ado. il me tape sur le bide, il me dit tu sais moi aussi j'ai fait une dépression. <br class='autobr' /> et son sourire de latino.</p> <p>51</p> <p>bonjour madame, que pensez-vous de votre psychiatre ?<br class='autobr' /> il est bien (sous tous les rapports.)<br class='autobr' /> ah ?<br class='autobr' /> oui, il porte une cravate chose, un pantalon machin (oh j'ai vu le même dans une galerie !), des souliers pointus cirés avec du cirage truc (on sent que son petit personnel est de qualité), son caleçon vous pensez je n'y pense pas, puis des lunettes car-ré-es à la mode, devant sa villa se trouve son cabriolet, d'ailleurs chaque week-end il emmène sa maîtresse à la mer, là ils se tiennent la main en amoureux.<br class='autobr' /> ils connaissent les meilleurs restos du coin.<br class='autobr' /> ils savent vivre.<br class='autobr' /> eux.</p> <p>52</p> <p>et il y a aussi ce cinéaste qui explique ceci : que les plus grands créateurs étaient tous alcooliques, <br class='autobr' /> sont tous alcooliques.<br class='autobr' /> et ils le seront ? (où les cinéastes vont-ils chercher leurs idées ? bulle à verre ?)<br class='autobr' /> 53</p> <p>mais non il est complètement con, ce psychiatre !<br class='autobr' /> deux ans que je le vois, et il n'a pas réussi à me faire arrêter de boire.</p> <p>54</p> <p>le mien, il a si je puis dire le bras long. <br class='autobr' /> à force.<br class='autobr' /> partout il transporte son très lourd DSM-IV-TR, le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux, quatrième édition révisée. je me reconnais dans la rubrique Troubles Liés à Une Substance. enfin, précisons, si je carbure, au fond, c'est peut-être à cause d'un trouble lié à l'essence, plutà´t.<br class='autobr' /> un manuel agnostique qui n'apporte aucune réponse à qui que quoi dont où quoi que ce soit, et partout nulle part, à la fois. <br class='autobr' /> depuis ma naissance.</p> <p>55</p> <p>un trouble.<br class='autobr' /> et une camisole chimique.<br class='autobr' /> deux forces.</p> <p>56</p> <p>et à la une,<br class='autobr' /> et à la deux, <br class='autobr' /> et à la trois,<br class='autobr' /> DSM quatre.</p> <p>57</p> <p>fiston, il faut que je te le dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, si les accus à plat j'ai arrêté d'accumuler les culs de bouteilles vides dans un coin du garage et si j'ai arrêté d'écrabouiller les canettes de vodka-orange sous le siège de la voiture, ce n'est pas pour moi, pas tellement. l'autre jour j'avais été déposer au moins cinquante vidanges de rouge à la bulle, alors un passant m'a fait remarquer : vous devez boire beaucoup. vous avez une bonne descente. <br class='autobr' /> oui je devais.<br class='autobr' /> oui une bonne descente, en effet, l'enfer n'était plus si loin de moi. à portée de goulot. <br class='autobr' /> ou bien le paradis ?<br class='autobr' /> parce que fiston, il faut que je te dise, après trois Xanax-Retard ®, un Rémergon ©,<br class='autobr' /> et une bonne dizaine de Château-Lafuite®, les draps de mon lit finissaient par avoir l'odeur du linceul, et cette odeur-là n'était pas pour me déplaire. c'est au premier étage que je dormais dès le milieu de l'après-midi, et pourtant je planais vachement plus haut que le premier étage. j'évitais avec soin le grenier où tous nous stockons les souvenirs dont nous ne voulons plus.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, ce n'est pas pour moi.<br class='autobr' /> la mort est inodore, je te le dis.</p> <p>58</p> <p>maman cette nuit j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> je ne m'en suis rendu compte qu'au réveil.<br class='autobr' /> il y avait quelque chose.<br class='autobr' /> insidieusement.<br class='autobr' /> quelque chose d'insidieux qui puait. <br class='autobr' /> quelque chose de lancinant qui puait.<br class='autobr' /> et c'était de la merde.<br class='autobr' /> ma merde.<br class='autobr' /> ma merde, tu l'as bien connue autrefois, ma merde, non ?<br class='autobr' /> donc je voudrais te parler de ma merde, celle de cette nuit. <br class='autobr' /> hier soir, j'étais, comme on dit, rétamé. le cuir passé, martelé par un rétameur du quartier des tannages de peaux, tu sais, cette collection de livres que tu m'achetais quand j'étais morveux, pour me faire connaître le monde. celui-là montrait d'énormes cuves avec du cuir trempé, depuis j'ai visité ce genre d'endroit,<br class='autobr' /> ça pue,<br class='autobr' /> ça pue aussi un peu la merde.<br class='autobr' /> à la fin, au bout de sept bouteilles de pinard (à 8 euros 75 pièce, on n'a que le plaisir qu'on se donne), sept comme dans les meilleurs contes, à la fin j'ai cédé. putain dehors c'était l'hiver livide, dehors. pas que tout semblait être en train de geler, non : tout était gelé pour de vrai. je vais t'aider à comprendre mon objectif. comme tu le sais, j'ai une tête, et dans sa partie supérieure, un cerveau. à un certain endroit de mon cerveau naissent des idées, des idées tantà´t fixes, pas qu'elles soient gelées, non : elles me glacent, moi ; et des idées tantà´t mobiles, toujours en mouvement,<br class='autobr' /> perpétuelles,<br class='autobr' /> en pure perte.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien.<br class='autobr' /> elles ne m'avancent pas.<br class='autobr' /> elles ne servent à rien d'autre qu'à être là à courir entre mes neurones et qu'à me faire chier.<br class='autobr' /> elles avancent masquées, et ça n'a rien d'un carnaval.<br class='autobr' /> je n'y comprends que dalle, elles sont de plomb, mais qu'est-ce qu'elles galopent !<br class='autobr' /> alors<br class='autobr' /> moi<br class='autobr' /> j'ai pensé que les étouffer dans du vin, leur noyer le cerveau, ça ne me ferait pas de tort.<br class='autobr' /> enfin, pas plus que ça.<br class='autobr' /> or tu vois,<br class='autobr' /> avant ça j'avais avalé plusieurs cachets de XXXXX (copyrighted, d'une seule traite), puis des pilules de YYYYYYYY (registered, c'est un fait), et tu vois, ces bonbons ont si bien déposé leurs marques, et je flottais à un point tel, loin de mes idées fixes, à un point tel que je ne me suis plus senti, ça, je t'ai déjà aidée à comprendre mon objectif. <br class='autobr' /> je ne me suis plus senti, et j'ai chié sous moi.<br class='autobr' /> ça puait, ça collait, c'était froid.<br class='autobr' /> tu m'as déjà connu, maman,<br class='autobr' /> un peu comme ça.</p> <p>59</p> <p>the fact is.</p> <p>60</p> <p>à l'hà´pital, aucun divan.<br class='autobr' /> faut pas qu'on s'affale comme avant.<br class='autobr' /> à l'hà´pital, aucun sofa.<br class='autobr' /> faut pas qu'on retombe aussi bas.</p> <p>61</p> <p>chèèèèrrrr public bonjouuuuuurrrrr ! connais-tu l'histoire de l'ascenseur ?<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> chèèèèèèrrrrr public la voi-ciiiiiii !!!!l<br class='autobr' /> de nos jours on ne compte plus les ascenseurs ! partout il y en a ! des grands et des petits ! des vieux qu'ont bien vécu, des jeunes qui vont nous en faire vivre ! <br class='autobr' /> (au 19ème siècle, déjà !)<br class='autobr' /> (d'ailleurs chérie on n'a jamais fait l'amour dans un ascenseur, ah ah !)<br class='autobr' /> et bien aujourd'hui, notre ascenseur se trouve dans un, je vous le donne en mille !, … un hà´-pi-tal ! très général, hein, l'hà´pital, très général, rien de particulier. l'aphone habituel, la flore intestinale, ah ah ! <br class='autobr' /> et là , dans un coin de l'ascenseur, une dame, la quarantaine la dame, quarante ans à tout casser. <br class='autobr' /> il fait beau… dehors, hein, pas à l'intérieur de l'hà´pital, d'ailleurs passer l'été à l'hà´pital, hein, on vous dit pas.<br class='autobr' /> bref.<br class='autobr' /> la dame, la quarantaine, donc, porte un short, disons une espèce de, disons sur l'étiquette au magasin ils avaient écrit ça : short. elle tripote et tripote et tripote les cordons qui pourraient, éventuellement, au cas où, lui tenir le short à la taille (voir : magasin, nom commun etc.) chèèèèèrrrr public, tu l'as compris : <br class='autobr' /> la dame, elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble parce qu'elle picole.<br class='autobr' /> elle picole parce qu'elle tremble.<br class='autobr' /> elle tremble, alors elle boit.<br class='autobr' /> au début, de l'intérieur, qu'elle tremblait.<br class='autobr' /> maintenant de tout partout.<br class='autobr' /> alors,<br class='autobr' /> humblement,<br class='autobr' /> elle demande au monsieur qui lui fait face monsieur vous ne pourriez-pas s'il vous plaît nouer les cordons de mon short je n'y arrive pas j'ai un problème je tremble.</p> <p>62</p> <p>la dame, la quarantaine, c'était la première fois qu'elle osait venir en parler.<br class='autobr' /> en parler à qui ?<br class='autobr' /> en parler à l'hà´pital, tiens !</p> <p>63</p> <p>putain de main droite de putain de main de putain de main de merde tu restes pas en place, j'ai encore dù utiliser ma main gauche pour te garder en place ! tu as encore cafouillé sur le clavier<br class='autobr' /> du terminal<br class='autobr' /> automatisé<br class='autobr' /> de la banque. <br class='autobr' /> j'avais tapé 368, pas 2b9 !</p> <p>63</p> <p>… mais je ne vais pas te couper, j'ai encore besoin de toi pour tenir la canette !</p> <p>64</p> <p>non monsieur l'agent de police non je ne bois pas !<br class='autobr' /> je me torche !<br class='autobr' /> 65</p> <p>bien bien bien vous l'avez compris (monsieur), vous buviez pour vous anesthésier. pour, en quelque sorte, endormir votre…votre douleur-de-vivre.<br class='autobr' /> non, pas en quelque sorte. souvent du bon vin.</p> <p>66</p> <p>ma douleur ce n'est pas que je m'y vautre, c'est que…</p> <p>67</p> <p>du coup,<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire<br class='autobr' /> (bordel c'est ça qu'ils apprennent à l'école, les psys ?)<br class='autobr' /> ske j'ai envie d'dire,<br class='autobr' /> sèkeu… vivre, est-ce une telle douleur ?<br class='autobr' /> vivre…<br class='autobr' /> (pour moi, oui.) (bordel.)</p> <p>68</p> <p>alors monsieur comprenons-nous bien, ici personne ne vous demandera d'arrêter de boire, absolument personne, hum !, si vous buvez et bien c'est que vous buvez, et c'est un fait incontournable, et si vous avez commencé à boire c'est que bon vous aviez besoin de commencer à boire, alors oublions que vous buvez, cela n'a finalement aucun intérêt.<br class='autobr' /> on va pas se fixer là -dessus.<br class='autobr' /> et si un jour vous arrêtez de boire, supposons que vous arrêtiez de boire pour… pour… votre petit chien, moi en tant que toubib j'en serais fort heureux ! <br class='autobr' /> (mais il n'a pas de chien, ce buveur !)</p> <p>69</p> <p>buveur invétéré, qu'on dit !<br class='autobr' /> invertébré ?</p> <p>70</p> <p>décervelé ?</p> <p>71</p> <p>ah non ça c'est le but !</p> <p>72</p> <p>you and me at the edge of time.</p> <p>73</p> <p>tu vois, moi non. moi je ne supporte pas que vous disiez à tout bout de champ : j'ai rechuté j'ai rechuté !<br class='autobr' /> d'où ?</p> <p>74</p> <p>oh j'en ai entendu d'autres, monsieur (le psychiatre) ! <br class='autobr' /> que j'étais en pleine déchéance. mais qui m'avait déchu ? pas moi, rien d'autre que le regard des autres…</p> <p>75</p> <p>the fire-sea licking my feet.</p> <p>76</p> <p>on rigole, on rigole.<br class='autobr' /> mais la douleur, ça existe.<br class='autobr' /> une douleur, comme ça, sans nom, qui se balade en vous sans définition possible, qui prend toute la place, qui fait ses petits en vous. une douleur qui ne va pas si mal et qui ne vous va pas bien.</p> <p>77</p> <p>ta douleur ? ta douleur ? allons bon ! c'est facile de parler de douleur, de chercher des excuses alors qu'en fait tu manques de vo-lon-té !</p> <p>78</p> <p>quelle volonté ? de quoi parle-t-on (à la fin ?)</p> <p>79</p> <p>il faudrait d'abord, pour s'entendre, savoir de QUOI on parle, bordel à queue ! après tout, jésus déjà disait : père, pardonne-leur, ils ne savent pas de quoi ils parlent ! c'est vrai : <br class='autobr' /> les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), bon, on leur a appris à parler quand ils étaient petits. ce faisant, ils s'imaginent, les gens, les proches, les amis, la famille (ah la famille !), ils s'imaginent connaître le vocabulaire ! de fait quand ils vont au supermarché, ils précisent qu'ils ont l'intention de régler par carte bancaire, la caissière les comprend, les gens, nos proches, nos amis, la famille.<br class='autobr' /> la famille. ah, la famille !</p> <p>80</p> <p>tu dis simplement : voilà , j'en ai marre de la vie.<br class='autobr' /> et c'est un scandale.</p> <p>81</p> <p>tu dis : voilà j'ai le cancer.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt auprès de toi avec des bouts de tuyaux qui leur restaient dans la remise.</p> <p>82</p> <p>tu dis : voilà , ça fait trop longtemps que je souffre.<br class='autobr' /> et tout le monde accourt avec des vitamines.<br class='autobr' /> et tout le monde planque les vitamines.</p> <p>83</p> <p>après tout, il n'a que le cancer…</p> <p>84</p> <p>je vais vous expliquer, moi, je vais vous l'expliquer pourquoi mon frère boit. <br class='autobr' /> je le sais, moi.<br class='autobr' /> c'est parce qu'il est faible.<br class='autobr' /> écoutez, allez, il avait tout pour réussir !<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> il est intelligent,<br class='autobr' /> mais il est si faible !<br class='autobr' /> (est-ce que je bois, moi ?)</p> <p>85</p> <p>ces deux-là sont tombés amoureux. à l'hà´pital.<br class='autobr' /> d'accord, ils n'allaient pas bien.<br class='autobr' /> ni l'un.<br class='autobr' /> ni l'autre.<br class='autobr' /> lui bon c'est depuis la mort de sa femme (dans un accident de voiture, il conduisait, elle était enceinte de leur première fille et le foetus, on l'a retrouvé sur le pare-brise.)<br class='autobr' /> on peut comprendre, n'est-ce pas ? <br class='autobr' /> on peut comprendre.<br class='autobr' /> elle ? je sais pas. ça tournait pas rond non plus.<br class='autobr' /> ils font partie de ces personnes qui croient échapper enfin à l'alcool<br class='autobr' /> en tombant amoureux.<br class='autobr' /> à l'hà´pital.<br class='autobr' /> (de quoi tu te mêles ?)</p> <p>86</p> <p>à part ça, jésus a dit : aime ton prochain…</p> <p>87</p> <p>et jésus dit : aime ton prochain verre !</p> <p>88</p> <p>fiston, il faut que je te dise.<br class='autobr' /> si j'ai arrêté de boire, c'est pour toi.<br class='autobr' /> je te le dis, de toi à moi.<br class='autobr' /> il fallait bien que je te le dise.<br class='autobr' /> je suppose qu'il est mieux de te le dire plutà´t que de ne pas te le dire.<br class='autobr' /> je pense vraiment qu'il n'est pas utile de tout dire à son fiston, sauf ce qu'il est mieux de dire plutà´t que de ne pas le dire.<br class='autobr' /> maintenant, ceci étant dit, je peux romancer l'affaire, si tu le souhaites.<br class='autobr' /> c'était un gris dimanche gris d'avril qui ne se découvrait pas d'un fil. comme à mon habitude, j'avais bu dès le réveil, j'étais déjà passé à la station, le dimanche c'est pas lui c'est sa cousine qui tient la boutique. <br class='autobr' /> comme à son habitude elle m'a salué avec gentillesse <br class='autobr' /> sans me poser <br class='autobr' /> la moindre question <br class='autobr' /> du genre : <br class='autobr' /> non mais pourquoi venez-vous acheter cinq bouteilles de rouge chaque dimanche à 7 heures du mat ? <br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> pas par compassion, sans doute.<br class='autobr' /> je faisais tourner la boutique, au fond.<br class='autobr' /> je débouche la première bouteille.<br class='autobr' /> je tremble.<br class='autobr' /> je flippe.<br class='autobr' /> mes mains lâchent la bouteille.<br class='autobr' /> elle va s'exploser la tronche sur les disques de mon chanteur favori.<br class='autobr' /> autour de moi. partout. du verre. du vin.<br class='autobr' /> ça pue. ça pue le vin. ma gueule pue pareil quand j'ai bu. et comme je bois toujours…<br class='autobr' /> tu sais, le vin, ça pue. ah la binette extatique du type à la télé ! il agite avec aaaamour son ballon, ah ça sent la noisette, le fruit rouge avec un arrière-goùt de mort ! arrêtez vos conneries, le vin ça pue ! <br class='autobr' /> j'ouvre une deuxième bouteille. je n'ai pas soif. je n'aime plus le vin. je n'aime plus boire du vin. je bois du vin parce que j'ai la tremblote. j'ai la tremblote. <br class='autobr' /> on appelle ça : le manque. joli mot.<br class='autobr' /> j'abrège la seconde bouteille je l'ai vomie.<br class='autobr' /> et au milieu des bulles de bile qui pétaient sur l'inox de l'évier<br class='autobr' /> de la cuisine,<br class='autobr' /> j'ai vu ton visage,<br class='autobr' /> fiston.<br class='autobr' /> joli mot.</p> <p>89</p> <p>et ce poteau de signalisation qui le regarde, <br class='autobr' /> lui,<br class='autobr' /> qui le nargue.<br class='autobr' /> ta gueule !</p> <p>90</p> <p>cette amie avait un ami.<br class='autobr' /> son ami buvait (beaucoup, mais demeurait toujours poli.)<br class='autobr' /> une fois assis à , par exemple, la terrasse de ce bistrot en face de la gare, <br class='autobr' /> il commandait un « demi de rouge. »<br class='autobr' /> la suite ? vous voulez la suite ?</p> <p>91</p> <p>tous les matins avant même de manger, il vomit.<br class='autobr' /> il ne vomit rien.<br class='autobr' /> juste un peu de cette bile verte<br class='autobr' /> fabriquée à l'intérieur de son corps blanc,<br class='autobr' /> ici, sur la planète bleue.</p> <p>92</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>93</p> <p>tous les matins, il vomit.</p> <p>94</p> <p>tous les matins…</p> <p>95</p> <p>les matins ? il les vomit tous.</p> <p>96</p> <p>un premier demi de rouge.</p> <p>97</p> <p>merde à la fin on vient ici pour se soigner, on sait très bien qu'on doit arrêter de boire, et puis voilà à la télé en plein salon, à une heure de grande écoute, des pubs pour de l'alcool vraiment c'est de nous qu'on se moque on nous provoque.</p> <p>98</p> <p>je ne sais pas, je me sens divisé.<br class='autobr' /> à quel sujet ?<br class='autobr' /> non, tu ne comprends pas. je suis divisé : moi.<br class='autobr' /> oui mais à propos de quoi ? de toi ?<br class='autobr' /> non tu ne comprends pas. je me sens divisé. une partie de moi dis fais ça, une partie de moi dit fais ci…<br class='autobr' /> ah oui ah oui ah oui je te comprends mieux, c'est le fameux truc de la division entre la raison et les émotions. non ?</p> <p>99</p> <p>aujourd'hui matin je n'ai même pas envie de me laver. non je ne vais pas me laver. j'ai des traces de merde sèche au fond du caleçon, trois jours de merde je crois.</p> <p>100</p> <p>putain l'odeur entre mes orteils ! <br class='autobr' /> 101</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, je m'épilais les poils de bite, j'évitais la brousse.<br class='autobr' /> maintenant, après, maintenant, après, je porte l'odeur de sperme pourri de ma branlette d'hier soir.</p> <p>102</p> <p>je me suis branlé hier soir ? j'ai oublié.</p> <p>103</p> <p>d'habitude, avant, d'habitude, avant, j'éliminais ces morceaux de peau durcie sur la plante de mes pieds.</p> <p>104</p> <p>il va travailler. <br class='autobr' /> un détour par la station. <br class='autobr' /> il achète deux flacons de ce rouge à la con format 50 cl, y a pas de bouchon donc pas de problème à l'ouverture du goulot, en allant travailler, après un détour par la station.</p> <p>105</p> <p>monsieur c'était votre jour d'essai et vous sentiez l'alcool.<br class='autobr' /> je sentais l'alcool ?<br class='autobr' /> je ne l'ai pas remarqué moi-même, mais ma secrétaire avait des doutes, elle est venue m'en parler.<br class='autobr' /> elle avait des doutes sur quoi ? sur le fait que je boive, ou sur le fait que je ne boive pas ?</p> <p>106</p> <p>une bouche de merde, une clef de merde dans ma bouche.</p> <p>107</p> <p>c'était jour de stage, aujourd'hui. le troisième de la semaine de stage, aujourd'hui. <br class='autobr' /> au volant sur l'autoroute, elle a bu six canettes de gin-cola, aujourd'hui. <br class='autobr' /> à l'école, les toilettes étaient fermées, aujourd'hui.<br class='autobr' /> elle est ressortie en rue, mais elle n'a pas trouvé le moindre bistrot, aujourd'hui.<br class='autobr' /> c'était pourtant stage, aujourd'hui.<br class='autobr' /> en revenant vers l'école, elle a pissé sur elle. aujourd'hui, son pantalon était trempé. <br class='autobr' /> trop tard.<br class='autobr' /> alors, avant de se présenter à son troisième jour de stage (c'était aujourd'hui, quand même !), elle est retournée dans sa bagnole, elle a mis le chauffage à fond sur chaud, elle a espéré que son froc sèche vite, vite, vite.<br class='autobr' /> vite.<br class='autobr' /> elle a espéré que personne ne se doute de rien, aujourd'hui.<br class='autobr' /> quand le maître de stage lui a dit votre leçon était bien donnée bravo mais excusez-moi si je vous importune c'est délicat avez-vous hum hum comment ? un problème avec votre séchoir.<br class='autobr' /> (pourquoi ? je la flaire la pisse ? c'est ça ?)</p> <p>108</p> <p>c'est depuis quand que tu aimes le foot, fiston ?<br class='autobr' /> j'avais pas remarqué.</p> <p>109</p> <p>traîne pas en rue.<br class='autobr' /> il fait froid.</p> <p>110</p> <p>fiston.</p> <p>111</p> <p>fiston.</p> <p>112</p> <p>j'arrêterai de picoler, et je passerai des heures à caresser mes chats.<br class='autobr' /> quand j'arrêterai.</p> <p>113</p> <p>elle m'embrassait. je veux dire elle me mettait la langue. elle touchait mes cheveux. elle touchait mes nichons. elle suçait ma bite. elle me mettait un doigt dans le cul. elle hurlait j'aime ta bite. une fois elle m'a mis un concombre dans le cul. c'était froid, putain !<br class='autobr' /> elle aurait pu aussi me sucer les orteils !<br class='autobr' /> mais on s'est tapés sur la gueule.</p> <p>114</p> <p>tu comprends tu comprends tu comprends ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> tu comprends ? six mois que je ne bois plus !<br class='autobr' /> vraiment ?<br class='autobr' /> six mois que je ne bois plus ! tu comprends ? (mais voilà ce week-end y a la ducasse au village et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront et tous mes potes y seront.)<br class='autobr' /> nnnnoooonnnn…</p> <p>115</p> <p>mesdames et messieurs, d'emblée je vais commencer mon exposé <br class='autobr' /> par une provocation. <br class='autobr' /> tion.<br class='autobr' /> vous avez tous, je le suppose, entendu parler du bioéthanol, ce carburant qui serait censé éradiquer le problème de la consommation de pétrole<br class='autobr' /> par les humains<br class='autobr' /> à la surface de la terre ?<br class='autobr' /> terre.<br class='autobr' /> j'oserai, mesdames et messieurs, une comparaison,<br class='autobr' /> son, <br class='autobr' /> avec l'éthanol consommé comme carburant par les alcooliques pour éradiquer le problème de la consommation existentielle,<br class='autobr' /> tielle, <br class='autobr' /> des dits alcooliques<br class='autobr' /> à la surface<br class='autobr' /> de leur âme.<br class='autobr' /> (n'est-ce pas ?)<br class='autobr' /> (pas)</p> <p>116</p> <p>n'est-ce pas ?</p> <p>117</p> <p>allez ! à ta santé ! (mentale.)</p> <p>118</p> <p>tale.</p> <p>119</p> <p>neuf.</p> <p>120</p> <p>en matière d'alcool, poser la réponse c'est y répondre.</p> <p>121</p> <p>on était là , on était encore là , et encore ! on était las.<br class='autobr' /> dans un groupe. de parole.<br class='autobr' /> tout à coup sans prévenir, le psychiatre (qui se démet soudain de sa confortable position socratique genre je ne dis rien mais je n'en pense pas moins je ne dis rien c'est à vous de parler qu'est-ce qui va surgir here and now ?), le psychiatre lance comme ça :<br class='autobr' /> et si on parlait des bienfaits de l'alcool ? des bénéfices que vous en tirez ?</p> <p>122</p> <p>alors marc il a lancé comme ça : des bénéfices des bénéfices ? mais on est fauchés, nous autres !</p> <p>123</p> <p>maà¯eutique ta mère !</p> <p>124</p> <p>marc est très drà´le. parfois. quand il n'a pas bu.</p> <p>125</p> <p>madame, moi je vous rendrais bien volontiers votre fils ! bien volontiers ! je n'ai pas pour vocation de hum… « retenir » les gens ! seulement vous le saviez il est hum euh schizotypique il se protège de la euh « vie â…” » en se coupant en deux, enfin je veux dire mais non après tout c'est vrai qu'il y met du sien à se couper en morceaux,<br class='autobr' /> et donc pour y venir,<br class='autobr' /> lors de notre dernière séance il est tombé en deux, par terre, littéralement en deux, un lui, un autre lui.<br class='autobr' /> moi je peux vous expliquer pourquoi à partir d'aujourd'hui vous allez devoir payer deux chambres,<br class='autobr' /> et le pire,<br class='autobr' /> et le pire là -dedans c'est qu'au fond c'est à cause de vous<br class='autobr' /> que <br class='autobr' /> tout<br class='autobr' /> a commencé â„¢.<br class='autobr' /> </p> <p>126</p> <p>alcool : <br class='autobr' /> info ou intox ?</p> <p>127</p> <p>jésus décida ce jour là <br class='autobr' /> de multiplier les personnes pétrifiées de douleur.<br class='autobr' /> la pétrification.</p> <p>128</p> <p>la pétrification vient <br class='autobr' /> aussi en ne mangeant pas.</p> <p>129<br class='autobr' /> mais madame mais madame comment voulez-vous que je vous explique les dessous de l'affaire ? comment ? je ne suis pas DANS lui. j'imagine ce qu'il ressent. j'en ai une idée. une toute petite. <br class='autobr' /> si petite.<br class='autobr' /> vous en avez une si petite ?</p> <p>130</p> <p>d'idée ?</p> <p>131</p> <p>la douleur, le doux leurre<br class='autobr' /> (oh arrêtez vos jeux de mots à la con, les gars !)</p> <p>132</p> <p>les deux lui c'est lui quand même ? mais qui boit ? lui ou l'autre lui ?</p> <p>133</p> <p>quand elle avait poussé la porte de l'hà´pital, elle avait d'abord vu le sourire sympa d'une infirmière qui lui avait balancé : oh la la mademoiselle n'a pas l'air faite pour le bonheur !</p> <p>134</p> <p>je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais faire une cure je devrais.</p> <p>135</p> <p>mon cher père, on peut toujours en causer on peut toujours. de ma douleur.<br class='autobr' /> cependant,<br class='autobr' /> dès que je vais t'annoncer que ma douleur commence avec ta tronche de merde, ça va mal tourner.</p> <p>136</p> <p>papa je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu m'as volé maman !<br class='autobr' /> maman je sais pourquoi je bois !<br class='autobr' /> parce que tu allaitais papa !</p> <p>137</p> <p>en couverture de ce magazine de sciences tousskiliadplusérieu, ils titrent :<br class='autobr' /> quand l'esprit dérape.<br class='autobr' /> petit a :<br class='autobr' /> l'esprit fonctionne ou ne fonctionne pas, il ne marche pas dans tous les cas, donc il ne se casse pas la gueule.<br class='autobr' /> c'est nous qu'on se casse la gueule !</p> <p>138</p> <p>bien-sùr que c'est la faute de la société !<br class='autobr' /> on ne va pas s'étendre là -dessus<br class='autobr' /> (quand même, quand bien même ♭♩♪♫ )</p> <p>139</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> j'ai acheté un microscope une lunette d'astronome et je me scrute. à la longue j'ai cessé de bouger pour ne pas voir trop de choses trop de détails trop d'étoiles mortes trop de minerai appauvri. en moi.<br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ?<br class='autobr' /> les autres aussi se sont procuré le même équipement. ils me scrutent à leur tour, depuis si longtemps. ça me fait mal. <br class='autobr' /> les dessous de l'affaire ? <br class='autobr' /> je me fais tout petit, petit, petit.<br class='autobr' /> (mais il faut bien que je continue à aller pisser et chier. on n'en sort pas grandi.)</p> <p>140</p> <p>en couverture de ce magazine, ils titrent la psychanalyse peut-elle soigner ?<br class='autobr' /> ils veulent rire ?</p> <p>141</p> <p>ah bon madame vous avez une formation psychanalytique ? manifestement vous ne connaissez pas le préfixe « dé » !</p> <p>142</p> <p>madame, s'y connaître en psychanalyse ou ne s'y connaître en rien, c'est du pareil au même !<br class='autobr' /> voyons voyons la psychanalyse ne cherche pas la guérison !<br class='autobr' /> c'est bien là son symtpà´me !</p> <p>143</p> <p>et la thérapie ? vous y croyez à la thérapie ?<br class='autobr' /> si vous me le dites !</p> <p>144</p> <p>vous y croyez (au moins) ?<br class='autobr' /> +</p> <p>145</p> <p>polize௠drà¤nkt.</p> <p>146</p> <p>morgen wieleicht.</p> <p>147</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> me voilà installé dans « ma » chambre. <br class='autobr' /> un lit, un lit mais pas vraiment d'hà´pital, quelque chose d'un peu plus cosy. on peut régler la tête, pas mal, j'ai déjà remarqué qu'en dormant relevé les cauchemars passent directement du cerveau (ou du siège des émotions ! ah ah !) au trou du cul d'accord ça fait mal en passant mais ça passe plus vite. une armoire qui ferme à clef, clef de merde dans ma bouche, une bouche de merde.</p> <p>148</p> <p>pour avoir quelque espoir de changer quoi que ce soit de sa propre vie, il faut la fracasser.</p> <p>149</p> <p>si on se contentait de fracasser les vidanges ?</p> <p>150</p> <p>il faut il faut il faut, il faut ceci, il faut cela. et pourtant, cette incantation-là , putain, elle est vraie, pour une fois.</p> <p>151</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> une armoire équipée d'une minuscule serrure, le premier venu la crochète, mais le premier venu n'est pas toujours le dernier arrivé.</p> <p>152</p> <p>quand on a bu, on se sent plus fort on conduit mieux on rigole plus on se fait des copains ça donne du courage l'alcool conserve la preuve mon grand-père est mort à 97 ans ça donne du goùt aux pâtisseries et du piment à la vie on fait mieux l'amour après <br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins peur<br class='autobr' /> on a moins<br class='autobr' /> on a <br class='autobr' /> a <br class='autobr' /> on.<br class='autobr' /> (laquelle de ces propositions vous ressemble le plus ?)</p> <p>153</p> <p>la gentille demoiselle songe quelques minutes encore au pourtant chouette boulot qu'elle a dù laisser derrière elle<br class='autobr' /> pour un mois<br class='autobr' /> pour un an<br class='autobr' /> (le reste de sa vie ?)<br class='autobr' /> (elle travaillait dans un magasin de vêtements pour enfants.)<br class='autobr' /> elle plonge le regard dans la photocopie qu'un patient lui a laissée sur la tablette du lit (d'hà´pital.) <br class='autobr' /> alors bien vrai ? l'alcool s'attaque à toutes les fonctions de l'organisme ? <br class='autobr' /> bien vrai ? <br class='autobr' /> l'alcool détruit les neurones, les liaisons entre les neurones, l'alcool s'attaque au foie, à la vésicule, troue l'estomac, peut rendre aveugle, ronge la gaine des nerfs, déchausse les dents avant d'entrer dans l'oesophage,<br class='autobr' /> et c'est ainsi qu'ils vécurent et eurent beaucoup de maladies,<br class='autobr' /> des grandes et des moins grandes.</p> <p>154</p> <p>maître corbeau, sur un arbre bourré, tenait en son bec une vidange…</p> <p>155</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le buveur il en a marre de lui-même au point de ne plus prendre soin de lui-même. <br class='autobr' /> aucun.<br class='autobr' /> tu vois ? <br class='autobr' /> mais merde à la fin, je me souviens avoir changé tes langes peints à la diarrhée, coupé les ongles de tes petits petons, décrassé tes yeux divins,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot,<br class='autobr' /> et je t'ai appris le pot.<br class='autobr' /> mais merde à la fin pourquoi je me lave plus la raie du cul ?</p> <p>156</p> <p>si l'alcool conserve ?<br class='autobr' /> ça dépend.<br class='autobr' /> tu ouvres un bocal de prunes, c'est un délice.<br class='autobr' /> tu ouvres le bocal d'un alcoolique, ça dégage !</p> <p>157</p> <p>fiston, bien-entendu que derrière tout ça j'ai un problème.</p> <p>158</p> <p>l'alcool fait perdre la mémoire ? attends, ça m'intéresse, moi, ce truc…<br class='autobr' /> faut faire quoi ? le boire ?</p> <p>159</p> <p>suis-je alcoolique ?<br class='autobr' /> suis-je vraiment alcoolique ?<br class='autobr' /> ne suis-je que alcoolique ?<br class='autobr' /> je me cache quelque chose.<br class='autobr' /> mais toi ?</p> <p>160</p> <p>c'est pas possib' de boire autant !<br class='autobr' /> (il est dingue, il détruit tout autour de lui, tout le monde le fuit.)</p> <p>161</p> <p>ah ? mais c'est le but… j'ai envie d'en finir avec tout avant que tout ne finisse de toute façon.</p> <p>162<br class='autobr' /> je te jure, c'est un groupe de malades !<br class='autobr' /> tu as vu ces fans de foot ? ils sont arrangés !<br class='autobr' /> ce film, c'est la folie !<br class='autobr' /> quel truc de débiles !<br class='autobr' /> (arrêtez, quand vous serez vraiment fous, vous comprendrez…)<br class='autobr' /> arrêtez !</p> <p>163</p> <p>mais allez va ! depuis que je ne suce plus, j'ai réalisé que dans les magasins, et bien !, il mettent le rayon alcool juste à l'entrée quand tu rentres à l'entrée quand tu rentres à l'entrée…</p> <p>164</p> <p>fiston, j'entends le vent. énormément de vent. l'hà´pital psychiatrique est construit sur une hauteur, au-dessus de la ville. avant y avait le gibet, ici. on pendait les condamnés à l'écart de la bienséance, du commerce et du culte. puis quand s'est agi de caser les maboules quelque part, si possible loin du regard des bons bourgeois, les zautorités ont choisi le même lieu, tiens ! <br class='autobr' /> la folie dérange bla bla bla je ne vais pas te casser les pieds avec ça…</p> <p>165</p> <p>bla bla bla…</p> <p>166</p> <p>on lui a expliqué ceci :<br class='autobr' /> quand tu auras arrêté de boire (enfin… pas de l'eau hein ah ah ah !), tu verras des alcoolos partout. le mec qui boit, dans la rue, tu le sentiras à 10 kilomètres à la ronde ! la nana du bureau de poste aux yeux jaunes et transparents ! le garagiste à la langue épaissie qui n'a plus que trois doigts à chaque main !<br class='autobr' /> on les repère, on les repère !<br class='autobr' /> (précisons, ils sont par-tout !)</p> <p>167</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> fig.1 (voir plus haut)</p> <p>168</p> <p>il était une fois<br class='autobr' /> un tailleur de pierre<br class='autobr' /> qui chaque jour<br class='autobr' /> taillait la pierre<br class='autobr' /> dans la carrière<br class='autobr' /> de pierre.<br class='autobr' /> un jour qu'il avait introduit le burin vers l'arrière<br class='autobr' /> d'une filière<br class='autobr' /> de pierre<br class='autobr' /> lui parla une grosse pierre :<br class='autobr' /> délivre-moi, délivre-moi, petit tailleur de grosses pierres !<br class='autobr' /> je suis une âme prisonnière<br class='autobr' /> de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> plus loin qu'hier,<br class='autobr' /> plus loin qu'avant-hier,<br class='autobr' /> une brave fermière<br class='autobr' /> m'a enfermé à l'intérieur de cette grosse pierre !<br class='autobr' /> mais pourquoi ? demanda le tailleur de pierre ?<br class='autobr' /> elle lui répondit, la pierre :<br class='autobr' /> elle en avait plein le cul de moi, je la faisais chier, et comme son mari s'en battait la queue avec une pelle à tarte,<br class='autobr' /> elle m'a taillé cette vilaine croupière !<br class='autobr' /> putain merde connasse !</p> <p>169</p> <p>ne suis-je QUE alcoolique ?<br class='autobr' /> non, poussière d'ange aussi.<br class='autobr' /> ailes damnées.<br class='autobr' /> envol condamné.<br class='autobr' /> pierre aux pieds.<br class='autobr' /> icarrément.<br class='autobr' /> 170</p> <p>quand il était tout petit déjà :<br class='autobr' /> il perdait ses lattes, il s'emmêlait les pinceaux, il perdait parfois la boule, on ne le comprenait pas, il changeait d'humeur, jean-qui-jean-qui-pleure, il n'allait jamais jusqu'au bout, il n'achevait rien, <br class='autobr' /> bref,<br class='autobr' /> il était déjà une sorte de gamin pourfendu qui n'existait pas vraiment et qui vivait perché.<br class='autobr' /> (oui, loin de vous très loin.)</p> <p>171</p> <p>articule !</p> <p>172</p> <p>achève ce que tu as commencé !</p> <p>173</p> <p>mesdames, messieurs, l'équipe est absolument d'accord que vous nourrissiez les chats sauvages qui vivent dans le parc de l'hà´pital !</p> <p>174</p> <p>tu n'as que six ans et tu te poses trop de questions !</p> <p>175</p> <p>ras-le-bol !<br class='autobr' /> ils font leur café, d'accord (ils ont le droit !), tout le monde n'aime pas le café, mais la question n'est pas là . la question étant, madame l'infirmière, qu'ils laissent traîner leurs tasses, leurs mégots, et le soir ils ont encore le culot de réclamer leur programme télé favori, toujours des feuilletons de mes couilles !, les mêmes conneries amerloques, les pieux de l'amour !, en plus je sais pas si vous savez mais moi je le sais : dans les séries ils picolent, ils se servent un whisky pour un yes pour un no, alors je vous dis pas, non c'est pas ça, je comprends ce que vous dites, je dois aller leur parler à EUX ? c'est ça ? non mais on est dans un hà´pital ici ou quoi ? l'équipe elle sert à quoi ? je paye mon séjour, moi !<br class='autobr' /> (oui, la mutuelle, plutà´t, de fait…)</p> <p>176</p> <p>il ronfle, quoi ! toute la nuit ! je fais quoi ?</p> <p>177</p> <p>on assiste chez le sujet à une lutte pour préserver le sentiment de sa réalité.<br class='autobr' /> (n'importe quoi ! il se noie et se décape dans le pinard !)</p> <p>178</p> <p>moi intérieur  faux moi sans vie</p> <p>179</p> <p>perception irréelle  action insignifiante</p> <p>180</p> <p>réalité ✖ persécution  pétrification<br class='autobr' /> ( tu comprends mieux, fiston ?)</p> <p>181</p> <p>psy ï ¸ chiatre</p> <p>182</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> pas loin se trouve la morgue, <br class='autobr' /> comme pour rappeler que la vie on en meurt à en crever.<br class='autobr' /> (la porte bat au vent, ça fait un peu western glauque !)</p> <p>183</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> le parc est grand, le pavillon des grands sérieux jouxte le mien, on peut rejoindre le pavillon des quand-c'est-eux à pied…</p> <p>184</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> on soigne toutes les pathologies des pas trop logiques, dans le coin…</p> <p>185</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> je n'irai pas jusqu'à dire que je les aime d'amour, non. quand tu viendras me saluer, bientà´t, on se baladera dans le parc, et alors tu les verras. <br class='autobr' /> ils me fendent, les « grands malades »â€¦<br class='autobr' /> celui-là fait un pas, stoppe le mouvement, reste là , comme une stèle, justement. derrière ses grosses lunettes, ses yeux s'allument de joie, il se met à sourire, à rire, il cause avec un autre, invisible, qui fait du surplace à ses cà´tés, et il porte de beaux favoris, au fait.<br class='autobr' /> celle-là avance, un lourd sac à la main, elle scrute le ciel toutes les dix secondes, j'ai regardé aussi, je n'ai rien vu, mais elle si : je la crois.<br class='autobr' /> celui-là s'esclaffe qu'aujourd'hui on va manger des calamars ! des calamars ! des calamars ! (fiston, j'ai vérifié, on bouffe du poulet !)<br class='autobr' /> tu feras connaissance avec « le chien », fiston : lui, il se carapate comme un militaire une-deux-une-deux, et de temps en temps il se prend à aboyer : roaoh roah !, peut-être après les chats sauvages, sans doute après des êtres qui lui font du mal et refusent absolument absolument absolument de lui foutre la paix.<br class='autobr' /> parfois on cite son prénom :<br class='autobr' /> marcel se prend pour un chanteur de variétoche,<br class='autobr' /> fernand le muet me montre les cahiers qu'il remplit d'une écriture indéchiffrable sauf de lui seul, il me fait piger que ce sont ses « devoirs. »<br class='autobr' /> simon chasse des mouches imaginaires avant de franchir le seuil des portes.<br class='autobr' /> ce n'est pas que je les aime d'amour, non. <br class='autobr' /> maintenant j'en fais partie,</p> <p>186</p> <p>bienvenue dans l'unité d'alcoologie !<br class='autobr' /> (ici, c'est moins grave !)</p> <p>187</p> <p>encore un gamin, débile léger, probable, en pleine discussion avec l'animatrice :<br class='autobr' /> • ils me font peur !<br class='autobr' /> • oh tu sais… devant chez moi un couple passe tous les jours à 17 heures promener leur chien… eux me font vraiment peur !</p> <p>188</p> <p>vraiment.</p> <p>189</p> <p>très peur.</p> <p>190</p> <p>je l'ai lu dans le journal :<br class='autobr' /> un jour un mec est arrivé dans un auditoire de médecins avec des échelles de différentes grandeurs. la vlà qui explique : il y a des échelles dans la douleur ainsi comparons un cancéreux à qui on a cousu le trou de balle et attaché une poche au ventre et comparons-le donc à un petit alcoolique de rien du tout qui manque totalement de courage…<br class='autobr' /> et bien ?<br class='autobr' /> et bien les étudiants ont saisi la plus grande échelle et ils ont pendu ce connard au plafond !</p> <p>191</p> <p>bon, je retourne à mon pavillon, celui des grands cireux au yeux vitreux…</p> <p>192</p> <p>y-a-t-il moyen de s'en sortir ? (parfois.)</p> <p>193</p> <p>parfois.</p> <p>194</p> <p>oh ça faisait longtemps qu'on ne me regardait plus comme avant !<br class='autobr' /> cool ! on te regardait toi (au moins) !</p> <p>195</p> <p>bonjour monsieur l'agent de quartier je viens pour la convocation celle de mon changement de domicile.<br class='autobr' /> ah ouais mais vous n'étiez jamais chez vous ! on peut être certain que vous habitez bien où vous le dites ?<br class='autobr' /> j'étais hospitalisé.<br class='autobr' /> hein ? où ça ?<br class='autobr' /> à l'hà´pital psychiatrique.<br class='autobr' /> hein ? on vous a interné ?<br class='autobr' /> non, j'y étais volontairement.<br class='autobr' /> hein ?</p> <p>196</p> <p>ce qu'elle a ? je vais t'avouer, moi, ce qu'elle a…<br class='autobr' /> pourquoi devrais-tu avouer TOI ce qu'elle aurait ELLE ?<br class='autobr' /> je me sens concerné…<br class='autobr' /> ah ?</p> <p>197</p> <p>ce qu'elle a c'est qu'elle a toujours eu peur de la vie, voilà !<br class='autobr' /> il est interdit d'avoir peur de la vie ?</p> <p>198</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ici la bouffe n'est pas très bonne. pas grave. mais pas tout à fait normal malgré tout. autour de moi y a des gens qui n'ont plus que ça, la bouffe…</p> <p>199</p> <p>normal, courant, ordinaire, compréhensible.<br class='autobr' /> anormal, spécial, monstrueux.<br class='autobr' /> incompréhensible.</p> <p>200</p> <p>ah je suis contente de t'entendre au bout du fil !<br class='autobr' /> tu m'appelles seulement maintenant ? chuis à l'hosto depuis trois mois.<br class='autobr' /> je sais, je me disais que tout allait bien.<br class='autobr' /> 201</p> <p>tu devrais faire une cure tu devrais faire une cure tu devrais…<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> tu es si… comment ?... loin<br class='autobr' /> et ?<br class='autobr' /> et ça me fait peur.<br class='autobr' /> peur pour moi ou peur pour toi ?<br class='autobr' /> je sais pas… l'alcool la folie tout ça c'est des trucs je sais pas…</p> <p>202</p> <p>ah vous aussi vous êtes un patient ? vous avez une cigarette pour moi ? des menthol ? bon, d'accord, tant pis. mon administrateur de biens est un radin. ils prétendent que je vais mal parce que je suis schizophrène. vous n'avez pas l'air d'un patient. vous êtes schizophrène aussi ? l'alcool ? rien de plus ? bah, ce n'est pas grave, ça. mais je ne suis pas schizophrène. il fait beau ce soir, non ? ils vont venir. les extraterrestres. ils ont envoyé un signal sur mon portable. pas si simple, mon vieux ! c'est un message codé, naturellement ! moi seul comprend ! (des fois j'en ai marre d'obéir à ces enculés de l'espace !)</p> <p>203</p> <p>tu vois, moi j'ai rien fait. c'est mon ex-mari. je me suis laissée entraîner. et le juge vient de refuser que je sorte pour de bon de cette prison de merde ! prison, hà´pital, c'est du pareil au même.<br class='autobr' /> non ?<br class='autobr' /> non.</p> <p>204</p> <p>les fantà´mes de l'hà´pital.<br class='autobr' /> eux.<br class='autobr' /> et moi.<br class='autobr' /> 205</p> <p>jamais je n'aurais cru finir un jour ici. maintenant, voilà , j'y suis. <br class='autobr' /> pourquoi pas ?</p> <p>206</p> <p>depuis quelques années tu te dégrrrrades trrrrrès forrrrrt.<br class='autobr' /> va te faire enculer, papa !</p> <p>207</p> <p>il n'était plus le même, il n'était plus lui-même.<br class='autobr' /> mais surtout c'étaient les autres qui persistaient à rester plus que jamais les espèces de cons qu'ils avaient toujours été.</p> <p>208</p> <p>fils de pute ! tu es toujours là au cul des infirmières à essayer de dénoncer ton voisin de chambre soi-disant qu'il aurait bu en cachette et au moment où je te cause, tu laisses tomber par terre ta barrette de shit !</p> <p>209</p> <p>ils organisent un groupe « contes », la psy lit une histoire, et on doit essayer d'en parler, voilà , ça me branche pas, c'est en fait le groupe « con » !</p> <p>210</p> <p>avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté du fil<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> pour me recoudre le nombril.<br class='autobr' /> avant d'aller à l'hosto<br class='autobr' /> j'ai acheté pour cinq pistoles<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> de fil<br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> une énorme bobine de fil<br class='autobr' /> je vais recoudre ma camisole<br class='autobr' /> oh oh oh !</p> <p>arrivé à l'hosto<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> j'vais observer ma pourriture <br class='autobr' /> oh oh oh <br class='autobr' /> sous toutes ses coutures.</p> <p>j' suis une enflure<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> une rature une vergeture<br class='autobr' /> oh oh oh<br class='autobr' /> faut qu'on m'enferme derrière les murs !</p> <p>211</p> <p>vous savez la façon d'aborder la maladie mentale a beaucoup changé avec le temps !<br class='autobr' /> sur quel flanc ?</p> <p>212</p> <p>putain de vie de merde à la con !<br class='autobr' /> j'en ai ras la patate !<br class='autobr' /> je vais me cuiter !<br class='autobr' /> rien à foutre de leurs tests de crétins !<br class='autobr' /> c'est truqué leurs trucs.</p> <p>213</p> <p>hips !</p> <p>214</p> <p>fiston, je le sens je le sens, plus rien ne sera comme avant. je… je cherche mes mots : ce n'est pas que plus rien ne sera comme avant, c'est que plus rien ne pourra être comme avant. non… il est impossible que tout recommence comme avant, voilà . non… là tu vas t'imaginer qu'il est possible que je picole à nouveau, or, de fait, il est impossible que je picole encore, l'alcool et moi c'est fini. non… je ne sais pas comment je vivais, avant, mais… je ne vais plus vivre comme ça. et je ne vais plus vivre comme ça, comme avant, sinon je vais me remettre à boire. non… non, non, non, je ne boirai plus et ne me demande pas comment je le sais, je le sais c'est tout, j'en suis absolument convaincu, enfin… même pas convaincu, je ne bois déjà plus, là , de fait, depuis mon arrivée à l'hosto, pas besoin de me convaincre moi-même. ne me demande pas comment je m'y suis pris, vu que je ne me suis pris à rien du tout, c'est comme ça, dès que j'ai su qu'une place se libérait pour moi, je n'ai plus avalé un gramme d'alcool. <br class='autobr' /> j'ai du mérite ? <br class='autobr' /> je n'ai aucun mérite ? <br class='autobr' /> je n'en sais rien je l'ignore, je ne pense même pas à ce genre de choses complètement hors propos. <br class='autobr' /> j'ai arrêté, c'est bien, non ?<br class='autobr' /> j'ai arrêté, fiston. <br class='autobr' /> au fait, voilà ce que j'avais l'intention de te dire : j'ai arrêté.</p> <p>215</p> <p>j'étais comment, avant ?<br class='autobr' /> chiant… mais je t'aimais déjà .</p> <p>216</p> <p>bon… dites… sorry… je n'ai plus des masses d'unité sur ma carte de téléphone alors dites-moi en vitesse : COMMENT IL VA ?<br class='autobr' /> oh il est là depuis trois jours seulement, il dort, il dort, il dort.<br class='autobr' /> et… c'est normal ?</p> <p>217</p> <p>faut pas que je te cause trop fort, tu vois le type là -bas devant la télé ? oui, lui. avec sa barbe. et bien, hier au repas de midi, on mangeait et tout et tout. on a entendu un énorme cri. le gars, oui, lui, hurlait des phrases qui lui restaient un peu dans la gorge, un doigt tendu vers le plafond, il s'est mis à baver, puis il est tombé sur le pavement, boum !, en tremblant, et bon, chut ! plus bas !, il a chié sous lui. une infirmière s'est pointée, celle qui ne met jamais son tablier, jamais !, et elle lui a enfoncé un bout de tissu dans la bouche,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et,<br class='autobr' /> et.</p> <p>218</p> <p>clef de merde.</p> <p>219</p> <p>salut salut ! j'peux m'asseoir à cà´té ? bon moi je voulais pas mourir, pas vraiment je voulais juste ne plus vivre mais poser un acte violent pour me supprimer ça non je n'y arrivais pas.</p> <p>220</p> <p>asile.</p> <p>221</p> <p>au repos.</p> <p>222</p> <p>loin.</p> <p>223</p> <p>asile.</p> <p>224</p> <p>boire ? ça peut arriver à tout le monde ! regarde jocelyne, là , elle n'aurait jamais imaginé se retrouver ici !</p> <p>225</p> <p>mais… ceux qui ne picolent pas… comment ils font pour tenir le coup, pour supporter cette vie de merde ?</p> <p>226</p> <p>t'inquiète t'inquiète, la société elle sait pertinemment qu'elle broie les gens en mille morceaux ! elle en fait du haché desséché et là -dessus elle les imbibe d'alcool pour leur rendre un semblant d'élasticité, et hop, bon pour le service ! ainsi de suite…</p> <p>227</p> <p>chers collègues,<br class='autobr' /> à l'aube de ce colloque assez singulier, nous nous questionnons tous :<br class='autobr' /> la folie, c'est quoi ?<br class='autobr' /> 228</p> <p>et au coucher de soleil, ils se demandaient encore ce que la folie pouvait bien être, à la fin…<br class='autobr' /> (c'est à ce moment que le chamane…)</p> <p>229</p> <p>pure mother, pure milk.</p> <p>230</p> <p>il a toujours été fou.</p> <p>231</p> <p>ça l'a rendue folle. à tout jamais.</p> <p>233</p> <p>tu as vu son regard ?</p> <p>234</p> <p>il fait le fou</p> <p>235</p> <p>elle joue à être folle, ça l'arrange bien, rapport à …</p> <p>236</p> <p>complètement frappé. comme un apéro.</p> <p>237</p> <p>il est passé de l'autre cà´té.</p> <p>238</p> <p>trouble mental, déséquilibre mental, aliénation, démence, délire, maladie mentale, psychose, déraison, dérangement, égarement, divagation.</p> <p>239</p> <p>c'est dans un moment d'égarement qu'il s'est mis à divaguer vers la démence délirante sous l'effet d'une déraison déséquilibrante, d'une terrible aliénation troublante.</p> <p>240</p> <p>moi, ça ne m'étonne pas ! on le sentait venir…</p> <p>241</p> <p>mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse pour elle ? elle est dans son monde à elle.</p> <p>242</p> <p>je suis malade, complètement malade.</p> <p>243</p> <p>livraison de légumes à domicile.</p> <p>244</p> <p>tu savais que le mot « maboule » était d'origine arabe, toi ? <br class='autobr' /> non, mais ça ne m'étonne pas.</p> <p>245</p> <p>de toute façon, il n'écoute plus personne !</p> <p>246</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> te parler de la folie c'est un peu les mots pour ne pas le dire… le mot « folie », c'est un entonnoir, figure-toi ! on y enfourne tout et n'importe qui. un mec a un léger grain, de l'humour, une personnalité propre ? alors, il est fou. sentence. une nana va jusqu'au bout de ses désirs ? ça y est : elle est folle. un père de famille n'aime pas le foot ? il faut l'enfermer. tu ne te soumets aux conventions fixées depuis la nuit des temps par dieu sait quel imbécile ? par ici la piquouze !</p> <p>247</p> <p>mais la folie, ça existe.</p> <p>248</p> <p>marre de cette réunion d'équipe ! on ne va quand même pas ramener la camisole de force, le bain froid et les chaînes ! si ?</p> <p>249</p> <p>en quelque sorte, il buvait pour ne pas devenir complètement ouf !</p> <p>250</p> <p>non mais quoi c'est quoi la différence entre boire et de l'alcool et sniffer de l'héro je sais pas moi qu'on m'explique !</p> <p>251</p> <p>pour oser conduire quand on a trop bu, il faut être dingue !</p> <p>252</p> <p>papa,<br class='autobr' /> dès que j'osais émettre une opinion différente de la tienne, tu me hurlais que j'étais dingue. mes copains étaient dingues, les profs que j'aimais étaient dingues, j'écoutais de la musique de dingues. <br class='autobr' /> j'ai si vite pigé que pour obtenir un peu d'amour, de reconnaissance, d'éducation, de sécurité, il fallait que j'approuve tes opinions. à toi. <br class='autobr' /> tu t'empressais de raconter à ma soeur aînée que j'étais dingue, puis tu me confiais que ma soeur cadette était dingue, à qui tu avais affirmé que notre soeur aînée était dingue. <br class='autobr' /> tu voyais des dingues partout.<br class='autobr' /> tu ne te regardais pas assez souvent dans le miroir, je crois. <br class='autobr' /> tu aurais aperçu un dingue de plus.<br class='autobr' /> c'est pourquoi, cher papa, va te faire mettre !<br class='autobr' /> même là où tu te trouves maintenant.<br class='autobr' /> dans ta tombe.<br class='autobr' /> d'ailleurs j'ai créé un comité de soutien aux vers, aux insectes et aux parasites, et dès la première réunion je leur ai expliqué le chemin à suivre pour entrer dans ton trou de balle.</p> <p>253</p> <p>papa,<br class='autobr' /> c'est à cause de toi que j'ai commencé à boire, au fond.<br class='autobr' /> ça fait un bien fou de déposer le paquet chez un autre que soi.</p> <p>254</p> <p>non papa,<br class='autobr' /> c'est plutà´t grâce à toi que j'ai commencé à boire. pour changer sa vie, il faut la fracasser. sauf que la mienne de vie, tu l'avais déjà fracassée, dès ma naissance. <br class='autobr' /> l'alcool ?<br class='autobr' /> j'ai du recasser le plâtre, quoi !</p> <p>255</p> <p>putain de bordel à queue (à roulettes), les plus fous ne sont pas ceux qu'on croit !<br class='autobr' /> les gens normaux : eux sont fous. fous de normalité, de trop de normalité, de normalité confondante. <br class='autobr' /> ( t'as un exemple ?)</p> <p>256</p> <p>j'ai plein d'exemples.</p> <p>257</p> <p>oui papa, je suis dingue. oui.</p> <p>258</p> <p>clef de merde ? de diamant, ça oui !</p> <p>259</p> <p>j'ai froid.</p> <p>260</p> <p>j'ai froid.</p> <p>261<br class='autobr' /> la folie,<br class='autobr' /> fiston,<br class='autobr' /> c'est quand<br class='autobr' /> à l'intérieur <br class='autobr' /> de toi<br class='autobr' /> il fait froid,<br class='autobr' /> très froid,<br class='autobr' /> si froid<br class='autobr' /> trop froid.</p> <p>1 bis</p> <p>un diamant, je te dis.</p> <p>2 bis</p> <p>l'alcool, chez lui, ça cache quelque chose et en attendant ça gâche tout.</p> <p>3 bis</p> <p>entouré d'empaffés qui ne savent plus s'ils veulent arrêter de boire, ou continuer d'arrêter de boire.<br class='autobr' /> ou boire.</p> <p>4 bis</p> <p>boire et déboires.<br class='autobr' /> tu veux rire, là ?</p> <p>5 bis</p> <p>ce type, comment que tu veux que il se soigne ? il participe à rien, il regarde des dvds toute la journée. c'est pas comme ça qu'on s'y prend.<br class='autobr' /> on ne sait jamais.</p> <p>6 bis</p> <p>mesdames et messieurs, chers patients qui coùtent cher à la société, c'est le distribuement des médications ! <br class='autobr' /> ( à vos marques ?)</p> <p>7 bis</p> <p>pourquoi yzont donné des noms de musiciens à tous les pavillons ? bientà´t yvont nous dire de soigner notre alcoolisme avec<br class='autobr' /> des élixirs de fleurs<br class='autobr' /> de bach !</p> <p>8 bis</p> <p>un magnifique hêtre pourpre. il déploie ses branches etc.<br class='autobr' /> au pied de l'arbre, un bonhomme archi maigre, cheveux longs et poisseux (poisseux, les cheveux !)<br class='autobr' /> il se lance dans une gestuelle héritée du bouddha musulman né sur les bords du jourdain. <br class='autobr' /> il est fou, donc ?</p> <p>9 bis</p> <p>à ce qu'on dit.</p> <p>10 bis</p> <p>il y en a un, je sais pas, je l'ai surnommé : jérà´me bosch, il me fait penser à un personnage d'un tableau de jérà´me bosch (j'ai oublié lequel.)</p> <p>11 bis</p> <p>euh… ce genre de personnes… ça existe VRAIMENT alors ?<br class='autobr' /> tu vois bien.</p> <p>12 bis</p> <p>cette nuit, ils ont téléphoné au service sécurité.</p> <p>13 bis</p> <p>ce genre de gens… ce genre de gens… ils ne font de mal à personne, je te ferai remarquer ! ils vont même pas au salon de l'auto !</p> <p>14 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> ici tout se passe bien.<br class='autobr' /> ce n'est pas l'hà´tel mais bon je le savais avant de venir.</p> <p>15 bis</p> <p>je le savais, fiston.</p> <p>16 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> je fais te faire une esquisse d'une typologie des maladies de l'âme.</p> <p>17 bis</p> <p>chère tatie,<br class='autobr' /> merde alors ! j'ai un dérèglement des quatre humeurs à la fois : <br class='autobr' /> phlegme, sang, bile noire, bile jaune.</p> <p>18 bis</p> <p>billevesées.</p> <p>19 bis</p> <p>sous le poids de leurs péchés, ils sont condamnés à l'enfer.</p> <p>20 bis</p> <p>la trépanation, ça fait même pas mal, fiston !</p> <p>21 bis</p> <p>mieux vaut avoir une bite dans le cul qu'une bouteille dans la tête !</p> <p>22 bis</p> <p>fiston, <br class='autobr' /> demain il m'enlèvent la pierre de folie de mon cerveau.</p> <p>23 bis</p> <p>de force dans la maison de force ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non… je suis venu en exprès !<br class='autobr' /> hein ? vous êtes fou ?</p> <p>24 bis</p> <p>qui a peur du grand méchant fou ?<br class='autobr' /> pas le petit litron rouge, en tout cas…</p> <p>25 bis</p> <p>bonsoir ma chérie, oui je t'aime encore, ah tu craignais qu'à cause de la cure je t'aimerais plus ? où tu vas chercher tout ça ? <br class='autobr' /> (quoique…)<br class='autobr' /> bon ben embrasse les enfants de ma part, hein !</p> <p>26 bis</p> <p>… paradoxalement, comme une avancée…</p> <p>27 bis</p> <p>fig 1, fig 2, fig 3, fig 4, figure-toi.</p> <p>28 bis</p> <p>quand charcot charcutait…</p> <p>29 bis</p> <p>nous sommes en direct du ALCOOL grand prix de formule 1 où les meilleurs ALCOOL joueurs de foot du monde vont s'affronter pour 3000 ALCOOL tours de pédales sur leurs ALCOOL vélos depuis un ALCOOL tremplin. ici la ALCOOL piscine olympique, à vous les ALCOOL studios !</p> <p>30 bis</p> <p>un jour ou l'autre, il est temps de savoir ce qu'on veut !</p> <p>31 bis</p> <p>plus jamais plus jamais !</p> <p>32 bis</p> <p>c'est ça que tu veux ?</p> <p>33 bis</p> <p>non, je pense vraiment que l'équipe nous respecte.<br class='autobr' /> tu parles ! ils savent tout de nous ! tout !</p> <p>34 bis</p> <p>chuis antipsychiatre… euh, antipsychiatrique…<br class='autobr' /> ouais, psychiatrique, quoi !</p> <p>35 bis</p> <p>JE N'AURAIS JAMAIS CRU QUE JE BOUFFERAIS UN JOUR DES NEUROLEPTIQUES !<br class='autobr' /> ( y en a bien qui bouffent du steak de cheval, alors…)</p> <p>36 bis</p> <p>qui s'y freud s'y pique !<br class='autobr' /> ( ou le pique…)</p> <p>37 bis</p> <p>alors vous, vous êtes contents d'avoir bu, vous êtes content d'avoir arrêté de boire, vous êtes content d'avoir fréquenté des malades mentaux ! hein ?</p> <p>38 bis</p> <p>d'une façon ou d'une autre, la soufffffrance mentale demeure un continent noir encore très mal exploré !<br class='autobr' /> (où ils ont mis le chauffeur de salle ?)</p> <p>39 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud.<br class='autobr' /> dans le fond de la salle : bien vrai, ça ! l'insconscient personne l'a jamais vu !<br class='autobr' /> au premier rang : en plus il sniffait de la coke !</p> <p>40 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et encore ! nous avons la chance toi et moi de vivre dans un pays qui ne criminalise pas la souffrance mentale ! y a un pays où un odieux président nabot …<br class='autobr' /> je sais, papa…<br class='autobr' /> comment : tu sais ?<br class='autobr' /> le cours de sciences sociales, à l école…</p> <p>41 bis</p> <p>sur cette photo, des malades mentaux à poil dans la cour d'un hosto en grèce. nous allons passer un chapeau pour le chauffeur…</p> <p>42 bis</p> <p>tu sais pas quoi tu sais pas quoi tu sais pas quoi ? il a réussi à convaincre son psychiatre qu'il était devenu alcoolique à cause de ses problèmes personnels !<br class='autobr' /> (quel culot !)</p> <p>43 bis</p> <p>depuis toujours l'homme s'est trouvé confronté à des êtres différents et impénétrables…<br class='autobr' /> ( d'autres hommes, non ?)</p> <p>44 bis</p> <p>au rang des personnalités toxiques :<br class='autobr' /> sigmund freud qui prolongea le mythe grec de « suffocation de la matrice » alors qu'en fait , c'est lui qui suffoquait du cerveau</p> <p>45 bis</p> <p>bienheureux les…<br class='autobr' /> car…</p> <p>46 bis</p> <p>sous l'effet de l'alcool, tout devient laid. la vie devient laide. le regard devient laid. les autres deviennent laids. l'oxygène devient laid. l'herbe devient laide. un éléphant rose devient laids éléphants roses.</p> <p>47 bis</p> <p>il a un gros pif rouge plein de trous. ses yeux ressemblent à des oeufs de cane : jaune laid, blanc pisseux. dans le ventre une montgolfière qui ne prendra plus son envol. <br class='autobr' /> laid.<br class='autobr' /> très laid.<br class='autobr' /> la vraie liberté, quoi !</p> <p>48 bis</p> <p>pour la millième fois elle nous dresse la liste des formations qu'elle a suivies, couvrant des domaines aussi invraisemblables que disparates. elle veut en mettre plein la vue, elle veut convaincre son auditoire qu'elle est quelqu'un, encore, malgré tout. <br class='autobr' /> à des degrés divers.<br class='autobr' /> malheureusement elle pue de la gueule, l'alcool à cent mètres, plein la vue.</p> <p>49 bis</p> <p>il dit sans honte : c'est la huitième fois que je viens ici, je lutte contre l'alcool depuis 15 ans.</p> <p>50 bis</p> <p>il est plus fort que nous il est plus fort que nous il est plus fort que nous.<br class='autobr' /> mais les deux font la bande.</p> <p>51 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis mon arrivée ici, je ne t'ai plus jamais vue sur les murs en pleine nuit.</p> <p>52 bis</p> <p>pas mal ! vous avez un q.i. d'autant.<br class='autobr' /> d'autant que nous n'avez plus de cuites !</p> <p>53 bis</p> <p>est-ce que c'est pour toujours, les dégâts ?</p> <p>54 bis</p> <p>on RESTE alcoolique.</p> <p>55 bis</p> <p>j'ai une fille, oui. enfin, j'avais une fille. enfin je l'ai encore, pourtant…</p> <p>56 bis</p> <p>docteurj'ail'impressionquemespiedsnesententpluslesol !<br class='autobr' /> ah ? c'est un début de polynévrite.</p> <p>57 bis</p> <p>mais le concept demeure flou.</p> <p>58 bis</p> <p>qu'est-ce que la consommation d'alcool ?<br class='autobr' /> un délire ?<br class='autobr' /> une démence ?<br class='autobr' /> une folie ?<br class='autobr' /> une frénésie ?<br class='autobr' /> une humeur ?<br class='autobr' /> une idiotie ?<br class='autobr' /> une possession ?<br class='autobr' /> une connerie ?</p> <p>59 bis</p> <p>ouais j'ai bu et alors ? ça emmerde qui ? va chercher l'infirmier ! tu veux que je te casse la tronche ?</p> <p>60 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> depuis que je suis arrivé ici, je commence à trouver la vie moins laide.</p> <p>61 bis</p> <p>c'est un bon début, ça oui ! mais derrière demeure un fameux rébus !</p> <p>62 bis</p> <p>quelle énigme de folie !</p> <p>63 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> s'il y a bien une chose que je ne supporte plus, c'est l'emploi à tout bout de champ du mot « malade » à la place d'autres mots. il a fait un truc de « malade », c'est un livre de « malade », il joue de la guitare comme un « malade. » la maladie, c'est la maladie. le froid. la laideur.</p> <p>64 bis</p> <p>il était deux fois… ah non ! une seule ! j'ai bu un coup de trop…</p> <p>65 bis</p> <p>voir page 974, cette citation de zigmound frott :<br class='autobr' /> la notion même de « boire un coup de trop » serait distrayante, pour ce qu'elle ne recouvrirait pas une réalité aussi sordide. en effet, le premier « coup » n'est-il pas déjà le « coup de trop ? »</p> <p>66 bis</p> <p>je lève le coude (de trop), et après, boum !, le trou noir. je me réveille à l'hosto.</p> <p>67 bis</p> <p>tu ne crois pas à la psychanalyse.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> c'est ton droit.<br class='autobr' /> ok.<br class='autobr' /> pourtant, avoue, si tu as bu, c'est qu'il y a une raison, non ? arrêter l'alcool, c'est un premier pas, ok. mais derrière ? hein ? derrière ? ok ?</p> <p>68 bis</p> <p>disons que collectivement, la bouffe est dégueulasse. et il ne s'agit pas d'inconscient collectif.</p> <p>69 bis</p> <p>derrière ? tout ce que tu veux, derrière. mais pas avec les outils rouillés de la psychanalyse, cette incantation mystique proche du dogme religieux et qui s'admire elle-même dans un miroir fêlé.</p> <p>70 bis</p> <p>toi, tu es venu ici pourquoi ? parce que tu es alcoolique ou parce que tu es fou ? parce que pour les fous, il y a d'autres pavillons ! dans celui-ci, personne n'est dingo !</p> <p>71 bis</p> <p>oui oui je veux bien aller aux activités d'ergothérapie, mais comprenez-moi, ça me fait bizarre. avant je bossais comme éducateur, alors bon me voilà de l'autre cà´té de la barrière donc ça me fait tout drà´le !</p> <p>72 bis</p> <p>égo-thérapie.<br class='autobr' /> ergot-thérapie.<br class='autobr' /> très charpie.<br class='autobr' /> c'est pas fini non ?</p> <p>73 bis</p> <p>vous pouvez nourrir les chats sauvages avec les restes des repas, ne laissez quand même pas dix assiettes traîner dans la cuisine<br class='autobr' /> pendant plusieurs jours !</p> <p>74 bis</p> <p>toi, on t'a expliqué pourquoi on t'a envoyé ici ? spécialement ici ?</p> <p>75 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> j'ai dormi jour et nuit un mois durant. j'ai recommencé à me laver. je me nourris mieux.<br class='autobr' /> l'autre jour un type est arrivé en pleine crise de délirium. il tournait en rond au pas de course dans le jardin, en écrasant les plantes sur son passage. du coup, l'autre là , le mec que je n'aime pas du tout vu qu'il critique tout le monde au lieu de s'occuper de lui-même, il a gueulé dans le réfectoire : <br class='autobr' /> korsakoff ! <br class='autobr' /> ou : korsakov !<br class='autobr' /> je ne sais plus.<br class='autobr' /> apparemment, cela se produit quand l'alcool a définitivement grillé la plupart de tes neurones. <br class='autobr' /> irréversible. <br class='autobr' /> ça fout les jetons.</p> <p>76 bis</p> <p>maman,<br class='autobr' /> j'avais oublié :<br class='autobr' /> dès que j'avais un peu mal au dents, tu me proposais un sucre imbibé d'alcool de menthe.</p> <p>77 bis</p> <p>oh ! vous avez bien raison, monsieur ! ici, certaines personnes s'installent et n'ont pas vraiment l'intention de guérir de quoi que ce soit ! si jamais elles ont quelque chose en débarquant ici, d'ailleurs !<br class='autobr' /> (oups ! je rougis ! en tant qu'infirmière, j'aurais du me taire !)<br class='autobr' /> (ah ! est-on assez sévères ?????)</p> <p>78 bis</p> <p>c'est à VOUS de savoir ce que VOUS attendez de VOTRE cure. NOUS on est à votre disposition pour vous aider dans VOTRE direction. <br class='autobr' /> (désolés mais y a rien d'aut' à dire !)</p> <p>79 bis</p> <p>c'est vous qu'avez commencé, c'est VOUS qu'arrêterez !<br class='autobr' /> (désolés mais c'est vrai !)</p> <p>80 bis</p> <p>moi, j'aime me bourrer la gueule, m'éclater le citron à la coke, à n'importe quoi qui me tombe sous la main ! avant j'étais taximan, j'ai bousillé je sais plus combien de bagnoles, plus aucun patron ne veut de moi ! je suis tombé du deuxième étage, bassin fracturé. cet appartement-là , en fait, j'y ai foutu le feu sans le faire exprès, je me suis endormi en fumant une cigarette ! <br class='autobr' /> du moment que ma bonne femme fait bien à manger !<br class='autobr' /> vrai, je claque toutes mes allocs de mutu dans l'alcool et la dope !<br class='autobr' /> et la meilleure de toutes ? j'suis heureux, moi ! j'suis heureux ! j'adore me péter les lattes ! à fond ! <br class='autobr' /> (c'est ma bonniche qui a contacté le psychiatre… moi…. bof…)</p> <p>81 bis</p> <p>moi j'en ai rien à foutre ici, rien…</p> <p>82 bis</p> <p>tu as d'autres anecdotes du genre ?<br class='autobr' /> plein.</p> <p>83 bis</p> <p>un rayon entier… :<br class='autobr' /> bonjour bonjour c'est moi je reviens ! je pensais que ça irait, dehors, mais ça n'a pas été. allez, je viens passer un petit mois de vacances, ah ah !</p> <p>84 bis</p> <p>t'es trop conasse ! huit fois que tu recommences une cure ! à chaque fois, tu subis un sevrage, vingt jours de comprimés ©, un mois de ® ! au bout de six semaines tu claironnes que tu te sens prête à quitter l'hosto… la suite au prochain numéro ! t'es trop débile â„¢ !!!!<br class='autobr' /> je n'arrive pas à me contrà´ler…</p> <p>85 bis</p> <p>mesdames et messieurs, la salle de remise en forme est ouverte !<br class='autobr' /> ppppffff….</p> <p>86 bis</p> <p>comme raconte le psychiatre, le taux de réussite, c'est 3% environ. alors, je préfère me dire que ça ne va pas marcher pour moi. et si ça marche…</p> <p>87 bis</p> <p>si ça marche, c'est bien emmerdant pour toi, au fond !</p> <p>88 bis</p> <p>je suis ton infirmière de référence, crois moi il faut que tu penses à toi. pas SUR toi. à toi. ça fait des années que tu tortures ton corps, il n'en peut plus, il est à bout…</p> <p>89 bis</p> <p>vous savez ?<br class='autobr' /> (elle pince les lèvres avec préciosité.)<br class='autobr' /> vous savez ? <br class='autobr' /> ici, c'est la première fois. mais avant j'ai fait quatre séjour à l'hà´pital ✜✜✜✜✜, et j'ai passé un an au centre $$$$$$, et bien, partout j'ai laissé un excellent souvenir, je suis encore en contact avec le ΨΔΓΑΘδ et avec la ςψζεΓ.<br class='autobr' /> tu veux ma photo ?</p> <p>90 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> y a un truc qui fait masse. <br class='autobr' /> autour de moi, je vois un gros tas d'alcoolos et d'alcoolotes qui n'ont pas l'air d'en vouloir. un peu comme s'ils refusaient leur moment de vérité. (non, tout à fait.) être face à eux-mêmes.<br class='autobr' /> pourquoi, au-delà du plaisir, je bois ? (plus que de raison.) that's the question quand même non ? <br class='autobr' /> bon, j'arrête de te casser les pieds.</p> <p>91 bis</p> <p>écoutez monsieur, je suis votre infirmière de référence et je peux vous affirmer <br class='autobr' /> que :<br class='autobr' /> c'est du travail !</p> <p>92 bis</p> <p>affolé par la folie,<br class='autobr' /> j'ai des affres au lit.<br class='autobr' /> va chier, à la fin !</p> <p>93 bis</p> <p>la première chose que tu ressens quand tu arrêtes de picoler, c'est que la vidange, c'est toi. et comme en plus tu es consigné, tu imagines que éventuellement il y aura moyen de recycler le grand vide que tu es devenu.</p> <p>94 bis</p> <p>salut à tous !<br class='autobr' /> j'me présente : je suis « la place. »<br class='autobr' /> pas la place du marché, ou la place de ciné, ni la place du mort ah ah ah !<br class='autobr' /> non, je suis : « la place. »<br class='autobr' /> celle que vous avez faite en vous décidant à faire une cure. oui, vous avez fait « de la place », et « la place » en question, c'est donc moi.<br class='autobr' /> quand même, ouvrez un peu les yeux, maintenant qu'ils ne sont plus plombés par monsieur éthanol â„—. l'alcool. l'alcool, avant, dans votre ancienne vie, il en prenait de la place, non ? <br class='autobr' /> il occupait touuuuuuutes vos pensées, lalalère !<br class='autobr' /> matin<br class='autobr' /> midi<br class='autobr' /> et soir<br class='autobr' /> et la nuit itou.<br class='autobr' /> lalalèreu !<br class='autobr' /> faut que j'aie de l'alcool en me levant, et de quoi tenir la matinée, et de quoi me noyer l'aprème, et devant la téloche, et du whisky pour le dodo, ça aide !!!!<br class='autobr' /> etc.<br class='autobr' /> itou.<br class='autobr' /> l'ennui, l'alcool, on doit aller l'acheter, se déplacer, passer du temps au night shop, revenir à la maison, ou bien alors repasser au bistrot. si on dégueule un building de bile, c'est encore la faute à l'alcool ! si on va pisser toutes les demi-heures, c'est encore la faute à l'alcool ! si on se fait choper au volant par les flics, avec deux tonnes de vodka dans les veines, ça prend la soirée pour s'expliquer ! si on crashe sa voiture contre une madame avec un landau, ça va encore durer des plombes ! si on se retrouve au tribunal de police, c'est encore à cause de l'alcool ! si on se chamaille avec sa gonze, c'est la faute à l'alcool ! si on fout des trempes aux gosses, la faute à qui ?<br class='autobr' /> hein ? à qui ? <br class='autobr' /> or donc :<br class='autobr' /> qu'allez-vous à présent faire de moi, « la place ? »</p> <p>95 bis</p> <p>de toute évidence, le problème… l'alcool, c'est permis ! légal ! encouragé, même ! voilà le problème !</p> <p>96 bis</p> <p>alll-llors… chez moi, tout a démarré quand<br class='autobr' /> (j'ai perdu mon boulot, ma femme m'a quitté, j'ai su que ma fille avait le sida, j'ai du vendre ma maison, mon père est mort, j'ai abandonné la pratique du foot, mon chef me harcelait, mon fils a tété en prison)<br class='autobr' /> quand j'ai craqué complètement.</p> <p>97 bis<br class='autobr' /> l'.</p> <p>98 bis</p> <p>l'énigme.<br class='autobr' /> 99 bis</p> <p>bonjour bonjour je suis « l'énigme. »</p> <p>100 bis</p> <p>mais non mais non l'alcool c'est bon pour plein de choses !<br class='autobr' /> regarde un peu…<br class='autobr' /> utilisée en shampooing, la bière permet de redonner de la brillance aux cheveux, <br class='autobr' /> l'odeur du houblon, incrustée dans un oreiller, aide à fermer l'oeil, la bière attire les limaces, elle noie les mouches, et détourne les guêpes, le sucre de la bière ravira vos fleurs et legumes, la bière enlève les taches des vêtements…</p> <p>101 bis</p> <p>et si tout cela, l'alcoolisme, si ce n'était qu'une construction de l'esprit ?<br class='autobr' /> et si après tout l'homme avait besoin d'alccol comme d'oxygène ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> tu en dis quoi ?</p> <p>102 bis</p> <p>l'excès nuit en tout, voilà .</p> <p>103 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> ce que j'ai, c'est une douleur, de la douleur.<br class='autobr' /> de toute évidence, à part les spécialistes et les pros, ça ne branche personne, à notre époque.</p> <p>104 bis</p> <p>trucmuche, vous êtes en direct de la grand-place, alors dites-nous est-ce que cette manifestion pour une meilleure prise en charge collective de la folie individuelle a rassemblé beaucoup de monde ?<br class='autobr' /> et bien, bidulette, oui, ici c'est noir de people et les slogans les plus passionants fleurissent ! on peut lire des choses comme : - viens chez moi, j'habite avec une folle !, ou encore : - donne moi un grain de ta folie !<br class='autobr' /> trucmuche, vous êtes notre envoyé spécial sur place, peut-on dire que les organisateurs sont satisfaits ?<br class='autobr' /> alors oui en effet ça oui, la plupart des manifestants, et il y en a de tous les âges, se sont déclarés en faveur d'un meilleur partage de la folie. le centre pour l'égalité des chances mène d'ailleurs la fronde. il faut savoir qu'à peine 1% de la population mondiale semble touchée par la schizophrénie, cela de toute évidence n'est pas équitable. mais l'alcool, ça non, les gens ne veulent pas du tout s'en passer, ils trouvent que la répartition de l'alcoolisme est acceptable.<br class='autobr' /> (telle qu'elle est.)</p> <p>105 bis</p> <p>pas de quoi mener une croisade, non plus ? des fois ?</p> <p>106 bis</p> <p>d'abord dans cet hà´pital à la con vous ne proposez aucune activité, et quand vous en proposez une, elle est débile. <br class='autobr' /> (qu'est-ce qu'on en a à foutre de changer, nous ? du moment qu'on ne paie pas notre chauffage en hiver…)</p> <p>107 bis</p> <p>aller faire des petits dessins, des bricolages en bois, soigner des chevaux, et puis quoi encore ?<br class='autobr' /> (de toute manière, à la relaxation, on s'endort !)</p> <p>108 bis</p> <p>fiston,<br class='autobr' /> et si on en finissait une fois pour toutes avec le sujet ?<br class='autobr' /> allons-y :<br class='autobr' /> LLLL'alcoolisme est l'addiction à l'alcool (éthanol) contenu dans les boissons alcoolisées, plus précisément l'absence du sentiment de satiété. LLLL'OMS reconnaît l'alcoolisme comme une maladie et le définit comme des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l'utilisation d'alcool. CCCCette perte de contrà´le s'accompagne généralement d'une dépendance physique caractérisée par un syndrome de sevrage à l'arrêt de la consommation (pharmacodépendance), une dépendance psychique, ainsi qu'une tolérance (nécessité d'augmenter les doses pour obtenir le même effet). LLLLa progression dans le temps est l'une des caractéristiques majeures de cette addiction. LLLL'usage sans dommage (appelé usage simple) précède l'usage à risque et l'usage nocif (sans dépendance), puis enfin la dépendance. LLLL'alcool est une substance psychoactive à l'origine de cette dépendance mais elle est également une substance toxique induisant des effets néfastes sur la santé. LLLL'alcoolodépendance est à l'origine de dommages physiques, psychiques et sociaux.</p> <p>109 bis<br class='autobr' /> wikhipspédia, quoi.</p> <p>110 bis</p> <p>l.</p> <p>111 bis</p> <p>leur.</p> <p>112 bis</p> <p>énigme.</p> <p>113 bis</p> <p>leur énigme.</p> <p>114 bis</p> <p>ils n'ont pas l'air d'en avoir une.<br class='autobr' /> les autres.</p> <p>115 bis</p> <p>moi si.</p> <p>116 bis</p> <p>eux ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.<br class='autobr' /> ils boivent.<br class='autobr' /> ils ne boivent plus.</p> <p>117 bis</p> <p>ils boivent.</p> <p>118 bis</p> <p>tout le monde boit.</p> <p>119 bis</p> <p>dyonisos buvait, les sumériens buvaient, noé buvait, tibère buvait, les grecs buvaient, les romains buvaient.<br class='autobr' /> déjà .<br class='autobr' /> alors…<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>120 bis</p> <p>c'est un truc ça existera toujours faudra toujours faire avec.<br class='autobr' /> alors ?</p> <p>121 bis</p> <p>alors rien.</p> <p>122 bis</p> <p>les infirmières ne sont jamais là ! elles partent tout le temps en conge !<br class='autobr' /> figure-toi, enfoiré, qu'elles ont aussi une vie privée…</p> <p>123 bis</p> <p>on dit les musulmans les musulmans on les critique mais ils ne boivent pas d'alcool, eux ! <br class='autobr' /> la voilà la solution !<br class='autobr' /> (si tu savais…)</p> <p>124 bis</p> <p>leur énigme ? <br class='autobr' /> aux autres ? <br class='autobr' /> ils ne parlent jamais d'eux-mêmes. <br class='autobr' /> que leurs enfants ne souhaitent plus les rencontrer, qu'ils ont été obligés de vendre leur maison, qu'ils ont séjourné dans des centres aux normes très sévères, ça oui. qu'ils ont fait de la taule, ça oui. qu'ils carburent au gin, au vin blanc, à la bière blonde, ça oui. que la nouvelle année est une sale période vu qu'ils avaient l'habitude de baiser au champagne, ça oui.<br class='autobr' /> mais leur énigme ?<br class='autobr' /> (et dans des centres aux normes très sévères… ça ne marche pas mieux !)</p> <p>125 bis</p> <p>la première chose que tu fais quand tu sors, tu bois. tu rebois.</p> <p>126 bis</p> <p>je vous regarde toutes et tous, avachis, là , et je me rends compte que vous avez perdu le chemin de dieu.<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu fous parmi nous, alors ?</p> <p>127 bis</p> <p>qu'est-ce qu'on lirait bien pour passer le temps ?<br class='autobr' /> zola, blondin, london, kessel, baudelaire, lowry, bukowski, kerouac, hemingway, apollinaire, faulkner.<br class='autobr' /> c'est un bon début.</p> <p>128 bis</p> <p>la folie,<br class='autobr' /> c'est quand ?<br class='autobr' /> c'est quand…</p> <p>1 ter<br class='autobr' /> alors, toi tu es prêt ?<br class='autobr' /> près de quoi ? de la sortie ? non, près des cuisines.</p> <p>2 ter<br class='autobr' /> alors moi, je serais prêt ?<br class='autobr' /> prêt à quoi ?<br class='autobr' /> prêt à sortir ?<br class='autobr' /> près de sortir ?</p> <p>3 ter</p> <p>d'où ? du trou normand ? de l'auberge espagnole ? de la bouteille bordelaise ?</p> <p>3 ter</p> <p>c'est comment qu'on freine ? j'voudrais descendre de là .<br class='autobr' /> petit à petit, l'oiseau fait son nid.<br class='autobr' /> son petit en tombe.</p> <p>4 ter</p> <p>dehors c'est comment ? c'est où le danger ? c'est quand la chute ? la confrontation avec les brutes de brut ? dehors c'est du verre pilé ?<br class='autobr' /> non, rien que des âmes pliées.<br class='autobr' /> sucré-salé.</p> <p>5 ter</p> <p>dehors, ce sera la guerre !<br class='autobr' /> oui, mais faudra bien trancher, non ?</p> <p>6 ter</p> <p>tu sors quand, toi ?<br class='autobr' /> je sais pas je sais pas, pas tout d'suite pas tout d'suite, j'attends encore un peu et toi ?</p> <p>7 ter</p> <p>dehors je ne bois pas passque je sais que je vais revenir dormir à l'hà´pital.</p> <p>8 ter</p> <p>fiston.</p> <p>9 ter</p> <p>dehors pour se protéger faudra une prise de terre.</p> <p>10 ter</p> <p>dedans c'est dans la tranchée, les obus passent, ils flinguent les autres, ceux qui oublient de porter leur casque.<br class='autobr' /> dedans le cocon tout rond de ceux qui l'étaient toujours.<br class='autobr' /> dedans les tabliers blancs, les tabliers blanc-sec, l'attention carmin qu'on nous porte, les produits de nettoyage rosés.<br class='autobr' /> mais dehors mais dehors mais dehors.</p> <p>11 ter<br class='autobr' /> dehors faudra gérer.<br class='autobr' /> aaaaaaaaahhhhhhh ???? c'est ça, le truc ?<br class='autobr' /> ouais.<br class='autobr' /> aaaaaaaahhhhhhhh ! ok !</p> <p>12 ter</p> <p>épileptique. si si oui oui. il picolait sans être une brute, <br class='autobr' /> pour autant,<br class='autobr' /> mais il picolait. <br class='autobr' /> il en avait besoin, on aurait dit. par fierté, il a décidé d'arrêter tout seul comme le grand qu'il croyait être. s'est enfermé quatre jours dans une maison de campagne. a dormi pour oublier le bruit du verre qu'on dépose, la douceur du goulot dans la main. <br class='autobr' /> c'est bon, c'est bon, on est pas au cinéma !</p> <p>13 ter</p> <p>il a cru qu'il avait gagné, il a cru qu'il avait vaincu l'alcool, comme on dit.<br class='autobr' /> seulement donc voilà , une nuit sa nana l'a vu se tortiller comme un lombric…<br class='autobr' /> un quoi ?<br class='autobr' /> un ta gueule !<br class='autobr' /> il avait défoutu les couvertures…<br class='autobr' /> si ça tombe ils ont des couettes !<br class='autobr' /> … bon, la couette, alors, si ça fait plus joli plus exact. il avait défoutu la couette, il était en train de sucer un coin de son oreiller. puis, il s'est levé, s'est dirigé vers le couloir…<br class='autobr' /> … et il s'est ramassé une gamelle !<br class='autobr' /> … putain va enculer les gardes de sécurité, trouduc ! laisse-moi continuer ! t'as peur de ce que je raconte, hein ? ketapeur ? puis il se dirige vers une fenêtre, s'allonge sur le sol tout en ramassant des poussières qu'il accumule en petits tas, comme ça, pendant des heures, jusqu'à l'arrivée de l'ambulance.<br class='autobr' /> on dirait un livre !<br class='autobr' /> pauvre con ! tu comprends pas ? le mec, il s'est débarassé de l'alcool sans soins autour. alors il est devenu épileptique. ça arrive.<br class='autobr' /> à moi aussi ?<br class='autobr' /> non, t'es trop con ! trop con ! ton cerveau était déjà cramé à la maternité !</p> <p>14 ter<br class='autobr' /> fiston, je viens juste de louer une nouvelle maison.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> fiston, maison.<br class='autobr' /> comme si ça allait ensemble :<br class='autobr' /> fiston, maison.</p> <p>15 ter<br class='autobr' /> ton papa a déniché une maison sympa.<br class='autobr' /> ça rime :<br class='autobr' /> papa, sympa.</p> <p>16 ter<br class='autobr' /> c'est s'taire, qu'il faudrait !</p> <p>17 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose.</p> <p>18 ter<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> elle sort.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> à 14 heures : pour de bon, comme on dit.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)<br class='autobr' /> une grosse valise près du bureau des infirmières. le bouquet de fleurs des copines.<br class='autobr' /> 14 heures.<br class='autobr' /> aujourd'hui.<br class='autobr' /> il rentre.<br class='autobr' /> (pour de bon ?)</p> <p>19 ter<br class='autobr' /> mais avant toute chose, fiston.<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?<br class='autobr' /> quand dans la file du supermarché<br class='autobr' /> à pas lestés<br class='autobr' /> je revoirdeirai et ron et ron petit, pas de litron,<br class='autobr' /> les têtes glauques des combattants du front<br class='autobr' /> en sueur mal torchés,<br class='autobr' /> l'énorme, là , à longueur d'année<br class='autobr' /> en sabots de bois<br class='autobr' /> (tu veux quoi ? tellement gros je suis désormais<br class='autobr' /> que je n'atteins plus mes pieds !),<br class='autobr' /> de ses douzes canettes toujours chargé,<br class='autobr' /> et les ouvriers du plâtre, les ouvriers polonaise,<br class='autobr' /> pour eux boire c'est la santé !,<br class='autobr' /> et le gamin de vingt ans tout ronds<br class='autobr' /> aux yeux injectés d'aiguilles rouges<br class='autobr' /> et quand je planterai ma culture de regards inquiets <br class='autobr' /> dans le sien<br class='autobr' /> où plus rien ne bouge<br class='autobr' /> sauf l'aiguille et le piston,<br class='autobr' /> comment je vais réagir ?</p> <p>20 ter<br class='autobr' /> dehors : quoi ?<br class='autobr' /> quoi, dehors ?</p> <p>21 ter<br class='autobr' /> dedans ils sont nombreux les ratés, les pétés, le jetés, les tricheurs, les planqués, les trépassants, les gerbants, les emmerdants.<br class='autobr' /> dehors, ils sont legion, les tricheurs<br class='autobr' /> vu que boire un coup c'est bon pour la santé.<br class='autobr' /> dedans, ils ont au moins, ils ont un peu, essayé.<br class='autobr' /> dehors, ils n'essayent même pas, <br class='autobr' /> trop contents<br class='autobr' /> qu'à l'asile des fous <br class='autobr' /> c'est une partie de leur propre âme noire qu'on cache en leur nom.</p> <p>22 ter<br class='autobr' /> parle-moi de ton âme heureuse.</p> <p>23 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ?<br class='autobr' /> j'vais boire. tout d'suite.</p> <p>24 ter<br class='autobr' /> qu'est-ce que tu vas faire quand tu vas sortir ? <br class='autobr' /> je vais continuer.<br class='autobr' /> à boire ?<br class='autobr' /> non, imbécile ! à réfléchir, à essayer de comprendre pourquoi je buvais.<br class='autobr' /> ah ? ta psychologue te l'a pas expliqué ?</p> <p>25 ter<br class='autobr' /> moi aussi, je vais continuer à boire. la société à besoin de nous, elle nous attend ! bitus ou pas. surtout bitus, d'ailleurs ! ça crée de l'emploi !</p> <p>26 ter<br class='autobr' /> alors voici le plan, je te le dessine en vitesse :<br class='autobr' /> alcool<br class='autobr' /> =<br class='autobr' /> du boulot pour la vigne ou le houblon<br class='autobr' />  du boulot pour les cultivateurs<br class='autobr' /> ⌘ du boulot pour les transporteurs<br class='autobr' /> ± du boulot pour les grossistes<br class='autobr' /> ≥ du boulot pour les revendeurs<br class='autobr' /> â„¢ du boulot pour les bistrots <br class='autobr' /> ∨ du boulot pour les toubibs<br class='autobr' /> ★ on recommence tout le toutim…<br class='autobr' /> ♩♫ ♯qui voudrait supprimer ça ?</p> <p>27 ter<br class='autobr' /> putain mais si tu sors d'ici pour ENCORE réfléchir, alors c'est que tu bandes pour ton âme noire et pas pour ton âme heureuse… non ? Remarque, moi, ici, j'ai rien réfléchi à rien du tout, alors… je suis pas mieux que toi…</p> <p>28 ter<br class='autobr' /> tu l'as dit.</p> <p>29 ter<br class='autobr' /> je fais partie de quelle tribu, fiston ?<br class='autobr' /> la tribu des tronches ravagées aux rides plus profondes que les failles des océans<br class='autobr' /> (mais ils ont à peine quarante ans et n'ont rien des atlantides),<br class='autobr' /> la tribu des pantalons toujours dégeulasses,<br class='autobr' /> la tribu des alcoolos un rien artistes,<br class='autobr' /> la tribu des pénibles,<br class='autobr' /> la tribu des sans abribus,<br class='autobr' /> des-ceux-qui-n'ont-jamais-bu-malgré-tout-que-des-millésimes ?<br class='autobr' /> la tribu aux attributs ramollis ?<br class='autobr' /> la tribu, elle est sans fin, des pères indignes<br class='autobr' /> malgré-l'autocollant-je-suis-un-brave-papa-(sur-le-front ?)</p> <p>30 ter<br class='autobr' /> tu sors, alors ?<br class='autobr' /> oui.<br class='autobr' /> pour quoi faire ?<br class='autobr' /> redevenir un père.</p> <p>31 ter<br class='autobr' /> nous venons de vous voir dans ce reportage.<br class='autobr' /> l'alcool, vous y avez finalement échappé.<br class='autobr' /> (tiens, on ne dit pas : vous LUI avez échappé ?)<br class='autobr' /> nous allons maintenant vous permettre de répondre aux questions internet, mail et réseaux sociaux des téléspectateurs.<br class='autobr' /> première question de j.l. de truc-les-fouillasses :<br class='autobr' /> comment réagissez-vous lorsque, dans la file du supermarché, vous apercevez un caddie bourré, oui, bourré, de bouteilles de whisky et poussé par une femme (ou un homme) dont le visage boursouflé vous fait soudain comprendre ce que dante a voulu écrire ?</p> <p>32 ter<br class='autobr' /> tu vois, bon, euh, merde, j'ai des crasses sous les ongles, la salle de remise en forme, tout ça, c'est pas mal tout ça, mais pour se sentir prêt à sortir d'ici, le psychiatre m'a demandé : avez-vous un projet ? voilà le hic. un projet. c'est quoi, un projet ?<br class='autobr' /> à toi de savoir, enflure !</p> <p>33 ter</p> <p>moi des projets j'en avais plein. j'avais d'ailleurs commencé à les mettre à exécution. malheureusement, c'est moi que j'ai exécuté. <br class='autobr' /> avant terme.<br class='autobr' /> j'ai pris de l'alcool pour vingt ans ferme.</p> <p>34 ter<br class='autobr' /> ça vient d'où ça de préférer tout foutre en l'air plutà´t que de ne rien foutre en l'air ?</p> <p>35 ter<br class='autobr' /> air. <br class='autobr' /> pierre.<br class='autobr' /> mer. <br class='autobr' /> ter.</p> <p>36 ter<br class='autobr' /> september's here again.</p> <p>37 ter<br class='autobr' /> regarde les rolling stones ! déjà des papys, toujours capables de donner des concerts, et pourtant ils ont avalé :<br class='autobr' /> de l'alcool<br class='autobr' /> de la coke<br class='autobr' /> de l'héro<br class='autobr' /> des champis du h du lsd des couleuvres.</p> <p>38 ter<br class='autobr' /> les couleuvres, c'est nous qu'on les avale. leur guitariste il se fait changer le sang une fois par ang.</p> <p>39 ter<br class='autobr' /> c'est ça, et michaà« l jackson, il était pas dans son cercueil, c'est bien connu.</p> <p>40 ter<br class='autobr' /> quarantaine.</p> <p>41 ter<br class='autobr' /> fiston, je suis sorti.<br class='autobr' /> pas pour de bon.<br class='autobr' /> pour un week-end.<br class='autobr' /> entier.<br class='autobr' /> j'ai préféré dormir chez une copine.<br class='autobr' /> la maison sympa du papa n'est pas encore aménagée. <br class='autobr' /> pour toi.</p> <p>42 ter<br class='autobr' /> fiston, avec cette copine, on a eu un projet.<br class='autobr' /> on a fait ma lessive.<br class='autobr' /> oh pas celle de mes sentiments oh non !<br class='autobr' /> ma lessive, quoi.<br class='autobr' /> et comme on n'avait pas de séchoir (sous la main),<br class='autobr' /> on a mis le linge sur un radiateur.<br class='autobr' /> j'ai pris une serviette chaude, elle sentait l'assouplissant, j'ai enfermé mon visage dedans,<br class='autobr' /> c'était meilleur que le pinard,<br class='autobr' /> vraiment.</p> <p>43 ter<br class='autobr' /> i had a dream, j'ai un projet.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> je grimpe à l'échelle.<br class='autobr' /> du silence.<br class='autobr' /> des étoiles.<br class='autobr' /> rien à dire.<br class='autobr' /> rien à chanter.<br class='autobr' /> rien à boire.<br class='autobr' /> je suis le singe de dieu.<br class='autobr' /> je cherche une échelle.<br class='autobr' /> (ah non putain merde cet espoir c'est celui qui justement m'a fait commencer à boire.)</p> <p>44 ter<br class='autobr' /> je pousse la porte,<br class='autobr' /> je casse la serrure,<br class='autobr' /> je veux permettre à la douleur de se faire un chemin en moi.</p> <p>45 ter<br class='autobr' /> hors de moi.</p> <p>46 ter<br class='autobr' /> car elle, elle ne meurt pas.</p> <p>47 ter<br class='autobr' /> car elle, on se la refile.</p> <p>48 ter<br class='autobr' /> de mains en mains.</p> <p>49 ter<br class='autobr' /> social, economical.</p> <p>50 ter<br class='autobr' /> un premier week-end.<br class='autobr' /> dehors.<br class='autobr' /> là -bas, ils prennent leurs potions vers 21 heures. <br class='autobr' /> y a des chances que thérèse soit de garde. thérèse, celle qui ne rit pas quand on ne la … pas. elle est pourtant si cool. 60 balais. enfermée des nuits entières avec des adddddddddictifs. thérèse, qui refuse qu'on ferme les portes des chambres. parce qu'elle l'a appris comme ça du temps des nonettes. elle passe son nez par le cran plusieurs fois sur la nuit. elle nous aime. je sais pas. un avant et un après. un dedans. et un dehors.</p> <p>51 ter<br class='autobr' /> je suis rentré.<br class='autobr' /> enfin : je suis sorti de chez cette copine.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas rentré chez moi.<br class='autobr' /> enfin : je ne suis pas vraiment rentré à l'hosto.<br class='autobr' /> j'étais sorti pour un week-end complet.<br class='autobr' /> 52 ter<br class='autobr' /> ah fiston ravi d'avoir été voir ce film avec toi : robin des bois. notre première sortie ensemble depuis des mois. vuke y avait eu toi au bout du fil voici des mois : <br class='autobr' /> nonpapajeneviendraipluchétoi.</p> <p>53 ter<br class='autobr' /> tiens ? errol flynn avait déjà joué le rà´le de robin au cinoche. il est mort d'alcoolisme à cinquante vergetures.<br class='autobr' /> sale habitude.</p> <p>54 ter<br class='autobr' /> errol Flynn, héros archetypal. de la forêt sombre sombre sombre de sherbottle !<br class='autobr' /> chère bottle ! (pour ceux qui…)<br class='autobr' /> 55 ter<br class='autobr' /> je te jure je vais reprendre des chats.<br class='autobr' /> des ?<br class='autobr' /> ouais : des.</p> <p>56 ter<br class='autobr' /> une vie sans chats est pire qu'une vie sans flacon.</p> <p>57 ter<br class='autobr' /> indépendants, autonomes, souvent décidés sans avoir recours à la flasque qui conduit à la mollesse, et toujours reconnaissants.<br class='autobr' /> mais si nécessaire, ils te virent.<br class='autobr' /> j'ai pigé. la fameuse D.A.<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> dépendance. affective. ils connaissent pas. ils sont pas addicts. ils sont felix.</p> <p>58 ter<br class='autobr' /> men at work.</p> <p>59 ter<br class='autobr' /> ils me proposent de venir en jour. de ne plus dormir ici.<br class='autobr' /> déjà que j'étais venu en douce !</p> <p>60 ter<br class='autobr' /> il pleut des seaux sans vin blanc.<br class='autobr' /> je n'ai jamais compris comment les voitures se retrouvent en avant.<br class='autobr' /> j'arrive de la droite le virage mène ensuite à gauche et, là , je suis devant.<br class='autobr' /> je tourne vers la gauche, angle droit, vraiment, feux rouges, pas blancs.<br class='autobr' /> je passe sur le pont en dessous duquel sous lequel je suis passé avant quelques seconds seulement.<br class='autobr' /> soudain je l'aperçois.<br class='autobr' /> sans vin blanc.<br class='autobr' /> je l'aperçois.<br class='autobr' /> elle court sous les seaux sans vin blanc. <br class='autobr' /> sans doute que son patron l'attend maintenant.<br class='autobr' /> courrir.<br class='autobr' /> flétrir.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> 61 ter<br class='autobr' /> bonjour facteuse ! vous avez des nouvelles de “o†? <br class='autobr' /> il était avec moi à l'hosto.<br class='autobr' /> ah ! facteur ! <br class='autobr' /> ils se foutent de votre gueule vos manageurs !</p> <p>62 etr<br class='autobr' /> etc.</p> <p>63 ter<br class='autobr' /> il faut savoir.</p> <p>64 ter<br class='autobr' /> savoir dire non.</p> <p>65 ter<br class='autobr' /> au fond.</p> <p>66 ter<br class='autobr' /> mais oui !</p> <p>67 ter<br class='autobr' /> non je vais pas acheter ce divan, plutà´t cet autre, là .<br class='autobr' /> pourquoi ?<br class='autobr' /> me fait trop penser à la psychanalyse !<br class='autobr' /> 68 ter<br class='autobr' /> des gamins des gamines.<br class='autobr' /> mauvaises mines.<br class='autobr' /> leur prof n'est pas spécialement fine.<br class='autobr' /> certains ont une angine.<br class='autobr' /> certains voudraient montrer leur pine.<br class='autobr' /> de rage.<br class='autobr' /> c'est ça la vie ?<br class='autobr' /> cette connerie ?<br class='autobr' /> et pourquoi ne pas vivre à l'hosto ?<br class='autobr' /> à vie.</p> <p>69 ter<br class='autobr' /> speechless.</p> <p>70 ter<br class='autobr' /> the age of self</p> <p>71 ter<br class='autobr' /> tu voulais faire quoi, DANS la vie ?<br class='autobr' /> la question étant : je suis venu faire quoi DANS la vie ?</p> <p>72 ter<br class='autobr' /> mais non, tu ne tombes pas.<br class='autobr' /> le garagiste du coin, lui il tombe.<br class='autobr' /> oui, dans sa fosse.</p> <p>73 ter<br class='autobr' /> toutes ces choses qui ne nous serviront plus quand nous serons morts.<br class='autobr' /> tous les livres que nous auron écrits, tous les livres que nous aurons écrits, <br class='autobr' /> toutes les voitures que nous aurons dépannées.<br class='autobr' /> les choses ne nous servent qu'à la condition d'être encore vivants.<br class='autobr' /> une bouteille vide ?</p> <p>74 ter<br class='autobr' /> revenons dehors. partons de l'intérieur.</p> <p>75 ter<br class='autobr' /> little red robin hood hit the road.</p> <p>76 ter<br class='autobr' /> on peut faire sans.<br class='autobr' /> sans quoi ?<br class='autobr' /> sans toutes ces choses.<br class='autobr' /> ok, je ferai avec.</p> <p>77 ter<br class='autobr' /> revenons dehors.<br class='autobr' /> ppppffff ! trop dur ! dehors, c'est le soleil MAIS la tempête, le chaud MAIS le froid, les feuilles mais les branches dénudées, les grosses nanas MAIS les maigres, et surtout : <br class='autobr' /> la télé, la télé, la téle, la télé.<br class='autobr' /> ouais mais la télé on l'a aussi ici dedans, derrière les murs de l'hà´pital, dans les murs, sous les murs, en cueillant des murs.</p> <p>78 ter<br class='autobr' /> oui, j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> mais je n'ai pas réussi la và´tre.<br class='autobr' /> mon fusain était usé.</p> <p>79 ter<br class='autobr' /> oui j'ai réussi ma vie.<br class='autobr' /> j'ai arrêté de boire à vie. <br class='autobr' /> dernier avis.</p> <p>80 ter<br class='autobr' /> dehors :<br class='autobr' /> violence<br class='autobr' /> destruction<br class='autobr' /> obsessions<br class='autobr' /> passions.<br class='autobr' /> dedans :<br class='autobr' /> violence destruction obsessions passions.</p> <p>82 terre<br class='autobr' /> îles.</p> <p>83 ter<br class='autobr' /> now you're wandering what to do,<br class='autobr' /> now it's the end.</p> <p>84 ter</p> <p>je suis pas diffcile. <br class='autobr' /> pas vrai.<br class='autobr' /> tu me proposes une jolie femme nue sur mon lit…</p> <p>85 ter<br class='autobr' /> l'érotisme, c'est bizarre, et cà marche !<br class='autobr' /> bon… tu veux une médaille ou des menottes ?</p> <p>86 ter<br class='autobr' /> dehors, c'est quoi ?<br class='autobr' /> c'est de hors.<br class='autobr' /> tu te crois drà´le ?</p> <p>87 ter<br class='autobr' /> dedans c'est quoi ?<br class='autobr' /> de dans, cachés.</p> <p>88 ter<br class='autobr' /> allo la 88ème terre ?</p> <p>89 ter<br class='autobr' /> non mais je vais où moi ?</p> <p>90 ter<br class='autobr' /> dehors.</p> <p>mais c'est où mais c'est où mais c'est où,<br class='autobr' /> le pays de la liberté ?<br class='autobr' /> sans bis, sans repetita.</p> <p>dans la main mon portable.<br class='autobr' /> suis-je transportable ?<br class='autobr' /> on arrive.<br class='autobr' /> j'attends sur le pas de la porte.<br class='autobr' /> jaune l'ambulance.<br class='autobr' /> jaune violent<br class='autobr' /> un conducteur sans travaux.<br class='autobr' /> un convoyeur coréen. jaune ? allez, arrête !<br class='autobr' /> moi même pas sur un brancard.<br class='autobr' /> et puis quoi ?<br class='autobr' /> vieille l'ambulance.<br class='autobr' /> pas confort, l'ambulance.<br class='autobr' /> pas demandé à vivre, moi.<br class='autobr' /> et eux ? le conducteur ? le convoyeur ? pas demandé à convoyer ?</p> <p>on va vous conduire aux urgences… mais faut pas rêver…<br class='autobr' /> non, faut pas…</p> <p>alors vous buvez… combien ?<br class='autobr' /> ouh la…</p> <p>on peut vous garder une nuit.<br class='autobr' /> pas plus ? normal. <br class='autobr' /> la cure après la curée.</p> <p>mais votre pouls est bon. vous êtes solide.l'écho de votre estomac aussi.<br class='autobr' /> pas comme l'écho de mes pensées.<br class='autobr' /> bah, ça peut arriver à tout le monde. tiens, tenez, justement, ici dans le service, et bien…</p> <p>excusez, monsieur, une jeune fille va venir vous tenir compagnie. on va tendre ce rideau, là .<br class='autobr' /> je vous en prie. enfin : on vous en prie. je suis à plusieurs dans ma tête.<br class='autobr' /> ah ! cette blague-là elle est connue !</p> <p>ah merde elle m'a pissé dessus quand je lui ai enlevé sa culotte. ppppsss son string… oh non… elle chie maintenant… pas possible quoi… ces séries de merde à la télé… ils savent pas de quoi ils causent.<br class='autobr' /> ils savent. des gens s'y chient dessus. on ne le filme pas. <br class='autobr' /> storyboard. <br class='autobr' /> prison.<br class='autobr' /> putain merde qu'est-ce qu'elle est migonnne. infirmier ou pas. bousillée. remets. remets le masque à oxygène.</p> <p>qu'est-ce que je fous là ?</p> <p>voilà la famille les proches la famille les proches… <br class='autobr' /> bien vous êtes qui ? <br class='autobr' /> son ex-peti-tami ? <br class='autobr' /> vous avez rompu ? <br class='autobr' /> ce soir-là justement ? <br class='autobr' /> hier, quoi. bon. <br class='autobr' /> et maintenant elle est ici.<br class='autobr' /> elle a bu quoi ?<br class='autobr' /> hein ?<br class='autobr' /> non…<br class='autobr' /> d'accord, elle s'est endormie dans la baignoire.<br class='autobr' /> non, y a pas de quoi rire. on rit, nous ? <br class='autobr' /> d'accord, il a maintenu sa tête hors de l'eau.<br class='autobr' /> sa tête.<br class='autobr' /> hors.<br class='autobr' /> mais qu'est-ce qu'elle avait dans la tête ?<br class='autobr' /> que vous l'avez plaquée en début de soirée ?<br class='autobr' /> non.<br class='autobr' /> vous avez tort.<br class='autobr' /> elle a bu.<br class='autobr' /> pour aussi peu. <br class='autobr' /> comme vous dites.<br class='autobr' /> elle est partie, où ? la gamine ?<br class='autobr' /> elle a foutu le camp.<br class='autobr' /> où ?<br class='autobr' /> vous savez bien.</p></div> les éditions du cerisier http://pascalsamain.be/spip.php?article623 http://pascalsamain.be/spip.php?article623 2012-09-13T18:18:18Z text/html fr pascal Samain - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class="hyperlien">Voir en ligne : <a href="http://www.editions-du-cerisier.be" class="spip_out">http://www.editions-du-cerisier.be</a></div> LE SOIR, 7 novembre 2003 http://pascalsamain.be/spip.php?article622 http://pascalsamain.be/spip.php?article622 2011-04-01T12:13:32Z text/html fr pascal Samain <p>CONTE <br class='autobr' /> HAUBRUGE,PASCALE <br class='autobr' /> Vendredi 7 novembre 2003 <br class='autobr' /> CONTE <br class='autobr' /> après nous avoir donné « L'indicateur des chemins de fer », roman pour navetteurs désabusés, voilà que Pascal Samain nous offre un recueil de contes berbères... Est-il berbère lui-même ? Pas au sens strict. Mais il semble qu'un djinn plus ou moins bien intentionné lui a insufflé l'art de conter. Résultat : une suite d'histoires où les sables chauds du désert et les vents froids des rues de Bruxelles se marient, sur un air mi-tendre mi-parodique. Ce (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong>CONTE</p> <p>HAUBRUGE,PASCALE</p> <p>Vendredi 7 novembre 2003</p> <p>CONTE</strong> </i></p> <p>après nous avoir donné « L'indicateur des chemins de fer », roman pour navetteurs désabusés, voilà que Pascal Samain nous offre un recueil de contes berbères... Est-il berbère lui-même ? Pas au sens strict. Mais il semble qu'un djinn plus ou moins bien intentionné lui a insufflé l'art de conter. Résultat : une suite d'histoires où les sables chauds du désert et les vents froids des rues de Bruxelles se marient, sur un air mi-tendre mi-parodique. Ce recueil de contes berbéro-belges s'avère, en fin de compte, aussi amusant qu'inclassable. (P. He.)</p></div> LE SOIR, 21 aoùt 2007 http://pascalsamain.be/spip.php?article621 http://pascalsamain.be/spip.php?article621 2011-04-01T12:09:46Z text/html fr pascal Samain <p>L'abécédaire « wok n wol » du Belgian Doctor <br class='autobr' /> SAINTGHISLAIN,VALERY <br class='autobr' /> Page 28 <br class='autobr' /> Mardi 21 aoùt 2007 <br class='autobr' /> Y'a des docteurs barges. Prenez le Belgian Doctor, alias Pascal Samain. Cet éminent spécialiste sévit dans les colonnes du magazine « Compact Crossroad ». En peu de temps, il est parvenu à s'y faire autant de fans que d'ennemis. Faut dire que dans ses papiers acerbes, ce critique « soigne » un genre musical qu'il adore depuis son adolescence. Le rock, le Belgian Doctor l'aime tellement qu'il le châtie (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong>L'abécédaire « wok n wol » du Belgian Doctor</p> <p>SAINTGHISLAIN,VALERY</p> <p>Page 28</p> <p>Mardi 21 aoùt 2007</strong> </i></p> <p>Y'a des docteurs barges. Prenez le Belgian Doctor, alias Pascal Samain. Cet éminent spécialiste sévit dans les colonnes du magazine « Compact Crossroad ». En peu de temps, il est parvenu à s'y faire autant de fans que d'ennemis. Faut dire que dans ses papiers acerbes, ce critique « soigne » un genre musical qu'il adore depuis son adolescence. Le rock, le Belgian Doctor l'aime tellement qu'il le châtie copieusement, pourfendant ses intégristes, ses chapelles, ses (fausses) icà´nes et ses marchands du temple. Mais jamais en donneur de leçon ou en vieux con ! Derrière un ton caustique que ne renierait pas feu Desproges, cet écrivain montois jadis auréolé d'un Grand Prix de l'humour noir pour son premier roman Les trous de la rue Lartoil vient de publier un abécédaire de rien (jeu de mots !) sur ce « §#ç&%$ de monde du rock » (sic). Un remède de 180 pages où chaque définition procure un effet secondaire jubilatoire, dopé par les dessins de Bruno Blum (Best). Dans la préface, le professeur Gilles Verlant met toutefois en garde contre un usage inapproprié de cet antidictionnaire. C'est marrant et sans prétention, certes, mais sa lecture est émaillée de vérités crues. Autant le savoir. Extraits. « Increvable : Expression journalistique typique qui désigne un groupe de rock<br class='autobr' /> qui nous les casse depuis 1967 ». « Bruce : Springsteen. Musicien borné in the USA ». Ou « Jackson (Michael) : Gimmi five (children) ! ». « Boys (The Beach) : Marchands de glaces américains et de sucreries ». Allez, une dernière ? « Waits (Tom) : Peut toujours attendre, en effet ». Incurable Belgian Doctor ! Et dire qu'un 2e tome est prévu si ce premier cartonne...<br class='autobr' /> L'Abécédaire de rien de ce §#ç&%$ de monde du rock, collection Les cahiers du rock. Prix : 12 euros. Infos : <a href="http://www.cahiersdurock.com" class='spip_url spip_out auto' rel='nofollow external'>www.cahiersdurock.com</a></p></div> LE SOIR, 29 octobre 1990 http://pascalsamain.be/spip.php?article620 http://pascalsamain.be/spip.php?article620 2011-04-01T12:07:48Z text/html fr pascal Samain <p>PASCAL SAMAIN GRAND PRIX DE L'HUMOUR NOIR <br class='autobr' /> MAURY,PIERRE <br class='autobr' /> Lundi 29 octobre 1990 <br class='autobr' /> Pascal Samain <br class='autobr' /> Grand Prix de l'humour noir Le jury (français) du Grand Prix de l'humour noir a bien de l'humour, puisqu'il prend soin de respecter l'équilibre linguistique (belge) : l'an dernier, il avait récompensé Hugo Claus, et cette année c'est Pascal Samain qui est à l'honneur pour son premier roman « borain », « Les Trous de la rue Lartoil ». L'auteur suppose qu'il y a en outre un rapport entre la couleur noire de cet (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong>PASCAL SAMAIN GRAND PRIX DE L'HUMOUR NOIR</p> <p>MAURY,PIERRE</p> <p>Lundi 29 octobre 1990</p> <p>Pascal Samain</p> <p>Grand Prix<br class='autobr' /> de l'humour noir</strong> </i><br class='autobr' /> Le jury (français) du Grand Prix de l'humour noir a bien de l'humour, puisqu'il prend soin de respecter l'équilibre linguistique (belge) : l'an dernier, il avait récompensé Hugo Claus, et cette année c'est Pascal Samain qui est à l'honneur pour son premier roman « borain », « Les Trous de la rue Lartoil ». L'auteur suppose qu'il y a en outre un rapport entre la couleur noire de cet humour et le fait que son livre se passe dans une région minière. Quoi de plus sombre en effet qu'une galerie de mine ? Et quoi de plus drà´le que ce livre délirant ?<br class='autobr' /> Il s'agit d'une chronique burlesque de la vie du petit Ducoron, qui grandit en se frottant au quotidien. Celui-ci n'est pas toujours rose. Adémar a pris feu et son corps pose un problème de manutention. Ducoron se demande s'il est bien le fils de ses parents. La rue Lartoil se déglingue...<br class='autobr' /> Agrémenté de planches de l'« Encyclopédie », le roman déroule ainsi les fastes minuscules d'une existence ballottée entre le sourire et les larmes - cà´té sourire, les filles sur papier glacé tiennent bien leur place. Pour mener à bien ce « roman belge » - appellation non contrà´lée, mais abondamment revendiquée au fil des pages -, Pascal Samain a dù faire travailler son imagination à partir d'observations faites autrefois, quand il vivait dans cette riante région à l'horizon bouché par les terrils.<br class='autobr' /> P. My.<br class='autobr' /> Pascal Samain, « Les Trous de la rue Lartoil ». Julliard, 247 p., 680 F.</p></div> LE SOIR, 12 avril 1990 http://pascalsamain.be/spip.php?article619 http://pascalsamain.be/spip.php?article619 2011-04-01T12:05:28Z text/html fr pascal Samain <p>LE ROMAN BELGE DE SAMAIN <br class='autobr' /> MAURY,PIERRE <br class='autobr' /> Jeudi 12 avril 1990 <br class='autobr' /> Le « roman belge » de Samain <br class='autobr' /> TRISTE décor que celui de la rue Lartoil, dans le Borinage de 1960, où le petit Ducoron se pose quelques questions existentielles - la principale étant : « Suis-je bien un Ducoron ? » - auxquelles ni les dictionnaires, ni son copain Domi, ni les photos de femmes toutes nues ne peuvent répondre. Cependant, Ducoron ouvre tout grand les yeux et explore les encyclopédies. Ce qui permet à Pascal Samain, dont le (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong><br class='autobr' /> LE ROMAN BELGE DE SAMAIN</p> <p>MAURY,PIERRE</p> <p>Jeudi 12 avril 1990</p> <p>Le « roman belge » de Samain</strong> </i></p> <p>TRISTE décor que celui de la rue Lartoil, dans le Borinage de 1960, où le petit Ducoron se pose quelques questions existentielles - la principale étant : « Suis-je bien un Ducoron ? » - auxquelles ni les dictionnaires, ni son copain Domi, ni les photos de femmes toutes nues ne peuvent répondre. Cependant, Ducoron ouvre tout grand les yeux et explore les encyclopédies. Ce qui permet à Pascal Samain, dont le premier roman est particulièrement réjouissant, d'illustrer son « roman belge », revendiqué comme tel, avec des planches de l'Encyclopédie Diderot et d'Alembert - mais la précision : « Section sur les arts romanesques en Belgique », induit le doute dans l'esprit d'un lecteur qui n'en a cure et en redemande.<br class='autobr' /> A l'évidence, Pascal Samain a choisi un sujet trop grave pour le traiter sérieusement. Avec l'élégance des timides qui craignent d'ennuyer leur public - à moins que ce soit avec l'élégance des créateurs de talent qui craignent surtout de s'ennuyer eux-mêmes -, il feuillette donc l'album de la vie du petit Ducoron, de ses ancêtres et de ses voisins. C'est Polonais Joseph sur son vieux vélo, ce sont des images du Congo, c'est l'Atomium, c'est monsieur Ducoron père chu dans le canal et le crâne fracassé contre l'écluse...<br class='autobr' /> Tout cela constitue un univers authentique - et authentiquement recréé par l'imagination délirante d'un jeune écrivain qui ne craint aucune irrégularité de langage.</p> <p>P. My.</p> <p>Pascal Samain,</p> <p>Les Trous de la rue Lartoil. Julliard, 247 pp., 680 F.</p></div> LE SOIR, 12 janvier 1991 http://pascalsamain.be/spip.php?article618 http://pascalsamain.be/spip.php?article618 2011-04-01T12:02:31Z text/html fr pascal Samain <p>PASCAL SAMAIN : GRAND PRIX DE L'HUMOUR NOIR <br class='autobr' /> VANDY,JOSIANE <br class='autobr' /> Samedi 12 janvier 1991 <br class='autobr' /> PASCAL SAMAIN <br class='autobr' /> Grand prix de l'humour noir <br class='autobr' /> Le 29 octobre 1990, Pascal Samain, Belge, 32 ans, est devenu le trente-septième lauréat du grand prix de l'Humour noir. Motif : son premier roman : Les Trous de la rue Lartoil (*), commis en plein délire de mots, que les éditions Julliard ont eu l'allègre envie de publier. Au restaurant « Le Procope », à Paris, il a été ceint de l'unique récompense de ce prix convoité, une (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong>PASCAL SAMAIN : GRAND PRIX DE L'HUMOUR NOIR</p> <p>VANDY,JOSIANE</p> <p>Samedi 12 janvier 1991</p> <p>PASCAL SAMAIN</p> <p>Grand prix de l'humour noir</strong> </i></p> <p>Le 29 octobre 1990, Pascal Samain, Belge, 32 ans, est devenu le trente-septième lauréat du grand prix de l'Humour noir. Motif : son premier roman : Les Trous de la rue Lartoil (*), commis en plein délire de mots, que les éditions Julliard ont eu l'allègre envie de publier. Au restaurant « Le Procope », à Paris, il a été ceint de l'unique récompense de ce prix convoité, une écharpe funéraire mauve portant ces mots décisifs : A notre regretté lauréat. Ensuite, les joyeux convives, en l'occurrence un jury de spécialistes ès humour - dont le membre le plus éminent est Eugène Ionesco - ont trinqué à la (bonne) santé du héros en qui ils ont reconnu le fils spirituel de Raymond Queneau.<br class='autobr' /> Ce prix, créé il y a trente-sept ans, par un libraire bourguignon, Tristan Maya, à la mémoire d'un écrivain de son pays, surréaliste - trop méconnu à ses yeux -, Xavier Forneret, a couronné une foule de personnalités en tous genres, de dix-neuf nationalités différentes. On y épingle Woody Allen, Arrabal, Hervé Bazin, Blavier, Buà±uel, Desproges, Ferreri, Bernard Haller, Patricia Highsmith, Léo Malet, Polanski, Plantu, Queneau, Tardi et Wolinski. Je me sens en bonne compagnie, a déclaré le lauréat, satisfait de ses drà´lissimes et talentueux prédécesseurs, avec qui il partage le goùt du « travail au noir ». Une couleur qui a toujours joué un grand rà´le dans sa vie. D'abord parce qu'il est né dans le Borinage, aux confins des noirs crassiers. Ensuite, parce qu'il partage avec Queneau, son auteur favori, l'angoisse de notre univers, de l'espace, ce grand vide tout noir. Dans les rues de son enfance, il croisait des Italiennes, blanches madones de noir vêtues. A l'adolescence - sa période anarchiste -, il leur emprunte cette habitude. Je portais le deuil de moi-même, parce que je me sentais très mal dans ma peau. De cette période ultra-sombre, Pascal Samain s'en est sorti par l 'écriture et en humour. Suprême pirouette face au désespoir, aux questions impossibles à résoudre. Le héros de son roman, le petit Ducoron, lui ressemble comme un frère, savoureux mélange de Zazie et de Tintin. Il lui tient la main dans cet ardu passage de l'enfance à l'adolescence, se souvient de ce temps pas très lointain où il rêvait de se trouver une autre famille que la sienne - aujourd'hui très fière de son rejeton -, et d'exercer un métier d'homme libre. Comédien, explorateur, reporter, je ne me voyais pas dans un bureau. Maintenant, j'ai compris que je rêvais d'un métier où je pourrais « explorer mon âme ». Et seule la littérature le permet.<br class='autobr' /> Pourtant, il n'avait jamais rien écrit. Ni poèmes brùlants, ni journal intime, aucun antécédent. Pour seuls bagages, il avait un voyage-choc au Maroc, sur les hauts plateaux de l'Atlas, et au Sri-Lanka. Une expérience d'animateur socio-culturel - il l'est toujours -, un mariage avec une jeune Marocaine vivant en Belgique depuis l'âge de 5 ans. Pascal Samain a mis son poids de vie et de mots dans la balance littéraire. Exorcisme-clin d'oeil. Pari gagné. Il médite une suite à son roman, comme Truffaut après « Les Quatre Cents Coups », rêve à un livre pour enfants et mijote dans son ordinateur-chaudron une nouvelle oeuvre. Au noir, évidemment !<br class='autobr' /> JOSIANE VANDY<br class='autobr' /> (*) « Les Trous de la rue Lartoil », Pascal Samain, éditions Julliard, 680 FB environ.</p></div> Super critique ! http://pascalsamain.be/spip.php?article560 http://pascalsamain.be/spip.php?article560 2010-08-10T17:59:32Z text/html fr pascal Samain <p>Un livre dépaysant ... <br class='autobr' /> ... qui ne ressemble à personne ne ressemble à rien : l'originalité absolue n'existe pas. C'est pourquoi, plus un livre est original, plus il suscite les comparaisons - les livres banals étant ceux qui n'obéissent qu'à un seul modèle. Pour parler de Des Filles invincibles, que Pascal Samain a publié aux éditions du Cerisier, il est possible d'évoquer aussi bien Les Mille et une Nuits, l'Odyssée, Jacques le fataliste de Diderot, Le Maître et Marguerite de Boulgakov, le théâtre de (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong>Un livre dépaysant ...</strong> </i></p> <p><i>... qui ne ressemble à personne ne ressemble à rien :</i> l'originalité absolue n'existe pas. C'est pourquoi, plus un livre est original, plus il suscite les comparaisons - les livres banals étant ceux qui n'obéissent qu'à un seul modèle. Pour parler de Des Filles invincibles, que Pascal Samain a publié aux éditions du Cerisier, il est possible d'évoquer aussi bien Les Mille et une Nuits, l'Odyssée, Jacques le fataliste de Diderot, Le Maître et Marguerite de Boulgakov, le théâtre de Beckett, les recherches graphiques sur les polices de caractère de poètes actuels tels qu'Olivier Cadiot, la crudité du roman contemporain, l'engagement social du roman naturaliste ou l'ancrage national d'une certaine littérature belge... Le sous-titre nous indique déjà la pluralité de l'inspiration : il s'agit de « contes berbelges ». Outre le pluriel, on remarquera le mot-valise mariant les mots « belges » et « berbères » et l'opposition, plus discrète, entre le jeu de mots, qui fait songer à une littérature ludique, et l'appellation « contes », qui implique a priori une littérature essentiellement narrative. Le livre est, on l'aura compris, un peu tout cela à la fois. De quoi s'agit-il ? Un écrivain meurt alors qu'il était en train d'écrire un livre intitulé Des Filles invincibles et se retrouve dans son manuscrit sous la forme d'un Djinn condamné à raconter des histoires que personne ne veut écouter, hormis quelques animaux. Le récit des mésaventures du Djinn s'interrompt régulièrement pour présenter en abyme les contes qu'il sème en vain au tour de lui : ces récits encadrés démarrent souvent dans l'Atlas marocain et semblent d'abord se passer à une époque lointaine puis intervient la thématique de l'immigration et les personnages se retrouvent à Bruxelles. Le merveilleux, qui présidait jus que-là au récit, résiste à la peinture prosaà¯que de la misère des déracinés. Les univers s'affrontent et en même temps se mêlent, par exemple lorsque « le Grand Souk Innovation » (où l'un des protagonistes travaille comme gardien de nuit) s'effondre : le grand magasin est peut-être symbole d'oppression et de luxe occidental, mais, dans l'économie du récit, il a également une signification berbère. Il rappelle en effet B'ida, la sorcière de l'Innovation, dont le statut est ambigu puisqu'elle permet d'échapper à la tradition. Il est donc difficile de tirer une morale claire de ces fables pleines d'imagination qui se succèdent rapidement, même si la forme du conte se prête volontiers d'ordinaire à la symbolisation. Pascal Samain est conscient de cet état de fait : l'une des histoires a justement pour sujet la recherche de la vérité, que personne ne parvient à atteindre, ce qui fait dire à l'un des personnages : « La Vérité se nourrit toujours d'elle-même pour apparaître toujours différente. » Ce n'est pas n'importe quel personnage qui s'exprime en ces termes : c'est Fatima, héroà¯ne que le lecteur retrouve d'un conte à l'autre sous différents aspects, et qui finit par rejoindre le Djinn dans le récit encadrant. Après avoir tenu les propos relativistes reproduits ci-dessus, Fatima exprime tout de même une pensée transcendante : « Ta Vérité, je la connais. [...] C'est la goutte de lait qui perlera à mon sein. C'est ton enfant dans mon ventre. » Cette vérité, très physique, devient le leitmotiv de Fatima et se dessine ainsi une opposition entre des personnages masculins indécis, errant à la poursuite de chimères et des personnages féminins aussi décidés qu'entreprenants. Tel est peut-être le thème véritable de ces contes berbelges.</p> <p>L'écriture est aussi éclatée que la narration. Samain utilise surtout le dialogue sous forme théâtrale (avec mention du nom du personnage avant la réplique), mais il varie volontiers les techniques, recourant par exemple parfois aux vers rimes. Qui plus est, il change souvent de polices de caractère pour souligner son propos, comme dans une bande dessinée (ce qui nous fait une comparaison de plus...). Enfin, des illustrations tirées d'une ancienne édition des Mille et une Nuits s'insèrent au récit presque comme par enchantement. Des Filles invincibles est donc un livre original, riche et habilement construit, un livre dépaysant.</p> <p>Laurent Demoulin</p></div> Un excellent article ! http://pascalsamain.be/spip.php?article558 http://pascalsamain.be/spip.php?article558 2010-08-10T17:52:33Z text/html fr pascal Samain <p>La concentration ferroviaire <br class='autobr' /> Est-elle morbide cette attirance mienne pour les récits de condamnés, de bagnards et d'autres escompteurs de peines en tous genre ? Participe-t-elle d'un voyeurisme malsain cette passion pour l'histoire d'êtres évoluant dans l'univers de la répression absolue, à la recherche d'un qui gnon de pain, d'un peu d'affection, d'une cigarette, pourvu que celle-ci ne soit pas la dernière ? Je l'ignore, mais c'est plus fort que moi : des Souvenirs de la maison des morts, comme les (...)</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p><i> <strong>La concentration ferroviaire</strong> </i></p> <p>Est-elle morbide cette attirance mienne pour les récits de condamnés, de bagnards et d'autres escompteurs de peines en tous genre ? Participe-t-elle d'un voyeurisme malsain cette passion pour l'histoire d'êtres évoluant dans l'univers de la répression absolue, à la recherche d'un qui gnon de pain, d'un peu d'affection, d'une cigarette, pourvu que celle-ci ne soit pas la dernière ? Je l'ignore, mais c'est plus fort que moi : des Souvenirs de la maison des morts, comme les appelle Dostoà¯evski, à la description de la Journée d'Ivan Denissovitch de Soljenitsine, en passant par les récits concen trationnaires de Primo Levi, je ne peux m'empêcher d'être admiratif devant les souffrances physiques et morales infligées à ces pauvres hères, les marchandages mesquins auxquels le dénuement les pousse ; mais aussi devant leur recherche de la dignité à travers de petites choses, pour eux grandes, aux quelles se raccrocher : pour certains d'entre eux le souvenir, le sens de l'observation poussé à l'extrême, leur recherche de sens pour l'univers restreint qui les entoure... Toutes proportions gardées, L'indicateur des Chemins de Fer, de Pascal Samain, est un ivre qui fait décidément partie du genre. Ce qui le distingue des ouvrages cités plus haut, c'est la nature de l'univers qu'il décrit : la concentration ferroviaire. L'histoire est celle d'un pauvre type qui, à la suite de ce qu'il appelle un « dysfonctionnement du réel », c'est-à -dire l'achat d'une bicoque au beau milieu d'une province reculée de notre gris et néanmoins belge royaume, se voit condamné, pour se rendre à son boulot dans la capitale du royaume précité, à l'in humaine « peine de navette ». Désormais il partagera le sort peu enviable de ces individus enfermés matin et soir dans les affreux compartiments de la « Société Nationale du Train-Train » (SNTT), le matin encore pâteux de leur mauvaise nuit, le soir suants et dormants, harassés par leur dure journée de travail, quand ils ne sont pas de dangereux lurons provocateurs à la solde de la SNTT. Pour éviter de sombrer dans l'oubli de sa profonde identité, qu'entraîné inexorable ment l'obligatoire double trajet quotidien, le narrateur décide de se transformer en « Indi cateur des Chemins de Fer » (IDCDF) et de consigner dans un carnet tout ce qui se passe durant ses navettes. Ou plutà´t, tout ce qui ne se passe pas, car, c'est là le drame, sur la navette comme dans bien d'autres prisons, il ne se passe rien. Heureusement, grâce à l'étude, théorique, du livret des Conditions générales pour le transport des voyageurs, et à celle, plus pratique, des comportements de ses codétenus, l'IDCDF s'en sort, à grand peine cependant, et redevient cet homme qui, bien qu'aliéné physiquement et morale ment par son atroce peine, retrouve pleine ment sa dignité d'être humain. Seul un humour frisant la répétition, qui colle on ne peut mieux à ces allers-retours journaliers, permet à Pascal Samain d'éviter l'ennui qu'une telle description ne pouvait manquer d'entraîner. L'auteur le manie avec habileté et jubilation, en dose les effets, et parvient ainsi à plonger le lecteur dans l'atroce inhumanité du « train-train ». La peinture qu'il livre des autres condamnés n'est pas toujours tendre, mais comment le serait-elle lorsque ceux-ci se montrent si souvent satisfaits de leur sort. Malgré tout, en définitive, c'est un message d'espoir que Samain nous délivre, et il se prend même à rêver à l'abolition de la peine de navette. A la libération : comme lorsque, pour des rai sons techniques, le train doit s'arrêter, et qu'il voit ses congénères libérés se ruer hors des compartiments, retirer leurs chaussures et lancer leur attachés-cases en l'air, même si, lui, l'IDCDF, n'y croit pas vraiment... Moi, j'espère pour lui que sa peine finira, car c'est un grand malheur... Oui, un grand malheur...</p> <p>Noà« l Lebrun</p></div> La boutique en ligne de l'Association Irma http://pascalsamain.be/spip.php?article545 http://pascalsamain.be/spip.php?article545 2010-07-30T12:18:08Z text/html fr pascal Samain <p>Ils ont des références assez complètes.</p> - <a href="http://pascalsamain.be/spip.php?rubrique2" rel="directory">Articles</a> <div class='rss_texte'><p>Ils ont des références assez complètes.</p></div> <div class="hyperlien">Voir en ligne : <a href="http://www.irma.asso.fr/L-abecedaire-de-rien" class="spip_out">Irma</a></div>